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peine de mort

  • Peine de mort, le moment ou jamais d'en finir !

    Je viens de prendre connaissance d'une information énorme : si le sondage dont Le Monde rend compte est exact, Obama a une occasion unique d'en finir avec la peine de mort aux USA.

    On voit souvent les Américains comme de fervents partisans de la Loi du Talion et accrocs aux chaises électriques et aux injections létales ? Eh bien rien n'est plus faux, apparemment.

    70% des Américains seraient favorables à un remplacement de la peine de mort par une perpétuité réelle avec ou sans possibilité de sortie.

    Obama tient sa chance d'entrer dans l'histoire : le Président qui abolirait la peine de mort aux USA. Je ne dis pas que c'est facile à faire, surtout avec les Républicains majoritaires au Congrès, et également si l'on considère que les États disposent de pouvoirs discrétionnaires ou presque sur le sujet.

    Mais voilà, quand un tel mouvement traverse l'opinion, il ne faut surtout pas le laisser échapper. Des dizaines et des dizaines d'innocents ont succombé après des procès iniques, bâclés, scandaleux, bien souvent.

    Il y a eu un appel du Conseil des Droits de l'homme de l'ONU basé à Genève pour abolir la peine de mort la semaine dernière. Bon, pas évident, parce que ce qui fait tache, là-dedans, c'est de devoir écouter les recommandations d'états comme la Lybie, le Pakistan ou encore l'Arabie Saoudite. 

    Mais les USA devraient passer outre la composition de ce Conseil et entrer de plein pied dans le concert des nations civilisées une bonne fois pour toutes...

  • Grenoble, la police fait son travail

    Je vois sur la Toile beaucoup d'internautes s'indigner de l'apparente absence de réaction de la force publique après les menaces qui pèsent sur des policiers de la BAC. L'ami hashtable, notamment, titre sur la peur panique de la place Beauvau. A sa place, je ne m'avancerais pas à une conclusion aussi hâtive.

    Éric Le Douaron, le nouveau préfet de l'Isère, est loin d'être un débutant. Ce n'est pas parce que la police ne fait rien de visible qu'elle n'agit pas. Il me semble, au contraire, que sa stratégie prudente n'est pas mauvaise. Pas de déclarations à l'emporte-pièces, pas de grands moulinets, mais de l'action. Je suis à peu près certain que pendant que la racaille s'imagine avoir flanqué la trouille à la force publique, dans l'ombre, le renseignement opère pour tenter d'identifier les auteurs des menaces.

    Mettre les familles en sécurité est une bonne chose. Ouf ! Enfin un chef de police qui ne considère pas ses troupes comme de la chair à canon.

    Sur le terrain, des choses se passent, avec des saisies d'armes. Ce qui compte, in fine, ce ne sont pas les déclarations de quelques voyous, mais l'issue des enquêtes. Ce serait un beau coup que d'attraper les auteurs des menaces et leur coller plusieurs années de prison pour menaces de mort aggravées. Patience, patience, pour une fois, les méthodes de ce super-préfet me donnent plutôt confiance.

    A gauche, on a une curieuse manière de relater l'histoire de Karim Boudouda, le braqueur d'un casino. Manifestement, il aura échappé à mon privilégié favori qu'un homme armé est un homme dangereux dès lors qu'il vient d'utiliser son arme (donc de menacer de mort) pour commettre un délit. Le privilégié fait comme si Karim Boudouda avait fait l'objet d'une exécution en bonne et due forme. Quelle confusion des genres ! Comment peut-on comparer la peine de mort et l'exercice de la protection des citoyens par la police ?! Non, Privilégié, dans des circonstances extrêmes comme celles-là, les forces de police doivent trancher. Un homme dangereux doit être arrêté à tout prix, sa vie en fût-elle le prix s'il n'y a pas d'autres solutions. Le respect de la loi demeure la meilleure des assurances-vie, je le maintiens.

    Bien sûr, il est malheureux que ce jeune homme ait payé de sa vie ses errements, et toute personne censée aurait souhaité une autre issue pour lui, et en fait, ce que je déplore à notre époque hyper-technologique, c'est notre incapacité à munir les forces de sécurité d'armes incapacitantes et/ou neutralisantes plutôt que d'armes létales. Les forces de police ne devraient pas être amenées à devoir opérer de tels choix. A défaut, il n'en reste pas moins que ce sont l'ordre et la sécurité des personnes qui doivent être privilégiés s'il y a danger mortel.

  • Robert Ménard victime d'un mauvais buzz

    On passe son temps à faire des explications de textes, sur la Toile, je trouve ; la grande affaire de ces derniers jours, ce sont les propos de Robert Ménard sur ses priorités de journaliste. La presse et pas mal de blogueurs, avec un bel ensemble, en a tiré la conclusion qu'il défend la peine de mort.

    Encore une assertion aussi débile que fausse : Robert Ménard a simplement dit que dans tout ce qui était sur le feu et qui urgeait, obtenir la grâce d'un Dutroux n'était pas vraiment une priorité, c'est tout. Je suis exactement de son avis.

    A titre personnel, ce n'est pas pour des raisons philosophiques que je suis contre la peine de mort, mais en raison des graves dérives qu'entraîne systématiquement son application. En soi, voir griller un Dutroux sur une chaise électrique ne m'empêcherait pas de dormir. Et je ne me mobilise pas pour obtenir la grâce de tous les condamnés à mort ; c'est seulement quand j'ai un dossier en main que je juge convaincant que j'écris si une condamnation me semble particulièrement injuste.

    Je crois que Robert Ménard a exprimé à peu près le même avis. Je rappelle ses paroles :

    «On profite de ce qu’il semble être une erreur judiciaire pour nous fourguer le problème de la peine de mort. Je pense que ce sont deux débats différents. On peut très bien penser que pour cette affaire-là il faut faire un test ADN et être partisan de la peine de mort. Et être partisan de la peine de mort, ça ne fait pas de vous un monstre qui serait exclu de l’humanité bien pensante, convenable et tout».

    Et il précise lundi :

    «Ce que j’ai voulu dire, c’est que j’ai mieux à faire que de défendre des gens comme Dutroux, c’est peut-être parce que je suis père de famille».

    Il a tout à fait raison. Je ne pense pas autrement avec la réserve, toutefois, que j'ai exprimée : je maintiens que l'application de la peine de mort en,traîne systématiquement des dérives qui aboutissent à la condamnation d'innocents. L'État du Texas est un spécialiste de la chose, et je ne parle même pas des dictatures de toutes sortes...

  • Hank Skinner, justice américaine, justice de merde !

    On entend parfois certains faire l'apologie de la justice américaine pour son indépendance : et pourtant, quelle justice de merde ! J'ai lu l'intégralité du dossier Hank Skinner, qui devrait être exécuté demain : n'ayons pas peur de le dire, ce n'est pas une exécution mais un assassinat politique en bonne et due forme. C'est tout de même incroyable : Hank Skinner est accusé de l'assassinat de Twila Busby et ses deux enfants sans que la moindre trace ADN ne soit venue accréditer ce crime. Pire encore : Twila Busby a passé la soirée en compagnie de Robert Donnell, l'oncle de Twila, qui l'avait deux fois abusée par le passé, lui faisait des avances ce soir-là, et avait déjà été condamné pour viol sur une jeune fille. Or, un témoignage direct informe qu'il lui avait fait des avances ce soir-là et que Twila le craignait. De plus, Twila a été retrouvée corsage baissé et braguette ouverte sans qu'aucune expertise n'ait été faite. Notre justice a des défauts, mais jamais elle n'aurait laissé passer de tels indices sans examen sérieux.

    Hank Watkins Skinner est de longue date, bien avant son arrestation, un militant des droits de l'homme et des prisonniers. Il gênait depuis trop longtemps. Son exécution programmée est un assassinat politique. Ce soir-là, il avait consommé un cocktail d'alcool et de Xanax qui l'avait laissé à 90% léthargique : il ne pouvait pas avoir frappé avec  force qui que ce soit (Twila a été retrouvée avec le crâne fracturé).

    Par ailleurs, un ami de Twila, Ronnie Campbell, a téléphoné ce soir-là chez Twila, et il a entendu, au téléphone, une voix d'homme, autre que celle de Hank Skinner. Il a demandé à parler à Twila, mais c'est Scooter, l'aîné des deux enfants, qui a répondu, d'une voix apeurée, qu'elle était en conversation avec "quelqu'un". Ronnie est sûr d'avoir entendu Twila hurler dans la pièce.

    La justice américaine, elle me rappelle bien les manuels d'inquisition du moyen-âge : dans l'un des plus fameux d'entre eux, le Manteau des Sorcières, l'inquisiteur rédacteur de l'ouvrage reconnaît explicitement qu'il y a certainement des innocents condamnés dans les procès en sorcellerie, mais, qu'au final, ce qui compte, c'est de frapper l'imagination du bon peuple.

    Je ne sais pas quoi faire pour Hank Skinner : en France, nous avions une grâce présidentielle, en Amérique, la justice est..."indépendante"... Tu parles d'une indépendance...Il faudrait aussi préciser que Hank Watkins Skinner luttait contre les mauvais traitements infligés aux prisonniers par le shérif local, celui-là même qui l'a arrêté...

    Quelques précisions supplémentaires chez Bug Brother, qui a lu, tout comme moi, le dossier.

    Le Texas a fourni vraiment à l'humanité ce qu'elle compte de pire : après Daboliou, des exécutions à tire-larigot sans contrôle, sur la foi de témoignages faisandés, et de préférence contre des gêneurs ou des individus sans défense.

    Bref, il faut lire le dossier et se faire une idée, mais une nouvelle fois, je maintiens que cette exécution a une claire allure d'assassinat politique dans la grande tradition des procès de la Guépéou au milieu des années 30.

    Moi, je suis tout de même très étonné de trouver l'Amérique au 18ème rang des démocraties complètes du classement de The Economist, avec une justice de cette teneur. En France, on n'en est peut-être qu'au 24ème rang, mais on n'en est pas encore à exécuter les opposants politiques.

    J'avoue que je suis un peu rageur, parce que je ne sais pas ce que je pourrais faire d'efficace pour alerter l'opinion publique américaine. Peut-être que Fred, qui a fait de la démocratie sans frontières le coeur de son blogue, et que je sais fin angliciste, pourrait dans l'urgence écrire un article en anglais, que nous pourrions alors tenter de propager sur la blogosphère et la twittosphère américaines ?

    Ah, peut-être que Robert Ménard pourrait faire quelque chose ? Là, c'est clair, c'est pas Dutroux...

  • Peine de mort, la crise pourrait sauver quelques vies...

    Les abolitionnistes ont trouvé l'argument choc aux États-unis pour renoncer à la peine de mort : son application coûte une fortune en maintenance, procès et contre-procès. C'est fort du collier que de voir Rue89 publier un article à ce sujet dans la rubrique économique tout de même... Cela dit, les abolitionnistes s'engagent tout de même sur une pente dangereuse : les Américains pourraient aussi décider d'accélérer les procédures, et puis surtout, une peine judiciaire, quelle qu'elle soit, ne devrait pas être fonction des circonstances économiques.

    Au Nouveau-Mexique, la peine capitale a été abolie : à vrai dire, l'un des contre-coups de l'apparition d'identification par l'ADN, ça a été de constater le total impressionnant d'erreurs judiciaires survenues dans les condamnations à mort ces trente dernières années aux USA. Là-bas, cela n'a pas eu l'air de faire ciller l'opinion, apparemment...

    Mais sur le fond, c'est la logique marchande qui finira pas avoir raison de la peine de mort là-bas : une condamnation à mort coûte dix fois plus cher, en moyenne, que la prison à perpétuité...

  • Peine de mort : constitutionnalisation de l'abolition

    Tribune d'Hervé Morin dans le magazine Valeurs Actuelles

     

    Le combat contre la peine de mort est un long combat. Il sera bientôt terminé dans nos lois mais il n’est pas fini dans les têtes, comme l’illustre le récent débat en France sur l’exécution de Saddam Hussein. Deux cents ans après que Le Peletier de Saint Fargeau ait demandé en 1791 l’abolition de la peine capitale, le vote dans quelques jours par notre Parlement de l’interdiction de la peine de mort dans notre Constitution est le dernier pas d’une longue marche. Plus de vingt-cinq ans après l’abolition de la peine de mort, le 9 octobre 1981, sur la volonté de François Mitterrand, Jacques Chirac fait bien de parachever l’œuvre de son prédécesseur.

    Reconnaissons le, il y avait du courage dans la décision de François Mitterrand en 1981 de dire aux Français que s’il était président de la République, il abolirait la peine de mort alors que l’opinion y était hostile. Valéry Giscard d’Estaing avait eu envie de le faire, il en avait été empêché par une partie de sa majorité. François Mitterrand l’a fait alors que les Français ne le souhaitaient pas. Et c’est bien ; et c’est cela la grandeur du politique : ne pas suivre systématiquement l’opinion, mais être à l’avant-garde, être un précurseur, même si c’est en contradiction avec ses concitoyens ; le décider quand même parce que l’on pense que c’est bien pour la communauté dont on a la charge.

    Si nous considérons que ce qu’il y a de plus précieux, c’est l’homme ; que personne, pas même la loi, ou la volonté du peuple n’a le droit d’attenter à la vie d’un homme ; que la peine de mort correspond au réflexe d’une société primitive légitimant la violence en l’inscrivant dans son droit alors qu’une société doit en appeler à la raison du coeur pour reprendre la belle expression de Tocqueville, c’est-à-dire conduire les citoyens à la vertu Républicaine et à l’intelligence collective, la peine de mort n’a pas sa place. Une société qui condamne la mort n’a pas le droit de la donner.

    L’abolition de la peine de mort c’est un acte de foi dans l’homme, mais aussi un acte de raison. Je sais qu’à chaque crime on a envie de mort ; je ne doute pas un seul instant que s’il fallait que l’on touche à l’un de mes enfants, l’envie de vengeance serait plus forte que tout et que je ne supporterais pas de voir l’assassin en vie… et un jour libre. Mais si je veux bien me raisonner – beaucoup – je me dis que cela ne changerait rien car le son de la voix de l’être cher ne sonnera plus, quoique l’on fasse.

    Refuser la peine de mort, c’est aussi un acte d’espoir dans l’homme qui s’amende, se répare. J’ai visité beaucoup de prisons, discuté avec beaucoup de criminels. A chaque fois, je n’oubliais pas ce que de plus atroce ils avaient pu commettre et ce que cela pouvait m’inspirer ; mais le travail sur eux-mêmes, la reconnaissance de leur propre ignominie font, qu’après une longue et nécessaire peine, ils ressortent de prison et réussissent parfois une belle réinsertion et surtout récidivent très rarement. En quittant le soir la prison, je me disais à chaque fois qu’on avait eu raison d’abolir la peine de mort.
    Mais je me disais aussi que la France n’avait fait qu’un bout de chemin en n’améliorant pas la condition pénitentiaire, afin de tout mettre en œuvre pour que la récidive soit la plus exceptionnelle possible et qu’après la peine sévère il puisse y avoir la rédemption de l’homme.

    L’échafaud disait Hugo, c’est le plus insolent des outrages à la dignité humaine, à la civilisation, au progrès. A moins de penser qu’avec la peine de mort, on élimine le crime, elle n’apporte rien dans la prévention de la délinquance. Toutes les études qui ont été menées démontrent que la peine de mort ne dissuade pas plus du crime que la prison. L’existence de la peine de mort est sans effet sur la criminalité. D’ailleurs, si c’était le cas, les Etats-Unis n’auraient pas trois fois plus de crimes que la France.

    Au lieu de la colère et de la vengeance inscrite dans nos lois – ce que représente la peine de mort – mettons au fronton de notre démarche « une sévérité puissante, calme et juste ».

    L’inscription de l’interdiction de la peine de mort dans notre Constitution, c’est enfin un message aux Chinois qui exécutent allègrement les opposants politiques, à certains pays du Golfe qui lapident des femmes seulement coupables d’avoir été amoureuses et aux Etats-Unis qui ont oublié qu’ils sont aussi le pays des Droits de l’Homme.