Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

L'Hérétique (Démocratie et hérésie économique) - Page 188

  • Zadig super star des régimes et de la diette

    Eh, oh, je parle de Zadig le héros de Voltaire. Pas de Zadig et Voltaire la marque de prêt à porter. Aujourd'hui, c'est la journée européenne de l'obésité, j'en ai parlé hier. Les motivations des êtres humains seront toujours des énigmes à plus d'un égard. Dans le conte fameux de Voltaire, Zadig, le héros du même nom, au cours de ses pérégrinations, croise un jour des femmes à la recherche d'un animal mythique, le basilic. Il s'enquiert alors des motivations de leur recherche et apprend qu'il s'agit là d'un remède pour leur maître Ogul, le seigneur de la contrée. Pour obtenir la libération de la femme qu'il aime, Astarté, il se présente alors comme médecin à la cour d'Ogul, et lui propose un rite particulier pour s'assurer de l'efficacité du basilic.

    Seigneur, on ne mange point mon basilic, toute sa vertu doit entrer chez vous par les pores. Je l’ai mis dans une petite outre bien enflée et couverte d’une peau fine: il faut que vous poussiez cette outre de toute votre force, et que je vous la renvoie à plusieurs reprises; et en peu de jours de régime vous verrez ce que peut mon art. Ogul dès le premier jour fut tout essoufflé, et crut qu’il mourrait de fatigue. Le second il fut moins fatigué, et dormit mieux. En huit jours il recouvra toute la force, la santé, la légèreté, et la gaieté de ses plus brillantes années.

    Par les temps qui courent, les laboratoires font assaut de pilules "miracle", quasiment de la magie, censées assurer le bien-être, la santé, la jeunesse et un amaigrissement accéléré moyennant achat en monnaie sonnante et trébuchante du dit miracle. C'est le médecin d'Ogul qui lui prescrit une décoction de basilic cuit à l'eau de rose. Une sorte de laboratoire miracle de l'époque, en somme. Mais la conclusion de Zadig est édifiante :

    Vous avez joué au ballon, et vous avez été sobre, lui dit Zadig: apprenez qu’il n’y a point de basilic dans la nature, qu’on se porte toujours bien avec de la sobriété et de l’exercice, et que l’art de faire subsister ensemble l’intempérance et la santé est un art aussi chimérique que la pierre philosophale, l’astrologie judiciaire, et la théologie des mages.

    Il nous faut de nouveaux Zagig de nos jours. Non pour leurs sages paroles, car notre société déborde de ces conseils raisonnables, mais pour leur art à circonvenir ceux qui les écoutent. Plutôt que de vendre le remède, il suffirait, sur le mode d'emploi, de préciser que leur absorption dans le sang doit être facilitée par une marche quotidienne après le repas d'une demie-heure, de la pratique d'exercices répétées (brasses dans une piscine afin d'assurer la circulation des énergies internes et autres flux astraux dans tout le corps) et le succès en serait assuré. Les publicitaires n'ont pas besoin de relire Zadig, mais les professionnels de la santé devraient s'y replonger pour leurs campagnes de prévention...

  • Sauvé par des ninjas !

    fr-images-coloriages-colorier-photo-ninja-p10749.jpgInsolite. Cela se passe en Australie du côté de Sydney: dans le cadre d'un échange, un étudiant de médecine allemand rentre par le dernier train de nuit. Il tombe alors sur trois mecs qui veulent lui chourer toutes ses affaires, au moment de descendre. Ils commencent à le latter, pas de pot, la scène se déroule juste à côté d'une école de Ninjas (Ça existe, apparemment !)

    Quand les apprentis ninjas rappliquent en tenue (costume noir avec juste les yeux qui dépassent) la racaille locale détale alors au quart de tour sans demander son reste. La police alpague finalement les malfrats.

    On arrête décidément pas le progrès. Il ne reste plus qu'à implanter quelques écoles de ninjas dûment assermentées partout où la délinquance explose. Qui soumet l'idée à Sarko ?

  • Obésité, splendeur et misère des chasseurs...

    Il ne se passe pas une semaine sans que soit évoquée l'obésité, l'un des maux les plus prégnants de nos sociétés occidentales développées et repues. En effet, l'obésité est l'un des principaux points noirs de santé publique non seulement en Amérique, mais désormais en France. Tout récemment, c'est à une jeune femme que l'on refuse la possibilité de la maternité, en raison de son poids. L'Europe en a fait l'une de ses préoccupations au point d'organiser demain la première journée européenne de l'obésité.

    Pauvres chasseurs ! On a émis l'hypothèse, mais cela semble se vérifier, que l'un des facteurs principaux de l'obésité, c'est d'abord une prédisposition génétique. L'humanité pendant des années n'a pas mangé à sa faim. Face aux disettes, aux temps incertains, le corps s'est adapté. Ainsi, les chasseurs des temps préhistoriques stockaient dans leur corps les graisses nécessaires à leur survie par temps maigre. Il y a donc eu une sélection, et, les obèses d'aujourd'hui ont les gènes de ces chasseurs d'autrefois. Ils sont les descendants des "survivors", en somme. Tous nos mannequins et autres canons de beauté n'auraient pas fait un pli aux temps préhistoriques. Je leur donne une semaine de survie, et encore, je suis optimiste.

    C'est étonnant finalement : en évoquant l'obésité, nous parlons aujourd'hui d'une maladie. Voire même d'une pandémie, alors qu'il ne s'agit pas d'un syndrome infectieux. Est-ce les corps  ou nos sociétés modernes qui sont malades ? Voilà la question qu'il conviendrait de poser.

    Quelle perversion que ces sociétés qui font des fils et filles des plus forts, des plus assurés de survivre, leurs premières victimes désignées : hyper-tension, diabète gras, maladies cardio-vasculaires sont les dangers les plus inquiétants qui guettent ces enfants des chasseurs d'antan, là où, par le passé, c'eût été le tigre à dents de sabre, l'hiver rigoureux qu'il eût fallu craindre.

    Des études à la con tentent de lier taille du cerveau et obésité, désormais, et l'AFP s'en fait bêtement le relais. Les gros seraient plus cons, c'est çà l'idée ? Tiens, j'ai eu connaissance d'une étude qui prétendait tout le contraire des femmes développées, observant qu'elles étaient plus intelligentes. Il faut dire que le titre de l'AFP est d'une ambigüité crasse : L'obésité est liée à un moindre volume du cerveau, relève une étude.

    Or, en lisant l'article, je comprends plutôt que l'accroissement de la masse corporelle aurait un impact sur le cerveau en favorisant la démence. Ce n'est pas la première fois que je lis ce genre de choses : en 2008, on disait que c'était l'alcool qui réduisait le cerveau.

    Tenez, au XIXème siècle, on pensait même que la taille du cerveau des femmes était inférieure à celle du cerveau des hommes. Devinez ce qu'on en déduisait...Sauf qu'in fine, il n'y a pas de rapports entre l'intelligence et la taille du cerveau chez l'espèce humaine.

    Non, tout cela est juste révélateur de nos propres représentations et le considération dans laquelle nos sociétés tiennent les individus obèses, ou simplement enveloppés...

  • Hommage à toi, Aurélie !

    A l'heure où d'autres choisissent de soutenir des individus qui appellent à la haine de la police, j'ai voulu, pour ma part, rendre hommage à Aurélie, jeune maman d'un bébé de 14 mois, décédée dans l'exercice de sa mission. Aurélie était une jeune policière plein de vie et de courage. Elle est tombée sous les balles de délinquants pour lesquels la vie n'a aucune valeur. Moi, je suis qu'un simple militant politique (MoDem), pas une personnalité, et donc, finalement, guère autre chose qu'un inconnu ordinaire parmi tant d'autres inconnus ordinaires, mais je voulais tout de même, en dépit de insignifiance de ma parole, apporter ma toute petite pierre au souvenir de cette jeune femme merveilleuse.

    Il est désormais un devoir moral  pour la France de tout faire pour aider à élever le bébé d'Aurélie. Si je peux contribuer à quelque chose, y compris financièrement, je le ferai très volontiers, si des amis et collègues d'Aurélie veulent bien se manifester sur ce blogue, en commentaires ou par courriel (l'adresse figure à gauche).

    Repose en paix, Aurélie. Je, nous, pensons à toi.

  • Le gouvernement a menti aux centristes !

    François Bayrou a écrit une lettre à François Fillon à propos du mode d'élection des futurs conseillers territoriaux. Rappelons-le, ils sont destinés à remplacer conseillers régionaux et conseillers généraux (département). Je suis pour ma part sidéré et exaspéré par les amendements que prépare la majorité actuelle. Les élus centristes (pas seulement ceux du MoDem, mais aussi ceux du Nouveau centre et les «centristes non-alignés» ) avaient accepté de voter cette réforme en échange de l'introduction d'un zeste de proportionnelle dans l'élection. C'est par exemple ce que Philippe Viger, député néo-centriste, avait fait valoir. Les députés centristes dans leur ensemble sont donc furieux de ce mauvais tour. Hervé Morin, qui a mis sa démission en balance, ira-t-il jusqu'au bout ? Nicolas Sarkozy reviendra-t-il au contraire à la raison ? En fait, le seul parti à être favorable au scrutin majoritaire à deux tours pour les conseillers territoriaux, c'est l'UMP. Absolument tous les autres sont contre, y compris le PS. L'UMP, seule, obtient aux alentours de 30-35% des voix lors des différentes élections. J'espère bien qu'un tiers des forces politiques du pays ne va pas imposer aux deux autres tiers une réforme dont ces derniers ne veulent pas.

    Plus fondamentalement, l'amendement vient du gouvernement : aucun scrupule à mentir éhontément. Comment pourra-t-on s'accorder, désormais, même sur les plus grands sujets, avec un tel gouvernement. Il y a là une très grave fracture éthique qui ne devrait pas laisser insensible tous ceux qui accordent encore une importance à ce mot.

  • Interdit d'interdire, vraiment ?

    J'ai cru halluciner à la lecture du communiqué publié sur le blogue de Laure Leforestier. Enfin, ce n'est pas tant le communiqué lui-même, dont je ne partage pas le souci, mais que je juge raisonnable, que le titre du billet du blogue. Comme le disent les Verts dans leur communiqué, nous notons le glissement sémantique de « soutien aux inculpés » à « soutien aux émeutiers ». On a bien compris le souci : en l'absence de jugement, nul ne peut être considéré comme coupable. C'est vrai de toute inculpation. Mais il y a le choix des mots et des appels auxquels on répond : il faut juger sur pièces du ton du communiqué du collectif qui a appelé les Verts à la rescousse : «pendant deux nuits, la police est tenue en échec. [...] du 25 au 27 novembre 2007, c'est une ville qui s'est soulevée, un moment de l'histoire.». Tout cela avec une belle écriture rouge sur fond noir qui rappellent diablement la coloration des groupuscules de l'ultra-gauche...

    Quant à décrire comme d'extrême-droite les policiers et le syndicat de gardiens de la paix qui se révoltent contre un concert donné par des groupes de rap qui appellent à la violence contre les forces de l'ordre dans leurs chansons, c'est du plus haut comique : il s'agit de FO, le syndicat Force Ouvrière, un authentique syndicat de gauche, même s'il a toujours revendiqué (et appliqué !) son indépendance par rapport aux partis politiques.

    Bref, initialement, il s'agissait pour Europe-écologie de s'élever contre l'interdiction d'un concert destiné à porter «la bonne parole», et, accessoirement, apporter des fonds aux fameux inculpés. Soit, admettons, il n'y a rien d'illégal à soutenir des gens qui sont inculpés.  Mais la défense de la liberté d'expression, invoquée dans le communiqué des Verts Haut-Normands,  s'est muée subitement, dans le titre du blogue, en soutien inconditionnel aux inculpés, parce qu'il est interdit d'interdire, slogan qui rappelle une autre époque d'émeutes. Il y a là une charge sémantique qui est loin d'être neutre, et traduit au moins l'arrière-pensée de la maîtresse des lieux.

    On peut jouer au chat et à la souris avec la sémantique, les mots ont un sens, connoté ou dénoté, et finissent toujours par parler. L'opinion publique ne s'y trompera pas : les Verts pourront toujours clamer leur bonne foi, elle retiendra qu'ils auront soutenu les émeutiers et, in fine, les voyous. Parce qu'il est interdit d'interdire...

     

     

  • Et Romulus inventa le clientélisme...

    Le croirez-vous ? D'après Denys d'Halicarnasse, ce serait Romulus en personne, le fondateur historique de la cité de Rome, qui aurait institutionnalisé le clientélisme politique.

    Pour les patrons et les clients il était impie et illégal de s'accuser dans les procès ou de témoigner ou de donner leurs voix les uns contre les autres ou de se ranger au nombre des ennemis de l’autre; et celui qui était convaincu d’avoir accompli une de ces choses était coupable du trahison en vertu de la loi sanctionnée par Romulus, et pouvait légalement être mis à la mort par n'importe quel homme qui le souhaitait en tant que victime consacrée à Jupiter des régions infernales.

    Et c'était un grand titre de gloire pour les hommes de familles illustres d’avoir le plus de clients possible et de conserver non seulement la succession des patronages héréditaires mais aussi par leur propre mérite d’en acquérir d'autres. Et c’était incroyable de voir l’émulation entre patrons et clients, car des deux côtés on essayait de ne pas être surpassé en bontépar l'autre, les clients estimant qu'ils devraient fournir tous les services possible à leurs patrons et les patrons souhaitant de leur côté de n’occasionner aucun ennui à leurs clients et n'acceptant aucun cadeau d'argent.

    En dehors de Denys d'Halicarnasse, je ne connais pas beaucoup d'historiens ou écrivains qui ont théorisé ce fléau avec autant d'allant et de bonne humeur. Soyons justes : à l'époque (8ème siècle avant Jésus-Christ) cela représente un certain progrès puisque cela garantit des avantages réciproques entre patrons et clients.

    Dans nos sociétés modernes, c'est un authentique facteur de blocage, d'autant qu'il ne se limite pas à la sphère politique. Philippe Sanmarco, sorte d'électron libre de la gauche marseillaise (à vrai dire, je ne sais plus trop où il en est puisqu'il me semblait qu'il avait adhéré à Gauche Moderne) proposait une réflexion atypique et intéressante sur le sujet, en 2003, lors d'un séminaire organisé par l'Université d'Aix-Marseille.

    Tout d'abord, le clientélisme n'est pas exclusivement politique :

    Car les phénomènes de clientélisme ne sont pas tous liés à la politique. Il y a d‘autres secteurs d‘activités qui connaissent des processus du même type. Je veux parler des grands secteurs d‘activités économiques et sociaux où il y a des processus non transparents, où il y a des processus de réseaux, d‘allégeance. Essayez d‘avoir une carte de docker sur le port de Marseille, essayez de passer un concours à la sécurité sociale ou d‘être embauché aux Assedic si vos parents n‘y sont pas déjà salariés, essayez de rentrer comme brancardier à l‘Assistance Publique de Marseille. Comment rentre-t-on dans les grandes entreprises autour de l‘étang de Berre ? Essayez simplement d‘avoir un emploi pour l‘été à la Poste ou à France Télécom… Il y aurait de belles études à faire dans ces domaines.

    Fondamentalement, ce qui distingue le clientélisme politique, comme l'a bien senti Philippe Sanmarco, c'est la notion d'allégeance : allégeance non à des idées, mais à un homme. Denys d'Halicarnasse ne définit pas autrement ce clientélisme-là, l'étendant même à une famille, puisqu'il évoque une transmission de témoins de génération en génération.

    Il ne faudrait pas, néanmoins, se tromper de combat : le clientélisme a une signification, au sens où les liens qu'un élu tisse avec ses administrés mettent aussi en évidence un besoin, une demande. Or, le contact avec le peuple, c'est la base même de la démocratie. Le Parlement européen qui est certainement l'une des institutions les plus "propres" au monde, en dépit de la transparence de ces processus offre une image si lisse, si dénuée d'aspérités et de rugosités, si éloignée, que les peuples peinent à s'y attacher.

    Le clientélisme s'observe à tous les étages de la société politique, mais il s'exerce de manière invisible, souvent faiblement médiatisée, particulièrement à l'échelon local. Paradoxalement, la décentralisation qui offre aux collectivités locales des pouvoirs toujours plus importants s'avère un véritable appel d'air pour cette pratique politique. L'offre d'échange d'intérêts s'est donc trouvée démultipliée. Quand Rome a grossi, que ses institutions ont crû en quantité, ce phénomène s'est aussi amplifiée, avec in fine, l'émergence d'ambitieux dont la soif de gloire et de pouvoir n'a plus connu de limites.

    La fragilisation des populations, l'omni-présence de la sphère publique dans l'économie locale, le mode de scrutin, entre autres favorisent les dérives de toute sorte. Comme l'observe Philippe Sanmarco, les élections cantonales, souvent découplées des grands enjeux politiques nationaux, avec un renouvellement par moitié, dont le territoire électoral a une dimension humaine, sont donc propices à la relation clientéliste.

    Le fonctionnement du parti politique est au coeur de ce système : les collectivités locales embauchent massivement les cadres du parti (pas besoin d'aller très loin pour vérifier la véracité de ces assertions) et on constate des collusions d'intérêt parfois inadmissibles, quand l'adhésion au parti se triple d'une fonction dans les instances locales et d'une fonction dans une entreprise privée touchée directement par les décisions des instances locales concernées.

    On a beaucoup glosé, çà et là, dans la presse ou ailleurs sur les démissions de cadres au MoDem ; mais la réalité est souvent crue et sans fard. Le MoDem n'avait rien à offrir dans les collectivités locales : pas de missions, pas de commissions qui occupassent les troupes. Un certain nombre de départ peut aussi se comprendre à cette aune : le MoDem n'avait pas les moyens, et sans doute pas la volonté, de jouer le jeu du clientélisme.

    Au final, il ne me paraît pas pour autant aisé de faire le procès du clientélisme : qu'est-ce qui sépare une décision clientéliste d'une décision politique ? La frontière est très facilement ténue. Il me semble que c'est surtout l'ignorance des processus, l'absence de transparence, l'éloignement des centres de décision et l'empilement des structures qui favorisent l'opacité nécessaire à l'émergence d'un clientélisme des plus néfastes.

    On se heurte toutefois à plusieurs obstacles frontaux en voulant lutter contre le clientélisme : rien n'indique que sa disparition assurera un mieux-vivre aux citoyens, et ces derniers n'y portent qu'un intérêt très limité, tant cette question semble toucher assez peu leur quotidien, au moins à leurs yeux. On est assez loin du clientélisme de Romulus qui voulait mesurer à la somme de vertu et non de fortune la bonne santé de son réseau, car, là encore, qu'est-ce qui distingue le clientélisme d'un réseau ? un réseau d'intérêts réciproques, finalement. Le clientélisme se distingue peut-être en ce qu'il lèse d'autres intérêts, mais cela demeure à étudier.

  • Espérance de vie : la boîte de Pandore...

    La pénibilité du travail fait l'objet d'une passe d'armes à fleurets mouchetés entre PMA et A perdre la raison. Le premier ne voit pas pourquoi le travail d'une standardiste serait moins pénible que celui d'un ouvrier de chantier, le second relève que non seulement l'espérance de vie des ouvriers est moindre mais que de surcroît, une part plus importante de leur existence professionnelle se déroule avec une incapacité physique ou psychique. Je vais les mettre tous les deux d'accord, puisque je ne suis d'accord ni avec l'un, ni avec l'autre. Il y a dans les statistiques publiées par Melclalex (A perdre la raison) un élément manquant à mes yeux : j'aimerais connaître l'espérance de vie non selon la catégorie socio-professionnelle, mais selon le niveau d'éducation (en termes scolaires, pour être précis). Notamment, l'espérance de vie dépend d'autres facteurs que la catégorie socio-professionnelle : hygiène de vie, génétique, sédentarité, et cetera...Faudra-t-il pondérer le calcul des retraites selon ces critères ? Si l'on évoque l'équité, est-il équitable de pénaliser selon la génétique, un critère que l'on en choisit vraiment pas, pour le compte, ceux qui naissent avec une constitution plus fragile ? Car voilà où nous en arriverions si nous ne tenions pas compte de ce critère. A l'inverse, est-il juste de faire peser sur toute une génération le choix de consommer alcool et tabac qui obèrent lourdement l'espérance de vie indépendamment de toute considération socio-professionnelle ?

    On le voit, avec la pénibilité, on va ouvrir la boîte de Pandore. On pourrait gloser aussi sur les chiffres donnés pour les inactifs, dans le tableau de Melclalex, qui en font les individus les plus exposés à la maladie et à la mort précoce.

    Au fait, dans la mythologie grecque, Pandore, l'épouse d'Épiméthée (le frère de Prométhée), ouvre le cadeau empoisonné que les dieux ont préparé pour les hommes. On y trouve tous les maux, et je crois bien qu'un certain d'entre eux nous affectent sur nos vieux jours. Il ne reste plus qu'une petite créature ailée quand Pandore s'avise de son erreur : l'espérance...

    Sur le fond, je suis plus proche de l'interrogation de PMA que des conclusions Melclalex, mais, pas de ses conclusions : la pénibilité est un critère, dès lors qu'on admet qu'il faille le prendre en compte, il ne devra pas être le seul, au risque, dans le cas contraire, de dénaturer le désir originel de justice qui y prélude. Tiens, Nicolas va peut-être devoir attendre avant d'ouvrir sa prochaine canette ; s'il a écrit sa précédente note sur le sujet d'un trait, il a du avoir très soif après. Sa note péchait à mon avis par un travers : c'est de l'agrément ou non d'une tache que Nicolas traitait alors, et non de la pénibilité au sens de ses implications sur la vie physiologique d'un individu, ce qui n'empêchait pas un certain nombre de réflexions de bon sens de sa part sur le sujet.

    Pour conclure et sur ce point, bien que l'entreprise soit risquée, tant les critères seront difficiles à établir, cela me semblait fort sage, dans un premier temps, dans la 9ème proposition du gouvernement, de ne tenir compte de la pénibilité du travail selon un «suivi personnalisé de la carrière des travailleurs et non sur la définition a priori de catégories professionnelles.»

  • Waka faukon et les d'jeun's

    J'aurais bien fait mes propres réflexions sur la waka (à ne pas confondre avec la haka) nouvelle sorte de danse de la jeunesse entonnée par notre génial gouvernement, mais il se trouve qu'Hashtable a déjà tout dit : waka foutr' l'argent par les f'nêtres...

    Mon Dieu...! Un tel niveau de grand-guignolesque est-il possible ? Le saviez-vous ? La waka waka dans les années 80 était un chant écrit par les gendarmes de la garde présidentielle du Cameroun pour galvaniser leurs troupes. Shakira, la star colombienne ne s'est pas ennuyée plus que cela, elle leur a repiqué en bonne et due forme jusqu'à l'idée du clip. Perso, je préfère la version camerounaise aux versions colombienne et surtout élyséenne...

    A tous les coups, ils ont du pomper l'idée là-bas. Pour ma part, outre la musique du Cameroun, j'apprécie la poésie japonaise du même nom, mais je doute que cela soit venu à l'idée des publicitaires qui ont imaginé cette appellation fumante. Bonne opération pour skyblog qui perdait justement de la population djeun's et se retrouve à la recherche d'un nouveau public.

    En Nouvelle Zélande, on reprend la haka pour impressionner l'adversaire (enfin, c'est la tradition des All Blacks que d'interpréter cette danse maorie rituelle) ; on France, quand on entonne en choeur la waka, c'est pour faire exploser de rire la partie adverse. Chapeau, le gouvernement a tapé dans le mille...

  • Désirs d'Avenirs-PS, DSK, et tout ça...

    Je visite de temps à autre le site de Désirs d'Avenir, le mouvement de Ségolène Royal, et, particulièrement ses forums participatifs. Je suis aussi quelques uns de ses soutiens sur le Post ainsi que quelques blogues royalistes. Cela me frappe, tout de même, de voir le changement de ton de militants que j'avais repérés, par le passé, vis à vis du PS. J'ai le sentiment que la pilule du Congrès de Reims n'est jamais passée. Les partisans de Ségolène Royal demeurent convaincus qu'il y a eu tricherie, et rien ne pourra le leur ôter de la tête. Le ton se fait dur vis-à vis du Parti Socialiste. Désirs d'avenir n'est pas encore un parti politique, mais c'est déjà clairement plus qu'une association ou un think tanks.

    Ce qui est à peu près clair, dans la ligne politique choisie par Ségolène Royal vis-à-vis du PS, c'est qu'elle est déterminée à ne respecter aucune discipline de parti et, le cas échéant, à couper l'herbe sous les pieds des caciques du PS chaque fois que cela sera possible.

    Par exemple, sur les retraites, elle a pris de court, à l'évidence, les Socialistes, en adoptant une position plus ouverte, tout en récusant tout retour sur la retraite à soixante ans. En termes de méthode, tout comme le MoDem, elle a choisi de consulter ses militants en ouvrant un forum participatif sur les retraites. J'y ai lu une idée intéressante, d'ailleurs, d'un de ses militants (Jérémie), qui me rappelle pas mal l'aménagement du temps de travail proposé par le MoDem pour les Seniors : il suggère de mettre en place un départ progressif en retraite. A 60 ans, un 3/4 temps, à 61 ans, un 1/2 temps, à 62 ans, 1/4 temps, et, à 63 ans, une retraite définitive, par exemple. Il suggère également de garantir le droit de départ à la retraite à 60 ans tout en supprimant toute limite légale, afin de permettre à ceux qui le veulent de pouvoir continuer à travailler.

    J'ai vu aussi que quelques militants de DA sont favorables à la mise en place d'un système de retraites par points, ce que préconisait François Bayrou en 2007 et dont le MoDem et le Nouveau Centre soutiennent, désormais, une version améliorée : le compte notionnel.

    Cela pourrait assez bien cadrer avec ce que Ségolène Royal serait prête à accepter du gouvernement, c'est à dire une augmentation de la durée de cotisation.

    Dans le même temps, le pS a confié sa réflexion sur les retraites à des comités d'experts, mais n'a pas cherché à consulter sa base, comme le MoDem ou Désirs d'avenir. Sur une réforme d'une telle importance, je crois pourtant profondément que c'est nécessaire. Il y a en tout cas une chose à peu près certaine : impossible de mettre en place une réforme des retraites sans revoir la fiscalité. Ça gronde de partout dans les bases militantes, jusqu'au sein même de l'UMP. Aucune réforme ne pourra faire l'impasse sur une nécessaire équité fiscale et sociale.

    Pour revenir à Ségolène Royal, je crois que sur le fond, les Socialistes ont la trouille de ce qu'elle peut faire ou non. Plusieurs responsables socialistes s'imaginent qu'elle serait balayée lors de primaires au PS, persuadés que DSK est désormais sous les feux de la rampe. C'est oublier à quel point Ségolène Royal demeure populaire dans les classes populaires, contrairement à DSK qui plaît beaucoup à l'électorat de droite et celui du centre, à une bonne partie de la gauche aussi, mais certainement pas à la gauche de la gauche.

    En fait, ce que craint le PS, c'est que Ségolène Royal passe outre les primaires et se lance toute seule à l'assaut de la prochaine élection présidentielle. A vrai dire, si jamais elle a le sentiment qu'il s'est tramé dans son dos des coups fourrés pour tenter de l'éliminer, il est très probable qu'elle le fera, d'autant que sa base militante l'y encouragera et qu'elle dispose d'un réseau d'élus suffisant pour tenter l'aventure.

    DSK, s'il est le candidat du PS, aura du mal à faire campagne contre Sarkozy alors qu'il lui doit sa place en partie. Par ailleurs, s'il y a un poste qui est vraiment intéressant, à l'heure actuelle, c'est bien celui de directeur du FMI. Notre planète vit des heures troubles, et de grandes mutations dans le fonctionnement de l'économie mondialisée pourraient surgir de ces troubles. DSK a le mérite d'être un pragmatique : il n'applique pas des recettes toute faites qui marchent ou ne marchent pas, comme cela avait pu se produire par le passé, mais adopte une démarche empirique. Il n'en marche pas moins sur des oeufs : le rôle du FMI, quoi qu'on en dise, est tout de même  de morigéner les États et de serrer les cordons de la bourse. Les Allemands ne s'y sont pas trompés :  s'ils souhaitent la présence du FMI dans tout plan de relance européen, c'est qu'ils jugent cette institution bien plus fiable que l'euro-groupe dont les atermoiements n'augurent rien de bon pour l'avenir. Pas commode : pour redonner confiance aux prêteurs, le FMI donc DSK doit incarner la rigueur, et, pour conserver une stature de présidentiable, DSK doit passer pour le "gentil" aux yeux des Français...

    Par ailleurs, le FMI dépend encore largement du financement américain, et, de côté-là, la solidarité commence à se fissurer aussi : les 94 sénateurs américains ont fait passer un amendement pour pouvoir bloquer les fonds à destination du FMI quand il s'agit de prêts à un pays qui n'offre pas des garanties sérieuses de remboursement à leurs yeux...

    Je ne sais pas si DSK sera finalement candidat, mais, finalement, on pourra assez aisément identifier ses différences programmatiques avec Ségolène Royal si elle vient le concurrencer. Si c'est entre Martine Aubry et Ségolène Royal que se joue la candidature socialiste, il en ira tout autrement : comme beaucoup de commentateurs, j'ai quelques difficultés à bien distinguer les différences entre le "care" de Martine Aubry et le projet "fraternel et solidaire" de Ségolène Royal. Les deux, en tout cas, me semblent des émanations de la vieille tradition social-démocrate du welfare state, qui vécut son âge d'or dans l'immédiat après-guerre à la suite du second conflit mondial.