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Philippe Morillon, mémoire de Massoud

En ces temps où l'on parle beaucoup de l'Afghanistan, je porte à la connaissance de mes lecteurs l'évocation de Massoud par le Général Philippe Morillon, députée européen UDF-MoDem :

7 juin 2000. Premiers pas sur le sol Afghan. Je réponds à l'appel du Commandant Ahmad Shah Massoud qui, depuis la Vallée du Panshir, où il dirige la résistance au régime barbare et fondamentaliste des talibans, nous a demandé de nous rendre auprès de lui pour y être informé des conditions qui règnent dans son pays et des perspectives de solution du conflit qui s'y déroule.

Cette invitation est adressée au député européen que je suis, mais aussi au général français dont il n'avait pas oublié les prises de position à Sarajevo - alors que lui-même se trouvait confronté au drame de la guerre civile dans Kaboul.

Elle s'accompagne d'une invitation semblable destinée à des représentants de l'Assemblée Nationale française et du Sénat belge.

J'en suis touché à double titre. D'abord par la découverte que l'Europe, attendue par l'ensemble du continent africain et des pays en voie de développement, rayonne aussi dans cette Asie Centrale destinée à prendre sur la scène mondiale une place de plus en plus importante. Ensuite, par le constat que Massoud, légende vivante, puisse avoir retenu quelque chose de mon histoire personnelle.

Dès notre première rencontre, Massoud se révèle bien différent du chef de guerre que de nombreux "faiseurs d'opinion" ont si injustement qualifié de "seigneur de la guerre". Massoud rayonne. Par son charisme. Par son intelligence. Par la beauté de son âme. De fait, il suffit de le voir au contact de ses hommes : aucun doute, c'est un chef aimé et respecté. Je découvre un homme profondément attaché à ses racines, à son peuple, à son pays pour lequel il se bat afin d'y rétablir la paix, la liberté et la démocratie. Massoud est un homme de paix.

Le message de Massoud est clair. Il ne peut y avoir de solution militaire au conflit qui déchire son pays. Il ne peut y avoir qu'une solution politique.

Le régime des Talibans tient grâce au soutien du Pakistan qui, animé par des ambitions panislamistes, a installé les talibans au pouvoir et a infiltré le pays. L'Afghanistan, où réside Ben Laden, est devenu la base d'Al Quaida et le terrorisme islamiste représente une menace réelle pour l'Occident. Le peuple afghan, acculé sous les souffrances qui lui sont infligées par le régime moyenâgeux et fondamentaliste dirigé par le Mollah Omar, n'aspire qu'à la liberté.

Il suffirait que la Communauté internationale, et l'Europe en particulier, face pression sur le Pakistan afin qu'il cesse son ingérence en Afghanistan pour que le régime des talibans, dépourvu de soutien populaire, tombe.

Convaincu, je reviens au Parlement européen, décidé à y délivrer le message de Massoud et à faire "bouger" l'Europe.

Articles de presse, nombreuses résolutions et interventions en plénière, venue officielle de Massoud au Parlement européen en avril 2001. J'ai le soutien de la majorité du Parlement européen derrière moi.

Malheureusement l'Europe politique n'existe pas. Bien sûr, le Parlement peut soulever des urgences en plénière, rédiger des rapports d'initiatives, déposer des questions écrites ou orales, mais les affaires étrangères appartiennent au domaine intergouvernemental. Cela signifie que pour pouvoir agir en tant que telle sur la scène internationale l'Europe doit préalablement obtenir l'accord unanime des Etats. Or à cette époque, hélas, la majeure partie des gouvernements européens, partisans de la realpolitik, estiment que "Massoud et Talibans, c'est blanc bonnet et bonnet blanc".

Le 3 septembre 2001 Massoud est assassiné. Le 11 septembre des avions civils pris en otage par des terroristes fondamentalistes s'abattent sur le World Trade Center et sur le Pentagone.

Vous connaissez la suite : sursaut de la communauté internationale, intervention militaire et renversement du régime des talibans.

L'Afghanistan, aujourd'hui dirigée par le Président Karzaï, a fait le choix de la réconciliation, de la paix, de la stabilité et de l'Etat de droit. Il est plus que jamais du devoir et de l'intérêt de l'Union européenne d'aider le peuple afghan à progresser sur cette voie, de l'aider à chasser les démons du passé et à se tourner vers l'avenir en s'arrimant à la démocratie.

Dans cette entreprise, l'Afghanistan a besoin du soutien plein et entier de la Communauté internationale et de l'Europe. Député européen, je suis déterminé à poursuivre, sans relâche, mon action et mon soutien en faveur du peuple afghan, en mémoire de Massoud et pour que le projet qu'il avait pour son pays ne tombe pas dans l'oubli.

C'est dans cet esprit que j'ai publié le Testament de Massoud, aux presses de la Renaissance, dont les droits d'auteurs sont entièrement versés à la Fondation Massoud.

C'est pourquoi je continue aussi à me rendre régulièrement sur place. La dernière fois que je m'y suis rendu c'était en septembre 2005, en tant qu'observateur pour les élections législatives, posté au Panshir. C'était mon cinquième déplacement dans ce pays. Ce ne sera pas le dernier.

 

Commentaires

  • Le général Morillon ne semble pas vraiment savoir ce qu'est l'Afghanistan. Choix de la réconciliation? Quand à la tête de l'Etat, en-dehors du très peu écouté Karzai, on a ou on a eu tous les ténors de l'Alliance du Nord (Fahim en maréchal!!!) cad des gens considérés par beaucoup d'Afghans comme des tueurs. Car autour de Massoud (dont on ne cesse de faire une hagiographie qui devient vraiment ridicule.. en plus d'être évidemment fausse, ou pour le moins partielle) il y avait pas mal de gens troubles... Morillon serait-il à ce point naïf pour penser qu'après plus de 20 ans de guerre permanente, Massoud et les siens étaient restés de jolis et bons résistants façon France occupée (et encore, on n a pas finit de creuser les ambiguités de toute résistance) Lors de la guerre civile que Morillon évoque quand même, je rappelle que la ville de Kaboul a été détruite par des combats entre moudjahiddines, dont ceux du Panshir. Le rôle de Massoud n'est à ce jour pas clairement défini. Héros? Bourreau? Les avis divergent comme on dit en AFghanistan, surtout chez ceux qui ont reçu des rockets signées Massoud l'Afghan. Ils ont torts? raison? Je n'en sais rien, mais je pense simplement qu'en tant que français, et faute d'une connaissance approfondie de la question -connaissance très difficile à avoir, cf les divergences profondes entre Olivier Roy et Gilles Dorronsoro par exemple, on doit s'imposer de la réserve. Car si faire de Massoud une icône ça peut nous amuser, il faut quand même savoir que dans ce pays qu'on aime tant, ça peut avoir d'immenses conséquences sur la vie des gens? Comment? Et bien, derriere cette icône, il y a des gens qui bien au chaud trafiquent tranquillement, tuent, détruisent. mais ils sont du Panshir, donc démocrates donc etc etc... Je passe sur l'absurdité de phrases telles que : "L'Afghanistan, aujourd'hui dirigée par le Président Karzaï, a fait le choix de la réconciliation, de la paix, de la stabilité et de l'Etat de droit. Il est plus que jamais du devoir et de l'intérêt de l'Union européenne d'aider le peuple afghan à progresser sur cette voie, de l'aider à chasser les démons du passé et à se tourner vers l'avenir en s'arrimant à la démocratie" Réconciliation? Soit, mais alors arrêtons justement de faire de Massoud un héros. Il ne l'est pas pour tous les afghans, c'est comme cela, c'est un fait. A tort ou a raison, mais Massoud est mort. L'Etat de droit? Bon, ça mange pas de pain. Mais un Etat de droit repose sur quoi? L'afghanistan est un pays dans lequel (comme d'autres) on compte pour sa survie, sur la solidarité de la famille, du clan de la tribu... l'Etat? Revoyez l'histoire de ce pays et dites moi quand il y a eu un Etat de droit . Mais ça se décrète sans doute au Parlement européen. Quand a "arrimer" ce pays à la démocratie.... Bref, je m'excuse pour le ton un peu dur de ce commentaire, mais j'aime vraiment ce pays dans lequel j'ai travaillé longuement, et qui abrite encore quelques - uns de mes amis les plus chers, et je suis lassé de tous ces discours proprets et finalement très pervers.

  • @ Kabulle
    Merci pour votre point de vue que je trouve intéressant. Je savais qu'avant l'arrivée des Talibans, en effet, les chefs de guerre s'étaient livrés une guerre sans merci, mais Massoud est très loin d'être le plus cruel : Dostom qui est un criminel de la pire espèce ou Heykhmatar qui n'avait pas grand chose à envier aux Talibans se sont aussi illustrés.


    Pour ma part, comme je l'ai exposé dans un autre billet, c'est surtout l'idée d'une confédération qui pourrait être intéressante pour l'Afghanistan.
    Je sais aussi que ce pauvre Karzaï n'a pas d'influence au-delà de la capitale.

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