J'ai trouvé la loi Léonetti sur la Toile, mais, à vrai dire, je ne vois pas ce qui dedans pouvait permettre de répondre positivement à la requête de Chantal Sébire. Je rappelle les références de cette loi : J.O n° 95 du 23 avril 2005 page 7089 texte n° 1
A l'article 1, on trouve la mention suivante :
« Ces actes ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable. Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris. Dans ce cas, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa vie en dispensant les soins visés à l’article L. 1110-10. »
Bon, évidemment, si on veut comprendre cet article, il est indispensable de connaître l'article L. 1110-10 :
Article L1110-10
Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage.
Le problème, en fait, c'est que la loi Léonetti évoque la possibilité d'interrompre un traitement, et non d'en administrer un spécifique. Cela dit, si je lis avec attention l'article 1, je peux l'interpréter ainsi : ne pouvant soigner Chantal Sébire d'un mal incurable, on pouvait peut-être lui administrer de très forte dose de morphine, au risque de provoquer une overdose, et ce afin de sauvegarder sa dignité. En même temps, pouvait-elle être considérée comme une mourante ? Probablement non, et c'est là où le bât blesse.
Je pense que l'article 2 de la loi va un peu dans le sens de ce que j'interprète :
« Si le médecin constate qu’il ne peut soulager la souffrance d’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qu’en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie, il doit en informer le malade, sans préjudice des dispositions du quatrième alinéa de l’article L. 1111-2, la personne de confiance visée à l’article L. 1111-6, la famille ou, à défaut, un des proches. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical. »
Après une lecture attentive, je pense que cela correspond au cas de Chantal : je ne sais pas ce qu'en pensent les juristes...
Par ailleurs, je signale l'excellent dernier numéro de l'Itinérant (hebdomaire de lutte contre la misère et la précarité, vendu essentiellement par des sans-abris dans les rues) : on trouve donc dans l'édition du 31 mars au 06 avril (n°697) un entretien avec Jean Léonetti, l'auteur de la loi que je cite ici. Il confirme dès la première question qu'il est possible de supprimer toute souffrance physique ou morale en fin de vie même si c'est au prix de raccourcir la vie. Et il fait exactement le même raisonnement que moi sur les doses de médicament, je le cite :
« De manière concrète, cela signifie qu'on a le droit, et même le devoir, d'utiliser tous les moyens thérapeutiques possibles pour supprimer la souffrance, même si, par les produits utilités, on est conscient que l'on hâte la mort.»
Voilà qui me paraît très clair, et je ne comprends pas ce qui a empêché de faire rentrer Chantal Sébire dans cette catégorie. Comme le note Jean Léonetti, le droit à la vie est inscrit dans l'article 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. On ne peut donc envisager un droit à la mort, c'est à dire l'euthanasie, sans être en contradiction avec cette convention. En revanche, on pourrait envisager une dépénalisation des homicides par compassion. A condition que les circonstances soient codifées et précisées, et bien sûr, dans un cadre médical.
Il n'y pas de position officielle du MoDem, du moins à ma connaissance, sur la fin de vie, et pas non plus de François Bayrou. En revanche, j'ai eu l'occasion d'en discuter avec Marielle de Sarnez, que la question intéresse. Marielle n'a pas adopté de position arrêtée, mais je crois que sa position se rapprocher sur certains points de celle de Jean Léonetti : elle est favorable à l'ouverture d'un débat sur la question, mais d'un débat de fond, et en attendant, d'utiliser toutes les ressources de la loi lactuelle pour les cas exceptionnels. Comme le relève Jean Léonetti, sa loi convient pour 95% des cas.