C'est toujours distrayant de lire Brighelli dans ses oeuvres : bien qu'il fasse souvent des observations de bon sens, il a une allergie à la modernité qui ne laisse pas de bien me faire rire. Analysant le programme pour l'école de François Bayrou, il attribue globalement un satisfecit au candidat centriste mais bute sur le numérique. Manifestement, l'e-learning (mais si ça existe en français, mon cher Jean-Paul, cela s'appelle l'enseignement à distance et le CNED - Centre national d'enseignement à distance - le pratique de longue date !) lui génère une grosse éruption de boutons.
Sur le fond, que dit Brighelli : qu'il est fâcheux de donner à de jeunes élèves des ordinateurs parce qu'ils passent leur temps à jouer plutôt que d'étudier. C'est ce que j'appelle l'effet console de jeu. Sur ce point, c'est aussi mon avis. Si vraiment on décide que des collégiens utilisent des ordinateurs, il faut brider les machines et les accès à la mode de Dracon : pas de jeux, accès internet restreints à une sélection de sites jugés fréquentables et intstructifs.
Mais pour le reste, Brighelli s'en prend aux copié-collé made in Wikipedia. Parce que c'était mieux les copié-gratté made in Universalis ou Petit Robert d'antan ? Très mauvais procès fait à l'encyclopédie en ligne. Le problème, c'est la demande. Quand un enseignant veut qu'un élève fasse une recherche, il doit lui faire savoir qu'il compte l'interroger sur ce qu'il aura retenu de la recherche en question. Nul doute qu'une telle exigence poussera à la rationnalisation du dit copié-collé.
Le grand plan du numérique que veut Bayrou ne me paraît donc pas insensé. En soi, je pourrais en penser autant de celui d'Hollande si je ne connaissais pas par trop bien les Socialistes et la gauche en général. Ils confondent l'outil (donc le moyen) et son but. A gauche, le numérique est un objectif en soi (tout comme dans les diverses officines de l'UMP au demeurant) : c'est bien là où le bât blesse, et c'est, au fond, la nature même d'un tel projet qui provoque des réactions épidermiques chez des individus comme Brighelli.
Le pédagogisme a tué l'informatique comme il a flingué la pédagogie. De même qu'il a fait de la pédagogie une idéologie il fait de l'informatique le Graal universel de la très sainte pédagogie.
Mais en soi, ni la pédagogie ni l'informatique ne sont à condamner. La première est une passionnante science humaine, la seconde une technologie aux ressorts et aux apports prodigieux.
Les pédagogistes ont sans nul doute entâché ce qu'ils voulaient défendre par des comportements sectaires et malhonnêtes, mais leurs adversaires pourraient bien se tirer une balle dans le pied en s'obstinant à jeter le bébé avec l'eau du bain...