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Où sont les ouvriers ? Où est le peuple ?

Je parcours, depuis quelques jours, les pages de l'ouvrage de deux sociologues, Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin (tiens, un ancien du MRC...). Il s'intitule "Recherche le peuple désespérement". Ce livre s'adresse préférentiellement à la gauche, mais il m'intéresse beaucoup, parce que les observations faites par les deux auteurs recoupent une partie de mes interrogations et également bon nombre de mes observations.

En particulier, on a cru, au sein du landernau politico-médiatique (et pas seulement à gauche), à l'exclusion, malheureusement et il faut le dire, du Front National, que la classe ouvrière n'existait plus en France. Le PS, les communistes et même les Trotskistes se sont satisfaits des populations multi-assistées des  logements sociaux des centre-villes ou des proches banlieues qui leur permettaient de se trouver une caution populaire à bon compte. Pendant ce temps, les classes populaires, repoussées bien au-delà des grandes banlieues, plongées dans une grande détresse, précarisées, affrontaient seules et abandonnées de plein fouet les effets pervers de la mondialisation.

Parce que l'industrie s'est réduite comme peau de chagrin, la gauche qui ne connaissait plus de classes populaires hors la bonne vieille industrie issue du XIXème siècle, n'a pas vu la précarisation croissante de tout un secteur de la population, péri-urbanisée, parfois rurale. Il a été plus simple d'y voir des beaufs, des électeurs du FN, des mineurs politiques dont il était préférable de limiter l'exercice des droits civiques, ces derniers ayant tendance à voter pas toujours comme il le fallait.

La gauche verdâtrisée a ignoré tous ces hommes et ces femmes, qui font jusqu'à 5 heures de trajet aller et retour pour venir travailler dans les métropoles, vivent dans des communes-dortoir de moins de 1000 habitants, n'ont d'autres choix pour se déplacer que d'utiliser leur automobile et ne connaissent plus des services publics que le nom que l'on en donne aux émissions télévisées, leur principale distraction.

Qui s'intéresse à ces gens ordinaires, qui vivent généralement de 100 à 200 kilomètres des grands centres urbains ? Quels partis politiques s'y déplacent ? Non, les préoccupations des populations boboisées des villes sont bien plus intéressantes, bien sûr !

Qui s'intéresse à la question ne sera pas étonné de découvrir que ces nouveaux ouvriers sont désormais en grande majorité des ouvrières...des femmes seules, souvent avec un enfant ou plus.  La demande de productivité toujours plus forte a rendu la vie impossible aux ouvriers qui travaillent encore dans les secteurs industriels, d'autant que le maintien de leurs usines et ateliers dépend désormais de leur propension à faire mieux et moins coûteux que ceux des pays qui pratiquent le dumping social. L'externalisation des services, leur automatisation, mettent aussi sur le carreau les caissières, les opératrices diverses et variées, elles aussi soumises à des "objectifs" et à des cadences infernales.

La gauche, les verts, ont été très forts pour proposer de la culture, quelques allocations et empoisonner l'existence du petit peuple que désormais ces partis méprisent. Mais rien dans leurs propositions politiques, n'a été pensé pour leur redonner un espoir. Quant à la droite, sous l'égide de Nicolas Sarkozy, elle a consciencieusement appliqué le vieux principe qui dit que les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent... Les visites dans les usines ? de la poudre aux yeux. Même le vieux thème porteur de la sécurité (qui s'appuie sur la peur d'un déclassement social toujours plus violent pour ces populations fragilisées) aura fait long feu. Je l'ai dit ce matin, le gouvernement réduit toujours plus les moyens de fonctionnement de la sécurité intérieure : le peuple n'aura même pas cette consolation-là.

La précarité ne touche pas seulement des ouvriers sans qualification, c'est toute une génération de jeunes diplômés, désormais, qui est assomée par la vie chère, par les CDD et l'incertitude de leurs revenus, même à bac+5. Les jeunes sont les premiers à faire les frais de cette nouvelle donne. Bac+5 et le SMIG, cela devient désormais la norme pour une part croissante de la jeunesse diplômée. Et même pour ceux qui disposent d'un emploi statutaire, garanti à vie, l'avenir demeure incertain : n'est-ce pas Robert Rochefort, euro-député MoDem, qui observait récemment que dans l'Académie de Versailles, près de deux cent enseignants reçoivent une aide alimentaire d'urgence de la part des services du rectorat ?

Je n'ai pas fini de lire le livre de Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin, j'en reparlerai donc ici. Je pense que sa lecture est salutaire pour tous les mouvements politiques. Je doute fort de recevoir les solutions préconisées par les deux auteurs, encore que, mais, j'estime que les populations péri-urbaines devraient faire l'objet de l'attention particulière de chaque parti.

En ce sens, j'appelle le MoDem à ne pas se laisser boboiser, notamment par des enjeux écologiques plaisants dans le principe, mais dont ces classes sociales feraient encore les frais. Le MoDem a été, je le crois, l'un des premiers partis à envisager sérieusement la nécessaire réindustrialisation de la France. Jean Peyrelevade, en particulier, en affirme l'absolue nécessité en raison de l'amplitude de la valeur ajoutée qui caractérise cette production économique. L'industrie n'a pas seulement un rôle économique, elle a un rôle social.

Ouf, c 'est l'une des priorités absolues du nouveau programme du MoDem. Dans ce programme, le premier chapitre porte sur l'économie, et le 1er sous-chapitre sur l'emploi. Le 13ème amendement du projet est le suivant : Développer l’emploi industriel par la relocalisation de certaines fabrications en France et en Europe ; évidemment, il faut le faire. Il faudra plancher même très sérieusement sur le sujet.

Ce sont les conditions de travail qui viennent juste après, dans le document préparatoire ; il y a un amendement, mais il n'engage à pas grand chose. Ce devrait être un axe prioritaire de notre réflexion.

Ensuite, nous devrions mener une réflexion sur la précarité qui ne se limite pas à l'industrie, mais qui touche les services et l'agriculture (et les ouvriers agricoles, alors !!!).

Soyons très clairs : ce n'est pas la peine de blablater sur le développement durable auprès des populations péri-urbaines. Ils ont d'autres choix à fouetter. Il faut leur proposer des solutions concrètes : par exemple, l'implantation d'une usine de production de panneaux photo-voltaïques, du côté d'Agen, c'est une réponse concrète.

Bref, nous autres démocrates et libéraux, reprenons la main et tendons-là aux populations abandonnées à leur sort depuis trop longtemps. Et ce n'est pas du lumpen-prolétariat des cités dont je parle, mais bien des honnêtes citoyens qui se crèvent la carcasse à ramener trois francs six sous chez eux. Ceux-là, personne ne leur dit jamais rien : innovons et incarnons, au MoDem, une véritable rupture. Si François Bayrou veut pouvoir continuer à parler au nom du Tiers État, il doit le prouver.

Ce n'est pas seulement le MoDem que j'invite à réfléchir, mais aussi les libéraux, qui se sont complètement désintéressés des classes populaires depuis un moment. Quelles propositions libérales pour les ouvriers ? Voilà un beau et délicat sujet de réflexion que les libéraux s'honoreraient à traiter avec d'autres réponses que les seul critères de productivité et de compétitivité...

Commentaires

  • Beau billet. Totalement d'accord avec toi. Je serai preneuse d'un résumé de l'ouvrage.
    Et sans doute revoterai Modem aux élections ;-)

  • Salut Polluxe
    Merci. Ne t'en fais pas, je vais terminer le livre et j'en parlerai alors à nouveau ici. J'ai aussi certaines critiques à lui exprimer.
    Content que tu te retrouves dans les premières propositions du MoDem.

  • Bon billet.
    Il est aussi une forme de précarité dont on ne fait guère état.
    Il s'agit des travailleurs "pauvres". Ce sont celles et ceux qui n'ont pas d'autres choix que d'avoir un contrat de travail à temps partiel qui leur est imposé par leurs employeurs.

  • Merci pour votre papier, je l'ai publié sur mon blog.
    A vous lire,

  • Merci pour votre papier, je l'ai publié sur mon blog.
    A vous lire,

  • @L'Hérétique

    Merci de prendre la défense des petites gens et aussi
    De nous dire quels en sont les ennemis
    "
    La gauche, les verts, ont été très forts pour proposer de la culture, quelques allocations et empoisonner l'existence du petit peuple que désormais ces partis méprisent.
    "
    et quels en seront les sauveurs
    "
    Bref, nous autres démocrates et libéraux, reprenons la main et tendons-là aux populations abandonnées à leur sort depuis trop longtemps.
    "
    Voilà certes qui est peu rassembleur(et qui aux antipodes de mes opinions) mais a le mérite d'une très grande clarté.

  • Je l'ai déjà dit ici même je crois mais je le redis : je suis une femme seule avec des enfants, je gagne 1200 euros et je suis
    adhérente MoDem.
    Non, non et non ce mouvement n'est pas un parti de bobos ; il faut le dire et le redire, casser cette image véhiculée pour, une fois de plus, nous marginaliser.

  • @ alouette
    Alouette, félicitations pour votre courage. être toute seule et élever des enfants, c'est déjà un tour de force, mais avec peu de ressources en plus, c'est un exploit.
    Je tiens absolument à ce que notre parti soit au plus près des classes laborieuses et leur fasse des propositions concrètes et acceptables.

  • @Alouette

    N'ayez crainte, L'Hérétique va préserver les petites gens de toute "la gauche verdâtre", tout en faisant réfléchir longuement les libéraux (c'est qui exactement au fait ?) et quand ils auront bien réfléchi ils viendront à leur secours.
    (je précise je suis du Modem et n'ai pas du tout la même conception).

  • @Alouette

    Vous avez raison de ne pas prendre le Modem pour un mouvement de Bobo. Son Programme tout Nouveau est trés "Social" et tourné vers un esprit de Solidarité.
    D'autre part Le Modem, (sauf malheureusement exceptions), a souci d'ouverture et de dialogue envers les Ecolos, la Gauche et la Droite Sociale.
    - tout en ayant souçi de son indépendance -
    Espérons qu'une Vraie unité permettra de réaliser.

  • Très intéressant. Une mise en perspective avec de précédents billets de ce blog appellerait une joyeuse foire d'empoigne entre les rédacteurs... (peut-être mieux qu'une révélation de schizophrénie, hihihi)

    Les réflexions sur le développement durable sont déplacées (et d'ailleurs démenties quelques lignes après) : une politique qui ferait l'économie de ces questions n'en serait tout simplement pas (greenwashing & greenbusiness plutôt).

    Ne pas confondre non plus l'électorat d'un parti, et ses membres/élus/programmes (valable pour les Verts, le FN... le MoDem?) merci ^^

  • Je me permets de signaler qu'il semblerait (hé oui il faut être prudent avec les sondages mais quand les chiffres sont nets à ce point...) que plus de 75 % des gens du Modem sont favorables à des alliances avec la Gauche, ce qui ne veut pas dire, loin de là que les 25 % restants la rejette.

    J'aimerais bien connaitre le % de gens qui au Modem rejette la Gauche, en prime les verts et ce au nom de leur Libéralisme.

    Cela doit être infime pour ces antropopithèques (heureusement).

    Il y a 2 choses qui sont énervantes

    1)Que l'on en arrive à croire qu'ils soient représentatifs de quoi que ce soit au Modem
    (et bravo pour le foin qu'ils font en étant si peu)

    2)Qu'il n'y ait pas un peu plus de Démocratie Directe au Modem.

  • Je complète,
    ce qui va continuer à se passer si cette poignée d'antropopithèques est trés abusivement écoutée, c'est que tous les gens du Modem vont aller soit au PS ou même à la Gauche de la Gauche soit chez les écolos.

  • @ chui kalm : pas tant que ça finalement...

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