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Economie - Page 57

  • Société Générale : l'homme qui valait 50 milliards !

    Pourquoi 50 milliards d'euros ? Pour une raison très simple : 5 milliards d'euros, ce sont les pertes. Enfin, soyons exacts : le montant des pertes, c'est 7 milliards d'euros, car il y a aussi 2 milliards d'euros de subprimes. D'ailleurs, depuis hier, cette information s'est volatilisée, on ne sait pourquoi. Revenons à nos moutons :  sur quels montants de fonds croyez-vous que des positions avaient été prises. Notez que je ne mets pas, grammaticalement, de complément d'agent à ma tournure passive, si bien que l'on ne sait pas, finalement, qui a pris les dites positions.

    50 milliards d'euros, c'est tout de même pas loin des 3/4 du budget de l'Education Nationale en France. 50 milliards d'euros de positions prises par un seul homme ? Le pauvre gars s'appelle Jérôme Kerviel, et l'hypothèse invoquée  serait qu'il aurait été pris de bouffées délirantes et paranoïaques. D'ailleurs, allez savoir pourquoi, il est introuvable : incroyable, non ?

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     Observez bien l'instrument qui se trouve représenté ci-contre : c'est un instrument de musique, bien connu, simple, et sympathique quand on veut siffloter une petite musique, l'air de rien.

     Ils donnent des cours de pipeau, à la Société Générale ? En langage technofrik, il paraît que cela se dit "seubpraïme", le mot pipeau...Faut que je consulte mon dictionnaire, hein, mais je crois que cela doit être quelque chose de ce genre... Evidemment, Christian Noyer, le directeur de la Banque de France assure que ce n'est pas la bonne traduction, et que c'est un autre mot. Il est toujours à la recherche de ce dernier.

    Je juge en revanche très démagogique la réaction de Ségolène Royal. Voici ce qu'elle déclare : "Je veux que l'Etat recadre les banques, réglemente leurs activités pour qu'elles fassent ce pourquoi elles sont payées, c'est-à-dire prêter de l'argent aux ménages, aider les entreprises pour qu'elles créent des emplois".

    N'importe quoi. Heureusement qu'une banque cela ne se limite pas à cela ; si elle veut en finir avec la réputation d'incompétence qu'elle s'est faite, elle a intérêt à éviter ce genre de sorties... 

    Ah, au fait, le comble de l'histoire, c'est que l'action de la Société Générale est en hausse aujourd'hui. Je parie que des petits malins ont voulu anticiper en se disant que quelques grosses banques verraient dans cette histoire le bon moment pour lancer une OPA. Attention, avec des anticipations de ce genre, ils pourraient bien louper le coche...

  • Krach ou pas krach ?

    Cela sent le souffre, voire le sapin : les principales places boursières mondiales dévissent sérieusement, de plus de 6% en moyenne. A Paris, c'est -7% quasiment, et les grosses valeurs bancaires perdent entre 8et 10% à commencer par BNP paribas (on ne comprend pas pourquoi d'ailleurs, car à ma connaissance, cette banque est justement saine), le Crédit Agricole, la Société Générale...

    Quand je pense qu'en janvier 2007, le Cac 40 était à 6200 points, et que là il n'est plus qu'à 4700 points. Pas le moment de vendre. Fairele dos rond et attendre que l'orage passe. Pour ma part, c'est ainsi que j'envisage les choses.

    Seules consolations : le baril de pétrole baisse et le dollar remonte face à l'euro. C'est la trouille d'une récession en Amérique qui précipite les marchés. Ce serait apparemment la baisse notation d'une très grosse société financière américaine de crédit, AMBAC, qui aurait provoqué la crise. Sa particularité, c'est de réassurer les groupes bancaires.

    En tout cas, ce n'est pas encore la panique générale, mais, si jamais on trouve le même chiffre demain, on pourra dès lors parler de krach boursier.

    Bon, autre consolation : dans pas longtemps, cela va être le bon moment pour acheter... 

    Autre solution, l'investissement socialement responsable. Je crois  que c'est le seul pour lequel l'horizon soit clair. Cela justifie a posteriori le bien-fondé du programme de Marielle de Sarnez à Paris, à ce sujet, puisqu'elle veut faire de Paris la capitale mondiale de l'Investissement Socialement Responsable. Or, il semble que ce secteur de la finance soit en pleine croissance et offre l'avantage de préserver en grande partie des mauvaises surprises.

     EDIT 14h46 Bon aux dernières news, cela a l'air de se stabiliser, mais bon, tout cela reste fragile... 

  • Avis des sénateurs MoDem et centristes sur l'éco-pastille

    da047f70779f8d59853395ed12085927.jpgDenis Badré, Sénateur UDF-MoDem, a pris la parole, au nom de l'Union Centriste, pour exposer ce que son groupe pensait de l'écopastille :

    Concernant l'écopastille automobile, que le Gouvernement a proposé lors de la lecture du texte à l'Assemblée nationale, un peu in extremis donc, je ferai une remarque de forme et quelques observations.

    Monsieur le secrétaire d'État, il est toujours hasardeux d'introduire une mesure nouvelle dont l'essence, si j'ose dire, est d'une telle portée.

    Au cours même du débat, chacun, qu'il s'agisse des parlementaires, des partenaires concernés comme d'ailleurs de vous-même, monsieur le secrétaire d'État ou du Gouvernement tout entier, chacun donc a besoin de temps pour étudier de tels textes, pour les calibrer, pour mesurer leur impact, les préciser dans leurs modalités, bref, pour leur donner toute leur lisibilité, leur efficacité et leur portée budgétaire, économique, écologique, donc politique.

    Cela est particulièrement important lorsqu'il s'agit de mesures qui peuvent très vite prendre un caractère emblématique compte tenu de leur nature.

    C'est vrai, le dialogue, ou tout au moins un dialogue assez spectaculaire et approfondi, a eu lieu lors du Grenelle de l'environnement. Dans ces conditions, pourquoi ne pas avoir fait figurer cette mesure dans le texte initial du projet de loi de finances rectificative ? Vous auriez ainsi pu prendre en compte nos préoccupations de principe concernant la méthode, préoccupations de principe qui touchent tout de même au rôle et à l'engagement du Parlement sur de telles dispositions.

    Sur le fond, il reste que l'écopastille automobile est une mesure de bon sens, qui s'inscrit complètement dans la ligne du développement durable.

    Le groupe UC-UDF la soutiendra donc, même si sa présentation un peu rapide fait que la disposition souffre encore de quelques imperfections ; j'espère que le débat permettra de les réduire.

    Ainsi, pourriez-vous nous indiquer où en est votre réflexion quant à la prise en compte de la nécessité pour les familles nombreuses d'utiliser des véhicules dont le bilan écologique peut, certes, laisser à désirer, mais qu'elles ne peuvent à l'évidence pas remplacer ? J'espère que vous pourrez, sur ce point, prendre en compte notre préoccupation.

    Toujours sur l'écopastille, mon groupe a déposé des amendements permettant de réajuster le montant du bonus-malus pour les véhicules qui auraient été manifestement mal catégorisés, je pense à des automobiles roulant au super éthanol ou aux véhicules dits flex-fuel. En effet, paradoxalement, ces voitures non polluantes seraient moins aidées qu'elles ne l'étaient jusqu'ici !

     

    Source : Sénat 

  • C'est en Inde que cela se passe...

    7d3bb81e7d3f944639fb6ab8eae1fe49.jpgJe lisais l'excellente analyse de Corine Lepage plaidant pour l'innovation financière afin de favoriser la croissance des PME, tout en songeant à mon récent billet sur l'Inde, et comme je venais de consulter google actualités, la jonction s'est faite naturellement à la lecture d'une dépêche de l'AFP sur l'automobile à air comprimé.

    Corine Lepage observe dans son billet qu'aucun des produits et services  financiers  actuels, en France, ne s'adaptent aux besoins d'investissements des petites PME et des TPE. Or, l'investissement des PME est justement le moteur dont notre croissance a besoin. 

    Or, j'apprends que ce sont deux français, Guy Nègre et Louis Arnoux, qui ont mis au point l'automobile à air comprimé, et que finalement, c'est un investisseur indien, TATA, qui leur fournit les 1.5 millions de dollars qui vont permettre à MDI-ernergy, leur petite entreprise, de commercialiser leur modèle, la OneCats. C'est en Australie qu'ils lancent leur petite merveille, et, tenez-vous, pour le prix de 5400 euros seulement !!! L'engin, de la taille d'une grosse smart, est tout de même capable de filer ses 150 km/h  !

    Futés, les deux Français ont inventé un concept complet : non seulement leur véhicule fait un plein en 3 minutes pour deux à trois euros, mais en plus, sa commercialisation en série repose sur de micro-unités de production implantables rapidement et facilement dans tous les pays. Et cela frappe à la porte : Iraniens, Sud-Coréens se montrent aussi intéressés que les Australiens, et bien sûr les Indiens.

     Et c'est là où je me dis que les observations de Corine Lepage prennent douleureusement toute leur acuité : pendant que l'Omni-président se prend pour un représentant de commerce et prend de haut les Indiens, ce sont des fonds indiens qui investissent dans une technologie de pointe audacieuse et prometteuse et qui lui donnent la possibilité de passer à l'étape de la commercialisation.

    Ils sont où les fonds d'investissement français, dans cette histoire ? et elle fait quoi l'industrie automobile française ? Cette histoire est pitoyable pour la France et même pour les pouvoirs publics français, incapables de réagir depuis 10 ans. Et côté Sarkozy, on voit bien que les discours sur les PME n'étaient que du flan : rien n'a bougé, ou, tout du moins, pas l'essentiel. Cette histoire est édifiante, et sans doute pas la seule...

    Ceci me rappelle que l'un des objectifs centraux du projet financier de Marielle de Sarnez et du MoDem, à Paris, c'est justement de promouvoir l'innovation financière. Bien sûr, une municipalité, aussi grande soit-elle, ne peut pas tout faire, mais, je me dis que si elle appliquait les points suivants (que l'on trouve texto dans le programme du MoDem à Paris) ce pourrait être déjà un bon début, et que même, si de telles mesures avaient été appliquées suffisamment tôt, Guy Nègre et Louis Arnoux implanteraient quelque part en région parisienne leur première usine de OneCats. Je cite l'extrait du programme :

    Promouvoir la Place de Paris comme première place de l’innovation financière
    Il est nécessaire de promouvoir plus activement la Place de Paris, au travers de Paris Europlace, dont la structure serait renouvelée sur le modèle de la Corporation of London (comme suggéré mais non réalisé par Bertrand Delanoë en 2001). Son rôle pourrait être de :
    - Prendre contact avec les acteurs financiers présents à Paris ou pouvant venir s’installer à Paris.
    - Recenser les besoins des acteurs (bureaux, infrastructures…) et prévenir les difficultés pouvant les conduire à quitter Paris.
    - Aider techniquement l’installation des entreprises à Paris.
    - Développer un discours de place pour améliorer l’image du secteur et lui apporter une plus juste reconnaissance.
    - Promouvoir la place à l’international, en effectuant un travail de ciblage, notamment à destination de la Chine, de l’Inde, de la Russie, et des pays arabes.
    - Contribuer à l’adoption d’une réglementation et une fiscalité adéquates et stables.
    - Contribuer à l’amélioration de la régulation : réactivité et diffusion de l’innovation..
    - Organiser des grandes rencontres annuelles dans les domaines d’excellence (assurance, Investissement Socialement Responsable notamment).

  • Subprimes : on savait...

    Ce qui est tout de même sidérant avec cette histoire de subprimes, c'est que l'on savait depuis un moment que cela allait "péter", que les lecteurs de ce blog me pardonnent l'expression. J'ai été un lecteur assidu du site www.ruedelimmobilier.com et les les usagers des news de ce site n'ont cessé de publier des informations à ce sujet depuis plus d'un an et demi. Je me souviens même d'avoir lu une analyse d'Exane-BNP Paribas invitant à se défier du marché américain et explicitant les paris fous des ménages américains afin de pouvoir se surdendetter toujours plus. bref, la presse financière a évoqué les subprimes dès 2006, et on savait depuis plus longtemps encore que nombre de ménages américains modestes risquaient d'être mis à la rue et en défaut de paiement en cas de retournement de la conjoncture, ce qui n'a pas manqué de se produire.

    Par exemple, Global Europe Anticipation avait dès mars 2006 imaginé le scénario de la contagion. 

    Le fait est que la BNP n'est a priori pas tombée dans le panneau : c'est l'une des rares banques françaises à ne pas annoncer de pertes en raison des subprimes. En revanche, elle va tout de même payer quelques pots cassés par les autres : comme la méfiance s'est installée et qu'elle a tout de même besoin de se financer, les banques étant très méfiantes, désormais, elle va devoir emprunter sur les marchés au prix fort... Consolation, elle ne sera pas la seule, et au moins son crédit n'aura-t-il pas été entamé.

  • L'entreprise dans l'environnement capitaliste

    Je n'adhère pas à tout ce que dit Jean Peyrelevade, et notamment à un discours un peu trop convenu à mon goût sur les actionnaires. Mais, sur le fond, je me retrouve tout à fait dans ce qu'il dit de l'entreprise, et trouve plutôt sympathique la définition d'une entreprise privée comme un bien public, non au sens où il s'agit de la taxer, mais au sens où l'entreprise privée produit du "bien" public. A comparer avec la définition que Schumpeter donne et du capitalisme, et de l'entrepreneur. Il y a certes des différences, mais je pense que les deux économistes se rejoignent en partie sur l'entreprise.

    Dans un long entretien, Jean Peyrelevade aborde franchement les transformations du capitalisme. Il met notamment en exergue le caractère insoutenable du modèle capitaliste actuel : insoutenable du point de vue du développement durable, insoutenable du point de vue des inégalités.

    Est-ce que l’on doit ou est-ce que l’on peut parler de crise du capitalisme ?

    Pas pour l’instant. Nous avons une machine qui est assez efficace, qui fabrique quand même un niveau de croissance mondiale qui jusqu’à présent n’a jamais été atteint. Avoir pratiquement 5% de croissance mondiale sur plusieurs années, c’est une exception historique. La crise actuelle des subprimes américains est une crise liée simplement à l’immobilier, et aux modes de financement de l’immobilier des ménages modestes aux Etats-Unis, c’est une crise de régulation banquière et financière. Elle ne met pas en cause le fonctionnement de l’ensemble de la machine, du moins je ne le crois pas. Simplement, le mode de développement actuel de cette machine globale, parfaitement efficace, qui une fois de plus, n’est pas encore en crise, est insoutenable à long terme pour deux raisons. L’une, fondamentale, est que ce développement est incompatible avec les ressources naturelles de la planète. On parle beaucoup de développement durable mais pour l’instant, le développement, tel qu’il continue à se faire n’est pas durable, de ce point de vue. Deuxièmement, c’est effectivement un développement qui fabrique, à l’intérieur de chaque pays-et c’est vrai aussi dans les pays développés, ce qui est nouveau-une inégalité croissante entre la couche, peu nombreuse mais extrêmement influente et importante en pouvoir des gens qui sont « aux commandes de la machine »,-ce sont des gens qui s’enrichissent énormément et très rapidemment. Et ce phénomène d’inégalité croissante au profit d’une « classe », parce qu’il faut l’appeler comme ça, une classe sociale nouvelle, réduite en nombre mais extrêmement riche et extrêmement puissante, se produit, dans tous les pays, pas seulement dans les pays émergents, dans les pays en développement où c’est un phénomène très classique au moment du décollage économique … mais de la même manière, aux Etats-Unis, en Grande Bretagne et en France. Et donc cela, je pense, politiquement et socialement, n’est pas tenable à terme. Et de ce point de vue là, je trouve que Nicolas Sarkozy a été, à lui seul, un symbole éclatant de la constitution de cette nouvelle classe sociale, entre la soirée au Fouquet’s, le soir de son élection, et les vacances sur le yacht de Vincent Bolloré … D’une certaine manière, notre nouveau Président de la République veut montrer qu’il appartient à cette classe sociale.

    Quel objectif réaliste face à cette double limite du capitalisme ?


    Je pense que l’échelle des richesses doit être définie pays par pays, ce ne peut être un objectif mondial. Chaque pays est responsable de sa solidarité nationale et de son modèle de redistribution. En tout cas, il me semble qu’en France, il est de notre responsabilité politique de faire en sorte que il n’y ait aucune couche sociale, aussi réduite soit elle, qui par fonction, creuse de manière extraordinaire, une inégalité de revenu et de patrimoine avec la moyenne de la population. Le phénomène qui est en train de se passer met en cause notre manière de « vivre ensemble ».

    Est-ce cette inégalité qui a créé le désamour des Français pour la mondialisation ?

    C’est un des aspects mais ce n’est pas l’aspect dominant dans la méfiance des Français envers la mondialisation. Je pense que ce qu’ils voient d’abord, c’est la redistribution des cartes à l’échelle mondiale qui fait qu’il y a une respécialisation de chaque pays, y compris le nôtre, sur un certain nombre de créneaux, et donc il y a des emplois supprimés, des secteurs qui souffrent du fait de la mondialisation. Je crois que la population voit surtout les emplois supprimés, du fait de cette redistribution des cartes. Elle voit aussi qu’il y a des gens qui en bénéficient. Quand ce sont les cadres, les ouvriers ou les employés d’Airbus ou d’Alstom, c’est très bien. Mais quand les gens qui en profitent font la une des magazines people, s’affichent avec tout leur luxe, en même temps que les vedettes du showbiz ou du sport, dans un mode de vie qui est clairement différent de celui de la moyenne de la population, cela provoque des réactions plus mitigées. Compte tenu de la culture, de l’histoire et de la mentalité française, cette apparition d’une caste, d’une classe supérieure privilégiée, est une circonstance qui aggrave le dépit de la mondialisation, j’en suis convaincu.

    Quelles pistes, quelles lignes pour construire un modèle de développement économique qui réduise ces inégalités que vous avez définies ?

    Il y a une piste qui me paraît extrêmement importante : lever la confusion qui règne en France entre l’entreprise, partie d’un système productif, et les intérêts des individus. Les entreprises sont des biens collectifs même quand elles sontde droit privé, l’entreprise est un être en soi, avec ses actifs, son appareil industriel et l’on doit tout faire, dans la compétition mondiale, dans le mouvement de mondialisation, pour les renforcer. Mais on a tendance en France a confondre, c’est très clair dans la politique actuelle de Nicolas Sarkozy, c’est malheureusement aussi très clair dans les prises de position du patronat, du MEDEF ou de la CGPME, c’est malheureusement aussi assez apparent dans le discours convenu en faveur des PME, il y a une confusion dont je ne saurais dire si elle est volontaire ou inconsciente, entre le patrimoine de l’entreprise et les intérêts matériels de ses propriétaires, de ses actionnaires, des gens qui la gèrent. Autant l’entreprise mérite un soin particulier, autant je ne vois aucune raison, absolument aucune pour que les revenus du capital ou les revenus du travail aient un traitement en matière de prélèvement fiscal et de cotisations sociales qui serait différent. Or, c’est le cas aujourd’hui, si l’on parle des stocks options, de l’exonération des droits de succession jusqu’à un niveau très élevé, de bouclier fiscal, de la diminution de la fiscalité sur les dividendes, on voit bien que, quelles que soient les justifications particulières de chacune de ces mesures, on est en train de favoriser de manière extrême les propriétaires, les actionnaires de l’entreprise ou ses grands managers et non pas l’entreprise elle-même.

    C’est cette logique qui est à l’œuvre dans le cadre de la fiscalité des dividendes ?

    La diminution de la fiscalité des dividendes n’apporte rien aux entreprises, n’augmente en rien la marge des entreprises, n’améliore en rien la compétitivité des entreprises. Pour le même effort fiscal, il eût mieux valu baisser d’autant l’impôt sur les sociétés, ce qui d’ailleurs, au bout de la course, aurait fini par procurer le même avantage économique aux actionnaires. Mais au moins, au passage, on aurait renforcé la marge et la compétitivité des entreprises. Ce qui montre bien qu’en France, la droite et en tout cas la droite sarkozienne et une large partie du patronat considèrent que lorsque l’on favorise les actionnaires, les mandataires sociaux, on a aidé et favorisé l’entreprise. C’est est un raisonnement complètement faux. Il faut soigneusement distinguer ce qui relève du patrimoine collectif, c’est-à-dire l’entreprise en tant que partie de l’appareil productif et les individus qui n’ont aucune raison, absolument aucune d’être traités fiscalement de manière plus favorable que l’ouvrier ou l’employé de base.

    C’est aussi par ce chemin que passe la réconciliation des Français avec l’entreprise ?

    Absolument. Les entreprises sont impopulaires ? Parce que les Français ont très bien compris que c’est le lieu où se forment des fortunes individuelles qu’ils considèrent, à tort où à raison, comme illégitimes. On ne réconciliera pas les Français avec l’entreprise tant que la distribution des fruits produits par l’entreprise ne sera pas plus républicaine.

  • Jean-Claude Trichet à l'honneur au Financial Times

    Jean-Claude Trichet est élu homme de l'année par le Financial Times. J'avoue que je trouve cela mérité. L'homme est discret, mais, sur les subprimes, il a su sortir de l'orthodoxie monétaire pour réagir vite et bien, et injecter suffisammment de liquidités pour rassurer les banques, d'autant plus que les marchés ont senti que la BCE était prête à rééditer l'opération.

    De surcroît, mener une opération concertée avec les autres banques centrales, c'était bien vu.

    Sur le fond, nul doute que les banques centrales devront évoluer dans notre monde moderne qui n'est plus le temps de leur création. Aujoud'hui, il ne s'agit pas seulement de gérer les risques de dérapage inflationniste, ce sont les crises financières de toute sorte auxquelles il faut faire face. Et c'est une tout autre mission qui exige une redéfinition du rôle des banques centrales partout dans le monde. 

  • L'avenir du livret A...

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    Parcourant le blog de Grozbulles, dessinateur humoristique de talent, je crois avoir trouvé une vignette assez évocatrice à propos du sort du livret A.
    Comme le titre fort humoristiquement Grozbulles, encore un éco-système en péril.
    Je ne donne en effet pas cher de la peau des caisses d'épargne...
    Cela dit, il faut aussi comprendre que toutes ces caisses mutualistes devaient faire un choix : dès lors qu'elles se lançaient dans des activités commerciales, elles ne pouvaient plus se prévaloir d'un avantage préférentiel. Or, elles se livrent à ce type d'activités depuis quelques années déjà. L'on ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre. C'est tout de même ce qu'omet Grozbulles dans son excellent dessin. 
    Fallait-il conserver la spécificité des caisses d'épargne ? Je ne le sais pas. Elles appartiennent à un autre temps, je ne suis pas convaincu de leur justification économique ni même sociale dans le paysage économique français. Bien sûr, l'autorisation de proposer des produits d'épargne défiscalisés de ce type pour les autres banques a été assortie d'une obligation de service public : elles devront être présentes partout sur le territoire français. 
    Le dessin de Grozbulles est certes amusant, mais il est tout de même fondamentalement tendancieux en assimilant la Concurrence au Grand Méchant Loup. Pauvre loup, d'ailleurs, encore un carnivore qui est le dindon de la farce dans cette histoire, puisqu'il fait les frais de la métaphore. L'écureuil pululle, qui le Sait ? Le loup, lui, se meurt à peu près partout.
    Quelque part, je me dis qu'il faudrait une campagne d'information pédagogique pour expliquer aux Français que la concurrence est saine, fondamentalement, dès lors qu'elle est libre et non faussée. Livrer le livret A à la concurrence, ce n'est pas en soi malsain, dès lors que l'obligation de service public est respectée. Rien ne dit, d'ailleurs, que les banques commerciales se précipiteront sur ce produit. A ce que j'ai entendu, les premières réactions sont assez frileuses...
     

  • Nintendo, Schumpeter et la WII

    On entend (et on lit aussi sur la Toile) beaucoup l'idée que Nintendo organiserait délibérément une pénurie de WII sa dernière console de jeu. A vrai dire, Schumpeter, au chapitre 8 de Capitalisme, Socialisme et Démocratie, s'est penché sur les pratiques monopolistiques afin de démontrer que la plupart du temps, il ne s'agit pas pour les entreprises de maintenir artificiellement prix et production dans un certain état afin de maintenir un profit assuré, c'est à dire de se créer une situation stable, mais, bien plutôt de se doter d'une couverture dans un temps limité pour se protéger de certains aléas du marché. Une telle attitude doit se comprendre à l'aune de ce que Schumpeter appelle la destruction créatrice, dont j'ai eu l'occasion de parler sur ce blog. 
     

    Si, par exemple, un risque de guerre est assurable, personne ne reprochera à une firme de recouvrer le coût des primes sur les acheteurs de ses produits. Or, ce risque, même s'il n'existe aucun moyen de l'assurer, n'en constitue pas moins un élément du prix de revient à long terme et, dans ce cas, une stratégie des prix visant au même objet pourra donner l'impression d'impliquer des restrictions évitables et d'engendrer des profits excessifs. De même, si un brevet ne peut être pris ou si, au cas où il serait accordé, il ne procurerait pas une protection efficace, il peut être nécessaire de pren­dre d'autres dispositions aux fins de justifier l'investissement - par exemple, d'appli­quer une politique de prix permettant d'amortir plus rapidement qu'il ne serait ration­nel de le faire si les aléas commerciaux étaient moins élevés, ou encore de procéder à des investissements supplémentaires en vue de se ménager une capacité de production excédentaire, réservée à des fins offensives ou défensives. De même, si des contrats à long terme ne peuvent être conclus à l'avance, une firme qui procède à des inves­tis­sements considérables peut être amenée à imaginer d'autres procédés pour s'attacher solidement les clients présomptifs.

     J'écoutais ce matin sur BFM les explications de Pierre Cuilleret, le directeur de la société Micromania, qui distribue la WII en France, et son commentaire était édifiant : il expliquait très bien comment Nintendo ne cherchait pas sciemment à réduire sa production, mais rapperlait simplement que cette entreprise avait failli plusieurs fois couler en raison d'un sur-investissement dans un produit qui n'avait pas percé comme attendu. De ce fait, elle préférait, dès lors, miser sur un succès moindre, quitte à perdre du chiffre d'affaires. 

    Cela me paraît tout à fait l'illustration de ce qu'écrit Schumpeter. 

    Quand il analyse ces stratégies d'affaires d'un point de vue instantané, l'économis­te ou le fonctionnaire-enquêteur observe des politiques de prix qui lui semblent abusives et des restrictions de production qu'il assimile à un refus d'exploiter toutes les possibilités de vente. Mais il ne voit pas que les agissements de cette nature constituent, au milieu de « l'ouragan perpétuel », de simples incidents, souvent inévi­tables, qui encouragent, bien loin de le freiner, le processus d'expansion à long terme. Une telle affirmation n'est pas davantage paradoxale que celle consistant à dire : les automobiles parce qu'elles sont munies de freins roulent plus vite que si elles en étaient dépourvues.

    Bon, il y a tout de même parfois des ententes sur les prix, objectivement. Mais, en effet, ces ententes n'ont sans doute pas pour objet de se garantir une rente, une attitude qui serait extrêmement dangereuse pour l'avenir, mais bien de couvrir des risques. Le gouvernement a vendu à des prix records les licences de téléphonie, sous le ministère de Jospin. Je sais qu'il y a des profits monumentaux à attendre de ces licences, mais les sommes demandées étaient tellement énormes, sans compter les investissements nécessaires dans le développement du réseau, que je me suis demandé si les entreprises des téléphonie ne prenaient pas des risques inconsidérés, a fortiori en considérant la nature éminemment concurentielle du marché. En tout cas, très probablement, pour revenir à notre WII, il n'y a pas de pénurie sciemment organisée. 

    « Comme nous l'avons vu, de telles entreprises sont agressives par nature et manient l'arme de la concurrence avec une réelle efficacité. Certes, leur intrusion ne saurait manquer, sinon dans des cas très exceptionnels, d'accroître en quantité ou d'améliorer en qualité la production totale, soit directement, par l'application de la nouvelle mé­thode - celle-ci ne fût-elle à aucun moment pleinement exploitée -, soit par la pression qu'elle exerce sur les firmes préexistantes. Cependant les conditions dans lesquelles sont placés ces agresseurs sont telles que, pour atteindre leurs objectifs offensifs ou défensifs, ils ont besoin d'armes supplémentaires, à côté des avantages de prix ou de qualité - ceux-ci devant d'ailleurs être constamment manipulés dans une intention stratégique, en sorte que, à tout moment considéré, les firmes novatrices donnent l'impression de se borner à restreindre leur production et à maintenir des prix élevés. »

     C'est tellement explicite, que je ne vois pas quoi dire d'autre. Schumpeter a tout de même anticipé avec une impressionnante préscience les problèmes économiques de notre époque. Nous abordons souvent ces questions avec le regard consumériste qui caractériste l'immédiateté de notre société de consommation. Or, ce regard s'étend très peu dans le temps. On peut par exemple supposer, et c'est très vraisemblable, que l'apparition de "générations" de processeur est fallacieuse, en ce sens que l'on aurait pu bien plus vite accéder à de plus performants processseurs. Mais il faut peut-être songer que les profits engendrés par cette célérité moindre couvrent certainement une large part des dépenses de RD nécessaires pour les entreprises.

  • Trois monstres pour l'économie française

    Je reprends un extrait très significatif d'un billet du blog de Christian Saint-Etienne. C'est tellement bien dit que je ne vois rien à rajouter :

    Trois idées monstrueuses, aujourd’hui éventées, ont guidé la « génération maléfique » qui a gouverné notre pays depuis un quart de siècle :

    - La dépense publique crée la richesse. Et depuis 1981, cet « adage » a été au centre de la politique publique. En sorte que la dépense publique française en pourcentage du PIB, qui était inférieure à celle de la zone euro (reconstituée) dans les années 70 est aujourd’hui supérieure de 8 points de PIB à la moyenne de la zone euro hors France. Dans le même temps, l’écart de croissance, entre notre économie et la moyenne des autres pays de la zone, est passé d’un point en notre faveur à un demi-point en notre défaveur.

    - Le travail doit être partagé. Avec la retraite à 60 ans, il s’agissait de faire travailler les jeunes en remplacement des vieux. Avec les 35 heures, il s’agissait de partager une quantité de travail donnée entre plus de bras. Ces deux mesures ont au contraire cassé le taux d’activité global de la population.

    - Les inégalités sociales créent la pauvreté. Après redistribution, l’écart de revenu entre le décile supérieur et le décile le plus bas est de 4 en France, 5 en Allemagne, 6 au Royaume-Uni et 10 aux Etats-Unis. Ces trois derniers pays ont aujourd’hui un niveau de vie supérieur au nôtre. A force d’écraser fiscalement les plus productifs, on les a fait fuir ou découragé.

     
    Cela tape fort, dans le mille, et juste.