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Il faut réhabiliter le travail des adolescents

J'espère me faire traiter au moins une fois de sale capitaliste droitier, salaud d'exploiteur du peuple (je suis très sensible à la flatterie et rien ne me fait plus plaisir que l'on me dise que je suis un sale droitier réactionnaire) ou pire encore, de  néolibéral avec ce billet.

Puisque l'on évoque la dérégulation du droit du travail,  il y a une dérégulation à laquelle je suis favorable : autoriser le travail des enfants (du moins, des adolescents). J'ai lu intégralement le deuxième livre de Maria Montessori, De l'enfant à l'adolescent, et elle l'envisage très sérieusement.

Au début du chapitre Métamorphoses, elle écrit ceci à propos de l'enfant (07 à 12 ans) et l'argent : il faut, entre autres réalités, qu'il se rende compte de ce que doit représenter l'argent. Sans l'argent nous pourrions nous promener au milieu des choses les plus merveilleuses sans jamais pouvoir y toucher. Nous serions comme un oiseau dont le bec serait cassé, et qui mourrait de faim sur un tas de grains. L'argent est le moyen qu'a l'homme de se procurer les objets ; c'est pour cela qu'il emprunte un grand intérêt. Nous devons le considérer comme la «la clef de métal» qui ouvre la porte de la supernature. Il faut donc que les enfants acquièrent une expérience personnelle en achetant eux-mêmes des objets, et qu'ils se rendent compte de ce qu'ils peuvent acheter avec l'unité de monnaie de leur pays.

Joli, non ? C'est par une critique en règle de l'école secondaire, dans le chapitre L'enfant à la terre, qu'elle introduit et réhabilite le travail, je cite le passage le plus enblématique, à mes yeux, de cette réhabilitation (ça va plaire à Hashtable, je le sens) :

Le problème de la réforme de l'école secondaire ne sera résolu ni en supprimant la «culture», ni en perdant de vue la nécessité de préparer la jeunesse aux professions intellectuelles. Mais il est essentiel que cette préparation n'endorme pas les hommes dans un sentiment erroné de sécurité, et ne les rende pas incapables de faire face aux difficultés imprévues de la réalité, en les laissant ignorants du monde dans lequel ils sont destinés à vivre.

Plus loin, elle écrit :

La réforme essentielle consiste donc à mettre l'adolescent en mesure d'acquérir son indépendance économique. Elle vante alors la valeur du travail pour l'édification sociale de l'adolescent et précise : le travail en soi a une bien plus grande importance que le genre de travail auquel on se livre. Tout travail est noble. La seule chose indigne est de vivre sans travailler.

Nous y sommes donc. Elle fait alors l'éloge des petits boulots et engage les enfants, dès leur jeune âge, à monter de petites entreprises et à vendre le produit de leurs travaux.

Chapeau ! Un des avantages du travail des jeunes adolescents est notamment de les occuper, d'éloigner d'eux l'oisiveté, dont on sait qu'elle est la mère de tous les vices. C'est ce que disaient nos anciens et industrieux Romains (le proverbe est d'origine latine) et ils avaient bien raison. Nul doute que les adolescents qui passent leur ennui en incendiant des véhicules ou en les caillassant eussent été bien mieux à pratiquer une activité artisanale ou commerçante. Et en effet, cela leur permettrait de rentrer de plein pied dans le monde social. Maria Montessori a raison.

Le salaud d'exploiteur du peuple que je suis, suppôt du capitalisme pré-fasciste et de la finance internationale, pense donc qu'il serait bon de rouvrir juridiquement le dossier. Les stages en entreprise ont été une brèche dans le principe, mais bien petite, et largement insuffisante. En outre, compte-tenu des très nombreux loisirs des adolescents aujourd'hui, je ne suis pas convaincu qu'il soit bien utile de les faire travailler sur le temps d'école. Cela pourrait se faire soit dans via des classes aménagées avec des programmes aménagés, soit tout simplement sur le temps libre qu'ils ont en abondance et dont ils ne savent généralement pas quoi faire...

Commentaires

  • Espèce de sale capitaliste droitier, salaud d'exploiteur du peuple

    bon maintenant je vais lire le billet

  • Pour les stages en entreprise, le problème c'est qu'ils ne sont pas rémunérés, ça apprend aux jeunes à se faire exploiter, mais c'est tout.

  • mes fils ont commencé à bosser à 16 ans durant leurs vacances,dans les champs de maïs, travail fatigant et peu rémunérateur.. ça leur a permis de comprendre la valeur de l'argent et ce que voulait dire "gagner son pain à la sueur de son front"...à 18 ans, ils ont bossé dans le batiment comme simples manoeuvres, à casser des enduits, trimballer des brouettes de gravats, dans la poussière, ils rentraient épuisés et dégoutants..
    une bonne école pour des ados plutôt très bons élèves qui sont devenus ingénieurs et cadres..et qui ont appris que le dur labeur des ouvriers est digne de respect..
    si tous nos valeureux élus et énarques avaient fait la même chose, on n'en serait peut-être pas là..car il y a effectivement des jeunes désoeuvrés, qui ne voient pas l'intêret du travail et la valeur de l'argent, mais les élites, elles ,sont aussi condamnables , parce qu'elles se croient au dessus des autres, par le pouvoir de l'argent, bien ou mal gagné...et méprisent les petites gens qui suent sang et eau pour un salaire de misère... des 2 catégories, on peut se demander laquelle est la plus coupable...

  • sale néolibéral
    moi j'ai bossé tous les juillets de 16 à ... x ans pour payer mes vacances (pompiste à la station après le péage de Fleury en Bière, dans une combi verte BP... waw les pourboires..., chez Mc Do, chez Gibert, au Conseil Régional PACA, là c'était excellent, j'étais "huissière", j'ouvrais la porte à Jean Claude GAudin quand il sortait de l'ascenseur) et avant, juillet chez ma grand mère, c'était ramassage de haricots ou lavage de bagnoles....
    ah pardon, je suis une vieille catho réac...

  • Je connais trois jeunes de 14 ans qui ont voulu apprendre à faire du pain pendant leurs vacances. une semaine à avoir les mains dans la farine (des garçons).
    Le but n'est pas du tout le même.... mais j'ai adoré l'idée. Le pain, tout un symbole.

  • Mon fils a 20 ans, déscolarisé depuis 5 ans, n'a jamais travaillé.
    Ma fille a 18 ans (enfin, une des 2), fait des extras, bosse dès qu'elle peut, et est parti bosser 2 mois en Angleterre.
    La petite de 13 ans est impatiente d'avoir 16 ans.

    A 16 ans, ma mère m'a mis des coups de pieds au cul et pistonné pour que je bosse au Prisunic de Vincennes.
    J'ai fait 1 été puis tous les samedis, jours fériés et la moitié des vacances.
    J'avais droit au PEE et me faisais un bon salaire à l'année.
    Lorsque j'ai laché la fac, ils m'ont accueilli bras ouverts.
    Riche expérience à tout point de vue.
    Merci maman !

    Tout est là : foutez des coups de pied au cul des mômes (mon garçon n'en a pas eu assez).
    Et les stages = caca boudin quand je vois que certaines grandes banques rémunèrent des stagiaires de l'IUT avec des... sacs de sport même quand ils bossent bien

  • En Allemagne, les choses sont claires.

    http://www.biallo.de/finanzen/Soziales/ferienjobs_ab_welchem_alter_dar.php

    La loi partage les adolescents en plusieurs groupes d'âge:

    Les adolescents peuvent travailler à partir de 13 ans pour des jobs comme baby-sitting, distribuer les journaux et prospectus, etc...

    ...jusqu'à deux heures de travail par jour ouvrable, c'est-à-dire au maximum 10 heures par semaine.

    Pendant la scolarité, cette activité ne peut s'effectuer au-delà de 18 heures, pendant les vacances, plus longtemps.

    A 15 ans, les adolescents peuvent travailler quatre semaines par an à temps plein. Sont autorisées les 40 heures par semaine, 8 heures par jour.

    Le temps de travail doit être compris entre 6 heures et 20 heures. Les dimanches et jours fériés, le travail est interdit. Mais ici, il y a de nombreuses exceptions, notamment dans les hôpitaux, maisons de retraite, les magasins, les restaurants et dans l'agriculture.

    À partir de l'âge de 16 ans les jeunes peuvent travailler de 5 à 21 heures, dans des restaurants jusqu'à 22 heures. Pendant la période de récolte dans l'agriculture, il peut travailler tous les jours jusqu'à neuf heures par jour.

    La loi sur la protection des jeunes fixe également les restrictions dans la nature de l'activité. Ainsi, le travail ne doit mettre en danger ni la santé des enfants ni leur scolarité. Interdictions sont donc les travaux effectués par forte chaleur, froid et humidité, bruit, exposition aux rayonnements et vibrations ainsi qu'aux produits toxiques ou corrosifs. Les jeunes ne sont pas autorisés à travailler de nuit ni à la chaîne.

    Voilà pour le droit allemand.

    Mon fils a vendu des sapins de Noel pendant trois jours, il avait 11 ans. Il s'est fait 100 €. Le vendeur croyait qu'il avait 15 ans, et comme il était bilingue et que le vendeur ne parlait pas allemand, il servait d'interprète entre le vendeur et les clients.

    A partir de 13 ans, il a donné des cours à d'autres élèves.

    A partir de 16 ans, il a travaillé pendant les mois d'été comme peintre en bâtiment, a appris le métier, monté des échafaudages, porté les pots de peinture, etc... 4 semaines par été pendant trois ans.

    Quand il a commencé ses études à 18 ans, il a travaillé tout d'abord comme barman le soir et le week-end, puis à partir du 2ème semestre comme "aide scientifique" à l'université - appelé en allemand HiWi pour "Hilfswissenschaftler". Il donnait 2 heures de cours par semaine pour les étudiants du 1er semestre et avait 1 heure de bureau où il répondait aux questions éventuelles des étudiants du 1er semestre. Il participait aux corrections des examens du 1er semestre. Il gagnait 400 € net par mois. (Il faut dire qu'ils ne prennent que ceux qui ont eu 20/20 en 1er semestre...) Il a continué cette activité pendant toutes ses études.

    Lorsqu'il était petit, dès l'âge de 6 ans, je lui ai versé son "salaire" chaque semaine, à l'époque c'était 1 DMark, 0,50 €. Il pouvait s'achetait ce qu'il voulait. Il a ainsi appris à économiser pour se payer ce qu'il voulait avoir, je l'ai laissé faire.

    Il a appris la valeur des choses et surtout à renoncer à acheter pour pouvoir après se payer quelque chose de plus cher. Il a souvent économisé pendant des mois.
    C'est selon moi une nécessité dans l'éducation.

    Aujourd'hui il est chercheur dans un institut allemand renommé.

  • Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?
    ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ?
    ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ?
    Ils s'en vont travailler quinze heures sous les meules
    ils vont, de l'aube au soir, faire éternellement
    dans la même prison le même mouvement.
    Accroupis sous les dents d'une machine sombre,
    monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l'ombre,
    Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,
    Tout est d'airain, tout est de fer.
    Jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue.
    Aussi quelle pâleur ! la cendre est sur leur joue.
    il fait à peine jour, ils sont déjà bien las.
    Ils ne comprennent rien à leur destin, hélas !
    Ils semblent dire à Dieu ! -Petits comme nous sommes,
    Notre père, voyez ce que nous font les hommes ! !
    Ô servitude infâme imposée à l'enfant
    rachitisme ! travail dont le souffle étouffant
    défait ce qu'a fait Dieu ; qui tue, oeuvre insensée,
    la beauté sur les fronts, dans les coeurs la pensée,
    et qui ferait - c'est là son fruit le plus certain !
    d'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin !
    Travail mauvais qui prend lâge tendre en sa serre,
    qui produit la richesse en créant la misère,
    qui se sert d'un enfant ainsi que d'un outil !
    Progrès dont on demande : Où va-t-il ? que veut-il ?
    qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,
    Une âme à la machine et la retire à l'homme !
    Que ce travail, haï des mères, soit maudit !
    Maudit comme le vice où l'on s'abâtardit,
    Maudit comme l'opprobe et comme le blasphème !
    Ô Dieu ! qu'il soit maudit au nom du travail même,
    au nom du vrai travail, sain, fécond, généreux,
    qui fait le peuple libre et qui rend l'homme heureux !

  • Le Victor Hugo qui reprend le poême du vrai poete confond tout, mélange tout...

    Que de rires chez les enfants qui sont fiers de gagner quelque chose pour se l'acheter et non tout recevoir de leurs parents...

    Il ne s'agit pas du travail des enfants, mais de 4 semaines par an pour apprendre le prix des choses et apprendre à gérer son argent... ce que peu d'adultes savent faire puisqu'ils ne l'ont jamais appris...

    Victor Hugo a bien raison dans ce qu'il écrit, celui qui reprend ses propos ne le fait pas à bon escient, dommage...

  • Il y a des règles très strictes à présent encadrant le travail des enfants, les assurances aussi...Sans parler des aléas juridiques.
    Bonne soirée à tous

  • @ Victor Hugo

    Ahem...ce dont Victor Hugo fait état date d'un autre siècle où la condition des enfants est désastreuse. D'ailleurs, il s'agit d'enfants et pas d'adolescents. Rien à voir avec notre progéniture repue et gorgée de biens de consommation qui ne sait plus quoi faire de son temps.

  • Pour ce qui est des noms d'oiseaux que l'on pourrait vous attribuer après un tel billet, pourquoi pas "sale communiste exploiteur des peuples"? Parce que les communistes (et associés) le faisaient très bien, tout en racontant aux enfants qui bossaient (gratuitement!) tous les étés dans les champs que c'est pour leur bien et celui du peuple entier. Alors si vous la voulez pour votre collection de flatteries, je vous l'offre! ;-)

    Sérieusement parlant, la question me semble très intéressante et aux multiples facettes: le travail rémunérateur comme outil d'apprentissage de la relation à l'argent, le travail comme moyen d'intégration sociale, etc. Une chose est certaine: il ne sert à rien d'écarter à tout prix les adolescents du travail, sachant qu'il est omniprésent dans le monde qui les entoure.

    Je voudrais ajouter dans le débat un autre aspect (au risque justement de me faire traiter de sale communiste exploiteur du peuple) : dans certains cas, il me semble qu'un travail non rémunéré peut aussi apprendre des choses. Un travail donné, pour aider quelqu'un, un travail comme obligation, devoir vis-à-vis du groupe dans lequel on vit. Si moi, mère de famille, je fais le ménage, la cuisine etc, personne ne me paie pour ça. Pourquoi devrais je payer mes enfants pour passer l'aspirateur ou ramasser les feuilles dans le jardin? Ou pour aller aider la voisine à faire une course? Je pense que l'argent ne doit pas être présenté comme le seul moteur qui nous pousse à travailler. Il faut aussi apprendre aux enfants que dans certains cas un travail peut être donné. Mais il n'a pas pour autant moins de valeur.

  • @ Anya

    En fait, dans Métamorphoses, elle fait l'éloge du scoutisme pour exactement les raisons que vous évoquez. Vous n'avez plus qu'à lire le livre, je pense qu'il vous plaira :-)

  • eh bien qu'on me donne un peu de travail, je m'ennuie et mes parents ne me donnent pas d'argent de poche !

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