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europe - Page 4

  • Cheval de Troie chinois...

    Énée dans l'Énéïde de Virgile, rapporte les paroles de Laocoon, prêtre d'Apollon à Troie, à la vue du cheval que les Grecs ont laissé après leur départ : timeo danaos et dona ferentes. Je crains les Grecs, même lorsqu'ils me font des cadeaux.

    C'est par cette formule judicieusement choisie que le blog du Parisien Libéral met en garde l'Europe contre les cadeaux potentiellement empoisonnés du régime chinois.

    Il observe que les pays en quasi-cessation de paiement qui ont accepté des aides de voisins "altruistes" ont infléchi curieusement, comme par hasard, leur diplomatie par la suite. Parisien Libéral cite notamment l'Islande avec la Russie, sur la question de l'Arctique, ou mieux encore, dans le domaine militaire avec la proposition de former des pilotes russes sur une ancienne base américaine.

    Si je n'agrée pas le discours final de l'auteur de l'article qui invite à chasser la Grèce de l'Europe en raison de ses fraudes, en revanche, je le rejoins tout à fait pour juger que l'Europe doit être indépendante face aux fonds souverains intéressés par ses soucis budgétaires...

    Si les Chinois aident les Grecs au moment où ils ont dans la difficulté, ces derniers leur seront reconnaissants pour longtemps, même si cette aide est clairement intéressée. Quand vous crevez la bouche ouverte, même si celui qui vous sauve vous demande un service après, vous êtes bien content qu'il vous ait sauvé.

    Il est déplorable que l'Europe ne soit pas en état d'aider les siens en priorité. La Chine rassure les marchés quand elle achète des emprunts d'État grecs, ou plus exactement, qu'elle est prête à le faire, tandis que nous Européens, les inquiétons quand au contraire nous hésitons sur la solidarité nécessaire. Solidarité qui n'exclut évidemment pas une sévère mise sous tutelle quand abus il y a.

    La proposition de virer la Grèce est la pire de toutes : c'est ouvrir en grand les portes de la nation hellène aux Chinois. C'est une faute éthique et un erreur diplomatique et stratégique majeure que de raisonner ainsi.

    Pauvre Europe : où en es-tu réduite, incapable de sauver l'un des tiens que tu es...

  • Anne Laperouze reprend du service

    Laperrouze-little.jpgL'organigramme complet du Cabinet Fantôme du MoDem figure désormais sur son site. C'est une très grande satisfaction pour moi d'y voir figurer Anne Laperrouze dans le domaine où elle est experte par-dessus tout. Je rappelle que cette ex-euro-députée est une chimiste de formation et qu'elle a traité la question de l'énergie en long et en large durant la totalité de son mandat européen.

    Pas de chance, son ancien site, consacré à l'Europe et à l'énergie n'est plus en ligne. C'est bien dommage, c'était une mine d'informations. Par chance, on dispose, à dépôt, de son bilan de mandat comme euro-députée, un bilan qui eût gagné à être davantage connu quand les Français ont voté en juin 2009 pour élire leurs nouveaux représentants. Outre l'énergie, Anne Laperrouze maîtrise très bien les dossiers liés à l'espace rural.

    Avec une personnalité de cette trempe et de cette compétence, le MoDem se dote d'une référence plus que sérieuse dans le domaine de l'énergie.

  • L'Europe, enjeu de la présidentielle de 2012 ?

    Quel coup de pot de Sarko ! Voilà qu'une commissaire européenne, Viviane Reding, vient à point nommé le secourir au moment où il est mal en point dans l'opinion. La divine surprise !

    S'il l'a fait exprès, alors c'est vraiment un artiste de la manoeuvre. L'Europe n'a pas bonne presse dans l'opinion, et elle ne risque pas de redorer son blason avec les interventions de Barroso et Reding. Il eût été bien plus simple de laisser Roumanie et Bulgarie régler le problème de leurs ressortissants avec la France, tout en rappelant discrètement à cette dernière qu'elle avait signé des conventions et n'était donc pas censée s'en affranchir.

    Au passage, cela va bien à Reding and co de hausser la voix après avoir laissé la question du statut des Roms pourrir tranquillement des années et des années. Viviane Reding, on ne peut pas dire que cela soit l'originalité  faite femme. Commissaire à la culture, elle m'avait surtout frappé par des initiatives frappées du coin de l'opinion commune : développer les nouvelles technologies dans l'éducation (bla bla habituel, en somme) faciliter les échanges entre les écoles, mais d'action forte en faveur d'une culture européenne, nada, rien. Les technocrates n'ont pas ce genre d'audace.

    Parce qu'ils sont nomades et pas sédentaires, les Roms auraient vocation à devenir les premiers citoyens supra-nationaux de l'histoire de l'Europe, mais, évidemment, cela suppose un volontarisme dont sont bien incapables la plupart des chefs d'État de l'Union...

    Pour Sarko,c 'est du pain béni, cette histoire. L'élection présidentielle ne se joue jamais sur les préoccupations principales des citoyens. Pour une raison très simple : côté emploi et économie, les Français renvoient dos à dos toutes les formations politiques, jugeant qu'aucune ne leur fait de propositions convaincantes. Ils se décident donc nécessairement sur les clivages les plus forts.

    Or, le camp anti-européen, en 2005, c'est 55% de la population. Une chouette magot électoral, pour un démagogue qui n'aurait peur de rien...

    On pourrait se dire que c'est gonflé pour quelqu'un qui a finalement fait passer un ersatz de traité sans vote direct du peuple. On pourrait, mais ce serait malhonnête, et c'est d'ailleurs l'argument habituel des nonistes. Sarkozy avait été très clair en prévenant lors de l'élection présidentielle qu'il ferait passer un traité simplifié par voie parlementaire. On ne peut pas lui reprocher d'avoir appliqué son programme , enfin, je veux dire, on ne peut pas l'accuser d'être malhonnête. Si certains voulaient avoir un référendum, il fallait voter pour Bayrou, puisqu'il le proposait, lui...

    L'idéal, en fait, c'est le cocktail détonnant que représente l'addition de la sécurité et de l'Europe. Que l'Europe hausse le ton contre la politique de sécurité de Nicolas Sarkozy, que celui-ci réplique vertement, et voilà l'électorat FN ravi, au grand damn de son leader...

    Il faut dire que la presse européenne a fait assaut d’imbécillité en parlant de déportation à propos des Roms. Il fallait le faire.

    C'est pourtant possible de les accueillir, les Roms, sans que cela pose particulièrement de problèmes. Un maire MoDem, Nicolas Lebas, me semble, dans les limites de son pouvoir (il ne peut délivrer de permis de travail) l'avoir amplement prouvé.

    En tout cas, si Sarkozy réussit à tenir sur ces thèmes-là jusqu'à 2012, la gauche et le centre ont du souci à se faire. 

  • Fini, les nounous ?

    Transposer une directive européenne en droit national, c'est un processus de longue haleine. Les lois d'un pays sont souvent un équilibre subtil, une sorte d'écosystème législatif dont il convient de respecter la nature profonde.

    Une disposition de la directive Services adoptée par le Parlement Européen en décembre 2006 a attiré mon attention. Elle concerne les services à la personne.

    Jusqu'ici, les services d'aide à domicile et de gardes d'enfants à domicile se faisaient sur la base de décisions toutes personnelles. Ni diplômes ni certifications, ni agréments n'étaient requis.

    Pour les enfants, on appelle techniquement ces personnels des auxiliaires parentaux, et plus familièrement des nounous. Autrefois, on aurait dit des gouvernantes...

    Or, si j'ai bien compris le rapport de transition, il est désormais question de soumettre à autorisation les activités de services à domicile. [Régimes d’autorisation (Article L. 313-1-1 du code de l’action sociale et des familles) et régimes d’agrément « qualité » (article L. 7231-1 du code du travail) ]

    Les activités de services d’aide à domicile (hors soins) et d’aide à la mobilité rendus à des personnes fragiles sont soumises à autorisation. Les professionnels disposent d’un choix entre le régime de l’autorisation du code de l’action sociale et le régime de l’agrément qualité du code du travail.

    Suit plusieurs justifications qui me paraissent en effet sensées dont au moins les trois suivantes :

    - les services sont délivrés au domicile privé des destinataires du service : l’intervenant est seul au domicile avec la (ou les) personne aidée sans regard extérieur, ce qui induit un risque d'intrusion et pas de possibilité de contrôle a posteriori sur place par les autorités habilitées pour contrôler, car le lieu d'intervention est un domicile privé, contrairement aux établissements ;

    - le service apporté consiste en une aide directe à la (ou les) personne (et non d'entretien du cadre de vie), susceptible d'attenter à son intégrité physique et morale ;

    - pour ces services, il existe des raisons impérieuses d’intérêt général (notamment d’ordre public, de santé publique et de protection des consommateurs) justifiant l’existence d’une autorisation obligatoire et des exigences auxquelles sont soumis les opérateurs, qui sont proportionnées à l’objectif d’intérêt général poursuivi.

    Réflexions en effet fort justes, le Parlement Européen a eu raison de soulever ces points.

    Mais, à côté de cela, on risque de forts flottements dans la sphère de l'emploi, avec un risque de dommages collatéraux non-négligeables.

    Que vont devenir les actuelles nounous qui ne disposent d'aucune accréditation ? Est-ce que les acquis de l'expérience vont être validés ? Qui va certifier ? Les services sociaux des mairies ? les pédiatres ? D'autres professionnels de la santé et de l'éducation ? Sur quels critères ?

    En outre, les places en crèche sont si peu nombreuses que les besoins en service à la personne pour la garde d'enfants persisteront de demeureront très importants. Il s'agit donc d'agir avec prudence pour le législateur afin de ne pas créer un important déficit de demandes par absence présumée de qualification, voire un gros appel d'air pour le travail au noir...

     

  • L'inconvénient du capital-risque, c'est le risque...

    Très intéressant, le débat actuel au Parlement européen sur les hedges funds. Les négociations sont à l'arrêt, d'ailleurs. Ce débat met à mon avis le doigt sur nos contradictions. Les hedges funds ont mauvaise presse, en France et plus généralement en Europe. On sait que ce sont des capitaux très mouvants, susceptibles de de se désengager très rapidement, sont gourmands en rendements et effarouchés aisément. L'Europe qui s'en défie, veut donc légiférer pour tenter de limiter leur participation lors des OPA (offre publique d'achat).

    Ce qui est paradoxal, c'est que dans le même temps, nous faisons, en France, tout un battage pour tenter d'attirer le capital-risque...

    Or, le capital-risque constitue justement lui-même un risque. Difficile de préparer une omelette sans casser des oeufs.

    En Amérique, où l'on prise les investissements de cette nature, on crie au crime et au protectionnisme, évidemment, devant les velléités d'encadrement de ces fonds des Européens. Michel Barnier, commissaire européen est aux premières loges. Il faut dire que ça va chauffer (pas trop fort, mais un peu quand même...) car  la directive européenne prévoit que les sociétés de capital-risque obtiennent désormais un agrément pour pouvoir opérer sur les marchés européens...

    Afin de pouvoir opérer dans l’Union européenne, tous les gestionnaires seront tenus d’obtenir l’agrément de l’autorité compétente de leur État membre d’origine. Tous les gestionnaires opérant sur le sol européen seront tenus de démontrer qu’ils possèdent les qualifications appropriées pour offrir des services de gestion de fonds alternatifs et devront fournir des informations détaillées sur l’activité envisagée, l’identité et les caractéristiques des fonds alternatifs gérés, leur gouvernance (y compris les modalités de délégation de services de gestion), les dispositions pour l’évaluation et la garde des actifs et les systèmes de soumission d’informations obligatoires, le cas échéant. Les gestionnaires devront aussi détenir et conserver un certain niveau de fonds propres.

    Pour garantir que les risques associés à l’activité de gestionnaire sont gérés efficacement sur une base permanente, les gestionnaires seront tenus de prouver à l’autorité compétente qu’ils possèdent des mécanismes internes solides en ce qui concerne la de gestion des risques, en particulier les risques de liquidité et les risques opérationnels et de contrepartie supplémentaires liés à la vente à découvert; la gestion et la divulgation des conflits d’intérêts; la juste évaluation des actifs; et la sécurité des arrangements en matière de dépôt et de garde.

    La directive proposée prévoit un niveau minimal de service et de fourniture d’informations initiales et régulières aux investisseurs (professionnels), pour les aider à faire preuve de la diligence nécessaire et assurer un niveau approprié de protection de l’investisseur. La directive proposée prévoit que les gestionnaires fournissent à leurs investisseurs une description claire de la politique d’investissement, incluant la description des types d’actifs et le recours au levier; la politique de remboursement dans des circonstances normales et exceptionnelles; les procédures d’évaluation, de dépôt, d’administration et de gestion des risques; enfin, les frais, charges et commissions associés à l’investissement.

    Une authentique déclaration de guerre, quoi...Et encore, ce ne sont que des morceaux choisis. Déclaration de guerre aux Britanniques : ce sont eux qui ruent dans les brancards. Ils ont proposé de laisser une seconde chance aux opérateurs qui n'auraient pas obtenu le sésame européen de pouvoir exercer leurs activités sur les marchés nationaux. Les Britanniques ne sont pas seuls sur cette position, mais je n'ai pas réussi à repérer quels autres pays s'étaient associés à leur démarche. Pas l'Allemagne et la France, ça, c'est sûr. Évidemment, côté américain, ça hurle encore plus...

    Barnier voulait donc trouver un compromis. C'est raté. Au moins pour l'instant, en tout cas...

    Étonnant que personne ne parle de cela en France. Et pourtant, l'impact et les conséquences de ces accords sont potentiellement énormes. Les hedges funds représentent un marché de 2000 milliards d'euros susceptibles d'être investis.

    Il faut espérer, si la directive passe, qu'ils plient. S'ils trouvent les moyens de se replier ailleurs, déjà qu'on peine à attirer des capitaux privés dans nos pôles de compétitivité...

     

  • A quoi joue Erdogan ?

    Je ne suis pas très loin de penser comme Manu et voulait d'ailleurs publier un billet en ce sens ce matin. Il y a un jeu très trouble de la Turquie dans l'affaire de la flotille de Gaza. Dans l'absolu, je n'avais jusqu'ici pas une trop mauvaise opinion d'Erdogan. Si je le trouve démagogue et populiste sur la scène internationale, à l'intérieur de la Turquie, l'économie décolle, les libertés civiles et politiques (à ce qu'il m'a semblé) progressent, la parole se libère. Sans lui donner un blanc-seing, et contre toute attente, force est de reconnaître que la venue de l'AKP a plutôt constitué un progrès pour les Turcs et les minorités en Turquie.

    Mais à l'extérieur, moi qui suis l'un des rares Français favorables à l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, je suis en train de raviser mon jugement. Parce qu'in fine, toute cette flotille, elle venait d'où ? De Turquie ! Le gouvernement turc connaissait parfaitement la destination et les véritables buts de l'IHH. Il connaissait ses liens avec le Hamas et savait que les six navires empruntaient précisément la route qui avait précédemment servi à livrer des armes au  Hamas.

    Je n'aime pas du tout les méthodes du Hamas. Je n'aime pas l'absence de respect pour la vie humaine de ce mouvement, et je n'aime pas son idéologie intégriste. Mais force est aussi de lui reconnaître qu'il n'a jamais cherché à exporter ce conflit en dehors de la Palestine ou d'Israël, et qu'ensuite, qu'il cherche à se fournir des armes, est, si je puis dire, de bonne guerre.

    Bref, ce n'est pas le Hamas en soi qu'il faut accuser. Le Hamas estime faire de la résistance (avec des méthodes dégueulasses, néanmoins) et il essaie de se procurer du matériel militaire en conséquence. Rien que de normal. Non, le fond du problème, c'est l'attitude de la Turquie qui le sait et laisse faire.

    L'AKP est un parti islamiste. Chassez le naturel, il revient au galop, c'est plus fort que lui. L'exercice du pouvoir l'a démocratisé, mais le vieux fond intégriste ressurgit au premier appât.

    Qu'aurait fait l'Europe si la Turquie eût été membre de l'Union ? Nous autres, Européens, aurions été dans de beaux draps, placés dans une situation inconfortable et mis devant le fait accompli !

    Erdogan a tout faux. Ses manoeuvres auront finalement enfoncé la crédibilité de la Turquie, et, comme on finira bien par parler du rôle de ce pays, mis en porte à faux ceux qui sont favorables à son intégration en Europe (du coup, je ne sais plus si j'en suis...).

  • Agriculture, réfléchir avant de signer...

    On a un sacré problème de méthode, en Europe. Pas mieux que Marielle : je ne comprends pas comment on ne peut commencer par réfléchir d'abord à ce que l'on veut, et ensuite, seulement, envisager de signer un traité...

    À l’occasion d’une audition de la commission du commerce international du Parlement européen, Marielle de Sarnez a interpellé le Commissaire De Gucht sur le volet agricole des négociations en cours entre l’Union européenne et les pays du Mercosur -Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay-.

    Marielle de Sarnez s’est en effet étonnée de la précipitation de la Commission européenne pour l’ouverture de ces négociations. Pour la vice-présidente du Mouvement Démocrate, « on prend le problème exactement à l’inverse, car la bonne question qu’on devrait se poser est : quel est notre niveau d’exigence à nous ? Quel est le niveau d’exigence et d’ambition de l’Union européenne en matière agricole ? Quel est le niveau d’exigence des Européens en matière agricole ? »

    « A ce moment-là, s’étant posé cette question, et y ayant répondu nous pourrions entamer ces négociations avec un mandat précis », a-t-elle ajouté.

    Marielle de Sarnez a conclu en rappelant « les enjeux de la question agricole : c’est une question de sécurité, c’est une question de santé, c’est une question d’économie, c’est une question de croissance et c’est une question aussi de modèle de société européen. La mission de la Commission est de veiller à l’intérêt général européen et donc je préfèrerais que, sur ce type de question, nous ayons une position offensive plutôt que défensive ».

    A l’occasion du Sommet UE – Amérique latine qui s’est tenu les 17 et 18 mai à Madrid, l’Union européenne et le Mercosur ont engagé la négociation d’un accord de libre-échange (ALE) après six années d’interruption. Les discussions avec le bloc latino-américain (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay) avaient été gelées en 2004 suite à plusieurs désaccords dont l’impact négatif d’un accord commercial sur l’agriculture européenne (le déficit commercial agricole de l’UE vis-à-vis du Mercosur a atteint 21 milliards d’euros en 2008).

  • Culture et Soft-power, la démission de Terra Nova

    C''est l'oeil effaré et le faciès épouvanté que je sors d'une visite du site de Terra Nova : je viens d'y lire une analyse de Frédéric Martel sur la fin du soft-power européen, qui, si elle ne laisse pas d'être brillante conclut et suggère très exactement aux antipodes de l'idée que je me fais de la culture. J'y retrouve très exactement ce qui se dit, au sein de la gauche progressiste, sur la culture depuis près de trois décennies : une dénonciation de la culture élitiste française. A vrai dire, jusqu'à peu, il s'agissait de dénoncer un vecteur de reproduction sociale au nom d'un bourdieusisme bien compris, mais, cette fois, la critique s'est faite plus subtile, elle a changé son fusil d'épaule.

    Frédéric Martel constate (à raison) les pertes d'influence française et européenne dans l'industrie culturelle (bouh, quel vilain oxymore !) ; il en attribue la cause d'une part à l'émergence d'une concurrence de plus en plus rude, d'autre part au vieillissement de nos populations qui freine la créativité (en somme, les vieux débris sont forcément peu créatifs, version re-masterisée du jeunisme progressiste) et enfin (et surtout, car c'est là où se porte le coup de grâce), l'absence d'adaptabilité de la vieille culture européenne aux temps de la mondialisation et du tout numérique.

    Allons bon : aux poubelles de l'histoire l'humanisme occidental ! Non, aujourd'hui, pour regagner en soft-power, il faut être world-fashion, c'est à dire multi-culturel, d'ailleurs, à en croire Frédéric Martel, c'est ce qui porte le modèle américain qui écrase tous les autres.

    Nous autres Européens, nous préoccuperions trop de l'offre culturelle et pas assez de la demande. Panem et Circenses, oui, voilà la solution à notre perte d'influence dans le monde. Du pain et des jeux non sous l'égide de petits producteurs indépendants, mais plutôt sous celle de grosses maisons, industries de masse capables de rivaliser avec les Hollywood, Bollywood et autres acteurs du marché de la culture mondialisée.

    Si j'agrée l'organisation pensée par Frédéric Martel, c'est à dire une agence culturelle digne de nom et des bureaux dans les plus grandes capitales à la tête desquels on ne retrouverait pas des nominations qui seraient le fruits de compromis politiques et d'une courtisanerie effrénée, je diverge fondamentalement du modèle idéologique auquel il se réfère.

    La question n'est pas de distinguer artificiellement une culture d'élite et une culture de masse, mais plutôt de déterminer les conditions dans lesquelles une démocratisation de la culture est possible.

    Interrogeons le fond : qu'est-ce qu'une culture élitiste ? Est-ce que c'est élitiste d'assister à une représentation d'une pièce de Sophocle ? On pourrait le penser, et pourtant, c'était l'une des occupations les plus populaires des Athéniens du temps de Périclès ? Est-ce élitiste de contempler gravement les frises de la Cathédrale de Chartres en interrogeant leur signification ? Là encore, on pourrait le penser, et pourtant, c'était la TF1 cathodico-catholique de tout un peuple qui ne savait ni lire ni écrire, au Moyen-âge pour accéder au sacré et au spirituel.

    In fine, il ne s'agit pas d'exclure notre culture européenne, mais de trouver plutôt les moyens de la revisiter : c'est ce que firent les Romains avec les Grecs, et l'on peut dire qu'ils en prolongèrent diablement et durablement le soft-power.

     

  • Sarkozy, Berlusconi, la charogne et moi et moi et moi !

    C'est tout de même invraisemblable : les pays européens vivent des temps difficiles, les dettes des États explosent et leurs créances sont menacées. Pour une fois, l'Europe essaie de réagir collectivement, et devinez qui la ramène pour tenter de se mettre en valeur au lieu de saluer l'action collective européenne ? Sarko et Berlu. Les voilà qui se querellent pour déterminer qui a eu le plus de poids dans la conclusion de l'accord. Comment voulez-vous que cela n'agace pas tous les autres partenaires, même si j'imagine qu'ils en ont vu d'autres avec ces deux zozos-là...

    Au passage, même si je salue cet accord entre États, je déplore que le Parlement européen ait été, comme d'habitude, complètement squizzé.

    Ce qui me frappe dans toutes les crises qui frappent les marchés économiques et financiers, c'est qu'elles ont toutes été annoncées : crise immobilière, crise des États, à chaque fois, j'en ai entendu parler au moins deux années avant qu'elles se produisent. Nous ne sommes pas face à des phénomènes qui ont pris les sociétés par surprise.

    Par exemple, pour le présent accord, Trichet a tout de suite prévenu qu'il ne fera pas long feu si États européens ne prennent pas les mesures d'assainissement de leurs finances qui s'imposent.

    On peut bien dire "ouf !" et pousser un lâche soupir de soulagement, en réalité, ce n'est pas fini, loin de là. Partout on entend parler de lutte contre la spéculation, contre la finance mondialisée, contre les profiteurs de tout acabit, mais la réalité, c'est que notre priorité, c'est d'abord d'être crédibles et de faire face à nos responsabilités. J'ajouterais même que les marchés me semblent avoir été très patients avec les États endettés, depuis fort longtemps. Difficile de les accuser dans ces conditions. Après, on peut râler contre les fonds spéculatifs, mais il faut savoir que dans la nature, il existe des charognards, et que leur rôle est utile : ils ont une fonction de nettoyeurs en se nourrissant des cadavres avant qu'ils ne se décomposent. Nombres de prédateurs s'attaquent aux proies les plus faibles et les moins aptes à survivre, assurant ainsi au reste des troupeaux cible un effectif de qualité.

    Cette métaphore filée est une facilité, et en réalité, elle n'a qu'un temps, mais il faut bien comprendre que ce ne sont pas les vautours qui font la charogne, mais bien la charogne qui attire les vautours...

  • Un répit pour l'Europe et ses États

    La Banque Centrale Européenne et la Commission ont donc pris la décision de proposer au reste du monde une action européenne commune. Faisant fi des traités, des garanties pour un montant de 750 milliards d'euros ont été prises par les pays de l'Union Européenne afin de pouvoir court-circuiter d'éventuelles spéculations et venir en aide à des pays en difficulté.

    Il ne faut pas pour autant compter échapper à nos charges, sauf à prendre le risque d'un tour de passe-passe que nos créanciers n'apprécieraient guère (voir l'analyse de Démocratie Sans Frontières à ce sujet...). Non, en réalité, les États européens n'ont fait que gagner le répit nécessaire pour assainir leurs finances publiques. Nous n'échapperons donc pas à une politique de rigueur ; l'enjeu, désormais, c'est d'avoir encore la possibilité de choisir entre une politique de rigueur que nous maîtriserons et une politique de rigueur qui nous serait imposée. C'est ce qu'évaluait avec beaucoup de justesse le blog Humeurs de vaches, avant-hier. Il ne suffira pas d'une seule révision générale des politiques publiques, en France, faute de montants significatifs. Comme l'observe Céline Alléaume sur le blog Politicia, c'est désormais d'une réforme de l'État dont nous avons besoin, avec une questionnement sur ses missions fondamentales :

    «La Réforme de l'État, elle, est empêtrée dans les contradictions de la politique du Président. L'opinion publique ne la soutient plus, ne la comprend plus. Les déficits publics s'accumulent, l'endettement de la France atteint des niveaux vertigineux. Plus que jamais une bonne gestion publique, à commencer par une gouvernance irréprochable, est nécessaire. François Bayrou, dans son dernier ouvrage Abus de Pouvoir rappelait que « pour le citoyen, les réformes ne valent que si elles sont progrès […] » et que seules « la discussion et la définition du but à atteindre permettent une méthode de la réforme, qui donne enfin sa place aux intéressés, aux bosseurs de terrain ». La nécessité de la Réforme de l’État reste entière.»