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  • Logement social, Denis Badré dénonce l'État scizophrène

    Badre.jpgDenis Badré, sénateur MoDem, est intervenu lundi dernier lors d'un débat sur le logement social. Il observe que même quand le foncier existe, nombre d'obstacles s'opposent à la mise en chantier de logement. Il prend l'exemple notamment de l'archéologie préventive. Sur le fond, son argumentation ne vise pas la nécessité d'un examen préalable des vestiges par des spécialistes, mais plutôt les déclarations d'intention qui ne sont pas suivies d'effets et qui au final bloquent tout.

    Les normes de compatibilité pour le logement ne doivent pas aboutir à des blocages parce qu'elles ont été établies pour faire des effets d'annonce, voilà, je crois, le sens de sa déclaration.

    «En dépit de la meilleure volonté du monde, les élus rencontrent souvent les plus grandes difficultés à lancer la construction de logements sociaux, surtout dans des zones sensibles. En tant que maire, j’en sais quelque chose !
    La plupart du temps, l’État est à l’origine de ces difficultés. Il m’est arrivé, un certain nombre de fois, de reprocher au préfet de réclamer la construction de logements tout en m’empêchant d’y procéder. Nous avons affaire à un État schizophrène qui, souvent fort légitimement, doit faire appliquer des lois dont les objectifs sont concurrents les uns des autres.
    Cet amendement, auquel tient beaucoup Daniel Dubois, élu de la Somme, concerne l’archéologie préventive. Notre collègue a noté que, tant dans sa ville d’Amiens que dans son département, riche en vestiges archéologiques, un très grand nombre de projets sont actuellement en attente, parce que les travaux de fouilles n’ont pas été lancés. Disant cela, je ne remets pas en cause la nécessité de ces derniers, mais il faut trouver une juste mesure.
    L’archéologie préventive souffre souvent d’un défaut de financement et d’un manque d’experts très spécialisés. Faute de tels experts et de financements, le temps passe et les projets ne voient pas le jour.
    Par conséquent, notre collègue Daniel Dubois propose que soit fixé un terme au-delà duquel le projet pourra être engagé, quand bien même les travaux de fouilles archéologiques n’auraient pas débuté.
    Je veux bien, madame la ministre, que le manque de foncier constitue un problème majeur. En l’occurrence, il y a du foncier, mais il n’est pas disponible. Il faut donc se donner les moyens de le rendre disponible lorsqu’il existe.
    M.  Repentin déclarait tout à l’heure qu’il fallait faire du « grenello-compatible ». Mais il faut aussi faire de l’agricolo-compatible, du scientifico-compatible et de l’archéo-compatible.
    Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer si la situation évoquée par M. Dubois est strictement locale ou si elle concerne l’ensemble du pays ?
    Le présent amendement a pour objet de mettre un terme à la période pendant laquelle la priorité est donnée à l’archéologie sur le logement social.»

    Denis Badré réagissait ainsi à un amendement du sénateur Nouveau Centre Daniel Dubois sur l'achéologie préventive : l'idée est que si aucune opération de fouilles n'a débuté dans les six mois suivant l'arrêté d'autorisation de fouilles, ce dernier soit levé.

    Pour ma part, je serais plus modéré que ces deux sénateurs, et je les mets en garde : il ne faudrait pas  prendre en otage l'archéologie préventive. Mais en revanche, le fait est que des moyens supplémentaires devraient être donnés à cette branche de l'archéologie afin qu'elle puisse remplir sa mission. Il y va de la conservation de notre patrimoine national. Cela dit, les lois ne doivent en effet pas aboutir à une situation de blocage.

  • Un impôt européen ?

    Badre.jpgA l'occasion des travaux qu'il a menés au nom de la commission des finances du Sénat, sur les ressources budgétaires propres de l'Europe, Denis Badré, sénateur UDF-MoDem, s'est interrogé sur les carences du mode de financement actuel du budget communautaire. Je trouve sa réflexion très fine et très intéressante. Il aboutit logiquement à la nécessité d'élaborer un budget indépendant des égoïsmes nationaux. Or, un tel budget ne peut être la résultante de la contribution de chaque état(il explique très bien pourquoi dans cet extrait de son rapport) et donc, seul un authentique impôt européen, directement perçu auprès des contribuables européns permettraient aux différentes politiques européennes d'avoir une véritable autonomie et d'échapper aux calculs comptables à court terme.

    Il y a là, je le crois, une piste de réflexion importante, au sein du MoDem, à explorer, sur les questions européennes. Voulons-nous d'un budget indépendant ou non pour l'Europe, c'est à dire directement perçu par les instances européennes ? Pas facile, d'autant qu'il faudra que chaque pays l'accepte...


    Des ressources essentiellement constituées par des contributions des États membres privent, en premier lieu, le budget communautaire de toute autonomie et accréditent auprès des opinions publiques nationales l'idée que la Communauté dispose d'un « droit de tirage » sur la richesse nationale. Elles conduisent, par ailleurs, à faire voter recettes et dépenses par deux autorités politiques différentes, ce qui peut paraître singulier en termes de « démocratie budgétaire ».

    Par ailleurs, la prééminence des contributions nationales entretient la logique du « taux de retour », qui veut que chaque État membre ne consente à contribuer au budget communautaire qu'à la condition de se voir garantir des retours nets suffisants au titre des diverses politiques communes mises en oeuvre sur son territoire. Outre qu'elle est assez peu compatible avec l'esprit de solidarité que l'on espère inspirer la construction européenne, cette « focalisation » sur le « juste retour » repose sur des considérations économiques contestables, dans la mesure où n'entre en ligne de compte, pour le calcul des soldes nets, que la différence entre dépenses réparties et contributions au budget de chaque État membre. Se trouvent ainsi évacuées toutes les « externalités positives » générées par l'appartenance à l'Union, parmi lesquels les gains économiques tirés de l'appartenance au marché intérieur, du développement de réseaux transeuropéens ou plus encore de la stabilité politique durable garantie par l'existence de l'Union.

    De surcroît, c'est en application de la logique du juste retour qu'on été institués des « corrections » et autres « rabais sur rabais », dont les équations en cascade contribuent largement à rendre les finances communautaires parfaitement inintelligibles pour le citoyen européen.

    En second lieu, la crainte des États membres d'assister à une croissance exponentielle des dépenses communautaires ruinant les efforts de discipline budgétaire nationale les a également conduits à en plafonner le montant. Cette intention louable aboutit toutefois à cantonner le budget communautaire dans des dimensions très largement insuffisantes pour lui permettre de jouer les rôles de stabilisation, d'affectation et de redistribution que la théorie économique assigne à la politique budgétaire. D'une manière générale, on peut regretter que les modalités de financement du budget communautaire aient assez peu été considérées sous l'angle de leur possible efficacité économique. De ce point de vue, un budget plafonné a-t-il un sens, si l'on admet que ce ne sont pas les politiques publiques qui doivent être calibrées sur les moyens, mais les moyens qui, dûment justifiés, doivent accompagner des politiques préalablement définies et acceptées ?


    Quelles pistes de réforme ?

    Le diagnostic d'un manque d'autonomie, de lisibilité et d'efficacité économique du mode de financement du budget communautaire étant posé, plusieurs pistes de réformes ont été esquissées pour remédier à ces défauts.
    a) Les solutions a minima

    Trois propositions a minima consisteraient à :

    1) opter pour le statu quo ;

    2) remédier à la complexité née de la multiplication des correctifs ad hoc consentis à certains États membres fortement contributeurs nets en établissant un mécanisme de correction généralisée à tous les États ;


    3) instaurer d'une unique contribution assise sur le RNB (NDLR : Revenu National Brut) des États


    Votre rapporteur ne souscrit à aucune d'entre elles. Un mécanisme de correction généralisée ne permettrait pas de sortir du débat sur le juste retour, qu'en définitive il entérine, et l'instauration d'une contribution RNB unique reviendrait sur la notion même de ressources propres et nierait la spécificité de l'Union européenne en calquant son mode de financement sur celui des autres organisations internationales.


    b) La nécessité de véritables ressources propres

    Plusieurs propositions visent en revanche à instituer des ressources propres directement perçues par la Communauté auprès des contribuables (citoyens et opérateurs économiques). Cette solution présente l'avantage de répondre simultanément aux trois principales critiques adressées au financement actuel du budget communautaire :

    1) une perception directe auprès du contribuable, le cas échéant couplée à une affectation du produit à une politique commune bien identifiée, permettrait de restaurer le lien entre le citoyen-contribuable et le financement communautaire et de faciliter la compréhension des finalités en vue desquelles les crédits communautaires sont mobilisés ;

    2) un tel mécanisme diminuerait la propension à raisonner en termes de taux de retour et accroîtrait sensiblement l'autonomie des ressources communautaires ;

    3) ce prélèvement, assimilable à un « impôt européen », permettrait de modifier le comportement des agents économiques et de créer des incitations à remplir les objectifs que se sont données les diverses politiques communes. C'est ainsi l'efficacité économique du financement communautaire qui serait améliorée.

    Votre rapporteur n'ignore pas que l'impôt européen est souvent considéré comme un horizon lointain de la construction européenne. Ce scepticisme semble parfois moins fondé sur l'impossibilité technique ou l'absence de pertinence économique d'un tel impôt que sur la crainte de ses effets dans l'opinion. Il est certain que l'acceptabilité politique d'une telle réforme serait conditionnée par sa mise en oeuvre à prélèvement constant, et par une diminution à due concurrence des autres ressources.

    Au demeurant, l'instauration d'une telle ressource semble de moins en moins une « vue de l'esprit », en particulier si l'on s'en réfère à un certain nombre de propositions précises déjà formulées et évaluées, qu'il s'agisse de la création d'un pourcentage additionnel de TVA perçu au profit des Communautés, d'une taxe kérosène ou d'une taxe CO2, d'une contribution sur les bénéfices des sociétés ou du transfert vers l'Union d'une partie des droits d'accise perçus sur les consommations de tabac et d'alcool, dont le produit serait « fléché » vers la politique communautaire de protection des consommateurs et de santé publique.

    Quoi qu'il en soit, votre rapporteur attache, à titre personnel, beaucoup d'importance à ce que les débats à venir n'excluent pas d'emblée, et par excès de prudence, de telles pistes de réforme.

  • Les opinions publiques peuvent-elles construire l'Europe ?

    Badre.jpgUn point de vue très intéressant de Denis Badré, sénateur MoDem, sur le NON irlandais et sur la construction européenne. Je ne sais pas si je suis d'accord avec lui, mais je trouve ses arguments très pertinents. Il s'agit d'une intervention au Sénat lors de la séance du 17 juin 2008. Par ailleurs, il n'a pas forcément le même point de vue que François Bayrou sur la pertinence des référendums. En tout cas, réflexion intéressante sur la responsabilité des hommes politiques.

     

    Sur la question européenne plus encore que sur toute autre, je pense que, pendant un certain temps encore, il appartiendra aux politiques de « tirer » les opinions, et non le contraire !

    La réconciliation franco-allemande serait-elle intervenue aussi rapidement et profondément si l’on avait attendu que Français et Allemands la réclament ? Les Allemands étaient-ils spontanément disposés à abandonner leur mark au profit de l’euro ? Je n’ose imaginer l’issue de référendums qui auraient pu être organisés à l’époque sur de tels sujets !

    Ce n’est pas en « attendant » les opinions que l’on construit le monde. Les responsables politiques nationaux doivent « monter en ligne », naturellement porteurs de l’intérêt national – c’est leur rôle –, mais aussi, et peut-être désormais surtout, chargés de défendre, même si cela est moins immédiatement populaire, l’intérêt supérieur commun, que minent au contraire, jour après jour, les ravages provoqués par les égoïsmes nationaux qui se cachent derrière les « retours nets » et les « j’en veux pour mon argent » !

    Le jour où l’intérêt commun disparaît, l’idée européenne meurt. Avant de faire quelque procès que ce soit à nos partenaires, interrogeons-nous sur nos propres attitudes. Sommes-nous véritablement convaincus que le premier intérêt national à défendre est bien cet intérêt commun européen, et fondons-nous nos discours et nos choix sur cette idée ? En réalité, chez nous comme ailleurs, la tentation de la démagogie n’est jamais bien loin.

    Ma troisième réflexion concerne le couple franco-allemand.

    « Au moment où nous nous apprêtons à exercer la responsabilité de la présidence de l’Union, il est, pour nous Allemands, d’une importance décisive de lui redonner un élan durable. Seule une vigoureuse rénovation d’une relation franco-allemande qui a fait ses preuves peut permettre d’y parvenir. »

    Ainsi s’exprimait le 27 novembre 2006, à la veille de la présidence allemande de l’Union européenne, Richard von Weiszäcker, alors président de la République fédérale d’Allemagne. Remplaçons « pour nous Allemands » par « pour nous Français », et nous pourrons reprendre cette citation mot pour mot ! Faisons-la donc nôtre !

    L’Alsacien, le Rhénan que je suis se trouve intimement convaincu qu’il n’y a pas d’avenir pour l’Union si le couple franco-allemand n’assume pas solidairement sa responsabilité toute particulière à l’égard de l’Europe, si chacun des deux pays ne fait pas tout pour comprendre et respecter l’autre, pour s’en faire entendre et pour se placer, avec lui, au service de l’Union. Tout est là ! C’était déjà vrai dans l’Europe des Six ; ça l’est plus que jamais, même si c’est d’une façon différente, dans l’Union à vingt-sept !

    Il nous faut adresser à notre partenaire allemand un discours univoque, direct, confiant et engagé. Il ne peut plus être question entre nous – jamais, ni ouvertement ni de façon subliminale ! – d’arrière-pensées, de zones d’influence ou de leadership. En ce sens, l’accord de Hanovre sur l’Union pour la Méditerranée est venu très heureusement clore une bien inutile querelle, et le climat qui régnait à Straubing, comme les engagements qui furent pris dans cette ville, sont de bon augure pour l’avenir.

    Il est bon, enfin, que nous reprenions à notre compte, avec les Tchèques et les Suédois, la formule du « portage à trois » inaugurée par les Allemands avec leurs successeurs à la présidence, à savoir les Portugais et les Slovènes. La crise née du vote irlandais vient à point nommé souligner le bien-fondé de cette démarche. À tous égards, le Président de la République a bien fait de se rapprocher immédiatement de nos amis Tchèques.

    Aujourd’hui, même si, sans les apports du traité de Lisbonne, nous devrions pouvoir progresser au moins sur les dossiers essentiels du climat et de l’énergie et de la PAC, bien des efforts déployés pour préparer notre présidence risquent d’être compromis par le vote irlandais. Je suis heureux que, sur ce point crucial, les plus hautes autorités allemandes et françaises aient choisi de réagir conjointement.

    Le vote des Irlandais, auxquels l’Europe a pourtant offert un avenir qu’ils n’osaient imaginer voilà cinquante ans, pose de véritables questions, d’ordre général. Certaines d’entre elles étaient d'ailleurs apparues dès le mois de juin 2005, à la suite des votes français et néerlandais.

    Le traité a été présenté comme « simplifié », ce qui fut sans doute une erreur, je n’hésite pas à l’affirmer : un texte appelé à prévoir de manière précise le fonctionnement d’une Union de vingt-sept États ne peut être ni très concis ni réellement simple. À la vérité, sa nature le qualifie plutôt, évidemment, pour un examen par voie parlementaire, c’est-à-dire par des responsables politiques auxquels les peuples ont précisément donné mandat de traiter de tels sujets. Nous devons au passage réaffirmer avec force que la voie parlementaire est parfaitement démocratique !

    Il se trouve que l’Irlande, en l’état actuel de sa constitution, devait tout de même emprunter la voie du référendum. Or, avec une telle procédure, hélas, démocratie peut rapidement rimer avec démagogie ! S'agissant d’un texte complexe, le « oui » est naturellement plus difficile à défendre qu’un « non » dont les tenants vont « surfer » sur toutes les inquiétudes, que celles-ci aient ou non un lien avec le traité. C’est ainsi que l’on commence à jouer avec l’Europe… Il est tellement plus facile de détruire que de construire !

    Bien sûr, ce n’est pas là une raison pour baisser les bras devant le fantastique besoin d’explications exprimé par tous les Européens. Cette attente, ce besoin, la présidence française doit les entendre et y répondre ! Pour l’Europe, nous sommes engagés dans un exercice de démocratie très exigeant.

    Avec ce référendum, nous étions confrontés au cas de figure le plus difficile, celui où un « non » semblait sans conséquences pour le citoyen qui l’exprimait, où le défoulement était donc gratuit et n’impliquait certainement pas, en tout cas, une sortie de l’Union. Il est si agréable, et tellement plus facile, de prendre ce qui est bon sans avoir à en payer le prix !

    Nous voyons se heurter ici deux principes démocratiques. Comme tous les Européens, les Irlandais doivent pouvoir s’exprimer et rester maîtres de leur avenir. Toutefois, leur vote entraîne des conséquences pour nous, qui aspirons également à maîtriser notre destin, lequel se trouve être commun avec le leur !

    Il ne s'agit donc plus d’une affaire purement intérieure à l’Irlande. Si, en démocratie, chacun a le droit de voter, il est aussi un moment où, tous étant concernés, la majorité fait la décision. Comment, dès lors, concilier ces deux fondements de la démocratie ? Aujourd'hui, nous devons nous fixer comme objectif incontournable la ratification du traité, ne serait-ce que parce que celui-ci représente un progrès dans le sens de la démocratie – ce principe au nom duquel, précisément, certains le refusent ! On ne pourra aller bien loin à vingt-sept avec un Conseil européen sans existence juridique, à une époque où les peuples attendent légitimement de lui qu’il intervienne de manière transparente et forte sur des sujets aussi sensibles que les frontières, les nominations ou le budget.

    Je rappelle au passage qu’à Philadelphie la Convention américaine avait prévu que la constitution des États-Unis serait adoptée si neuf des treize États fondateurs appelés à se fédérer l’acceptaient. Nos maux actuels viennent de ce que nous avons été beaucoup plus démocratiques dans nos exigences que ne l’étaient les Américains voilà deux siècles !

    Aussi, monsieur le secrétaire d'État, faudra-t-il que la présidence française appelle chacun des vingt-sept États membres à la fois au pragmatisme et à la responsabilité. Il ne peut être question de renoncer ou de repartir pour une énième tentative avec un nouveau texte « super-simplifié ».