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  • Bayrou/Cohn-Bendit

    Aïe aïe aïe...ça a pété entre les deux. Bon, genèse : Bayrou et Cohn-Bendit étaient amis jusqu'à peu. Seulement voilà, il y a un mois, je ne sais pas quelle mouche a piqué Cohn-Bendit, voilà qu'il déclare que Bayrou a vu la vierge et ne pense qu'aux présidentielles. Le MoDem et Bayrou ne s'étaient attaqués à aucun moment ni aux Verts, ni à Cohn-Bendit. Ces deux dernières semaines, le MoDem est devenu la cible préférentielle de l'UMP, du PS et des Verts. Dans le même temps l'UMP vante les Verts et Michel Barnier et Xavier Bertrand déclarent que Cohn-Bendit est le seul vrai européen de gauche. Dans le même temps, on entend au Nouveau Centre et à l'UMP que Bayrou serait un Le pen light. Je ne m'imaginais pas Cohn-Bendit se mêler un jour à la curée. De plus, Cohn-Bendit a toujours admis certaines affinités avec Sarkozy. Soyons juste, ce ne sont pas des affinités politiques, ou du moins, pas seulement. Ils ont simplement en commun d'aimer les transgressions, aussi bien l'un que l'autre. Et comme Sarko se targue de faire bouger certaines lignes, cela plaît à Dany le Rouge. Par ailleurs, comme Sarko, Dany est un libéral [EDIT : il faut que je corrige. En fait, ils ne sont libéraux ni l'un ni l'autre. DCB est un social-démocrate libertaire, et Sarko une sorte de Colbertiste napoléonien mâtiné de néolibéralisme (sorte de fusion entre une école du libéralisme économique et le darwinisme social). Je précise, d'ailleurs, que pour ma part, je me réclame ouvertement du libéralisme : un libéralisme pragmatique et modéré. Merci à Criticus et LomIG de leurs remarques et corrections en commentaires], même si je préfère évidemment le libéralisme de Dany à celui de Sarko (plutôt du néo-libéralisme).

    Alors, c'est vrai, Bayrou a dérapé pendant l'émission A vous de juger. Mais Cohn-Bendit le cherche tout de même depuis un moment. Quand Bayrou dit que Cohn-Bendit est reçu à l'Élysée, c'est vrai, même si je doute que ce soit pour une alliance politique. Répliquer à Bayrou qu'il est minable parce qu'il le dit, je peux comprendre que cela l'ait passablement énervé, d'autant que Verts et UMP sont tout de même non moins passablement complices, dans cette campagne, contre le MoDem et Bayrou.

    Tout de même, je suis étonné : je me serais attendu à ce que l'opposition s'oppose. Pas du tout à ce que l'opposition s'oppose à l'opposition. Bref, Socialistes et Verts tirent à vue sur le MoDem et Bayrou depuis un moment. Ne serait-il pas logique qu'ils se concentrent contre le projet qu'il estiment le plus opposé aux leurs, c'est à dire celui de l'UMP ? C'est bête. Et puis quand on voit le sirupeux Xavier Bertrand en rajouter une louche après en dénonçant Bayrou, la décence eût été plutôt se s'abstenir de commentaires sur un épisode qui n'était pas fameux, c'est tout...

    Nous ne sommes pas ennemis. Benhamias a même dit des choses intéressantes en imaginant un axe Verts/Démocrates au Parlement européen. Bon, évidemment, avec les décroissants, cela ne va pas être possible, mais avec les autres, des majorités d'idées peuvent parfois être possibles.

    Je pense que nous, militants, nous ne devrions pas nous mêler de la querelle entre Cohn-Bendit et Bayrou. Je regrette qu'elle ait eu lieu, d'autant qu'ils étaient jusque là amis. Là, hélas, je crois qu'il y a un fossé irréversible qui est désormais creusé entre les deux. C'est dommage.

    De notre côté, essayons de garder raison et de débattre calmement. C'est, je crois, ce que j'ai commencé à faire aujourd'hui sur l'énergie et l'agriculture.

    Je déplore également que les médias sur Internet n'aient retenu que ces échanges vifs de l'émission A vous de juger, alors que le débat entre tous ces leaders politiques a été objectivement intéressant.

    [EDIT]J'ajoute quelque chose, je viens de voir la fin de l'émission: c'est tout de même inadmissible qu'une émission de service public finisse  sur un gros plan sur un titre dénigrant un des partis présents à la table ronde : Cohn Bendit devant Bayrou. Voilà ce qu'on pouvait lire en gros sur l'écran.[/EDIT]

  • MoDem/Verts, convergences et divergences

    Le MoDem et les Verts ont la particularité, dans ces élections européennes, de partager en partie un électorat commun et d'avoir mis au point des programmes dont les objectifs sont parfois convergents.

    J'ai lu avec attention le programme des Verts, tout comme celui du MoDem, évidemment. Ce qui me frappe, et je l'avais déjà constaté en Europe avec certains votes communs entre les groupes ADLE et ALE, c'est la présence de certaines convergences. Quand Cohn-Bendit assure avoir un plan pour créer 10 millions d'emplois en Europe par une relance de l'investissement et de l'industrie verte, c'est exactement ce que propose Corinne Lepage depuis un bon moment. Dommage, d'ailleurs,qu'un classement thématique ne figure pas sur son blog, cela apparaitraît très nettement. On trouve la même proposition de la part de l'ADLE dans sa feuille de route et ses priorités pour 2010.

    C'est sur l'énergie, toutefois, que les différences les plus sensibles sont manifestes : le programme des Verts est davantage basée sur la contrainte que l'innovation. Je lis dans le pilier énergie que les Verts proposent surtout de taxer lourdement les énergies non renouvelables. Ils combattent le nucléaire et les agro-carburants dont ils souhaitent l'interdiction.

    Il y a sur le nucléaire une différence majeure entre les Verts et le MoDem. Les premiers veulent l'interdire, les seconds le limiter, et ce pour une raison que l'on comprendra si on lit ou écoute attentivement une intervention d'Anne Laperouze, euro-députée et spécialiste MoDem de l'énergie. Le MoDem ne perd en effet pas espoir de parvenir à un nucléaire propre. C'est ce qu'Anne Laperouze appelle la fusion (sans préciser nucléaire, mais c'est bien à cela qu'elle pense). Elle a vraisemblablement en tête la fusion par confinement magnétique, qui offre l'avantage de ne générer une radio-activité que très limitée dans le temps (qu'on appelle radio-activité à vie courte, c'est à dire inférieure à 30 ans). En outre Le combustible utilisé est le deuterium ou le tritium deux isotopes de l'hydrogène. Ils sont très aisés à produire et pas radio-actifs (ils ne le deviennent qu'après transformation par le réacteur).Le réacteur peut de plus auto-produire une partie du combustible qu'il utilisera. Enfin, le risque d'accident nucléaire est très faible, car le moindre incident provoque l'arrêt immédiat des réactions.

    Si je comprends les buts des Verts, et que j'en partage quelques uns, ce qui me frappe, c'est la faiblesse des solutions qu'ils mettent en oeuvre, leur programme se limitant en règle générale à la déclaration d'intention.

    Pour vraiment comprendre les différences entre les Verts et le MoDem, il faut écouter ou lire les compte-rendus de débats dans leurs conventions respectives.

    Ainsi, sur le nucléaire, les Verts refusent toute expérimentation, quand bien même on parviendrait à une énergie atomique propre et sans danger. Ils refusent, en fait, d'en étudier l'hypothèse. C'est pourtant tout l'objet du projet de recherche ITER et du réacteur qui est en construction à Cadarache.

    Cette différence n'est pas la seule. Les Verts, par rapport au secteur agricole, sont essentiellement dans la conservation et la promotion de l'agriculture biologique. Là s'arrête leur programme pour les campagnes et le monde rural en règle générale. Pas un mot ou presque pour les agriculteurs qui resteront sur la touche. Autant dire que ça n'est pas bien exaltant. Si le MoDem s'accorde sur ces deux objectifs, il propose tout de même un programme autrement plus complet pour l'économie du monde rural, particulièrement le développement de l'agro-industrie et des activités issues du végétal.

    Mais de telles vues découlent logiquement des perspectives des deux mouvements : les Verts veulent limiter la croissance, voire décroître quand cela est possible. Le MoDem se propose de récupérer les surplus afin de les affecter à d'autres utilisations. Dans le domaine agricole, par exemple, François Bayrou observait que l'on ne peut pas produire 100 pour nourrir 100. Pour nourrir 100, compte-tenu des aléas (climatiques et économiques), on ne peut pas faire autrement que de produire 130.  Le MoDem propose donc de gérer les surplus sans devoir, comme le dit Bayrou,  les déverser dans les rivières :

    Depuis quelques années, à mon sens, cette question ne se pose plus car on a découvert qu'un certain nombre de productions agricoles pouvaient être utilisées, pour les surplus et pour les quantités que l'on voulait, de manière industrielle : agro-carburant, agro-industrie, demain biomasse comme vous l'avez très justement évoqué. On a devant nous, pour la première fois de l'histoire de l’humanité, la possibilité de gérer sans drame la question des surplus, notamment en matière céréalières, sans avoir à jeter, sans avoir à basculer des bennes dans les rivières. On a le moyen d'utiliser, pour le bénéfice de l’humanité, les surplus agricoles qui sont naturels, quand on veut garantir la sécurité alimentaire, d'une partie de l’humanité, en tout cas de notre partie de l’humanité.

    De manière générale, les différences entre MoDem et Verts se lisent à travers une divergence fondamentale dans la méthode. Au pragmatisme des premiers répond l'idéologie brute des seconds. Les Verts n'hésiteraient pas un seul instant à casser la machine économique pour changer de monde. Nous aussi, au MoDem, nous voulons changer de monde, mais nous ne pouvons adhérer à des méthodes aussi brutales. C'est donc dans un souci de transition que le MoDem a organisé ses propositions dans ce domaine :

    - Repenser nos modes de transports, de production et de logement. La mise aux normes durables des bâtiments et le développement des transports propres permettra d’importantes économies d’énergie.
    - Recourir massivement aux énergies renouvelables pour diversifier nos ressources énergétiques.
    - Mener un grand programme de recherche européen pour développer les énergies du futur.
    - Développer les activités économiques issues du végétal (agro-industries).
    - Orienter les financements des fonds sociaux européens vers la formation aux nouveaux métiers du développement durable.
    - Imposer une notation sociale et environnementale européenne aux grandes entreprises et renforcer leurs obligations en termes de responsabilité sociale et environnementale.
    - Instaurer une taxe carbone européenne qui pénalisera les énergies fossiles les plus polluantes.
    - Taxer les pollueurs pour qu’ils soient incités à modifier leur comportement.
    - Instaurer un moratoire sur les OGM tant qu’un organisme de recherche indépendant n’aura pas évalué tous leurs effets.
    - Créer un corps de garde-côtes européen pour lutter contre les pollutions maritimes.
    - Construire une solidarité énergétique européenne en coordonnant la gestion de nos stocks et en créant des infrastructures d’acheminement vers les pays menacés de pénurie.

    Tous ces points sont développés par les différents intervenants lors de la convention thématique du MoDem sur le développement durable. J'invite tous mes lecteurs à en prendre connaissance. J'aurais bien aimé mettre en lien une éventuelle convention des Verts sur le sujet, mais le fait est qu'il n'y en a aucune trace sur le site d'Europe-écologie...Y-en-a-t-il eu seulement une ?...

    Luc Mandret me demandait récemment d'écrire un billet où je devais expliquer pourquoi j'allais voter aux élections Européennes. Je lui ai ici répondu en lui précisant pour qui...C'est très long d'écrire des billets pour comparer les programmes dans le détail, et c'est très long aussi de les éplucher. Pourtant, ce travail, je l'ai fait. Et je trouve très injuste de déclarer que le MoDem n'a pas de programme, alors qu'au contraire, la perspective du MoDem est tout à fait particulière en France, contrairement aux réductions qu'en donnent les médias, et que de plus, énormément de choses très intéressantes ont été dites lors des Conventions. Pour savoir ce que compte faire le MoDem, c'e sont d'ailleurs ces dernières qu'il faut visualiser ou lire. S'il y a eu une très grosse erreur de stratégie du MoDem lors de ces élections, c'est de ne pas les mettre bien plus en avant, et de ne pas insister sur sa particularité. Bayrou a déclaré à la presse que le programme du MoDem serait envoyé à tout le monde. Cela a été fait, puis, après, psssscchhht...plus rien. On n'en a plus parlé ou presque ! Il fallait embrayer là-dessus, bon sang, et parler de ce que nous avons dit, analysé et proposé lors de nos conventions !

    Il me reste peu de temps, mais je vais essayer d'écrire quelques autres billets comparatifs sur le fond : c'est à dire, non en comparant les slogans, ou même les synthèses de programme (les tracts, en somme) mais vraiment les propositions et les analyses.

     

     

  • Intentions de vote MoDem, analyse du sondage IPSOS

    J'aime beaucoup les sondages IPSOS, car ils sont généralement détaillés et précis, au moins en politique. J'ai observé qu'ils se trompent rarement, d'ailleurs, ou alors de très peu. S'ils nous disent 12% pour ces Européennes, c'est que cela a de bonnes chances d'être notre score, lors des Européennes. Ce riche sondage, examiné dans le détail, nous donne quelques enseignements sur lesquels nous devrions nous pencher.

    Sommes-nous un parti de mecs ? 9.4% de femmes contre 14.5% d'hommes, c'est l'écart le plus fort. Et pourtant, nous avons beaucoup de femmes têtes de liste et les principaux cadres et figures de notre parti sont des femmes (Marielle de Sarnez, Corine Lepage, Sylvie Goulard...)

    Ne devrions-nous pas revoir notre message et nos propositions à l'égard de ceux que l'on classe comme inactifs, c'est à dire vraisemblablement les chômeurs et les étudiants : 5.5% seulement d'entre eux comptent voter pour nous. En comparaison, 43.3% d'entre eux vont donner leur voix à l'UMP ! A mettre en relation avec le niveau d'études : 15.9% avec bac + 2 contre 7.9% avec pas de diplôme et diplômes professionnels avant le bac.

    Nous ne faisons pas le plein de nos symathisants :  81.6% d'entre eux seulement vont voter pour nous. Bon, c'est pire ailleurs, à l'exception de l'UMP.

    Nous ne parvenons pas à convaincre dans les très grosses aglomérations : 9% en moyenne (9.5% à Paris, comme aux municipales, au demeurant). Ils jugent d'ailleurs que nous ne faisons pas une bonne campagne.

  • La méthode Descoings, miroir aux alouettes

    Je ne peux qu'abonder dans le sens de Philippe Cohen, seul journaliste a avoir établi clairement la véritable nature de la méthode Descoings. Du battage et encore du battage : on a compris le message, bien lourd et populaire à souhait avec son "lycée pour tous". J'observe d'ailleurs, que quelques blogueurs sont tombés à pieds joints dans le panneau. Ils ont accepté l'invitation de Richard Descoings et lui servent désormais de béni oui-oui. Il faut dire que l'individu s'y entend à manipuler ses interlocuteurs avec ses propositions frappées du bon sens...Descoings est dans la doxa : il sanctifie les langues vivantes, stigmatise l'élitisme républicain, et veut la même chose pour tous en abrasant tout ce qui fait la différence. Il est d'avis de jeter les vieilleries aux orties ou à la décharge. Il faut être moderne. Oui, moderne, au sens où l'entend l'ami Ambrose dans son dictionnaire du Diable : Lycée n. 1/. École antique où l'on s'entretenait de morale et de philosophie. 2/. École moderne où l'on discute de football. Il faut dire qu'il vaut son pesant d'or l'ami Ambrose. A "Consulter", on trouve par exemple la définition suivante : Rechercher l'approbation d'autrui pour un projet déjà bien arrêté. Ah, je l'imagine bien, l'Ambrose, secoué spasmodiquement de ricanements à la lecture des propositions d'un Descoings.

    Richard Descoings veut du chiffre : plus d'étudiants à l'IEP, plus de lycéens, plus de lycées visités. Le chiffre, cela ne vous rappelle pas quelque chose ? Le chiffre, c'est moderne. C'est la culture du résultat. Alors pour avoir des résultats, Richard Descoings visite...le plus de lycées possible. Et il consulte...

    On trouve dans le rapport de Descoings la grandiose déclaration suivante :  L’hétérogénéité sociale plus marquée des élèves entrant au lycée fait en effet de l’accès à la culture, à la musique, aux arts et aux pratiques artistiques un enjeu de société de premier ordre. Si l’on veut que cet accès soit le plus équitable possible sur l’ensemble du territoire, il faut prendre résolument appui sur le lycée qui offre à la fois un espace et un temps uniques pour développer une politique volontariste en la matière, à destination du plus grand nombre de jeunes adultes.

    Question à mes lecteurs , devinez qui, sur le bondy Blog, il y a quelques jours, déclarait à deux étudiants qui s'inquiétaient de la disparition d'options rares (histoire de l'art, latin, grec) : On va donc remettre du latin et grec pour tout le monde en France ? On va retourner au lycée d’il y a 50 ans ? Arrêtez ! Ce n’est pas possible. [...] Il y a un développement des options, porté par les classes dirigeantes, porté à juste titre par les milieux intellectuels. Jacqueline de Romilly, de l’Académie française, appelle tous les deux ou trois ans au retour du grec, qui est une merveilleuse façon, effectivement, d’ouvrir l’esprit vers la culture. Mais, quitte à me fâcher avec les élites, je le dis tout de suite : on ne reviendra pas au grec ancien pour les lycéens. Veut-on plus d’égalité pour tous ou plus de choix pour certains ? Plus de réussite pour tous ou plus de réussite pour une petite proportion des jeunes Français ?

    Autre morceau d'anthologie : Tous les jeunes peuvent découvrir la littérature. Mais pour avoir accès à la littérature, il faut maîtriser les fondamentaux du français, et cela vaut pour toute littérature et toute langues étrangères. Ce que je veux dire, c’est que parfois, chez certains jeunes, l’enseignement traditionnel du « Cid » ou de « Phèdre », ça ne passe pas. Ils décrochent. Et notre ami de conclure qu'un atelier théâtre fera l'affaire. Wow ! Je suis impressionné ! Richard Descoings est moderne...

    Le rapport de Descoings est ici, mais ce n'est pas la peine de le lire : c'est un poncif de la vox populi, et surtout, de toutes les tentatives de réforme du lycée dont personne n'a voulu ces dernières années : réduction des enseignements, suppression progressive de l'examen terminal du baccalauréat, culte des langues étrangères (Descoings dit tout et son contraire : que ne s'est-il avisé que l'absence de maîtrise des langues étrangères était peut-être à mettre en lien avec l'absence de maîtrise du français dont il fait pourtant un objectif prioritaire), mise en concurrence des disciplines, bla bla habituel sur le lycée professionnel, béni oui-ouisme sur la diversité et la discrimination positive. Mais, Descoings connaît la voix de son maître, j'ai remarqué, dans l'échange avec les étudiants sur le Bondy Blog sur les options rares, qu'il s'est bien gardé de répondre sur l'histoire de l'art. Eh oui...Nicolas Sarkozy aime l'histoire de l'art, figurez-vous, puisqu'il veut la voir enseignée à toutes les sauces au collège puis au lycée.

    Évidemment, tout n'est pas à jeter dans les propositions de Descoings, mais, il y a là avant tout de la poudre aux yeux. La réalité, c'est qu'il faut habiller avec de pseudo-propositions la future saignée de l'Éducation Nationale. L'argument-massue, c'est de réduire le corpus disciplinaire en clamant que les lycéens passent trop d'heures en classe. Il va de soi qu'il sera bien plus aisé par la suite de supprimer des heures d'atelier, de réflexion sur l'orientation et cetera que des heures disciplinaires. Espérons que les acteurs de l'Éducation ne tomberont pas dans le panneau. Il n'y a pas de projet autre, dans le rapport de Descoings que de faire du chiffre, d'être efficace, moderne et de réduire les coûts. On y trouve aucune réflexion ni dimension humaniste, notamment sur la place de la culture alors que cette dernière cimente la nation. Pire, on y trouve la volonté affirmée d'en finir avec l'excellence. En fait, le lycée pour tous, pour Richard Descoings, ce n'est pas donner l'accès à l'excellence à tous, mais, au contraire, à personne. C'est dans la novlange la mise en pratique de l'égalité des chances dont on nous rebat les oreilles, et qui nous permet d'esquiver la douleureuse question de l'équité.

    Cela me rappelle un sketch de Thierry Le luron sur Mitterrand. On interroge Mitterrand sur la planification économique. Ce dernier, très docte répond : quand il y a à Bordeaux 5% de chômeurs et à Strasbourg 10%, la planification, c'est faire en sorte qu'il y ait 10% de chômeurs aussi à Bordeaux...

     

  • Airbus 330, Icare brisé

    Je n'ai pas renoncé à m'exprimer sur la catastrophe de l'Airbus 330 en provenance du Brésil, en dépit des très déplaisants commentaires d'hier. Je ne vois pas en effet, pourquoi je me tairais sur la foi d'un procès d'intention indigne. Je veux m'exprimer sur ce drame, parce que je veux essayer de comprendre pourquoi il nous touche, moi y compris, avec une telle intensité, avec une telle violence. J'ai pris plusieurs fois l'avion, et surtout, il m'est arrivé à plusieurs reprises d'attendre quelqu'un à la sortie d'un avion. Cette nuit, j'ai été pris de sueurs glaciales  en repensant à cet accident. L'évènement n'est pas neutre pour moi, et sans doute pour d'autres. Jeune, j'aimais passer d'un continent à un autre par la voie des airs. Mais, au fil du temps, avec la conscience des accidents, j'ai commencé à avoir peur, et aujourd'hui, quand je boucle ma ceinture de sécurité et que l'avion commence à décoller, ou encore lors des atterissages, a fortiori quand il y a des turbulences, j'ai une sourde appréhension qui m'étreint. Et pourtant, l'avion est infiniment plus sûr que mon automobile que je prends tous les jours ! Aussi bien en proportion qu'en quantité, en comparaison des morts sur les routes, le nombre de morts dans les airs est infime. Mais dans mon automobile, je me sens en sécurité.

    La catastrophe aérienne, quand elle survient, fait le tour du monde : radios, chaînes télévisées, journaux, et même blogs, en parlent sur toute la planète. Cette catastrophe a fait 240 morts. Le Rwanda, le Darfour, ont généré des centaines de milliers de morts sans générer la même attention ni même la même intensité dans l'émotion. Mon intention n'est absolument pas de donner une leçon de morale, je laisse cela aux concupiscents, comme dirait Nietzsche. Non, je m'étonne simplement de la force de cette émotion. Au moment où j'entends ces nouvelles terribles, mon empathie avec les familles des victimes est très forte. Ce n'est pas une question de distance ni de nationalité : l'avion était loin et il transportait des hommes et des femmes d'origines diverses.

    J'écoutais France Info, ce matin, et notamment, comme Bayrou était justement là, on lui a demandé ce que lui inspirait cette catastrophe. Comme toute la classe politique, il a bien sûr déploré un drame terrible, mais ce qui m'a intéressé, c'est ce qu'il disait du transport aérien : «ça donne au transport aérien une dimension qu'il n'a pas habituellement, on finit par s'habituer à cette incroyable aventure, et puis tout le monde voit bien qu'elle conserve une dimension de risque ». C'est cette réaction qui m'a frappé, et qui m'a rappelé qu'au fond, nous sommes tous les héritiers d'Icare. Dans la mythologie grecque, Icare est le fils d'un inventeur de génie, Dédale. Ils ont été enfermés par le roi Minos dans le labyrhinte dont Dédale a lui-même réalisé les plans. Pour s'évader, Dédale, après avoir observé des oiseaux, parvient à confectionner avec de la cire et des plumes des ailes. Il recommande toutefois à Icare de ne pas trop s'approcher du soleil car la cire fondrait et il pourrait tomber. En dépit des sages recommandations de son père, Icare veut voler trop haut et il chute finalement dans la mer. Mer qui prendra son nom, puisque c'est la Mer d'Icare aujoud'hui.

    Je crois que l'émotion très forte qui nous étreint à chaque catastrophe aérienne fait de nous les enfants d'Icare. Parce que notre rapport à l'air et au ciel demeure mystérieux et empreint d'étonnement, nous continuons à avoir du mal à admettre la chute.

    Je voulais dire aussi autre chose : on va de conjectures en conjectures pour tenter de comprendre ce qui a pu arriver à cet aéronef. Moi-même, hier, j'ai espéré qu'il pouvait avoir amerri (sans doute en vain, hélas).

    Il existe en mathématiques une théorie que l'on appelle théorie du Chaos : l'effet papillon en est le phénomène physique le plus saillant. L'idée est qu'un battement d'aile à l'autre bout du monde peut provoquer une tornade de l'autre côté. Le mathématicien Edward Lorenz, qui est à l'origine de cette citation fameuse a travaillé justement sur les phénomènes météorologiques. Constatant que des variations infimes entre deux situations initiales pouvaient conduire à des situations finales sans aucun rapport entre elles, il a jugé qu'il n'était pas possible de faire de prévisions météorologiques à long terme. Il a calculé, par exemple, qu'une incertitude de 1 sur 106 lors de la saisie de données, pouvait conduire à des conclusions totalement erronées.

    Je voudrais comparer cela à un autre témoignage. J'ai eu comme premières automobiles deux XM fonctionnant au GPL. La première s'est enflammée sur l'autoroute à grande vitesse. Le réservoir était le vieux système à bouchon. On l'a abandonné car on sait depuis qu'en cas de dilatation du gaz (c'est le cas d'un incendie) si le bouchon ne sort pas, l'explosion est terriblement meurtrière. Je suis resté à moins de 50 mètres de mon automobile qui brûlait sur le bord de l'autoroute, sans savoir qu'en cas d'explosion, tout ce qui se trouvrait sur un rayon de 200 mètres aurait été soufflé par l'explosion. Coup de chance, le réservoir s'est mis à fuire. Avec ma seconde XM, un soir que j'étais fatigué, j'ai percuté un trottoir assez haut par le côté à une vitesse d'environ 60 km/h. Il s'en est ensuivi une vibration qui a complètement désaxé et démoli la boîte de vitesse. L'expert qui a examiné le véhicule par la suite m'a dit qu'il n'avait jamais vu ni entendu parler d'une vibration d'une telle ampleur avec un accident de ce genre. Un cas unique dans sa carrière. Même son de cloche au garage citroën où un tel évènement ne figurait même pas dans la base de données de la marque.

    Ce à quoi je veux en venir, c'est que nous ne connaîtrons peut-être jamais exactement les causes de l'accident, et ce, en dépit des mesures de sécurité, pourtant nombreuses. Quand des causes multiples, incluant des facteurs humains, de surcroît, se superposent les uns aux autres, comment savoir s'il y en a une qui est première parmi elles. Et si toutes ces causes sont infimes, mais que leur résultat final est une catastrophe, c'est imprévisible. Tous les classements de sécurité n'y pourront rien. Je sais que Toréador voudrait donner un nom à la mort et à la foudre, et je le comprends très bien, car il a tout à fait raison d'estimer que c'est absolument nécessaire pour pouvoir commencer un deuil. Mais si la cause est la résultante d'une cascade d'incertitudes, il sera bien difficile de la nommer.

  • Un Airbus A 330-200 peut-il amerrir ?

    Je déplore tout à fait que mon intention ait été très mal interprétée quand j'ai écrit ce billet. Il n'était aucunement dans mon intention de faire le charognard, mais au contraire de cultiver l'espoir qu'il en restait un.

    Compte-tenu des premières réactions, manifestement indignées par mon billet (je ne comprends pas pourquoi, mais bon, s'il est à ce point sujet à être mal jugé, c'est qu'il doit être maladroit d'une manière ou d'une autre), je le retire.

    Il ne s'agissait pour moi que de considérer la possibilité technique d'un Airbus d'amerrir, avec l'idée que tout n'était peut-être pas complètement perdu. Mon tempérament me pousse à ne jamais baisser les bras tant qu'une mauvaise nouvelle n'est pas confirmée, c'est tout. Quant à l'accusation de vouloir faire monter mes "stats", je ne crois pas que j'y gagnerais ainsi, et de surcroît, je n'ai pas besoin de cela. Je cherche à traiter l'actualité, moi aussi, comme le font les autres médias, avec un autre regard. Ceci n'empêche pas le respect de l'émotion. Est-ce un crime ?

    [EDIT le 02/06/2009] Comme je n'ai pas voulu  en rester sur une page rayée et des soupçons sur un évènement qui me touche profondément, j'ai écrit une autre note, Airbus A330, Icare brisé ; en l'écrivant, j'ai essayé de comprendre pourquoi les accidents aériens heurtaient nos sensibilités (particulièrement la mienne) avec une telle intensité.[/EDIT].

    Les nouvelles à propos de l'Airbus A330-200 en provenance de Rio de Janeiro sont tout sauf rassurantes. A l'heure actuelle, il ne peut plus être en vol faute de kérosène. Toutes les hypothèses sont ouvertes, évidemment, mais, à l'évidence, pour que l'équipage de l'aéronef n'ait donné aucune nouvelle, quelque chose de soudain s'est produit. Cet avion n'a quasiment jamais connu d'incidents à toutefois une exception près. Dans les accidents précédents, jamais l'appareil lui-même n'a été en cause. Toutefois, le 24 août 2001, un appareil similaire avait volé pendant 1/2 heure avec une fuite de carburant, parvenant malgré tout à aterrir. A priori, l'A300-200 est un avion très fiable, et de surcroît, cette version de l'A300 emporte un surplus de carburant assez considérable. Pour ma part, je ne suis pas un spécialiste comme Démocratix, des avions, mais je crains et soupçonne une dépressurisation explosive . Si une brèche apparaît dans la paroi de la carlingue (hublot arraché ou autre) l'avion dépressurise très rapidement. On parle de explosive si elle se produit en moins d'une seconde. (source : http://www.aviation-fr.info/medecine/medecine.php). Aux dernières nouvelles, l'appareil aurait connu une panne de circuit électrique, et un message automatique aurait été reçu peu après 4 heures du matin. Mais cela ne me convainc pas : la panne peut très bien être une conséquence plutôt qu'une cause. Un A320 avait amerri en janvier dernier, et en principe bien que cela soit très risqué, ce n'est pas totalement impossible. Mais ce qui est inquiétant, c'est l'absence totale de nouvelles. C'est là quelque chose qui n'incite pas hélas, à l'optimisme. Un numéro d'urgence a été mis à la disposition des familles : 0 800 800 812