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euthanasie

  • Euthanasie pour les mineurs ?

    Il y a à l'heure actuelle en Belgique un débat fondamental qui fait rage, même s'il ne risque pas de faire irruption tout de suite en France, pays bien trop occupé à panser les plaies du débat précédent...

    Des parlementaires ont proposé d'étendre le droit à l'euthanasie aux mineurs. L'association de deux mots aux portées sémantiques aussi antithétiques ne manque évidemment pas de nous heurter. L'enfance devrait avoir avec la vie, pas avec la mort.

    Dans le principe, je tends à penser que les enfants devraient pouvoir disposer des mêmes possibilités que les adultes quand leur vie et leurs souffrances deviennent intolérables.

    Mais ce qui est très problématique, ce sont plusieurs intitulés de la loi en discussion. Notamment, le texte considère possible l'euthanasie de bébés prématurés après 24 à 26 semaines en invoquant des complications graves.

    Or, rien dans le projet ne vient définir ce que l'on appelle des complications graves. Un certain nombre de handicaps pourraient être considérés comme des complications graves. Ce que je vois, tout comme les médecins, c'est que le texte rend possible la mise à mort de bébés à termes, tout comme les médecins qui ont écrit une tribune dans le quotidien belge lalibre.

    Nous ne sommes pas loin de l'eugénisme. Très dangereusement proche en fait. Je suis étonné de l'absence de réactions d'Isabelle sur un tel débat, car, pour ce que j'en comprends, ce texte permet l'élimination d'enfants en raison de leur handicap. Décider de mener une grossesse à son terme quand on sait que son enfant souffrira d'un handicap assez lourd, c'est quelque chose de difficile. Je ne jetterai certainement pas la pierre à ceux et celles qui renoncent. Mais je ne saurai pour autant évacuer d'un revers de la main les objections de Corto à ce sujet. J'ai lu le court commentaire de Jegoun sur l'un de ses blogues sur ce sujet. Il a tort de renvoyer à un délire le propos de Corto. Je ne sais pas si "éradication" est le terme qui convient, mais le fait est bien qu'en proposant un dépistage génétique, il y a une volonté, en effet, de neutraliser à la source un handicap. Entre le texte belge actuel et le dépistage de la trisomie avec ses conséquences, la distance n'est pas si longue. 

    Comprenons-nous : je ne considère pas ce dépistage comme une régression, mais j'invite à la plus grande prudence en s'engageant sur un telle voie, facilement pavée de bonnes intentions. Or, la sagesse populaire sait où conduisent de tels chemins...

    Je me demande quelle direction prend ce pays. Si ce sont les mineurs qui font l'objet d'intenses débats à l'heure actuelle, la prochaine commission devrait aborder le cas  des personnes démentes.

    L'euthanasie est une pente glissante : elle doit demeurer un choix. Il y a un texte désormais en discussion en France sur ce sujet. Veillons à ce qu'elle soit une liberté, pas un meurtre.

  • Vivre et...mourir libre !

    Si je ne saurais valider l'injonction ignoble de Taro Aso, le vice-premier ministre japonais, invitant les Anciens à mourir plus vite pour ne pas coûter plus cher à l'économie nippone, en revanche, je suis fondamentalement convaincu que mourir est un droit qui vaut bien celui de vivre.

    Taddeï a ouvert le débat sur son site newsring et j'ai pris le temps de parcourir les différentes réponses.

    Je me retrouve en grande partie dans l'avis exprimé par Armand Stroh, l'un des contributeurs. 

    On doit pouvoir avoir le droit de mourir, mais sans aucune pression extérieure. Voilà qui disqualifie Taro Aso d'office.

    Je pense, malgré tout, que cette liberté a vocation à être assorti de quelques contraintes et limites. Elle ne devrait pas être aidée à un âge inférieur à l'espérance de vie en bonne santé sauf maladie grave. 

    Évidemment, un tel choix risque de se heurter à de sérieux problèmes de définition car il sera difficile, au moins du point de vue de la psychiatrie, de faire la distinction entre suicide et euthanasie. On peut toujours me répondre que le premier est le fruit d'une dépression majeure, cela ne sera pas suffisant car on pourrait postuler que c'est le cas pour toute volonté de se donner la mort.

    In fine, j'aime la propositon d'Yvan Bachaud suggérant l'accès libre à une potion létale assurant une mot douce pour tout individu qui juge un jour que la vie ne vaut plus d'être vécue.

  • Euthanasie : liberté ou suicide ?

    J'arrive un peu après la bataille à propos du débat sur l'euthanasie, mais j'avoue que c'est un thème qui me travaille.

    Je m'étais déjà prononcé en faveur d'une euthansaie contrôlée ; aujourd'hui, je m'interroge sur le lien, sans doute ténu, qui associe l'euthanasie active et la liberté. Plus exactement, je me pose la question suivante : se donner la mort est-il une expression de nos droits naturels ?

    En posant cette question, je marche sur un champ de mines : le fil est très ténu entre le suicide et l'euthanasie. J'ai toujours considéré, au cours de mon existence, que le suicide coïncidait avec l'anéantissement de tout espoir. Or, quand je m'interroge moi-même, et que je pèse la balance de mes maux à venir, puisqu'ils sont sans doute inévitables, je tends à penser que la somme des contrariétés et des souffrances, quand elle devient trop importante, l'emporte sur le désir de vivre. 

    Le désir de vivre n'est pas seulement l'émanation de notre instinct de survie mais aussi l'espoir de jours meilleurs : c'est cela surtout qui nous rattache à l'existence me semble-t-il.

    Notre tolérance aux afflictions de toute sorte est très variable d'un individu à l'autre. L'émotivité de chaque individu, j'imagine, accentue dans un sens ou dans l'autre nos espoirs.

    Je ne sais si nous avons peur de la mort ou peur de ne plus vivre. Quand j'envisage pour mes vieux jours l'euthanasie plutôt que la décrépitude sans fin, j'ai le sentiment qu'elle ne sera pas possible tant que l'existence me sera tolérable. Et, tant que j'ai envie de vivre, j'ai peur de la mort. En fait, je pense bien que j'ai peur de ne plus vivre.

    J'envie ceux qui sont portés par leur foi : j'ai eu une grande-tante et une grand-mère très croyantes, impliquées dans la charité et la solidarité. Ce sont elles qui m'ont vraiment instruit en religion. Quand j'étais petit, je croyais qu'elles étaient des saintes, et une fois, je me souviens d'avoir posé très sérieusement la question à l'une d'entre elles.

    J'envie également ceux qui sont capables de faire du suc de l'existence une force intérieure profonde. Quand je songe à la mort, à ma mort, parfois, j'ai constamment présents à l'esprit les derniers mots qu'Épicure adressa à ses amis en mourant. La lettre à Idoménée, rapportée par Cicéron, en fait état : parce qu'il était entouré de ses amis et proches, en dépit de ses souffrances, il affirmait partir dans la joie en se souvenant de tous les bons moments qu'il avait passé avec eux.

    Partir dans la joie. Moi, je me représente la mort comme une affreuse agonie. Je n'imagine pas d'autres remèdes qu'une euthanasie douce et rapide pour s'en débarasser au plus vite.

    Et comme je n'ai pas la foi, je ne m'imagine pas de vie meilleure ailleurs. Pour moi, mon corps ne redeviendra que poussière et rien d'autre.

    Je n'imagine pas de mort volontaire sans submersion sous l'angoisse (j'exclus de ce champ, toutefois, le sacrifice). L'angoisse me paraît l'un des pires maux humains dans le domaine de l'esprit.

    Toutefois, si un jour je voulais en finir avec l'angoisse, j'estimerais profondément attentatoire à ma liberté et à mes droits que l'on m'en empêche.

    Je reconnais toutefois qu'une telle affirmation est gênante car elle légitime de fait le suicide. Je pense néanmoins que le suicide n'est pas une issue normale pour de jeunes gens ou des hommes et des femmes dans la force de l'âge et en bonne santé. Cette observation seule me semble suffisante pour tracer la nécessaire frontière entre l'euthanasie et le suicide.

  • Tuer des enfants "non-conformes" à la naissance ?

    C'est en passant sur le blogue de Corto puis celui de Causeur que j'ai mis la main sur cet article du Journal of Medical Ethics et là, je me suis demandé l'espace de quelques minutes, après l'avoir lu, si je n'étais pas victime d'hallucinations.

    Il s'agit pourtant d'une revue très sérieuse et de deux chercheurs italiens éminents dans leur domaine. Tenez-vous bien : sous prétexte que des enfants atteints de maladies rares et vraisemblablement très incapacitantes seraient un poids émotionnel pour leur famille et une charge économique pour l'État nos deux frappadingos suggèrent ni plus ni moins que de les liquider. Ils appellent cela l'avortement post-natal. Ces très grands "philosophes" assortissent leur réflexion d'arguments "bien sentis" de ce type, par exemple :

    - on devrait pouvoir tuer un bébé pour exactement les mêmes raisons qui font que l'on avorte

    - le bébé qui vient de naître n'a pas plus d'existence ni de "droit" à la vie que le foetus.

    L'article est en ligne depuis février 2012 mais il a dû passer entre les mailles du filet médiatique. Seules des sociétés ultra-totalitaires (et encore, pas toutes) s'en sont pris de cette manière à des enfants.

    Nos amis Grecs sdu site NewNow ont également levé un autre lièvre : au Canada, l'Association des Médecins vient de voter une résolution faisant valoir que le bébé ne dispose de la nature humaine et donc des droits qui y sont atenants qu'après sa naissance :

    Στον Καναδά, σύμφωνα με δημοσίευμα του lifesitenews, η Ένωση Καναδών Ιατρών ανακοίνωσε ψήφισμα που συμφωνεί με τον Ποινικό Κώδικα της χώρας το οποίο αναφέρει ότι ένα μωρό έχει ανθρώπινη υπόσταση και φύση μόνο μετά τη γέννηση του

    Le monde dans lequel nous vivons commence à puer sérieusement. Je pense que l'on devrait rendre obligatoire l'étude du grec ancien à tous ceux qui entreprennent des études de médecine avec comme première traduction le Serment d'Hippocrate...

  • Euthanasie, prises de position des partis politiques

    Tiens, je me suis dit que cela pouvait être utile de faire un tour d'horizon des positions officiellement exprimées par les différents partis politiques à propos de l'euthanasie. Pour ma part, je distingue une différence de degré notable entre la loi Léonetti de 2005 et l'amendement récent proposé au Sénat. Dans le premier cas, on a le droit de ne pas continuer à vivre. Dans le second, celui de mourir...A priori, je fais partie de ceux qui aimeraient qu'on leur laisse le choix, mais j'admets qu'il n'est pas aisé de tenir une position tranchée sur un sujet aussi délicat.

    Le MoDem a réagi officiellement par la voix de Yann Wehrling : le parti de François Bayrou est d'avis d'en rester à la loi Léonetti de 2005 qui lui paraît un bon point d'équilibre.

    Il y a certainement des opinions divergentes sur le sujet à l'UMP, mais, in fine, le Sénat a retiré l'article qui légalisait de fait l'euthanasie si bien qu'on peut considérer que l'UMP est également favorable au statu quo.

    Parti de Gauche, Verts, PS, PCF, MRG sont tous favorables à une loi autorisant l'euthanasie. Toutefois, il y a des voix discordantes, à commencer par celle de Ségolène Royal qui émet les plus grandes réserves sur un tel choix.

    Le FN est contre l'euthanasie mais également contre l'acharnement thérapeutique.

    Difficile de savoir ce que pensent les petits partis. Alternative Libérale s'est prononcée très clairement en faveur de l'euthanasie, silence radio du côté du Nouveau Centre et d'Alliance Centriste mais pour les seconds, Muguette Dini, sénatrice de ce parti, est hostile à l'amendement. Quant au Parti radical valoisien de Borloo, je ne l'ai jamais entendu exprimer une position autonome. Du côté de l'AEI (écologistes indépendants) silence radio également.

  • Euthanasie, antithèse...

    Plusieurs de mes lecteurs ont vécu comme une provocation mes prises de position en faveur d'une euthanasie contrôlée mercredi dernier. Koz s'est même déplacé pour me signifier à quel point il était outré de la reductio ad absurdum à laquelle je me complaisais à ramener une part de son argumentation. En fait, je crois surtout que c'est le "réacosphérique" du titre qui l'a surtout vexé (juste un petit appeau de rien du tout, quoi...). Il n'en reste pas moins qu'un sujet aussi délicat ne souffre à mon avis pas de positions tranchées et mérite, dans tous les cas, la controverse. Do, qui lit, me semble-t-il, assez souvent mon blog, a réagi vivement, avec une argumentation qui mérite amplement le détour. Je reproduis donc son commentaire ici...

    Le problème est que ça se fait ailleurs et que les dérives sont bien trop tentantes pour résister à une loi, qui de toutes façons finit très vite par dériver avec elles!
    En Hollande, il y a 50% d'euthanasies qui se passent sans l'avis du médecin (et donc consentement de la personne) alors que c'est légal: ça veut dire que quand c'est légal, c'est considéré comme acquis, et même si la personne concernée n'est pas d'accord; il y a assez de gens concernés par sa mort qui, eux, sont d'accord, parce que tout simplement, c'est lourd, une personne en fin de vie, et au quotidien, su la loi ne la défend pas, ses proches ne pourront ou ne voudront pas toujours le faire.
    Et je ne parle pas de toute cette frange de personne âgées, (qui a été étudiée, je ne le dis pas par imagination), qui accepte de se faire euthanasier à cause de la pression (active ou passive) de son entourage: coût de la maison de retraite, coût des soins, héritage, coût des retraites pour la collectivité, etc...

    si on parle de l'avortement, ce n'est pas seulement pour parler du respect de la vie, mais aussi de la façon dont la loi et la pratique dérivent quand on ouvre des brèches sur la protection des plus faibles: au début, on nous a vendu l'avortement pour les filles de 15 ans qui s'étaient fait violer par 15 types! Alors évidemment, c'est tellement contre nature que les gens ont été d'accord! mais aujourd'hui, on a 250 000 avortements pour 750 000 naissances (environ), et des militants trouvent que ce n'est pas encore assez, et militent pour que ce soit inscrit aux droits de l'homme et qu'on fasse des campagnes de promotion!
    Or une naissance, c'est normalement une joie.
    Qu'en sera-t-il pour l'euthanasie? 

    Peut-on être assez fous pour croire que nous empêcherons l'état de faire pression sur les familles pour qu'elles favorisent ce mode de fin de vie, qui économiserait des sommes astronomiques en retraites et en soins hospitaliers?! QUe ferez cvous quand il ne remboursera plus la maison de retraite ni les soins après un certain âge ou dans certaines affections comme la démence ou les cancers: aurez vous le choix, individuellement? et le vieillard, lui, aura-t-il le choix, face à ses enfants au bord du gouffre financier?

    Science fiction? eh bien non, c'est ce qui arrive aux parents d'enfants handicapés : depuis qu'on leur propose de les avorter, on a supprimé une grande partie des aides et des centres qui les hébergeaient, sans compter la recherche au sujet de leur maladie (0€ de recherche publique en France pour la trisomie 21, première cause de retard mental...) et c'est devenu extrêmement lourd pour les parents et leurs autres enfants, qui ont tout à leur charge.. c'est comme ça. On avait pas dit ça dans la loi pour l'avortement des enfants handicapés, mais la réalité c'est est celle là, c'est pas les belles phrases des philosophes de comptoir qui s'agitent sur les cas des autres avec leurs peurs à eux, mais sans jamais être allés visiter un centre de soins palliatifs, bien souvent.

  • Euthanasie et cris d'orfraie réacosphériques

    Tiens, c'est mon affreux libéral de service qui va faire une drôle de tronche en lisant mon billet : le voilà qui soupçonne ces vieux barbons de sénateurs de vouloir buter les vieux parce qu'ils s'apprêtent à légaliser l'euthanasie. Et en plus il prend à témoin la cathosphère.

    Je n'ai jamais eu cette sorte d'adoration assez étrange des conservateurs et des chrétiens pour la vie en tant que telle (pas qu'eux d'ailleurs : à gauche, l'idée chrétienne que toute vie doit être préservée à fait aussi son chemin chez les laïcs). La vie, à mon sens, est d'abord ce que l'on décide d'en faire. Dans l'Antiquité, les platoniciens, les stoïciens, les épicuriens n'hésitaient pas à appeler à devancer la mort et ne la craignaient pas. 

    Autant de terrifiants soupçons m'incitent à la plus grande réserve lorsque l'on évoque l'avortement, car on ne peut en aucun cas parler de choix pour une vie qui éclot autant, à l'inverse, pour une existence qui s'achève, la pensée consciente me paraît capable de fixer elle-même quel doit être son terme.

    Je crois qu'il faut bien distinguer l'euthanasie du suicide consécutif à une pathologie mentale, qu'elle soit permanente ou temporaire. Koz craint qu'une loi sur l'euthanasie marque la fin du développement des soins palliatifs. Je ne le crois pas. Je crois surtout que l'euthanasie en marque la limite.

    Sophisme que celui d'Hashtable et Koz qui associent peine de mort et euthanasie. L'euthanasie n'est pas une peine, c'est une délivrance. Rien à voir avec une peine judiciaire. Hashtable affirme que les lois actuelles sont suffisantes, et de citer la loi 22 avril 2005 du code de la santé publique. Dans la loi actuelle, qui juge de la pertinence ou non de soins curatifs ? Le médecin et exclusivement le médecin. Allons, mon affreux libéral favori : alors ? On n'est plus assez grand pour savoir ce que l'on peut faire ou non de son existence ? On ne parle pas d'une euthanasie de confort, en la circonstance. Le sujet est grave et sérieux. 

    Toute personne capable, majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable, lui infligeant une souffrance physique ou psychique, qui ne peut être apaisée ou qu'elle juge insupportable peut demander à bénéficier d'une assistance médicalisée permettant par un acte délibéré une mort rapide et sans douleur.

    Ouf, on demande enfin l'avis du mourant en phase terminale, puisque l'amendement en appelle au jugement de ce dernier. On a enfin le droit de dire "j'ai mal" sans qu'un bon praticien ne vienne répliquer "mais non mais non, ne faites pas l'enfant, mon ami, voyons...". Ce n'est pas un choix de bien-portants pour les mourants, mais au contraire celui des mourants à la place des bien-portants. Seul un ressuscité pourrait juger, et encore, de la pertinence ou non de cette demande. Voilà qui clôt ce point.

    Koz pense qu'en légalisant l'euthanasie, note société rompt avec l'interdit de donner la mort : faux ! c'est l'individu qui fait ce choix, pas la société à sa place (comme dans la peine de mort ou l'avortement, par exemple). Il assimile l'euthanasie à un jugement de valeur sur la qualité de l'existence d'autrui. Que vient faire cette réflexion sur la dignité dans ce débat ? Il ne s'agit pas de dignité mais de souffrance, ne jouons pas avec les mots, svp.

    L'euthanasie n'est pas une démission collective : elle marque les limites de notre savoir médical et le choix désespéré mais raisonné, pour autant qu'il puisse l'être, de l'individu au terme de son existence. Et ce n'est pas le fruit d'une société matérialiste et égoïste mais au contraire qui se penche sur la souffrance de l'un des siens.

    La mort ne doit pas être hâtée, se récrie Koz, c'est un moment qui doit être vécu. Ah bon. Ah, c'est mieux d'agoniser le plus longtemps possible, alors ? On peut aussi s'immoler au chalumeau pour faire durer le plaisir.

    Je donne en revanche complètement quitus à Koz de s'inquiéter de dérives. L'extension envisagée en mars 2008 aux enfants déments est 200% inadmissible. L'euthanasie doit impérativement finir là où s'arrête le libre choix de l'individu. Ce devrait être un préambule clair et affirmé.

    A nous d'être vigilants. Il est vrai que pour ma part, je me suis toujours opposé à la peine de mort en raison des graves et lourdes dérives auxquelles elle a donné lieu quand elle a été appliquée, y compris en démocratie. Si jamais il s'avérait que l'euthanasie aboutisse par la suite à des dérives semblables (mises à mort sans consentement éclairé des individus) bien entendu, ma position sur le sujet évoluerait radicalement. De tous les arguments que donne Koz, c'est d'ailleurs le seul qui me semble véritablement recevable.

    Je juge d'ailleurs très inquiétant et regrettable que ce soit un parti libéral et démocrate, l'OVLD (Parti libéral et démocrate flamand), membre de l'ADLE, qui promeuve cette extension par la voix de Bart Tommelein.

    Cette proposition me paraît très grave et me paraît aux antipodes de la philosophie libérale qui place l'individu, sa responsabilité et ses choix au coeur de l'action humaine. Au minimum, elle exigerait de demander l'avis de l'enfant (l'âge de décision est évalué à 7 ans en Belgique). Mais je peine à déterminer comment le consentement d'un enfant pourrait être éclairé. Je crois toutefois comprendre que l'intention de Bart Tommelein n'était pas foncièrement mauvaise, puisqu'il s'agissait de prendre en considération la souffrance de l'enfant.

    Ce qui m'a révolté, in fine, c'est la mention de la démence qui me semble 100% hors de propos dans de telles circonstances. 

    Enfin, concernant l'enfance, j'ai quelque peine à associer à ce qu'elle représente l'idée de fin de vie. L'enfance, c'est la vie qui commence. On ne peut présager de son issue.

     

  • Voir mourir un bébé ?

    J'ai appris que les parents d'un enfant lourdement handicapé avaient obtenu la condamnation de l'hôpital d'Orange pour cause d'acharnement thérapeutique à la naissance de l'enfant. Je comprends la peine de cette famille dont l'enfant souffre de maux multiples : il est tétraplégique, ne s'exprime que par râles, peine à déglutir et est sujet à de fréquentes crises d'épilepsie. Il souffre vraisemblablement de lourds handicaps mentaux. Cet enfant est né en état de mort apparente, et, après 20 minutes d'efforts, le gynécologue, à sa naissance, a annoncé sa mort aux parents. Mais le personnel hospitalier n'a pas abandonné, et, à force d'efforts, est parvenu à faire repartir le coeur. Le problème, c'est que le cerveau n'a pas été alimenté en sang pendant près de 30 minutes.

    J'avoue que je suis très troublé par cette condamnation : je comprends le concept d'acharnement thérapeutique quand on évoque le cas d'individus gravement malades et/ou en fin de vie. Mais j'ai beaucoup plus de mal à accepter cette terminologie quand il s'agit d'un bébé qui vient de naître et qu'une équipe fait des efforts désespérés pour le sauver. Le métier des services de réanimation, c'est de réanimer : va-t-on assister à des procès contre les hôpitaux qui n'ont pas essayé de réanimer les nouveaux-nés, puis, à l'inverse, contre ceux qui l'ont fait ?

    Peut-on reprocher, in fine, à une équipe dont le métier est de donner la vie, d'admettre de voir mourir un bébé sans intervenir ? Le tribunal administratif de Nîmes a eu la main aussi lourde que son jugement a été léger.  J'estime, au nom de la solidarité, que l'État doit tout faire pour aider les familles dont les enfants sont très lourdement handicapés, mais je ne juge pas juste que l'on reproche à un hôpital d'avoir fait de son mieux, surtout en l'absence d'une loi claire sur le sujet.

    Il naît actuellement 10 000 grands prématurés par an, tous susceptibles de développer des séquelles, qui seront d'autant plus graves que le terme aura été échu bien avant l'heure.

    Il conviendrait, je le crois, de fixer une loi-cadre afin de déterminer ce que les professionnels peuvent faire ou non. J'espère que ce jugement ne fera pas jurisprudence et que l'on n'en tirera pas une généralité. L'hôpital a agi sagement en choisissant de ne pas faire appel. Aucun second jugement ne viendra confirmer le premier, au risque de le graver dans le marbre. L'accouchement a eu lieu en 2002, et la loi Léonetti date de 2005.

    L'article L 1110.5 était rédigé en ces termes :

    «Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-ci requiert, le droit de recevoir les soins les plus appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent la meilleure sécurité sanitaire au regard des connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de soins ne doivent  pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. Les dispositions du premier alinéa s'appliquent sans préjudice de l'obligation de sécurité à laquelle est tenu tout fournisseur de produit de santé, ni des dispositions du titre II du livre Ier de la première partie du présent code. Toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Celle-ci doit être en toute circonstance prévenue, évaluée, prise en compte et traitée. Les professionnels de santé mettent en oeuvre tous les moyens à leur disposition pour assurer à chacun une vie digne jusqu'à la mort

    La loi Léonetti a ajouté les deux alineas suivants :

     

    « Ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n'ayant d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins visés à l'article L. 1110-10. »

    Article 2

    Le dernier alinéa de l'article L. 1110-5 du même code est complété par deux phrases ainsi rédigées :

    « Si le médecin constate qu'il ne peut soulager la souffrance d'une personne, en phase avancée ou terminale d'une affection grave et incurable, quelle qu'en soit la cause, qu'en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d'abréger sa vie, il doit en informer le malade, sans préjudice des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 1111-2, la personne de confiance visée à l'article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un des proches. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical. »

     

    Entre eugénisme et euthanasie, la limite n'est pas aisée à tracer. Tout être, à sa naissance, a droit à une vie digne et heureuse : la santé physique et mentale en est souvent une condition sine qua non.

     

  • Statut de l'embryon

    Je reviens du blog de Florent, Ataraxosphère, car je viens d'y lire un billet très intéressant sur l'embryon : en deux notes récentes, Florent traite le rapport des sociétés à l'euthanasie, et, sur l'embryon, il a mis les pieds avec un grand courage dans le plat.

    Il admet ouvertement dans sa note que l'embryon est un être humain, et ce, dès sa conception. Les pro-life vont être contents...Mais, sur ce point, je suis d'accord avec lui, c'est aussi mon sentiment, et, en réalité, Florent a bien raison d'écarter d'un revers de la main les controverses sur l'humanité ou non d'un être humain.

    Je suis d'accord, l'embryon est un être humain. Dès lors, les tergiversations écartées, il pose la seule question désormais valable, qui est de savoir si nos sociétés modernes ont le droit ou non d'euthanasier un être humain, ou, de réaliser des expériences sur un être humain. En effet, en admettant que l'embryon est un être humain, il accepte fatalement que toute expérience sur l'embryon soit une expérience sur un être humain...

    La question du statut de l'embryon m'a toujours mis mal à l'aise. Contrairement aux pro-life, je ne suis pas croyant, mais, cela ne m'empêche pas de tendre à penser que l'embryon est bien un être, et j'avoue que l'idée de tuer, car c'est bien de mort dont on parle, un embryon, me met très mal à l'aise. En réalité, tout en saluant la lucidité et le courage de Florent, qui aborde la question en prenant le taureau par les cornes, je ne peux pas accepter ses conclusions.

    Je ne suis bien sûr pas opposé à l'avortement, tout du moins, quand les motivations sont sérieuses, et, sur ce point, je rejoins tout à fait ce que dit Florent : si un avortement est un homicide, il ne faut pas tolérer des homicides de confort (par exemple, que l'avortement serve de substitut pratique à la contraception). Mais même si je n'y suis pas opposé, rien n'empêchera ma sensation de malaise de persister.

    Reste le cas délicat des embryons surnuméraires en cas de procréation médicalement assistée : Florent est favorable à l'usage de ces embryons pour la recherche. Il fait notamment valoir, que de toutes façons, ils seraient autrement détruits et qu'il s'agirait tout de même d'un homicide légal. J'ai noté un concept intéressant dans l'argumentation de Florent, qui est la notion de projet de vie. Il semble, pour Florent, que cela soit un élément déterminant pour prendre une décision sur les embryons.

    Et là, j'ai à nouveau un problème, et je ne peux suivre Florent. La relation des parents aux enfants est avant toutes choses, de mon point de vue, une relation de responsabilité, et non une relation de possession. Bien sûr, un embryon n'est pas un enfant, mais l'absence de projet de vie de sa part justifie-t-il que l'on décide du sort de l'embryon ? Je considère déjà avec horreur l'idée de leur mort, alors la simple pensée d'une expérience me rebute totalement.

    J'ai le sentiment, au final, que Florent ouvre le bon chemin, en acceptant de placer le débat sur le terrain qui est le véritable terrain : celui de la mort et de la vie, celui de l'euthanasie et de l'humanité. En revanche, je ne suis pas certain d'accepter toutes ses conclusions. Je crois que ce débat commence, et qu'en effet, nos sociétés modernes vont devoir l'affronter. Il y a là une problématique éthique tout à fait fondamentale.

  • Hannah, une enfant de 13 ans peut-elle choisir de mourir ?

    HannahJones.jpgLe cas de Chantal Sébire, en mars dernier, avait bouleversé la France. Mais celui d'Hannah Jones risque de nous frapper de stupeur encore bien plus. Il s'agit d'une enfant de 13 ans, hospitalisée à de nombreuses reprises et victime d'une cardiomyopathie contractée à la suite d'un traitement contre une leucémie à 5 ans. Elle est condamnée à mort à plus ou moins brève échéance, d'après ce que j'ai compris, sauf à tenter une incertaine greffe du coeur, et, même dans ce cas, il lui faudrait alors suivre à vie un traitement d'immuno-dépresseurs susceptible de réactiver sa leucémie. Une cardiomyopathie est un dysfonctionnement du muscle cardiaque. La survie à l'opération n'est pas assurée, et des complications très graves peuvent survenir.

    Choix terrifiant. Comment peut-on avoir 13 ans et choisir de mourir ? Car cette jeune fille ne veut plus passer encore du temps à l'hôpital. Elle se juge condamnée et veut finir son existence chez elle, quand bien même cela raccouricrait sa vie. Bien peu de médias se sont intéressés à cette triste histoire, en France, mais le quotidient le Figaro la suit avec attention. Il lui a consacré deux articles dont je recommande la lecture (Le cas Hannah Jones vu de France, A 13 ans elle obtient de ne pas être opérée ).

    Comment ne pas être bouleversé par un choix aussi dramatique ? N'y a-t-il donc vraiment aucun moyen de sauver Hannah ? Personnellement, j'ai le plus grand mal à nme résoudre à admettre qu'une enfant de cet âge puisse mourir, doive mourir. La loi Kouchner de 2002 prévoit pour les individus mineurs qu'ils puissent refuser des traitements s'ils sont en état de discernement. Les équipes médicales oeuvrent en fait un peu dans le flou, en essayant d'adopter une attitude pragmatique et en évaluant elles-mêmes la maturité de l'enfant.

    Hannah a exprimé elle-même son avis sur la chaîne TV SkyNews.

    J'avoue une forte détresse quand j'entends cette enfant choisir sa mort. Comment ne pas s'insurger ? Confronté à ces morts choisies de préférence à la souffrance, nous sommes désarmés, comme je l'avais noté dans mon article sur Chantal Sébire, et, pour ma part, je me tourne une fois de plus vers Épicure sur son lit de mort, dans sa lettre à Idoménée, son ami : il dit que le souvenir des bons moments passés ensemble lui permet de mourir en paix. Il me semble qu'Hannah a choisi de suivre la même voix que le philosophe grec. Si elle doit mourir, que le maximum de moments heureux aient été vécus, avec sa famille et avec ses amis. Quant à moi, tout hérétique que je suis, j'en suis à espérer le miracle pour Hannah, parce que je crois que c'est tout ce qu'il reste.