Philippe Nogrix, Sénateur UDF-MoDem, est, entre autres, un spécialiste des questions militaires. En novembre 2007, il présentait au nom de la commission des Affaires étrangères du Sénat ses analyses sur le budget consacré à la préparation et l'emploi des forces militaires, dans le projet de loi de finances 2008. La conclusion de son rapport me paraît particulièrement d'actualité à l'heure où le gouvernement a choisi de sévèrement réduire les effectifs militaires.
La voici :
Les crédits de fonctionnement courant des armées constituent la principale variable d'ajustement du budget de la défense : leur compression ne suscite pas d'effets négatifs immédiats, à la différence de ceux affectés aux personnels, et ne semble pas affecter l'avenir, contrairement à ceux consacrés à l'équipement.
Or les effets d'un budget de fonctionnement courant insuffisant sont insidieux, et ne révèlent leurs potentialités négatives qu'avec retard.
Cet effet « retard » entraîne deux conséquences majeures : il contribue à une démoralisation des personnels, sans être toujours clairement identifié. Pourtant, le fait de travailler, de s'exercer, de résider dans des locaux insuffisamment entretenus, dégradés, ravaudés avec des « bouts de ficelle » pèse indéniablement sur l'image que le ministère de la défense donne de la mission qui lui est confiée par la Nation, et aussi sur les personnels qui y concourent.
De plus, les financements requis par une rénovation s'effectuant au terme d'une trop longue période de délaissement s'en trouvent considérablement accrus.
La qualité de l'entraînement, qui est la meilleure « assurance-vie » du combattant, peut être également affectée par des financements trop « justes » en carburant, en munitions, voire en tenues.
Moi, j'ai entendu que nos soldats en Afghanistan manquaient des moyens nécessaires pour pouvoir identifier et se protéger des mines et explosifs associés...
Le bon déroulement de ces exercices peut être entravé par la pénurie financière qui touche souvent les petits programmes de cohérence dont l'impact semble infime au regard de celui des équipements majeurs. Mais les chars, les bâtiments, comme les aéronefs de dernière génération technologique requièrent, pour fonctionner, un approvisionnement continu en pièces de rechange.
Quand je pense que Philippe Nogrix a rendu son rapport en novembre dernier...Prémonitoire à tous points de vue pour qui a lu le Canard Enchaîné ces deux derniers mois : 50% de notre matériel militaire est hors-service, et une opération de sauvetage d'otages français a bien failli capoter parce que nos navires tombent en panne...
Il y a donc à la fois une facilité et un danger à sous-estimer ce type de crédits, d'autant que les armées se sont attachées, parfois de leur propre initiative, à mutualiser leurs besoins et leur gestion depuis la professionnalisation pour en réduire les coûts.
Les coûts élevés requis par le MCO des matériels modernes, notamment aéronautiques, ont été reconnus, et des structures ont été mises en place (SIMMAD, SIAé) pour concilier impératifs industriels et maîtrise des financements.
En revanche, le recours à la location de services pour assurer des fonctions annexes au métier militaire, comme l'entretien des locaux et des espaces verts, leur gardiennage éventuel, le transfert des personnels, l'entretien de leurs tenues, semblait économiquement et fonctionnellement raisonnable, avec la professionnalisation des armées.
Leur coût, parfois prohibitif au regard de la qualité du service rendu (constatation qui n'est pas limitée au seul secteur des armées !) pose la question de leur éventuelle réintégration au sein des personnels de la défense.
Commentaires
Mon cher Hérétique, la rumeur court que le sénateur Nogrix travaillerait pour la création d'une association "centriste" hors modem pour le Sénat.
De mon bout du monde je ne suis pas en mesure d'en évaluer la véracité.
Est-que vous en savez plus que moi?
@ Bzhita
Je ne suis pas au courant : hors MoDem ou incluant le MoDem ?
En tout cas, il vient tout juste d'obtenir l'investiture du MoDem pour les sénatoriales alors cela m'étonne un peu...
Je ne suis pas certaine que M.N ait parfaitement analysé l'ampleur du problème, il s'attache essentiellement à l'aspect financier, or il s'agit aussi d'etres humains aspect qui peut paraitre négligeable mais qui a son importance.
@l'hérétique,
Il semblerait que quelques réponses soient attendues
@hérétique
je pose la question, car, comme j'ai dit, c'est difficile d'évaluer à partir d'ici ...
cette rumeur, je dis bien -rumeur-, voudrait Nogrix et autres candidats aux sénatoriales sous l'étiquette modem, impliqués lourdement dans le projet d'Arthuis. Qui, a ma connaissance, a quitté le mouvement.
Vous conviendrait que ça fait un poil bizarre quand les adhérents viennent de se voir proposer un texte sur "l'indépendance".
Cependant, je ne voudrais pas faire de tabac public, car la rumeur est souvent imprécise ou infondée.
On peut échanger par mail si vous voulez
Excellent texte de M. Nogrix, merci de l'avoir signalé. La réduction des dépenses de fonctionnement est la solution de facilité pour les gouvernements et Parlements, plutôt que de réduire les dépenses de personnel (parce que syndicats) ou les dépenses d'investissement (parce que Dassault, Lagardère, Bouygues et quelques autres).
Or sans essence et sans photocopieuse, les militaires ne peuvent pas faire grand chose, et les civils non plus. Car hélas, la compression des dépenses courantes, ça fait au moins 5 ans que toute l'administration d'État la subit. Beaucoup d'agents travaillent dans des conditions misérables … à côté de bureaux des Départements ou Régions qui ne cessent de s'agrandir en embauchant.
Décentralisation, piège à ronds !