Pierre Albertini, le maire de Rouen, a ouvert sur son blog un débat sur la gratuité des musées, à la suite d'une expérience initiée en ce sens par l'actuel Ministère de la Culture. J'ai exprimé là-bas mon avis, répondant notamment à l'un des contradicteurs favoris de Pierre Albertini répondant au doux nom d'Albertinon.
Je pense qu'il peut y avoir des temps de gratuité, mais que les musées doivent demeurer payants. Déclarer que la culture doit être gratuite est une idée en soi pernicieuse : si elle gratuite, l'art aussi, et par là, les artistes également. Les Musées ont besoin d'être entretenus, et les artistes de se nourrir. L'Etat a vocation à aider les musées, mais nullement à leur interdire de générer des recettes.
On paye une redevance télé pour regarder des âneries, on achète des jeux vidéos des fortunes, mais il faudrait refuser d'acquitter un droit d'entrée très modéré pour accéder aux musées ?
J'y suis radicalement hostile. J'ajoute qu'une culture entièrement financée par l'état finit par perdre sa liberté et on a très bien vu ce que cela a donné dans les pays communistes, voire dans certaines communes de gauche ou de droite en France...
Par ailleurs, certains mots usés et abusés finissent par se galvauder. Ainsi en est-il de la démocratisation de la culture. C'est que bien souvent, ses thuréfiraires , en brandissant en apparence la démocratie et la culture masquent en réalité l'apauvrissement culturel généralisé.
Je ne suis pas le promoteur d'un art exclusivement sponsorisé, mais je ne vois absolument pas le mal à ce que le privé fasse du mécénat et utilise l'image de la culture pour promouvoir ses activités. Les plus pauvres peuvent déjà rentrer dans les musées gratuitement. Nous sommes donc loin d'une culture réservée à une minorité vivant dans l'aisance.
Nous vivonss dans une société marchande et il faut en prendre acte : ce qui est gratuit, dans une société marchande, est bien moins valorisé que ce qui est payant. L'état peut intervenir pour veiller à ce que l'accès à la culture ne soit pas hors de prix, mais, certainement pas pour donner la gratuité dans tous les musées.
Quelques réalités sont d'ailleurs bonnes à rappeler :
Une carte pass sur plusieurs musées à l'année coûte généralement moins cher que la redevance télé. Alors quand on voit les m... qui passent sur les chaînes, il est fort simple de balancer son téléviseur par la fenêtre, cesser tout abonnement, et acheter une carte pass.
La moindre place d'un match de football coûte plus cher que la meilleure place à la Comédie Française. Et les matches de coupe du monde, même de rugby, infiniment plus cher que la place d'opéra la plus chère à l'Opéra Garnier ou l'Opéra Bastille.
François Bayrou, lors du colloque sur la culture organisé par l'UDF le samedi 17 février 2007 a dit deux choses qui me paraissent essentielles :
1.La culture ne doit pas être entièrement marchande, ne peut pas être entièrement soumise à l'Etat.
2.Un des impératifs de la politique culturelle, c'est que la culture doit être une culture de peuple. Je dis bien de peuple et non de masse.
Ce sont deux points qui me paraissent fondateurs. Et j'ai également beaucoup apprécié sa vision du rôle de l'Etat sur la culture :
On a vécu avec l'idée qu'il n'y avait qu'un référent, l'Etat, ayant en face de lui des individus inorganisés. Depuis la loi Le Chapelier (1790), on a interdit l'organisation de la société pour que l'Etat reste seul. Il faut tourner la page. Un certain nombre d'actions de service public, d'actions publiques, peuvent être incitées par l'Etat, mais n'ont pas à être conduites par l'Etat.