Je viens d'écouter l'interview de Jacques Delors sur France Inter via Marianne. Une petite remarque avant toutes choses : Marianne conlut un peu vite à une trahison de Jacques Delors parce qu'il cite les noms de Juppé ou de Fillon comme présidents possibles de la commission européenne. Il ajoute, ce que Marianne n'a pas relevé, "compte tenu du rapport de forces en Europe". C'est à dire, en gros, dans la mesure où le PPE serait majoritaire en Europe. Et il précise que si ce devait être les Socialistes (PSE) il aurait alors d'autres noms à proposer. Martine Aubry n'a donc pas de raisons de se plaindre de son père. Sur les propositions de Delors, je n'ai pas grand chose à redire, ce sont quasiment les mêmes que celles de Bayrou et du MoDem, particulièrement sur la solidarité européenne, une politique commune de l'énergie et la coopération entre États européens. Je déplore en revanche profondément qu'il demeure prisonnier de schémas politiques archaïques. Il ne cite pas même le nom de l'ADLE et encore moins du MoDem, qui manifestement n'existent pas pour lui. Consolation, en dehors de l'UMP et du PS, il n'y a pas d'autres forces politiques qui comptent de son point de vue. Bref, passons, on finit par s'y habituer, au MoDem (ou ailleurs). Espérons le détromper largement en juin...
Concernant Fillon et Juppé, moi aussi, mais seulement si le rapport de forces s'y prêtait, je ne serais pas contre leur candidature à la présidence de la commission européenne. Ce sont deux hommes politiques honnêtes et qui maîtrisent leur sujet. J'aurais une préférence pour Juppé, mais je pense que Fillon, qui a de la poigne, ne serait pas mauvais comme commissaire européen (encore que parfois buté). Parce qu'il en faut de l'énergie, et de la volonté, pour lutter contre l'indivualisme des États-nations incapables de s'entendre, par les temps qui courent, alors que ce serait tellement nécessaire. Le concert des nations, comme dit Jacques Delors : voilà ce qu'est l'Europe. Un concert dans lequel chacun joue sa partition, mais pas une partition commune. Prenons l'industrie automobile : il n'y a que 5 ou 6 gros constructeurs en Europe, ce devrait donc être possible de s'entendre ! c'est à juste titre que Delors cite cet exemple. Et pourtant rien. Et là-dessus, on ne peut vraiment pas dire que Nicolas Sarkozy (mais Fillon aussi, il gouverne !) donne le bon exemple. Pourtant en Europe, l'ADLE, auquel le MoDem appartient, fait des propositions concrètes qui recoupent exactement ce que François Bayrou et Corine Lepage disaient en septembre 2008.
On a dit que Sarkozy avait été un bon président de l'Europe. Je rectifie le tir : comme Delors, je pense qu'il a été un bon président du concert des nations européennes. Mais comme Président de l'Europe...il n'a rien fait évoluer. Je ne lui jette pas la pierre : pas plus lui qu'un autre. Le fait est qu'il nous manque des chefs d'état visionnaires et déterminés, par les temps qui courent, pour relancer l'Europe.
Malheureusement, j'ai le sentiment que les élections européennes prennent le chemin de se jouer sur des enjeux nationaux ; c'est, tout du moins, ce que vise le PS qui s'efforce d'en faire un référendum contre Nicolas Sarkozy. Quelle erreur fatale ! C'est à une toute autre échelle que ces élections doivent être pensées. Le MoDem a le mérite de faire ses premières propostions dans cette optique. Tenez, par exemple, le MoDem est parvenu à faire adopter une mesure-clef, tout récemment, pour lutter contre le dumping social : il ne sera plus possible de se cacher derrière un sous-traitant pour sous-payer outrageusement un travailleur. Bien vu Jean-Marie Beaupuy (euro-député MoDem à l'origine de cet amendement). Voilà un embryon d'Europe sociale qui se met enfin en place.
Commentaires
Je trouve quand-même très décevant de la part d'un grand Européen cette priorité de principe donnée à un candidat français. Delors a été Président de la Commission pendent 10 ans, jusqu'en 1994. Des Français sont à la tête de la BCE, du FMI, de l'OMC. Il ne faut quand-même pas pousser! Il y a des gens qui savent y faire, en dehors de l'hexagone. Ma préférence va à JC Juncker, mais il n'est pas candidat. Verhofstadt aussi serait un bon candidat. Il y en aurait sans doute côté allemand aussi.
Quant à Fillon, il a été partisan de Séguin CONTRE le Traité sur l'Union européenne (Maastricht) auquel nous devons cette formidable avancée qu'est l'euro. Et celui-ci nous sortirait du marasme intergouvernemental (concert des Nations dixit Delors) pour donner une impulsion plus européenne? Foutaises!
Je ne comprends pas plus cette initiative sur l'automobile. Quoi, on va donner du fric, et encore du fric à Peugeot, BMW, Saab, Daimler Benz? Pour enfin nous produire des bagnoles moins polluantes? L'Union a beaucoup fait au niveau de la réglementation des gaz d'échappement et plusieurs initiatives on été prises en termes incitatifs ces derniers temps. Mais vouloir refaire l'Europe par l'auto aujourd'hui, je trouve cela absurde.
Non, déçu de Delors. Il a beau jeu de critiquer les actuels dirigeants, ce n'est plus de son côté qu'ils trouveront une source d'inspiration.
En revanche d'accord sur votre mis au point sur le caractère très injuste du gros titre de Marianne. On a l'habitude, hélas.
:D mdr...
Remake des présidentielles et municipales, je sais je me répète mais je ne radote pas, du moins, pas encore! :)
On a ici l'occasion d'en apprendre petit à petit sur la Politique Européenne. Je ne dois pas être le seul à n'en pas être très familier. Je suis effectivement étonné de l' estime pour Fillon. Je note un manque de décisions fortes centrales de l'Europe pour sortir de la crise notamment dixit Delors pour l'Automobile et l'Energie. On a quand même l'impression que les USA ont mis le Paquet dans un style pour sortir de la crise et que l'Europe, en l'état actuel, trop inégale par pays en compétitivité chez elle, attend pour raccrocher après.
Hors Europe ce que dit aussi Delors, parait bien terne.
Un peu de spleen aussi ici !!
Force est de constater que le discernement du vieil homme est altéré car outre le grossier contre-sens politique de cette observation, il évoque publiquement deux nationaux en lieu et place d'un autre européen.
Belle démonstration chauvine d'objectivité !
Fillon et Juppé ont le profil "non écrit", c'est à dire que les chefs d'états veulent obligatoirement un ancien premier Ministre comme comme président de la commission européenne.
A l'image de Pastel, je pense qu'ils n'ont aucune chance vu que la France est déjà à la tête de 3 organismes internationaux importants.
Si Delors donne cette position c'est que les socialistes européens sont divisés sur la personnalité à soutenir et même s'ils gagnaient les européennes ils ne soutiendraient pas le même candidat. les anglais et les espagnols soutiennent d'emblée Baroso, ce qui est une hérésie..... pourquoi le font-ils parce que Baroso a peu de personnalité et qu'il est ultra libéral ( dont adepte de la non régulation) ce qui en ces temps de crise et de remise a plat de certaines choses semble absurde!!!!!
Qui soutenir, voila une bonne question. si les socialistes ne proposent pas de candidat, l'ADLE doit le faire, sinon que penser de la démocratie européenne si les bruits de couloirs et les arrangements entre amis demeurent la règle!!!!!
Patience est mère de sureté.
Utiles précisions.
@Europium,
"Barroso n'a pas de personnalité" : effectivement, c'était son frère jumeau qui a posé sur la photo du sommet des Açores...et c'est son sosie qui a fait à Poutine une leçon de droits de l'homme en direct, en février dernier.
"Barroso est ultra-libéral" : oui bien sur, c'était un autre Barroso qui laissé passé le plan de sauvetage par l'Etat des constructeurs d'automobiles français....
En France, Barroso est une sorcière et vous perdez votre bon sens.
a propos de Barroso, voici ce que bon nombre pensent
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2008/04/barroso-prsiden.html
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2007/07/barroso-le-port.html
"Comme on peut le constater avec les rumeurs persistantes sur le renouvellement de José Manuel Barroso à la Présidence de la Commission, les Etats membres favorisent une personnalité qui est à bien des égards l'antithèse d'Obama. Barroso est faible, sans danger et ne soulève aucun enthousiasme. C'est donc dans un futur très, très lointain qu'on pourra voir dans l'Union européenne quelque chose de similaire à la dernière campagne américaine."
http://etoile.touteleurope.fr/index.php/post/2009/01/20/Jon-Worth-:-Barroso-est-lanthitese-dObama
"Europe confidentiel retient finalement une chose : "Durão Barroso est le candidat idéal des grands pays de l’UE plutôt pour tout ce qu’il ne représente pas que pour ce qu’il est. Ce n’est pas un leader charismatique qui puisse noircir les personnalismes de dirigeants tels que Sarkozy, Brown, Berlusconi".
http://etoile.touteleurope.fr/index.php/post/2009/03/20/Le-soutien-tacite-du-PSE-a-Barroso-suscite-lincomprehension-sur-la-Toile
juste un moment de plaisir
http://www.taurillon.org/Jose-Manuel-Barroso-demissionne-du-poste-de-President-de-la-Commission
Il reste une lueur d'espoir...
http://www.lemonde.fr/europe/article/2009/03/28/m-rasmussen-si-une-autre-majorite-se-degage-m-barroso-ne-pourra-pas-etre-reconduit_1173742_3214.html
@ europium : trop gros :-)
c'est effectivement trop gros mais ça montre quand même l'étendue du problème et les attentes de bon nombre...