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Bayrou entre emploi et réarmement industriel

J'avais déjà évoqué le 20 janvier dernier des éléments de la stratégie industrielle de François Bayrou. Le dévoilement et le chiffrage de son projet, ce matin, me permettent d'ajouter quelques éléments.

Jean Peyrelevade, l'un de ses proches conseillers, s'exprimait ce matin sur France Info et faisait valoir que c'est à tort qu'on faisait porter au coût du travail la baisse de notre compétitivité. En fait, remarque Peyrelevade, nous avons des champions industriels, mais nous avons abandonné une quantité assez invraisemblable de créneaux. Chaque créneau est petit, mais leur somme est mastodontesque. Nous avons un problème de gamme, en somme. Il citait quelques exemples, mais j'ai tout de même retenu que nous importions nos lunettes de plongée du Japon parce que nous n'en produisons pas en France !

D'une certaine manière, Bayrou tente de prendre en tenailles le problème : il est convaincu qu'il ne faut pas toucher aux salaires car ils sont la garantie de la consommation. Ainsi, s'il escompte bien faire des économies dans les dépenses de l'État, il ne veut absolument pas qu'elles se fassent au détriment des revenus des salariés de la fonction publique. Pas de blocage de points d'indice ni de grilles de salaires avec lui.

C'est pour cette raison aussi qu'il récuse la facilité (en apparence) qui consisterait à lutter contre les coûts du travail avec d'autres pays. C'est pour cette même raison qu'il estime que la TVA sociale ne saurait en aucun cas apporter un surcroît de compétitivité. Si TVA il doit y avoir (il prévoit une hausse de 1%) c'est exclusivement pour faire partie d'un pack destiné à désendetter l'État.

La PME demeure pour lui la clef du réarmement industriel. Toutefois, il est difficile d'en favoriser la création ex nihilo, et, s'il approuve l'existence de stratagèmes public, il pense aussi qu'ils ne suffiront pas. Oui à Oseo, bien sûr, mais il faut aller plus loin : il faut que l'investissement puisse s'associer directement à l'industrie. Pour cela, il escompte actionner deux leviers :

a) l'investissement des particuliers avec un livret épargne industrie qui pourrait proposer d'assez fort rendements et drainer ainsi l'épargne des particuliers.

b) celui des plus gros acteurs à commencer par les grandes entreprises : l' avantage fiscal lorsqu’une grande entreprise aura créé une structure d'investissement en direction des PME ou pris une participation dans une telle structure me paraît particulièrement astucieux.

Il y a là une mesure propre à favoriser la constitution de clusters, ces grappes d'entreprises qui ont fait et font encore le bonheur et le dynamisme de la Silicon Valley.

Bayrou n'a jamais été un admirateur des conflits dans le travail : plutôt que des grèves dures, il préfère la co-gestion. Mais pour lui donner une substance bien plus consistante que la traditionnelle négociation à flux tendus, il suggère d'acter par une loi la participation en dur des représentants des salariés, les syndicats, en somme, aux Conseils d'Administration de toutes les entreprises.

Voilà qui ferait un bien fou à la démocratie sociale dans le travail. J'imagine la tête des gros actionnaires face aux représentants syndicaux quand il va s'agir de proposer d'éventuelles délocalisations. Nul doute qu'il ne sera plus possible d'agir dans le dos des salariés. Mais ce sera aussi l'occasion de proposer cartes sur table des stratégies. La méfiance se nourrit du secret.

Le capital-risque doit pouvoir trouver son compte et des compensations dans les risques qu'il prend : l'idée de proposer aux Business Angels la possibilité de déduire leurs pertes de leurs impôts sur le revenu est très forte et très bien pensée. Très bonne incitation fiscale ciblée.

Les PME auront besoin de pouvoir employer : un emploi sans charge pour les entreprises de moins de 50 salariés pendant deux ans, c'est une sécurité pour les TPE qui grossisssent. Quel est le problème ? Votre entreprise grossit, il y a trop de travail pour vous, mais peut-être pas assez pour votre premier salarié. L'exemption des charges pendant deux ans est un sacré coup de pouce pour voir venir...

J'ai suffisamment parlé du Made in France et notamment du label que Bayrou entend développer pour y revenir. Je signale toutefois un sondage qui fera taire tous ceux qui affirment que l'ambition de Bayrou relève d'une douce rêverie : 83% des Français sont prêts à payer plus cher pour acheter un produit français. Il n'y a plus que les dirigeants socialistes pour affirmer le contraire. L'idée de Bayrou, qui épousait une aspiration profonde du peuple français continue de faire son chemin.

Je n'ai pas présenté ici la totalité des mesures de François Bayrou, mais si avec cela, si jamais Bayrou est élu, nous ne retrouvons pas le chemin de la croissance et de l'emploi, je veux bien manger mon ordinateur portable sans aucun assaisonnement...

Commentaires

  • http://www.medef.com/

    Exactement la réaction à laquelle on pouvait s'attendre de leur part :

    "Le personnel d'une entreprise est représenté au conseil d'administration par son comité d'entreprise mais une voix délibérative ne peut être accordée qu'à des personnes représentant des actionnaires qu'elles soient salariées ou non"

    Nos vies dépendent de nos emplois, elles sont donc entre les mains de tiers actuellement, ce n'est pas plus compliqué que ça.
    Avoir son mot à dire, peser dans des décisions qui peuvent changer nos avenirs du tout au tout, c'est la moindre des choses. On est pas du bétail ... n'en déplaise au medef.

    Merci Bayrou pour la leçon de socialisme.
    Et dire que l'autre ahuri gélatineux négocie avec les inutiles d'EELV plutôt qu'avec lui ... Ferait mieux de prendre des notes et de s'en inspirer, ça lui éviterait d'avoir l'air d'un gland ...

    Tu vois, c'est exactement pour ce genre de choses que j'apprécie grandement Bayrou.
    Pas de tapage, pas de clientélisme forcené (l'ennemi de la finance ... si ce n'était pas aussi grave j'aurais surement finis par me casser les cote à force de rire), par contre des idées qui tiennent la route et dans lesquelles tout le monde peut ce retrouver. Et lui ne fait pas volte-face au premier coup de vent ...

  • "Nul doute qu'il ne sera plus possible d'agir dans le dos des salariés. Mais ce sera aussi l'occasion de proposer cartes sur table des stratégies. La méfiance se nourrit du secret."

    C'est en définitive le seul blocage. Seule la transparence la plus totale amène le progrès c'est évident. Les manipulateurs, les tricheurs, ne maintiennent leur pouvoir qu'en taisant la vérité. Ou en faisant tout pour la travestir, c'est pareil.
    Donc -je fais ici référence au rapport du député Perruchot sur le financement des syndicats-, mettre des salariés dans un conseil d'administration implique que les syndicalistes (s'ils le sont, ce n'est pas une obligation, on peut très bien être représentant du personnel sans étiquette), soient eux-mêmes dignes de confiance. C'est un pré-requis obligatoire !

  • @Skunker,
    Oui, cette intervention porte à sourire ;) Sachant que la plupart des "affaires" ont trouvé leurs sources au sein de CE...Et puis, me suis toujours posée la question de la pertinence d'une action une voix.

  • Salut Skunker
    Content que tu te retrouves dans ses propositions. Moi aussi je juge celle-là excellente.

  • @ Françoise Boulanger :

    "je fais ici référence au rapport du député Perruchot sur le financement des syndicats"

    Je me rappel un reportage diffusé il y a plusieurs années de cela et qui dénonçait déjà ces pratiques (et d'autres dans le même cadre, du style repas 3 macarons aux frais du CE etc ...).
    Plus ça va plus je me demande en qui on peut placer notre confiance.
    C'est clair que si c'est pour donner voix au chapitre à des mecs corrompus autant garder le statu quo, au moins on aura pas par dessus le marché l'impression d’avoir été vendu par des gens qu'on a élu ...


    @ l'hérétique :

    J'aimerais ça voter PS, vraiment, mais le problème c'est qu'ils se sont englués dans leur rôle de néo-communistes à deux ronds. Par moment il y a comme des relents de marxisme du pauvre ...
    Dans le fond les solutions qu'ils proposent sont partisanes plutôt que logiques, ça les fait passer à des années lumières de ce que l'on pourrait attendre venant d'eux.

    Vivement que la politique évolue, parce que les différentes "écoles de pensées" commencent à montrer leurs limites.

  • Le PCF : parti centriste français. Le nec plus ultra de l'avancée sociale en 2012 :p

  • Il me semble (je peux me tromper et n'avoir rien compris) que le rapport Perruchot n'accuse personne en particulier, ne dénonce en tout cas aucune affaire qui ne soit déjà connue. Mais le fait que le rapport lui-même soit interdit ne pourrait-il pas porter tort à tous les syndicalistes en laissant croire que ce milieu est pourri ?! Eux qui sont sincères pour la plupart. Jamais il ne faut généraliser, de quelque bord que ce soit.
    En tout cas, ce serait désastreux pour un syndicaliste présent dans un conseil d'administration d'avoir d'abord à prouver sa bonne foi, voire son honnêteté.

    Voilà pourquoi, ma propre entreprise sera d'emblée une SCOP. Cela signifie que je ne serai jamais majoritaire et que je me mettrai peut-être en danger. Celui de me voir expulsée entre autre de ce que j'aurais pourtant créé.
    Je le ferai malgré tout. Mon raisonnement est très simple : chacun de mes collaborateurs se sentant solidaire et tributaire de tous les autres ne pensera pas à leur nuire, à me nuire, pour la bonne raison qu'il se saborderait lui-même. Dans ce système il n'y aura même plus besoin de syndicalistes ! Sauf bien sûr s'il y a l'intrusion d'une personne malveillante et manipulatrice, chacun saura défendre ses intérêts.

  • Bravo pour cette explication, L'Hérétique, clap clap clap. On peut ajouter que la proposition révolutionnaire concernant les CA des entreprises a été formulée d'abord par Pierre Sudreau, qui vient de s'éteindre à un fort grand âge. C'était sous VGE, avec le même succès du côté du patronat. Il met le doigt sur notre problème culturel quant aux relations dans l'entreprise et c'est très juste.

  • Exact Hervé, nous pourrions aussi ajouter que la TVA dite Sociale puis nommée anti-délocalisation (doit etre plus joli :o))), n'a été instaurée que dans les pays dont le taux de natalité est très faible (cf les courbes démographiques), et fut assortie d'un système de retraite par capitalisation qui ne me parait pas des plus justes...

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