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crédit

  • Un État sans dette ?

    Bon : il se trouve encore des furieux pour affirmer très péremptoirement qu'un État ne peut faire faillite. J'en ai croisé quelques uns sur la Toile, et il y en a même un qui tient un blogue : un spécialiste de la mystification économique... Quand je pense que je viens de le faire référencer chez wikio...je suis trop bon. Nous sommes comme ça, nous autre libéraux : charitables.

    Mon bon mystificateur a un petit problème avec l'argent, et plus généralement, de la monnaie : il a du mal à comprendre que la monnaie n'est pas une création ex nihilo, comme il semble le croire, mais se trouve directement reliée à la création de richesses. Et la valeur de ces richesses n'est pas, évidemment, celle que les divers mystificateurs lui prêtent, mais bien le prix qu'autrui est prêt à les payer.

    Notre bon démystificateur définit donc ainsi la dette :

    une dette c’est de l’argent que l’on doit à quelqu’un. D’où vient cet argent ? Pour faire vite, ce sont les banques qui créent cet argent et qui le prêtent ensuite…moyennant intérêt.

    De l'argent que l'on doit à quelqu'un ou une personne morale, c'est tout à fait une évidence. En revanche, d'utiliser un raccourci pour dire que ce sont les banques qui créent cet argent et le prêtent ensuite moyennant intérêt, c'est une contre-vérité totale, révélateur de notre chasseur de koulaks vert de liquider ces salauds de banquiers. En réalité, c'est totalement faux : il n'existe pas d'emprunt sans une contrepartie. La plupart des emprunts servent à créer l'argent nécessaire pour acheter un service ou un bien.

    En revanche, il est vrai que le système des réserves fractionnaires fait qu'une partie de la création monétaire n'est pas garantie sur des fonds existants (ou du moins, à hauteur d'un pourcentage ridicule). En somme la banque prête de l'argent qu'elle n'a pas. Que la banque n'ait pas l'argent ne signifie pas que l'argent créé ne finisse pas par correspondre à de la création de richesses ; cela finira par se produire, mais avec un décalage dans le temps.

    Il ne faut pas croire que cette création ne soit pas encadrée : des règles prudentielles s'appliquent (Bâle2 entre autres) même si l'on peut en contester la légitimité. De plus, le mécanisme fonctionne dans les deux sens : une fois le crédit remboursé, une destruction monétaire est opérée à la mesure exacte de la création.

    Je sais que pas mal de penseurs libéraux de l'école autrichienne sont très hostiles à cette création-là, la jugeant dangereuse et estimant ainsi la masse monétaire et le crédit artificiellement gonflés. Mais d'un autre côté, la démultiplication du crédit ainsi générée relance plus facilement consommation et investissement.

    Cela dit, je trouve fort du collier de notre démystificateur de s'inspirer d'une analyse libérale des réserves fractionnaires pour en déduire que les États peuvent, eux, créer du crédit et surtout de la monnaie à tour de bras.  D'ailleurs, le texte auquel se réfère notre ami va tout à fait dans ce sens. Il est vrai qu'il est étonnant de voir des penseurs libéraux invoquer ainsi l'État afin de réguler les risques du crédit ; la diversité des établissements des crédits, cela me paraît une condition sine qua non de la liberté d'entreprendre car cela entretient une concurrence nécessaire. En effet, le crédit n'obéit pas seulement à la seule logique du profit : l'estimation que peut faire d'un profit futur un bureaucrate et un banquier n'est à mon avis pas la même. Si seuls les États ouvrent et ferment les robinets de crédit, nous entrerons dans une logique d'étatisation de planification du crédit. Je crois bien, quoi que dise Christian Gomez sur le sujet, que cela n'a pas empêché les États socialistes de s'endetter lourdement par le passé ; et pourtant, ils contrôlaient le crédit sur leur territoire.

    In fine, de toutes façons, ces économistes ne proposent pas de créer de la monnaie pour résorber les dettes, mais de laisser le robinet du crédit entre les seules mains de l'État. En réalité, leur principale préoccupation, c'est de couvrir la création de crédit par des réserves métalliques, c'est à dire, en somme, de revenir au système en vigueur avant 1971, afin d'éviter tout emballement du crédit et mieux réguler les économies nationales.

    Pour revenir à notre démystificateur, il constate la chose suivante :

    « le déficit budgétaire est sensiblement égal au montant des intérêts du service de la dette (en dehors des périodes de crise). La dette est donc en gros, créée par ces mêmes intérêts. La question qui peut alors venir à l’esprit est : pourquoi l’Etat doit il payer (des intérêts) pour quelque chose (la monnaie) qu’il pourrait créer lui-même ? »

    Observons l'interrogation purement rhétorique qui consiste à objecter que l'État pourrait se prêter de l'argent à lui-même. Bien évidemment, c'est de la création monétaire sans contrepartie si elle sert à financer ce que nous finançons à l'heure actuelle, c'est à dire les frais de fonctionnements de l'État. Même s'il s'agit d'investissements, encore faut-il espérer un retour sur cette création monétaire, je le suppose, via la fiscalité produite par les richesses facilitées par ces investissements.

    Quand Gomez écrit qu'un crédit sous contrôle de l'État serait à l'abri des humeurs animales des agents économiques (page 6 en pdf)et que par exemple un boom immobilier comme celui des dernières années aurait été impossible, je suis quelque peu sceptique : aux USA, actuellement, on invente les subprimes d'État, c'est à dire que pour assurer la pérennité des emprunts immobiliers, c'est l'État, désormais, qui garantit la valeur hypothécaire des biens immobiliers. On voit donc bien  qu'un État est tout à fait capable des mêmes erreurs qu'une banque, même s'il est évidemment plus solide.

    Écomystificateur est très sûr de lui et considère ses contradicteurs (enfin... au moins ma personne) comme des demeurés bêlant "la dette, la dette, la dette !". Qu'il comprenne bien que les auteurs du texte qu'il cite ne proposent nullement de faire fonctionner la planche à billets, comme il le suggère. D'ailleurs, Gomez, tout en recevant l'analyse des Autrichiens, est bien contraint d'admettre que son État vertueux serait contraint de créer de la monnaie, à son usage exclusif, certes, mais de créer de la monnaie ex nihilo tout de même (page9).

    Si j'ai bien compris, les banques centrales récupéreraient les derniers crédits des banques afin de financer la création monétaire nécessaire au remboursement des dettes publiques (p13 et 14). Cette opération n'aurait lieu qu'une seule fois, en principe.

    Le document de Gomez mérite évidemment le détour, et son calcul est séduisant en apparence. Il s'appuie toutefois sur l'impression que l'État est un prêteur infaillible. Ensuite, l'imbrication des économies entre elles est telle que la mise en place d'un tel système suppose un accord mondial, or, c'est là une arlésienne : on sait bien que le principal obstacle à la mise en place d'une régulation à l'échelle mondiale, c'est la difficulté à s'accorder entre des États très différents. Il faut donc raisonner sur l'existant, même si on peut tenter de promouvoir des solutions séduisantes au moins intellectuellement.

    In fine, pour bien comprendre les tenants et les aboutissants du débat, il faut lire évidemment le document de Gomez, l'éco-mystificateur a raison sur ce point, et, pas seulement le résumé, bien trop insuffisant pour comprendre la logique du raisonnement.

    On pourrait admettre que la solution proposée par Gomez résorbe à terme la dette, mais elle ne l'enlève pas à l'heure actuelle, et si notre bon mystificateur s'appuie sur la thèse de Gomez pour lancer une telle assertion, il n'a rien compris à la thèse.

    In fine, c'est assez étonnant de voir l'auteur invoquer les Mânes de tant de penseurs libéraux, parce que ces derniers ont estimé que le seul secteur qui ne pouvait et ne devait être libre était celui de la monnaie, privilège des États, sauf à risquer de graves déséquilibres. Peut-être est-ce ma méfiance instinctive de l'État qui me pousse, pour le compte, à me montrer plus libéral que les libéraux eux-mêmes. Peut-être, aussi, qu'après un examen plus attentif, je me laisserai finalement convaincre par cette solution. En fait, je pense que je vais en reprendre la lecture avec une attention renouvelée et aller jeter un oeil du côté de la critique.

     

     

     

     


  • Crédit P2P, le cauchemar des banques

    On trouve de tout dans le journal de rue l'Itinérant. Vendu à Paris par des SDF, c'est la seule presse que j'achète très régulièrement (quasiment chaque semaine) avec mon bon vieux Canard. On y trouve toujours un billet particulier, un thème original, souvent à contre-temps, mais toujours passionnant. Dans son dernier numéro (788), l'hebdomadaire s'est intéressé à une forme très particulière de micro-crédit : le crédit peer to peer. Il existe de longue date, sous une forme très rudimentaire dans de nombreux pays, et consiste tout simplement à emprunter une somme d'argent à sa famille ou à son voisin en cas de nécessité. Sauf que rien qu'en France, cette pratique brasse tout de même pas loin de deux milliards d'euros par an ! Du coup, cela a donné des idées à pas mal de petits malins : des plate-formes de prêts entre particuliers apparaissent.

    Le taux de l'usure est à l'heure actuelle de 21.43%. Aucun taux d'intérêt ne peut lui être supérieur. 14.79% , c'est le taux moyen constaté en France pour un crédit de plus de 1524 euros , et de 16.09% pour un montant inférieur. Ne vous laissez pas emberlificoter par les annonces mirobolantes, c'est du flan, ça ne concerne qu'une minorité et quelques cas précis. La réalité moyenne, ce sont les taux moyens constatés.

    Imaginez maintenant que les particuliers qui touchent 1.25% avec leur livret A commencent à penser que ce n'est guère rémunérateur, comme taux : eh bien ils pourraient avoir l'idée de déposer des fonds sur une plate-forme de particuliers, et même, plus fûté encore, de mutualiser les risques en constituant des fonds de particulier. Voyons, si les banques font du 14 à 16%, les particuliers peuvent se contenter de 8 à 10%. En tout cas, moi, oui : à 8%, je suis prêteur d'une partie de mes économies à plusieurs acteurs particuliers (je ne parle pas de fonds spéculatifs, mais bien d'individus).

    Il y en a qui sont dans les starting-blocks pour permettre ces beaux scénarii. Caramba ! Raté, la loi française ne permet pas de telles ententes. Il ne reste plus qu'à convaincre des parlementaires de se lancer dans la bataille et de produire un projet de loi. Évidemment, les banques vont ruer dans les brancards...

  • Banques, trop de crédit ou pas assez ?

    Ce que j'aime bien, c'est que l'opinion publique a le sens de l'humour : on reproche aux banques d'avoir prêté trop facilement (notamment avec les fameuses subprimes) et d'avoir déclenché la crise. Mais voilà, les banques sont devenues méfiantes, et du coup, aujourd'hui, elles ne prêtent plus facilement. Et devinez ce qu'on leur reproche ? De ne pas prêter assez... Il y a des jours comme ça, j'vous jure...

  • Les Sénateurs centristes veulent la peau de l'abus de revolving !

    On a parfois l'impression que les élus centristes prêchent dans le désert. Cela fait un moment qu'ils font des propositions pour lutter contre le surendettement, en fait, deux gouvernements mais en vain : ni celui de Villepin en 2006 ni celui de Fillon en 2008 ne veulent y prêter attention.

    C'est pourtant clair : les banques ne devraient pas pouvoir cumuler les crédits à la consommation (que l'on appelle crédits revolving). Ce sont des crédits courts à des taux d'intérêt monstrueux (17 à 21%). La spirale du surendettement commence souvent par là. Et de fait, une enquête de la Banque de France datant de février 2002 constate que 80% des dossiers de surendettement comportent plus de quatre revolving. Tiens, ça me fait encore penser à mes nexi (souvenez-vous du centurion romain de Tite-Live...), cette histoire-là...

    Du coup, Michel Mercier (MoDem), Muguette Dini (centriste sans appartenance) et Claude Biwer (Nouveau Centre) au nom de l'Union Centriste ont proposé un article de loi qui contient en gros les dispositions suivantes :

    Afin de responsabiliser les établissements de crédit, il apparaît urgent d'exiger qu'ils étudient la situation financière des souscripteurs. Les établissements de crédit doivent connaître avec précision la solvabilité des demandeurs de crédits à la consommation avant de répondre positivement à leur demande.

    S'il apparaît que l'établissement de crédit n'a pas procédé à cette vérification, il serait dès lors responsable de la non-solvabilité éventuelle du souscripteur et ne pourrait donc pas engager de procédures de recouvrement, sauf si le souscripteur a délibérément fourni de fausses informations le concernant (article 1er).

    Il semble dès lors nécessaire de rendre obligatoire un délai d'agrément de sept jours, tant pour l'établissement de crédit que pour l'emprunteur, afin que la banque ait le temps de procéder à l'étude de la solvabilité de l'emprunteur (articles 2 et 3).

    Il convient donc de donner les moyens aux établissements de s'informer de la situation d'endettement personnelle des emprunteurs. À cette fin, la présente proposition de loi établit la création d'un répertoire des crédits aux particuliers pour des besoins non professionnels (article 4).

    Ce répertoire offrirait une double protection aux consommateurs : il serait géré par la seule Banque de France à l'exclusion de tout organisme privé, bancaire ou non, et les établissements de crédit n'auraient accès aux informations que dans l'hypothèse où l'emprunteur potentiel les y aurait explicitement autorisés, interdisant ainsi tout usage commercial de ce répertoire. La mise en place de ce répertoire serait assurée par une contribution des établissements de crédit.

    Il est imposé aux établissements de crédit de faire figurer sur leurs publicités un avertissement visant à alerter les emprunteurs potentiels des risques de surendettement (article 5).

    Enfin, l'article 6 impose les mêmes règles à l'offre préalable de crédit.

    Bon. Il ne reste plus qu'à voir ce que le Sénat va en faire. Pour moi, cela me paraît cousu du fil du bon sens, et je me demande par quel prodigieux hasard (étonnant, non ?)  cette proposition ne parvient pas à être adoptée, depuis le temps...

    Tiens si jamais LOmiG passe par là, à titre de curiosité, lui qui est libéral pur sucre, lui semble-t-il que la conclusion de crédits revolving relève de la liberté contractuelle ? Ce n'est pas directement lié avec le thème de l'article en lien, mais avec sa représentation de la liberté contractuelle (lire notamment ses réponses à ses contradicteurs dans les commentaires).

  • Crise : la danse des Yaka Faukon

    Connaissez-vous la Danse des Yaka Faukon ? C'est une sorte de chant magique accompagné de force hochements de menton que l'on entonne en temps de crise. Je me suis laissé entendre dire que la Danse provient d'un rituel magique entonné par la tribu des Yaka Faukon elle-même.

    Il suffit de marteler le sol à pas lourds en beuglant Yaka faukon !, yaka faukon !, yaka faukon !, et comme par miracle, tous les problèmes trouvent une solution. Parfois, il peut être utile d'ajouter un verset au yaka faukon, qui est l'essentiel de la formule pour que la formule opère.

    Tenez, pour la crise récente, par exemple : ben yaka réguler. Faukon prête de l'argent aux entreprises, aussi. Faukon taxe également les super-profits. Yaka relancer l'économie. Faukon moralise le système financier. Pas mal, comme mantra, non ?

    C'est marrant, tout de même, considérons les banques : on leur reproche d'avoir provoqué la crise pour avoir prêté trop facilement de l'argent. Eh bien devinez ce qu'on leur reproche, aujourd'hui ? de prolonger la crise en ne prêtant pas suffisamment d'argent aux entreprises et aux particuliers ! C'est fort, non ?

    L'avantage du Yaka Faukon, comme rituel, c'est qu'on n'a pas à se soucier d'une quelconque forme de logique ou de raison. La seule chose qui compte, c'est de réciter le mantra dans le bon ordre, et hop, ça marche. Et même si ça ne marche pas, ce n'est pas grave, on peut décliner le yaka faukon dans toutes les langues et sur n'importe quel sujet. Il suffira simplement d'adpater le rite et la formule.

    C'est simple, non ? Yaka l'faire. Faukon l'fasse, même...

  • Jean Lassalle s'oppose aux agios pour les TPE

    Lassalle.jpgEt toc : encore une intervention cousue du bon sens (question écrite n°31893) de la part de Jean Lassalle, député MoDem.

    M. Jean Lassalle attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur le souhait du syndicat des indépendants (SDI) de voir faciliter les conditions d'accès au crédit pour les très petites entreprises (TPE). En effet, ce syndicat estime qu'il est plus intéressant aujourd'hui pour le système bancaire de restreindre l'accès au crédit lors d'un besoin de financement d'une entreprises (en bénéficiant des frais liés au dépassement d'un découvert) que d'accorder un crédit dont les intérêts rapporteront nettement moins. Il s'agit ici d'un problème majeur pour les très petites entreprises. À l'heure où se déroule l'examen de la loi de modernisation de l'économie visant notamment à fluidifier l'ensemble des tuyaux de l'économie par des circuits de financement facilités, il lui demande de bien vouloir lui faire connaître son sentiment sur ce dossier et quelle mesure elle compte prendre pour répondre à l'attente de ce syndicat.

  • Quand Sarkozy aimait les subprimes

    Trouvée, cette perle sur Carnets de nuit (merci à José Ferré) ; il s'agit du candidat Sarkozy s'exprimant sur le crédit et le logement lors de la campagne présidentielle de 2007 :

    “Les ménages français sont aujourd’hui les moins endettés d’Europe. Or, une économie qui ne s’endette pas suffisamment, c’est une économie qui ne croit pas en l’avenir, qui doute de ses atouts, qui a peur du lendemain. C’est pour cette raison que je souhaite développer le crédit hypothécaire pour les ménages et que l’Étal intervienne pour garantir l’accès au crédit des personnes malades.

    “Je propose que ceux qui ont des rémunérations modestes puissent garantir leur emprunt par la valeur de leur logement.

    “Il faut réformer le crédit hypothécaire. Si le recours à l’hypothèque était plus facile, les banques se focaliseraient moins sur la capacité personnelle de remboursement de l’emprunteur et plus sur la valeur du bien hypothéqué. Ceci profiterait alors directement à tous ceux dont les revenus fluctuent, comme les intérimaires et de nombreux indépendants.

    Remarquable, non ? Je n'arrive même pas à commenter...

  • Les banques n'ont plus de fric !

    Je viens de lire un excellent article sur le non moins excellent site Telos, de Marco Onado, professeur d'économie financière à l'université Bocconi de Milan. Il l'a intitulé Achille et la Tortue. Le titre n'est pas innocent pour qui connaît l'école philosophique grecque antique des Eléates, et l'un de ses deux maîtres à penser, Zénon d'Elée. Zénon essaie d'établir l'existence de l'Être mais veut montrer que nos sens ne peuvent en rendre compte car ils sont mouvants, et donc, par nature, reliés au non-Être. Il invente donc plusieurs paradoxes, dont celui d'Achille et la tortue pour montrer que les sens et la raison divergent, ce qui prouve bien que les sens ne sont pas fiables.

    Dans le paradoxe d'Achille et de la tortue, le héros grec Achille dispute une course de vitesse avec une tortue. Grand seigneur, il laisse 100 mètres d'avance à la brave bête. Mais, déclare Zénon, Achille , réputé pour sa vitesse (Homère lui accole l'épithète de "aux pieds rapides"), ne rejoint jamais la tortue. En effet, chaque fois qu'Achille a comblé son retard, la tortue a entre-temps avancé. Et chaque fois qu'il comble son retard encore, entre-temps, la tortue avance encore. Certes, Achille se rapproche à chaque fois, mais il ne rattrape jamais le brave bestiau à carapace. Quelques siècles plus tard, il y aura un lièvre qui se fera avoir aussi...

    Ce que Marco Onado explique, c'est que dans le temps où le crédit explosait, les fonds propres des banque diminuaient toujours plus. Rien de plus logique : plus le crédit augmente, plus les capitaux bancaires diminuent, puisqu'ils sont engagés.

    Pour faire face à la crise des liquidités sur le marché, en raison de la crise du crédit, les banques cherchent à se recapitaliser en vendant des actifs. Le problème, c'est qu'entre le fait qu'un certain nombre de ces actifs sont douteux (subprimes) et que toutes les banques poussent dans le même sens, du coup, les capitaux disponibles se font rares.

    Et comme les actifs que vendent les banques se déprécient toujours plus, les banques ne parviennent pas à se recapitaliser suffisamment pour redonner confiance au marché. Par suite, la valeur des actifs continue de se détériorer, et Achille court en vain derrière la tortue...

    En fait, la seule issue, c'est la vente simultanée des titres surnuméraires, et l'émission massive d'actions pour accroître d'un coup et significativement le capital de chaque banque. Il n'y a apparemment pas d'autre issue pour fluidifier le marché des capitaux et relancer, de ce fait, l'investissement.

    NDLR : au fait, chers lecteurs, j'ai la joie et la fierté de pouvoir vous annoncer que cette note est très exactement la 1000ème publiée sur ce blog depuis sa création, un jour de mai 2006 :-)