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MoDem, Tocqueville trace la voie...

J'en suis désormais au chapitre II de a deuxième partie du Tome I de "De la démocratie en Amérique" de Tocqueville. Il y aborde le fonctionnement des partis, et fait quelques réflexions sur ce qui fait leur grandeur ou leur petitesse...

« Il arrive des époques où les nations se sentent tourmentées de maux si grands, que l’idée d’un changement total dans leur Constitution politique se présente à leur pensée. Il y en a d’autres où le malaise est plus profond encore, et où l’état social lui-même est compromis. C’est le temps des grandes révolutions et des grands partis.

Entre ces siècles de désordres et de misères, il s’en rencontre d’autres où les socié­tés se reposent et où la race humaine semble reprendre haleine. Ce n’est encore là, à vrai dire, qu’une apparence ; le temps ne suspend pas plus sa marche pour les peu­ples que pour les hommes ; les uns et les autres s’avancent chaque jour vers un avenir qu’ils ignorent ; et lorsque nous les croyons stationnaires, C’est que leurs mouvements nous échappent. Ce sont des gens qui marchent ; ils paraissent immobiles a ceux qui courent.

Quoi qu’il en soit, il arrive des époques où les changements qui s’opèrent dans la Constitution politique et l’état social des peuples sont si lents et si insensibles que les hommes pensent être arrivés à un état final ; l’esprit humain se croit alors fermement assis sur certaines bases et ne porte pas ses regards au-delà d’un certain horizon.

C’est le temps des intrigues et des petits partis
.

Ce que j’appelle les grands partis politiques sont ceux qui s’attachent aux principes plus qu’à leurs conséquences ; aux généralités et non aux cas particuliers ; aux idées et non aux hommes. Ces partis ont, en général, des traits plus nobles, des passions plus généreuses, des convictions plus réelles, une allure plus franche et plus hardie que les autres. L’intérêt particulier, qui joue toujours le plus grand rôle dans les passions politiques, se cache ici plus habilement sous le voile de l’intérêt public ; il parvient même quelquefois à se dérober aux regards de ceux qu’il anime et fait agir.

Les petits partis, au contraire, sont en général sans foi politique. Comme ils ne se sentent pas élevés et soutenus par de grands objets, leur caractère est empreint d’un égoïsme qui se produit ostensiblement à chacun de leurs actes. Ils s’échauffent tou­jours à froid ; leur langage est violent, mais leur marche est timide et incertaine. Les moyens qu’ils emploient sont misérables comme le but même qu’ils se proposent. De là vient que quand un temps de calme succède à une révolution violente, les grands hommes semblent disparaître tout à coup et les âmes se renfermer en elles-mêmes.

Les grands partis bouleversent la société, les petits l’agitent ; les uns la déchirent et les autres la dépravent ; les premiers la sauvent quelquefois en l’ébran­lant, les seconds la troublent toujours sans profit. »

Il y a tellement de grandeur dans le propos de Tocqueville, que je ne vois rien d'autre à ajouter, et pas de commentaire supplémentaire à faire. 

Commentaires

  • Je suis en train de le lire et bien que lectrice rapide, je passe bcp de temps sur chaque page tellement c'est profond... malheureusement je m'endors assez vite dessus car je ne peux le lire qu'au moment du coucher étant donné mes contraintes familiales (dans les transports c'est plutôt la presse pour gagner du temps).
    A ce rythme là j'aurai fini de lire les 2 tomes quand F. Bayrou sera élu ;-) !

    Bref, ça fait du bien de prendre de la hauteur avec de vrais penseurs (malgré mes propos oh combien prosaïques !).

  • @ l'Hérétique,
    "Il y a tellement de grandeur dans le propos de Tocqueville, que je ne vois rien d'autre à ajouter, et pas de commentaire supplémentaire à faire."
    ... moi aussi ;-)

  • "Il y a tellement de grandeur dans le propos de Tocqueville, que je ne vois rien d'autre à ajouter, et pas de commentaire supplémentaire à faire. " => Tellement vrai :-)

    Deux réflexions parallèles tout de même: les grands politiciens sont ceux qui savent saisir l'instant politique exceptionnel et se mettre en valeur; une constitution a une durée de vie de 50 ans (c'est de Badinter si mes souvenirs sont bons); Quindi... les réflexions sur les changements institutionnels et le "grand parti démocrate" de FB

    @ Fotini: lol, c'est vrai qu'il faut prendre son temps et se créer une bulle diurne pour le lire (mon truc à moi: entre 5 et 6h du mat, tout seul dans un fauteuil, avec un thermos de thé chaud à portée de main)

  • Et moi j'avais lu le chapitre sur l'impôt sur l'héritage comme favorisant la redistribution et donc la démocratie cet été au moment du paquet fiscal! J'ai failli envoyer le chapitre à l'Elysée, et puis, je me suis dit qu'il faudrait lui envoyer le prof avec, alors je me suis retenue...

  • Merci Arnaud de me faire partager ton "truc", mais c'est un peu dur pour moi. Je suis une vraie marmotte :-) !

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