Mathieu a soufflé très fort dans son nouvel appeau, et, de ce fait, je rapplique ventre à terre. Il se propose, sur son blog, de disserter de l'utilité de l'orthographe. Particulièrement, il expose l'une de ces théories très en vogue chez les gauchistes (mais pas seulement) qui veut que l'orthographe soit la science des imbéciles, des individus sans génie juste bons à devenir des exécutants de second ordre.
Pour appuyer ses dires, Manuel ramène l'orthographe française à un ensemble de règles ennuyeuses qu'il faut apprendre par coeur. La chose n'est pas si simple : en réalité, l'orthographe rend compte d'une part de l'évolution d'une langue, d'autre part de la manière de penser de ceux qui la pratiquent. On dit les Français sophistiqués parce que leur langue les prépare aux tours et aux détours les plus retors : en effet, pas un pluriel qui ne suive une règle commune sans connaître une ou plusieurs exceptions. Fatalement, quand on a passé son enfance à chercher la règle qui s'appliquait (et encore, quand il y en avait une) aux accords, on a bénéficié du caractère formateur de sa propre langue natale pour entrer dans la complexité de la vie. L'orthographe française est une première entrée dans cette complexité : la découverte que les questions simples n'ont pas nécessairement de réponses simples.
C'est que les mots ne sont pas seulement des états ; ils ont aussi une histoire, et ils n'ont pas toujours été ce qu'ils sont aujourd'hui. La phonétique et la morphologie sont deux disciplines qui rendent compte de leur histoire, mais elles ne suffisent pas à les circonscrire puisque le champ lexical de chaque mot se décline dans le temps également.
Je me dis souvent que si les espèces d'ânes qui nous ont précédé aux premiers temps de la Gaule romaine avaient appris correctement leur orthographe latine ( et elle était simple, pourtant : peu d'exceptions, toutes les lettres se prononçaient !!!), nous n'en serions pas aujourd'hui à suer sang et eau sur des orthographes aussi étranges qu'absconses. On a déjà du mal à retrouver la logique qui conduit le mot latin à son avatar français, mais s'il faut un jour retrouver la source du globish mâtiné de SMS en style texto, on n'a pas fini de s'arracher les cheveux de désespoir.
Peut-être, finalement, pour simplifier l'orthographe, conviendrait-il de s'exprimer par grognements avec des tonalités selon le besoin vital exprimé. Nous aurions là un gain de temps précieux qui permettrait ainsi à nos chères têtes blondes (ou non) de consacrer leurs fragiles petits neurones à d'autres tâches plus nobles...Qu'en pense Mathieu ?