On entend parfois certains faire l'apologie de la justice américaine pour son indépendance : et pourtant, quelle justice de merde ! J'ai lu l'intégralité du dossier Hank Skinner, qui devrait être exécuté demain : n'ayons pas peur de le dire, ce n'est pas une exécution mais un assassinat politique en bonne et due forme. C'est tout de même incroyable : Hank Skinner est accusé de l'assassinat de Twila Busby et ses deux enfants sans que la moindre trace ADN ne soit venue accréditer ce crime. Pire encore : Twila Busby a passé la soirée en compagnie de Robert Donnell, l'oncle de Twila, qui l'avait deux fois abusée par le passé, lui faisait des avances ce soir-là, et avait déjà été condamné pour viol sur une jeune fille. Or, un témoignage direct informe qu'il lui avait fait des avances ce soir-là et que Twila le craignait. De plus, Twila a été retrouvée corsage baissé et braguette ouverte sans qu'aucune expertise n'ait été faite. Notre justice a des défauts, mais jamais elle n'aurait laissé passer de tels indices sans examen sérieux.
Hank Watkins Skinner est de longue date, bien avant son arrestation, un militant des droits de l'homme et des prisonniers. Il gênait depuis trop longtemps. Son exécution programmée est un assassinat politique. Ce soir-là, il avait consommé un cocktail d'alcool et de Xanax qui l'avait laissé à 90% léthargique : il ne pouvait pas avoir frappé avec force qui que ce soit (Twila a été retrouvée avec le crâne fracturé).
Par ailleurs, un ami de Twila, Ronnie Campbell, a téléphoné ce soir-là chez Twila, et il a entendu, au téléphone, une voix d'homme, autre que celle de Hank Skinner. Il a demandé à parler à Twila, mais c'est Scooter, l'aîné des deux enfants, qui a répondu, d'une voix apeurée, qu'elle était en conversation avec "quelqu'un". Ronnie est sûr d'avoir entendu Twila hurler dans la pièce.
La justice américaine, elle me rappelle bien les manuels d'inquisition du moyen-âge : dans l'un des plus fameux d'entre eux, le Manteau des Sorcières, l'inquisiteur rédacteur de l'ouvrage reconnaît explicitement qu'il y a certainement des innocents condamnés dans les procès en sorcellerie, mais, qu'au final, ce qui compte, c'est de frapper l'imagination du bon peuple.
Je ne sais pas quoi faire pour Hank Skinner : en France, nous avions une grâce présidentielle, en Amérique, la justice est..."indépendante"... Tu parles d'une indépendance...Il faudrait aussi préciser que Hank Watkins Skinner luttait contre les mauvais traitements infligés aux prisonniers par le shérif local, celui-là même qui l'a arrêté...
Quelques précisions supplémentaires chez Bug Brother, qui a lu, tout comme moi, le dossier.
Le Texas a fourni vraiment à l'humanité ce qu'elle compte de pire : après Daboliou, des exécutions à tire-larigot sans contrôle, sur la foi de témoignages faisandés, et de préférence contre des gêneurs ou des individus sans défense.
Bref, il faut lire le dossier et se faire une idée, mais une nouvelle fois, je maintiens que cette exécution a une claire allure d'assassinat politique dans la grande tradition des procès de la Guépéou au milieu des années 30.
Moi, je suis tout de même très étonné de trouver l'Amérique au 18ème rang des démocraties complètes du classement de The Economist, avec une justice de cette teneur. En France, on n'en est peut-être qu'au 24ème rang, mais on n'en est pas encore à exécuter les opposants politiques.
J'avoue que je suis un peu rageur, parce que je ne sais pas ce que je pourrais faire d'efficace pour alerter l'opinion publique américaine. Peut-être que Fred, qui a fait de la démocratie sans frontières le coeur de son blogue, et que je sais fin angliciste, pourrait dans l'urgence écrire un article en anglais, que nous pourrions alors tenter de propager sur la blogosphère et la twittosphère américaines ?
Ah, peut-être que Robert Ménard pourrait faire quelque chose ? Là, c'est clair, c'est pas Dutroux...