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La méthode Descoings, miroir aux alouettes

Je ne peux qu'abonder dans le sens de Philippe Cohen, seul journaliste a avoir établi clairement la véritable nature de la méthode Descoings. Du battage et encore du battage : on a compris le message, bien lourd et populaire à souhait avec son "lycée pour tous". J'observe d'ailleurs, que quelques blogueurs sont tombés à pieds joints dans le panneau. Ils ont accepté l'invitation de Richard Descoings et lui servent désormais de béni oui-oui. Il faut dire que l'individu s'y entend à manipuler ses interlocuteurs avec ses propositions frappées du bon sens...Descoings est dans la doxa : il sanctifie les langues vivantes, stigmatise l'élitisme républicain, et veut la même chose pour tous en abrasant tout ce qui fait la différence. Il est d'avis de jeter les vieilleries aux orties ou à la décharge. Il faut être moderne. Oui, moderne, au sens où l'entend l'ami Ambrose dans son dictionnaire du Diable : Lycée n. 1/. École antique où l'on s'entretenait de morale et de philosophie. 2/. École moderne où l'on discute de football. Il faut dire qu'il vaut son pesant d'or l'ami Ambrose. A "Consulter", on trouve par exemple la définition suivante : Rechercher l'approbation d'autrui pour un projet déjà bien arrêté. Ah, je l'imagine bien, l'Ambrose, secoué spasmodiquement de ricanements à la lecture des propositions d'un Descoings.

Richard Descoings veut du chiffre : plus d'étudiants à l'IEP, plus de lycéens, plus de lycées visités. Le chiffre, cela ne vous rappelle pas quelque chose ? Le chiffre, c'est moderne. C'est la culture du résultat. Alors pour avoir des résultats, Richard Descoings visite...le plus de lycées possible. Et il consulte...

On trouve dans le rapport de Descoings la grandiose déclaration suivante :  L’hétérogénéité sociale plus marquée des élèves entrant au lycée fait en effet de l’accès à la culture, à la musique, aux arts et aux pratiques artistiques un enjeu de société de premier ordre. Si l’on veut que cet accès soit le plus équitable possible sur l’ensemble du territoire, il faut prendre résolument appui sur le lycée qui offre à la fois un espace et un temps uniques pour développer une politique volontariste en la matière, à destination du plus grand nombre de jeunes adultes.

Question à mes lecteurs , devinez qui, sur le bondy Blog, il y a quelques jours, déclarait à deux étudiants qui s'inquiétaient de la disparition d'options rares (histoire de l'art, latin, grec) : On va donc remettre du latin et grec pour tout le monde en France ? On va retourner au lycée d’il y a 50 ans ? Arrêtez ! Ce n’est pas possible. [...] Il y a un développement des options, porté par les classes dirigeantes, porté à juste titre par les milieux intellectuels. Jacqueline de Romilly, de l’Académie française, appelle tous les deux ou trois ans au retour du grec, qui est une merveilleuse façon, effectivement, d’ouvrir l’esprit vers la culture. Mais, quitte à me fâcher avec les élites, je le dis tout de suite : on ne reviendra pas au grec ancien pour les lycéens. Veut-on plus d’égalité pour tous ou plus de choix pour certains ? Plus de réussite pour tous ou plus de réussite pour une petite proportion des jeunes Français ?

Autre morceau d'anthologie : Tous les jeunes peuvent découvrir la littérature. Mais pour avoir accès à la littérature, il faut maîtriser les fondamentaux du français, et cela vaut pour toute littérature et toute langues étrangères. Ce que je veux dire, c’est que parfois, chez certains jeunes, l’enseignement traditionnel du « Cid » ou de « Phèdre », ça ne passe pas. Ils décrochent. Et notre ami de conclure qu'un atelier théâtre fera l'affaire. Wow ! Je suis impressionné ! Richard Descoings est moderne...

Le rapport de Descoings est ici, mais ce n'est pas la peine de le lire : c'est un poncif de la vox populi, et surtout, de toutes les tentatives de réforme du lycée dont personne n'a voulu ces dernières années : réduction des enseignements, suppression progressive de l'examen terminal du baccalauréat, culte des langues étrangères (Descoings dit tout et son contraire : que ne s'est-il avisé que l'absence de maîtrise des langues étrangères était peut-être à mettre en lien avec l'absence de maîtrise du français dont il fait pourtant un objectif prioritaire), mise en concurrence des disciplines, bla bla habituel sur le lycée professionnel, béni oui-ouisme sur la diversité et la discrimination positive. Mais, Descoings connaît la voix de son maître, j'ai remarqué, dans l'échange avec les étudiants sur le Bondy Blog sur les options rares, qu'il s'est bien gardé de répondre sur l'histoire de l'art. Eh oui...Nicolas Sarkozy aime l'histoire de l'art, figurez-vous, puisqu'il veut la voir enseignée à toutes les sauces au collège puis au lycée.

Évidemment, tout n'est pas à jeter dans les propositions de Descoings, mais, il y a là avant tout de la poudre aux yeux. La réalité, c'est qu'il faut habiller avec de pseudo-propositions la future saignée de l'Éducation Nationale. L'argument-massue, c'est de réduire le corpus disciplinaire en clamant que les lycéens passent trop d'heures en classe. Il va de soi qu'il sera bien plus aisé par la suite de supprimer des heures d'atelier, de réflexion sur l'orientation et cetera que des heures disciplinaires. Espérons que les acteurs de l'Éducation ne tomberont pas dans le panneau. Il n'y a pas de projet autre, dans le rapport de Descoings que de faire du chiffre, d'être efficace, moderne et de réduire les coûts. On y trouve aucune réflexion ni dimension humaniste, notamment sur la place de la culture alors que cette dernière cimente la nation. Pire, on y trouve la volonté affirmée d'en finir avec l'excellence. En fait, le lycée pour tous, pour Richard Descoings, ce n'est pas donner l'accès à l'excellence à tous, mais, au contraire, à personne. C'est dans la novlange la mise en pratique de l'égalité des chances dont on nous rebat les oreilles, et qui nous permet d'esquiver la douleureuse question de l'équité.

Cela me rappelle un sketch de Thierry Le luron sur Mitterrand. On interroge Mitterrand sur la planification économique. Ce dernier, très docte répond : quand il y a à Bordeaux 5% de chômeurs et à Strasbourg 10%, la planification, c'est faire en sorte qu'il y ait 10% de chômeurs aussi à Bordeaux...

 

Commentaires

  • Effectivement, il semble que R. Descoing défend ses vues dans l'éducation comme un avocat d'affaires. Mettre "Le Cid" et "Phédre" dans le même sac au point de vue
    de la difficulté "à faire passer" me parait un signe que ses arguments sont complètement préfabriqués. Car si "Phèdre" l'est peut-être (difficile), "Le Cid" parait très abordable et devrait continuer à enthousiasmer.

  • Est-ce grave Docteur?

    La france est-elle si politiquement hypocondriaque, si hystérique, si accroc aux médocs qu'il faut réformer la réforme précédente qui a à peine vue le jour? L'overdose est souvent nuisible....

    Les différents chefs (éminemment compétent...) de service qui sont au chevet de la france,censée être atteinte d'une maladie incurable,"irréformisme", sont eux atteint d'une réformite qui est à la fois aiguë et chronique.....vu qu'ils ont promis pas mal de chimères pour avoir le job

    A chaque changement de gouvernement (même sans nouvelle majorité) voila qu'on annonce une nouvelle réforme qui sera la dernière et qui va résoudre tous les problèmes, bien évidemment, le grand docteur(fraîchement élu, et qui usera, changera ses médecins en cours de route) a toujours raison.

    L'EN en est le parfait exemple,mais s'il n'y a pas que l'EN....la maladie s'est gangrénée partout!!!!

    Est-ce un problème de moyens pour l'EN? a priori non vu que le budget de l'EN est le premier de l'état,sauf depuis la crise avec l'explosion de la dette, notre principale maladie( sans doute à l'origine de tous les maux, chut faut pas le dire...). Alors quel est le pb? Quel est alors le bon diagnostique et quel sera le traitement?

    Un nouveau rapport peut-il être la solution? qu'a-t-on fait des rapports précédents, chez les autres patients, comme ceux de Pébereaux, Rocard, du Sherpa de Miterrand, etc...rien!!!!!!!!!!!!

    Alors avec un rapport de plus ou de moins, va-t-on trouver le graal, va-t-on soigner cette France impossible à réformer, du moins c'est ce que l'on nous rabâche a longueur de journée?

    ben non, je ne le crois pas, car les réformettes ne sont que de la poudre aux yeux, un médoc peu actif car les chefs de services n'envisagent jamais un traitement de fond qui soignera le mal au long terme car pour cela il faudrait envisager d'examiner les patients dans leur ensemble( qui en en rélité n'en fait qu'un) afin d'avoir un traitement cohérent.

    Pour cela il faudrait que le chef de service s'arrange avec les chefs de services en devenir et qui veulent sa place, qui ne font qu'éructer dans l'attente de leur job sans proposer de traitements d'appoint......

  • Dans la continuité, l'hérétique.
    L'atelier théatre a été testé cette année en ZEP dans le cadre de l'enseignement des langues, et puis le rapport se base sur un sondage effectué auprès des élèves pour court-circuiter les syndicats et profs. Technique aussi utilisée dans les grands groupes...La démocratie participative a fait des émules avec distorsion bien évidemment!!

  • Tu critiques le rapport sans même l'avoir lu... Y'a pas comme un problème, là ? Ca s'appelle pas être barré de certitudes et rester confiné dans ses préjugés ?

    Quant au grec ancien, si la réforme du lycée doit passer par un retour des cours de grec, latin, morale et choses de la vie obligatoire, on a qu'à aussi remettre la blouse, bannir l'usage du stylo Bic, et autoriser de nouveau les châtiments corporels.

    Puis dans le même temps, on a qu'à aussi demander à Citroen de ressortir la Rosalie, comme ça on sera vraiment revenu dans la IIIe République.

  • Pas mieux.
    Après le collège unique et le lycée pour tous on aura quoi ? La licence pour chacun ? Le master universel ? Le doctorat pour tout le monde ?

  • A lire aussi le dernier billet de Brighelli avec son post-scriptum sur le rapport Descoings : http://bonnetdane.midiblogs.com/archive/2009/06/03/le-bac-approche.html

  • @ Franck
    Voyons, cher ami, évidemment je l'ai lu. N'observez-vous pas que j'en cite des extraits ? Pour le reste, vous versez dans la caricature. Qui parle de retour ? Vous, bien sûr, et le camarade Descoings. Moi, je parle seulement de ne pas réduire l'offre de formation et de laisser sa chance à tout le monde.
    @ Oaz
    Attends, tu n'exagères même pas : sérieux, je crois que tu as exactement saisi quel chemin se prépare. Il y aura un lycée tour tous, et...un autre juste pour quelques uns. Et tu auras intérêt à être passé par le lycée pour quelques uns, pas par le lycée pour tous. Je ne dis pas que notre système actuel est satisfaisant, mais ce que propose Descoings est pire.
    Merci pour le billet de Brighelli, je vais le lire de ce pas.

  • @Frank
    Toujours la même dialectique mécanique et ridicule. Vous déviez complètement des critiques faites. Elles disent que cette "réforme" va dans le sens "Marketisant" pour l'Education qui a un avenir très douteux. Elle ne disent nullement qu'il ne faut rien faire.
    Elle disent d'autre part qu'il est évident que ceux qui la défendent ne prennent nullement à coeur l'avenir de ceux sur qui elle s'appliquera mais prennent très à coeur leur avenir personnel avec servilité.

  • @ europium
    Oui, c'est la fameux réformisme dont on nous rebat les oreilles tant à droite qu'à gauche...
    @ Chui Kalm
    Ben je préfère encore l'avocat d'affaires. Descoings, c'est un bol d'opportunisme avec un zeste d'idéologie.
    @ Martine
    L'atelier théâtre, je trouve ça bien, mais ce que veut Descoings, c'est que cela remplace l'étude littéraire du Cid ou de Phèdre, alors qu'à mes yeux, c'est complémentaire. Je crois que je vais écrire un autre billet et mettre cela en parallèle avec la Princesse de Clèves et Sarkozy...

  • "culte des langues étrangères (Descoings dit tout et son contraire : que ne s'est-il avisé que l'absence de maîtrise des langues étrangères était peut-être à mettre en lien avec l'absence de maîtrise du français dont il fait pourtant un objectif prioritaire)"

    Effectivement. Comment apprendre de manière convenable une langue étrangère si l'on ne maîtrise que très mal sa langue maternelle ?

  • L'atelier théatre...J' ai fait du théatre en sixième dans un établissement aux Antilles, je m'en souviens fort bien, il s'agissait du docteur Knock! Au sein de l'établissement de mes enfants l'ai vivement encouragé depuis quelques années, alors...Je ne peux pas etre contre!
    Dans la zone zep concernée, il a été travaillé une pièce de Shakespeare...
    Les deux doivent effectivement etre travaillés ensemble, à défaut aucun intéret pédagogique.

  • Oups, quand je parle des deux, j'évoque étude littéraire et théatrale bien sur.
    En ce qui concerne la Princesse de Clèves, je me demande si je ne vais pas avoir une poussée d'eczéma et oui les allergies trouvent souvent leurs origines dans le sur dosage !

  • Ce matin, à la matinale de Canal +, R. Descoings indiquait, à plusieurs reprises, au journaliste qui trouvait que le rapport était très consensuel, que "la modernité c'était la recherche du consensus social". J'espère qu'il a passé le message au commanditaire de son rapport qui, à tout bout de champ, cherche à cliver ou à monter une partie de la population contre l'autre. Je veux parler de Nicolas l'Ancien, bien sur.

  • @ SOS éducation
    C'est le genre de subtilités qui a échappé à Descoings. Pas grave, on parlera tous globish bientôt, c'est ça la modernité, voyez-vous ...
    @ panache
    Oui, on sait que Descoings aime bien ce qui est «moderne»...

  • Voici ce que pense la tête de liste Modem dans l'Ouest de l'éducation
    http://europe.lesdemocrates.fr/chronique-dediee-a-celles-qui-ne-la-liront-pas-et-a-mme-de-lafayette-chroniques-europeennes-du-large-n°-28/

    Désolé (quoique...) de ramener le débat à l'échelon européen, mais vu que FB a dit logiquement qu'il faut associer France et Europe et que c'est dans le programme....

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