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La femme en version DNB (Brevet des collèges)

Décidément, c'est marrant comme on ne se refait pas, dans notre société encore patriarcale, et ce, jusque dans ce temple de l'égalité que se veut l'Éducation Nationale. Il y avait mardi matin dans l'Académie de Versailles une épreuve de français du Brevet des Collèges. D'après mes informations, un texte de Colette dans lequel une mère se fâche avec son fils (un petit de quelques années) parce que ce dernier est venu lui annoncer que sa petite soeur s'était probablement noyée (en fait, elle avait disparu derrière un tas de sable). Mon objet n'est pas de faire l'analyse littéraire du texte (les Vrilles de la Vigne, en baie de somme), encore que cela serait certainement intéressant.

Non, ce qui est édifiant, c'est le sujet de rédaction qui a été donné aux collégiens :

«un peu plus tard, le père rejoint sa famille à la plage. Un dialogue s'engage entre les trois personnages : la mère explique à son époux ce qui vient de se passer ; Jojo proteste ; le père tente de les réconcilier. Écrivez le dialogue».

Dans le texte, en fait, la mère lit un livre, et elle est surprise, évidemment, par l'interpellation de son petit. L'enfant, logique et naïf, voit dans la noyade la cause de la disparition de sa soeur. La mère, quant à elle, juge l'enfant sévèrement en raison son insensibilité apparente. Elle médite alors sur l'abîme qui sépare le jeune enfant, encore sauvage, de l'adulte, civilisé. C'est sommairement ce qu'il y a dans le texte.

Je sais que l'on va me dire que je chipote, que je tire le sujet par les cheveux, mais tant pis : je dis ce que je pense. Lisons bien le sujet : que comprenons-nous ? que la mère crée le conflit et que le père apporte l'harmonie. Mieux, non seulement il apporte l'harmonie, mais en plus il arbitre le conflit.

Il y a, à mon avis, une vision de la femme qui s'exprime dans le sujet. Et sur un texte intéressant comme celui-là, qui interroge sur la notion de responsabilité, qui permet vraisemblablement plusieurs niveaux de lecture, ça me scie que les huiles de l'Éducation Nationale n'aient trouvé comme matière à réflexion pour nos jeunes âmes que ce tissu de  banalités empreint d'idées préconçues.

Je sais : le Diable vient se nicher jusque dans le détail...

Commentaires

  • Bonsoir,
    Naturellement, cet aspect m'a aussi frappé. Mais il me semble encore plus grave qu'on pousse les élèves à dénigrer la lecture, dans la matière même où on devrait leur apprendre à aimer cette discipline. Point de vue de prof de lettres qui prime sur le pont de vue de femme.

    Pendant la correction, je dois préciser que j'ai été choquée par les élèves qui terminaient leur texte par le divorce des protagonistes... (ou plutôt la répudiation, devrais-je dire, de la mère, par le père)...Et combien de rédaction dans lesquelles le père se contentait de réprimander assez violemment la mère...

    Je suis étonnée comme vous de ce choix idiot. La littérature française regorge pourtant de beaux textes et de pages intéressantes...Pauvre Colette, qui était pourtant une sorte de féministe à sa manière...

  • @CC
    Je comprends votre point de vue, mais je juge le dénigrement sous-jacent de la femme autrement plus grave, d'autant que le livre n'est dans le texte qu'un prétexte. J'imagine qu'aujourd'hui, ce serait un magazine du type Voici ou Gala.
    En revanche, passe l'air de rien à l'as l'idée que la mère crée le conflit en plus d'être une mauvaise mère qui ne veille pas sur son fiston tandis que le père apparaît comme le grand conciliateur donneur de leçons et responsable.
    Une image encore très traditionnelle qui explique les errements de bien des pères d'aujourd'hui.

  • Oui, bien sûr, c'est autrement plus important. (mais ça ne servait pas le sujet de mon billet...c'est pourquoi j'ai seulement effleuré le sujet. D'autant que vous l'avez très bien fait ici...Hop ! J'ajoute un lien à mon texte !)

    :)

  • Bonjour,
    Je n'ai pas non plus supporté de lire 40 copies m'expliquant qu'une mère est une hystérique, rancunière, irresponsable et au même niveau argumentatif que son fils ! La mère est redevenue mineure en l'espace d'un sujet de DNB... Le père incarnait cette force impassible qui résout tout magiquement, sans effort, sans doute baignée par la grâce. Le sujet était vraiment très mal choisi.

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