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Bayrou et l'industrie

Impossible de s'intéresser aux problèmes de l'industrie en France sans lire si possible en détail le rapport sénatorial piloté et déposé par Alain Chatillon (Sénateur UMP) le 05 avril dernier sur le sujet.

Quand j'ai lu l'État d'urgence de François Bayrou, je m'étais interrogé sur sa volonté de laisser les industries françaises externaliser certains segments de leur production. Cela me semblait s'opposer au Made in France qu'il prônait. C'est en lisant le rapport que j'ai compris.

En fait, c'est exactement ce que font les Allemands : contrairement aux Français, ils ne délocalisent jamais toute une production, mais des segments seulement. En France, dès que l'on exporte, on tend à produire tout dans le pays du marché visé. Il n'y a pas de réflexion véritable sur la segmentation de l'industrie, alors que nous devrions nous préoccuper au premier chef de conserver sur place tout ce qui porte une forte valeur ajoutée.

Il y a de ce fait toute une réflexion à mener sur la formation de nos ouvriers. On a eu, à mon avis, grand tort de supprimer dans l'enseignement les filières E, du temps des bacs A, B,C, D et cetera. A la place, on a créé l'inspide section STI dont les débouchés professionnels ne sont guère clairs. Avec les bac E, la France avait pourtant généré des techniciens-ingénieurs d'une qualité exceptionnelle. Comme le disait récemment Bayrou au Figaro, nous étions un pays d'ingénieurs nous sommes devenu un pays de financiers.

On doit repenser le métier d'ouvrier, à n'en pas douter, de manière à ce qu'il devienne celui d'un technicien supérieur. De ce fait, il y a une vraie réflexion à mener sur les filières techniques et professionnelles. Pour l'instant, on essaie bien de donner de la valeur ajoutée à ces filières par création de diplômes supérieurs ad hoc, mais le résultat se fait attendre.

Bayrou voulait faire de la France un pays pro-entreprises en 2007 et toute son action est tournée vers les PME. Je pense qu'il n'est pas le seul à avoir ce souci, mais dans les faits, la consanguinité est si forte entre les grands groupes et les principaux partis, que les PME sont toujours les laissées pour compte des pratiques des grands partis. 

L'environnement global français ne leur demeure donc pas favorable. Bayrou voulait en 2007 (et le propose à nouveau pour 2012) simplifier profondément l'environnement juridique et fiscal de l'entreprise. Sarkozy s'est emparé de la question en 2008, et, le résultat des courses, c'est qu'il a créé 500 pages supplémentaires de codes divers. Il faut, je le pense, une véritable détermination pour atteindre cet objectif. 

L'une des faiblesses de l'industrie française, c'est ses investissements en recherche et développement : insuffisants il ne permettent pas de faire émerger des produits à la fois hauts de gamme, high tech et de qualité. Il est donc essentiel pour les entreprises de dégager des marges. Si la taxe sur les transactions financières est mise en place, Bayrou escompte en utiliser une partie pour faire baisser les charges qui pèsent sur le travail. Ce faisant, évidemment, les entreprises retrouveraient de petites marges de manoeuvre.

En somme, si je récapitule le programme de Bayrou tel qu'il s'esquisse, voilà ce que j'y trouve :

- Favoriser la segmentation de  l'industrie : externalisation des segments à basse valeur ajoutée et  localisation de ceux qui ont une forte valeur ajoutée.

- simplifier considérablement le cadre juridique dans lequel évoluent les entreprises, particulièrement les PME.

- développer une filière professionnelle et technique de haute qualification.

- accroître les marges des entreprises en dégageant des marges de manoeuvre sur les charges du travail, de manière à permettre des investissements plus importants en RD

- favoriser les rapprochements en réseaux des entreprises, et faire de l'État un acteur stratégique de ces rapprochements

- développer un label Made in France afin de faire des consommateurs des acteurs du redressement de leur propre pays

Il a évidemment d'autres idées en tête, mais je pense que ce sont les grandes lignes.

Commentaires

  • "en dégageant des marges de manoeuvre sur les charges du travail" - certes.

    Mais tout le monde se focalise sur le travail. Or, à mon humble avis, ce sont les charges sur le capital qui sont le pbm principal. IS qui subventionne le crédit, marginalement élevé mais avec énormes "niches", ISF aux multiples effets pervers...

    Le coût du W n'est pas un problème pour les industries capables de donner à leurs salariés un appareil de prod ultra compétitif (la faible part du cout du W qui va au salarié est par contre un pbm crucial, mais c'est un autre débat). Mais pour ça, il faut que la rentabilité du capital soit au RDV.

    FB pourrait réaliser un gros coup qui le démarquerait de la concurrence en osant dire qu'il faut arrêter de vouloir punir par la fiscalité le capital productif, utile.

  • @Vincent
    Je suis d'accord avec cette observation. C'est aussi ce que dit Peyrelevade. Je pense qu'il a quelques idées en tête sur le sujet, mais je vous en dirai plus une fois que j'aurai eu plus d'info et décrypté discours et livre davantage.

  • Comment définir réellement ce qu'est un produit Français? Si une voiture est assemblée en France mais que 60% de ses composants sont fabriqués à l'étranger, comment la considérer??

    Bref, sans même parler de l'inefficacité de la mesure (les consommateurs achètent avec un portefeuille, pas avec un drapeau Français), on peut le dire sans sourciller que le made in France est de la démagogie pure.

    Plus grave, cette mesure fait croire au peuple que la mondialisation est responsable de la crise actuelle, donnant du crédit au thèses protectionnistes du FN.

  • Comment définir réellement ce qu'est un produit Français? Si une voiture est assemblée en France mais que 60% de ses composants sont fabriqués à l'étranger, comment la considérer??

    Bref, sans même parler de l'inefficacité de la mesure (les consommateurs achètent avec un portefeuille, pas avec un drapeau Français), on peut le dire sans sourciller que le made in France est de la démagogie pure.

    Plus grave, cette mesure fait croire au peuple que la mondialisation est responsable de la crise actuelle, donnant du crédit au thèses protectionnistes du FN.

  • Désolé pour le double post...

  • Bonjour,
    petite rectification, le principe de la série E de l'ancien bac a été repris dans le nouveau par la spécialité sciences de l'ingénieur de la série S qui attire aujourd'hui comme la série E hier des élèves plutôt motivés attirés à la fois par les aspects scientifiques et les aspects techniques, la série S.T.I. reprend plutôt la plupart des anciennes série F ainsi me semble-t-il que la série H.
    Cordialement.
    J.Houdouin

  • @JH44
    En théorie, oui, mais en pratique, ce ne sont plus les mêmes jeunes ni le même esprit.

  • Vous oubliez une chose, en Allemagne, Corée, Chine maintenant...

    Les salariés qui inventent reçoivent une rémunération complémentaire fonction des ventes, qui est une incitation et une récompense.

    En France, pour avoir éventuellement gain de cause, le salarié devra aller au tribunal, auquel cas il sera mis à la porte par son patron, et le jugement n'est pas garanti en faveur du salarié risquant d'être condamné aux dépens. Ça, aucun politique ne veut le voir, mais ça ne les empêche pas de pérorer sur l'innovation à laquelle ils ne connaissent rien, d'autant plus qu'ils n'écoutent pas ceux qui la font majoritairement, les salariés, de RD le plus souvent.

  • Pour avoir redoublé au basculement de la réforme de E en S Techno , je peux vous dire que c'était quasi la même chose avec un peu de perte en sciences donc nivellement pas le bas en l'occurence.
    Idem pour les STI.
    De plus souvent les E ou S Techno sont dans des lycées professionnels , c'est donc toujours le même public etc...
    En fait à la lecture de votre article on voit que vous n'y connaissez rien.
    Votre réponse à JH 44, je penserais plutot que la théorie c'est plutot vous, la pratique elle est différente de ce que vous avancez.
    Si les ingénieurs de supaéro vont dans la Finance ce n'est pas parce qu'on a supprimé la filière E, peut être parce qu'à choisir ils préfèrent être du coté des tondeurs que celui des tondus. On peut être regarder du coté de la prise de pouvoir par les managers genre HEC dans l'industrie....
    C'est peut être aussi une certaine culture de l'ingénieur en France, regardons une des entreprises les plus innovantes FREE: une culture d'entreprise à part hors des grande écoles tradi, les pères de la FREE BOX sont sortis de ce que la théorie appellerait une école d'ingénieur de quatrième zone....
    ...

  • @josette
    Je n'ai pas dit que c'était parce que la filière E avait été supprimée. J'ai dit que c'en était un symptôme.

Les commentaires sont fermés.