Je visite de temps à autre le site de Désirs d'Avenir, le mouvement de Ségolène Royal, et, particulièrement ses forums participatifs. Je suis aussi quelques uns de ses soutiens sur le Post ainsi que quelques blogues royalistes. Cela me frappe, tout de même, de voir le changement de ton de militants que j'avais repérés, par le passé, vis à vis du PS. J'ai le sentiment que la pilule du Congrès de Reims n'est jamais passée. Les partisans de Ségolène Royal demeurent convaincus qu'il y a eu tricherie, et rien ne pourra le leur ôter de la tête. Le ton se fait dur vis-à vis du Parti Socialiste. Désirs d'avenir n'est pas encore un parti politique, mais c'est déjà clairement plus qu'une association ou un think tanks.
Ce qui est à peu près clair, dans la ligne politique choisie par Ségolène Royal vis-à-vis du PS, c'est qu'elle est déterminée à ne respecter aucune discipline de parti et, le cas échéant, à couper l'herbe sous les pieds des caciques du PS chaque fois que cela sera possible.
Par exemple, sur les retraites, elle a pris de court, à l'évidence, les Socialistes, en adoptant une position plus ouverte, tout en récusant tout retour sur la retraite à soixante ans. En termes de méthode, tout comme le MoDem, elle a choisi de consulter ses militants en ouvrant un forum participatif sur les retraites. J'y ai lu une idée intéressante, d'ailleurs, d'un de ses militants (Jérémie), qui me rappelle pas mal l'aménagement du temps de travail proposé par le MoDem pour les Seniors : il suggère de mettre en place un départ progressif en retraite. A 60 ans, un 3/4 temps, à 61 ans, un 1/2 temps, à 62 ans, 1/4 temps, et, à 63 ans, une retraite définitive, par exemple. Il suggère également de garantir le droit de départ à la retraite à 60 ans tout en supprimant toute limite légale, afin de permettre à ceux qui le veulent de pouvoir continuer à travailler.
J'ai vu aussi que quelques militants de DA sont favorables à la mise en place d'un système de retraites par points, ce que préconisait François Bayrou en 2007 et dont le MoDem et le Nouveau Centre soutiennent, désormais, une version améliorée : le compte notionnel.
Cela pourrait assez bien cadrer avec ce que Ségolène Royal serait prête à accepter du gouvernement, c'est à dire une augmentation de la durée de cotisation.
Dans le même temps, le pS a confié sa réflexion sur les retraites à des comités d'experts, mais n'a pas cherché à consulter sa base, comme le MoDem ou Désirs d'avenir. Sur une réforme d'une telle importance, je crois pourtant profondément que c'est nécessaire. Il y a en tout cas une chose à peu près certaine : impossible de mettre en place une réforme des retraites sans revoir la fiscalité. Ça gronde de partout dans les bases militantes, jusqu'au sein même de l'UMP. Aucune réforme ne pourra faire l'impasse sur une nécessaire équité fiscale et sociale.
Pour revenir à Ségolène Royal, je crois que sur le fond, les Socialistes ont la trouille de ce qu'elle peut faire ou non. Plusieurs responsables socialistes s'imaginent qu'elle serait balayée lors de primaires au PS, persuadés que DSK est désormais sous les feux de la rampe. C'est oublier à quel point Ségolène Royal demeure populaire dans les classes populaires, contrairement à DSK qui plaît beaucoup à l'électorat de droite et celui du centre, à une bonne partie de la gauche aussi, mais certainement pas à la gauche de la gauche.
En fait, ce que craint le PS, c'est que Ségolène Royal passe outre les primaires et se lance toute seule à l'assaut de la prochaine élection présidentielle. A vrai dire, si jamais elle a le sentiment qu'il s'est tramé dans son dos des coups fourrés pour tenter de l'éliminer, il est très probable qu'elle le fera, d'autant que sa base militante l'y encouragera et qu'elle dispose d'un réseau d'élus suffisant pour tenter l'aventure.
DSK, s'il est le candidat du PS, aura du mal à faire campagne contre Sarkozy alors qu'il lui doit sa place en partie. Par ailleurs, s'il y a un poste qui est vraiment intéressant, à l'heure actuelle, c'est bien celui de directeur du FMI. Notre planète vit des heures troubles, et de grandes mutations dans le fonctionnement de l'économie mondialisée pourraient surgir de ces troubles. DSK a le mérite d'être un pragmatique : il n'applique pas des recettes toute faites qui marchent ou ne marchent pas, comme cela avait pu se produire par le passé, mais adopte une démarche empirique. Il n'en marche pas moins sur des oeufs : le rôle du FMI, quoi qu'on en dise, est tout de même de morigéner les États et de serrer les cordons de la bourse. Les Allemands ne s'y sont pas trompés : s'ils souhaitent la présence du FMI dans tout plan de relance européen, c'est qu'ils jugent cette institution bien plus fiable que l'euro-groupe dont les atermoiements n'augurent rien de bon pour l'avenir. Pas commode : pour redonner confiance aux prêteurs, le FMI donc DSK doit incarner la rigueur, et, pour conserver une stature de présidentiable, DSK doit passer pour le "gentil" aux yeux des Français...
Par ailleurs, le FMI dépend encore largement du financement américain, et, de côté-là, la solidarité commence à se fissurer aussi : les 94 sénateurs américains ont fait passer un amendement pour pouvoir bloquer les fonds à destination du FMI quand il s'agit de prêts à un pays qui n'offre pas des garanties sérieuses de remboursement à leurs yeux...
Je ne sais pas si DSK sera finalement candidat, mais, finalement, on pourra assez aisément identifier ses différences programmatiques avec Ségolène Royal si elle vient le concurrencer. Si c'est entre Martine Aubry et Ségolène Royal que se joue la candidature socialiste, il en ira tout autrement : comme beaucoup de commentateurs, j'ai quelques difficultés à bien distinguer les différences entre le "care" de Martine Aubry et le projet "fraternel et solidaire" de Ségolène Royal. Les deux, en tout cas, me semblent des émanations de la vieille tradition social-démocrate du welfare state, qui vécut son âge d'or dans l'immédiat après-guerre à la suite du second conflit mondial.
Commentaires
Pour revenir sur la conclusion de votre article, la différence que je perçois entre la Fraternité et le care est claire, si je puis dire. En effet, dans le premier cas, il s'agit de réunir tous les citoyens dans le groupe nation, alors que dans le second, il s'agit de prendre soin les uns des autres.
Or, je peux prendre soin, sans y prendre goût, par exemple si c'est mon métier. C'est ce que les féministes qui ont crée ce concept mettent fort bien en avant en parlant de ces emplois féminins, au service de personnes en difficultés (infirmières ...). Politiquement ça vaut ce que ça vaut ... (beaucoup de citoyens n'ont pas envie que l'Etat prenne soin d'eux, mais qu'il accomplisse sa mission, et ce sera déjà bien).
La Fraternité souffre de l'autre travers, je peux sentir l'autre mon frère, même si je devrais, moralement, le soutenir, je peux ne pas le faire.
En tout cas les objectiffs sont différents, le care doit apporter le bien-être à un individus (aux deux dans le meilleur des cas), alors que la Fraternité a pour but de rompre l'indifférence, selon moi.
Pour revenir sur la conclusion de votre article, la différence que je perçois entre la Fraternité et le care est claire, si je puis dire. En effet, dans le premier cas, il s'agit de réunir tous les citoyens dans le groupe nation, alors que dans le second, il s'agit de prendre soin les uns des autres.
Or, je peux prendre soin, sans y prendre goût, par exemple si c'est mon métier. C'est ce que les féministes qui ont crée ce concept mettent fort bien en avant en parlant de ces emplois féminins, au service de personnes en difficultés (infirmières ...). Politiquement ça vaut ce que ça vaut ... (beaucoup de citoyens n'ont pas envie que l'Etat prenne soin d'eux, mais qu'il accomplisse sa mission, et ce sera déjà bien).
La Fraternité souffre de l'autre travers, je peux sentir l'autre mon frère, même si je devrais, moralement, le soutenir, je peux ne pas le faire.
En tout cas les objectiffs sont différents, le care doit apporter le bien-être à un individus (aux deux dans le meilleur des cas), alors que la Fraternité a pour but de rompre l'indifférence, selon moi.
Bonne analyse, mais je pense comme vous que Mme Royal est plus proche des classes moyennes et surtout elle a un impact beaucoup plus offensi sur les jeunes qui se sont abstenus aux dernières élections!!!! elle a su mobilisér les jeunes dans sa région ou le taux d'abstention de la tranche 18/25 etait inférieur au taux national .......bien à vous Nanougk
Je ne sais pas trop quoi penser de DSK.
J'ai l'impression que l'ensemble des médias orchestre la montée de sa popularité malgré le fait qu'on ne l'entend pas beaucoup (devoir de réserve) et l'installe petit a petit dans le rôle du présidentiable de la gauche qui plait aussi a droite.
Etant donné la toute relative indépendance des médias et le fait qu'aujourd'hui une campagne électorale est un duel de popularité doublé de promesses n'engageant a rien, je pense que ça n'augure rien de bon et j' me méfie d'un DSK président.
my 2 cents ...
La seule chose que je peux dire, c'est d'aller lire la définition de la Fraternité sur le site des désirs d'avenir.
Ce n'est pas aussi simpliste que tu le montres.
La fraternité recouvre l'ordre juste, les donnant-donnant, gagnant-gagnant, le respect mutuel de l'autre, de ses idées et de ses intérêts, l'ouverture à l'autre, donc la tolérance; considérer le monde comme un grand village, et c'est ce qui permet de partir du local au global dans la démarche politique; c'est l'acceptation de l'autre qui sous-tend l'alliance arc-en-ciel, qui met la finance au service de l'économie et l'économie au service de l'homme et de l'environnement.
Un monde plus juste, plus fraternel, qui place les citoyens et 'environnement au cœur de toute action politique, un monde de paix.
Le Care et la Fraternité n'appréhendent donc pas la politique de la même façon.
"C'est parce que je respecte l'autre et son avis que j'organise des débats participatifs; c'est parce que je respecte l'autre que j'établis avec lui lui l'ordre juste..." c'est à peu près ainsi que fonctionne un monde fraternel.
Il faut lire les débats de la première UPPC sur "l'instant fraternité" avec Régis Debray, tu pourras ainsi mieux appréhender la démarche politique de Royal sur le plan local et sur le plan national et international.
Tout à fait d'accord avec elly ...
En ce qui concerne le Care et la Fraternité, la démarche n'est pas du tout la même !
Un exemple pour illustrer et bien comprendre avec la réforme en cours ( c'est presque un cas d'école !! ):
Les têtes pensantes du PS et Martine Aubry en pratiquant le Care, ont émis des propositions concernant la réforme des retraites ...ils savent ce qui est bon pour nous ... ils ont pris soin de nous.. tellement ... qu'ils ont décidé à notre place !!!
C'est ça le Care à la mode socialiste ...
Ségolène Royal, elle, déchire la méthode sarkozyste, propose une méthode de travail différente, constructive,plus globale et met en place un forum participatif, persuadée que les experts ce sont les gens du terrain, persuadée aussi qu'au milieu de toutes les suggestions jetées en l'air, des idées originales et concrètes émergeront ...
C'est ça la base d'un monde plus juste et plus fraternel dans lequel chacun peut s'impliquer et s'exprimer !!
Vous avez compris la différence ???
C'est simple ...
J'avais lu l'hypothèse que DSK visait plutôt la présidence de l'Europe plutôt que celle de la France, le poste étant à pourvoir juste 1 an après la fin de son mandat au FMI.
@Cédric
Tiens, ça, j'ignorais, en revanche.