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L'Esprit des Lois

Depuis le temps que j'entends souvent parler de l'Esprit des Lois, l'ouvrage politique fameux de Montesquieu, je me suis résolu à le lire une bonne fois pour toutes : il faut dire qu'il y a de quoi. Entre 800 et 1000 pages, et pas écrites en gros caractères de surcroît.

Pour l'instant, j'ai lu les livres I à V. Passionnant. Je ne savais pas Montesquieu à ce point épris de démocratie.

Il compare en fait plusieurs régimes et distingue trois grandes sortes :

- républicain

- monarchique

- despotique

Le type républicain comprend deux sortes : le démocratique et l'aristocratique (au sens grec du terme, et non au sens de l'Ancien Régime : ἄριστος en grec signifie le meilleur. Il s'agit donc du gouvernement des meilleurs). Pour lui, il ne fait pas de doute que le type républicain est fondé sur la vertu, tandis que le monarchique s'appuie sur l'honneur, et qu'enfin le despotique ne repose que sur la crainte.

Je trouve cette lecture raffraîchissante d'autant qu'à mon sens, il existe des accointances par la nature entre le bonapartisme et le despotisme, toutes proportions gardées évidemment.

J'ai médité assez longtemps le chapitre XIII du livre V qui porte sur l'Idée du Despotisme, parce qu'il m'a fait penser aux cessions d'actifs de notre actuel gouvernement et du précédent (Autoroutes sous Villepin, France Télécom sous Fillon).

Voilà ce qu'écrit Montesquieu :

«Quand les sauvages [...] veulent avoir du fruit, ils coupent l'arbre au pied, et cueillent le fruit. Voilà le gouvernement despotique.»

Au chapitre XIV il relève que dans un gouvernement despotiqu, il ne faut pas beaucoup de lois : tout doit y rouler sur deux ou trois idées. Amusant : ça m'a fait penser à certaines déclarations de la campagne présidentielle sur les idées simples...

Je trouve en tout cas, que Montesquieu écrit de fort belles choses sur la démocratie, qui lui paraît la forme supérieure du type républicain, et qu'il y a matière pour nous à reprendre un certain nombre de principes pour le MoDem. Notamment, Montesquieu est époustouflant de justesse sur la nécessaire moralisation de la vie publique dans une démocratie et la nécessité d'un éthique forte pour ceux qui gouvernent.

Au fur et à mesure de ma lecture, je publierai des remarques supplémentaires. 

Commentaires

  • Merci pour cette analyse très actuelle de Montesquieu, le grand concepteur -notamment- du principe de la séparation des pouvoirs (en vertu de ce principe, le chef de l'exécutif ne devrait pas pouvoir entrer dans l'enceinte du corps législatif ... contrairement à la réforme voulue par M. Sarkozy).

    Quand il distinge la république "démocratique" de la république "aristocratique", il faut voir sous cette dernière dénomination l'ensemble des républiques oligarchiques. En effet, les quelques républiques existant à l'époque de Montesquieu (Provinces-Unies, cantons suisses, Venise, Mulhouse ...etc.) sont toutes oligarchiques.

    La démocratie est alors une forme quasi-inédite de l'organisation de la souveraineté (si l'on met de côté certains systèmes politiques de la Grèce antique, à l'exemple de la cité athénienne), ce qui démontre bien le génie visionnaire de Montesquieu.

    J'attends la suite avec impatience.
    :)

  • @ Ledru-Rollin

    Merci pour vos commentaires. Il faut dire que Montesquieu a le sens de la formule. Je lis actuellement le livre VI et Montesquieu compare l'égalité dans le régime despotique et dans le régime républicain :

    « Les hommes sont tous égaux dans le gouvernement républicain ; ils sont égaux dans le gouvernement despotique : dans le premier, c'est parce qu'ils sont tout ; dans le second, c'est parce qu'ils ne sont rien. »

    Joli...

    En revanche, ce n'est pas un orientaliste...Je découvre avec un oeil étonné que l'auteur des Lettres Persanes voit en gros tout ce qui trouve à l'EST comme un amas de gouvernements plus despotiques les uns que les autres. Russie, Inde, Turquie, Perse, ils en prennent tous pour leur grade.

    Cela dit, certaines observations sont très intéressantes : Montesquieu remarque que la religion est d'autant plus importante dans un état despotique que la morale n'y existe pas. Elle assure de ce fait un semblant de cohésion sociale (c'est dans les livres I à V qu'il dit cela, il faut que je retrouve le passage exact. C'est fort juste, je crois, et cela explique le poids de l'Islam, je pense, dans une grande partie du monde arabo-musulman, car l'écrasante majorité des régimes y sont de nature despotique, en effet.

  • De manière générale, dès que l'on entre dans une zone de non-droit ou de droit limité le poids de la religion populaire augmente : dans les cités, elle s'implante d'autant plus que le droit, et par suite la morale sont absentes.
    Or, ce sont de petits despotes (caïds) qui y exercent le primat de la force.
    Il y a là le ferment d'une analyse poussée des rapports sociaux, le despotisme étant une forme de domination qui tend à se développer également au sein de cellules sociales restreintes (famille, cité, quartier, par exemple).

  • J'ajoute une remarque encore : Montesquieu dit que le despotique repose sur la crainte.

    Remarque : pourquoi donc tant de personnes avaient peur de Nicolas Sarkozy ? Pourquoi disait-on de lui qu'il faisait peur, au point que l'hebdomadaire Marianne a titré au lendemain du 10 mai sa couverture en gros par ces mots : "N'ayez pas peur" ?

    A méditer. Bien sûr, mon intention n'est pas de faire de Nicolas Sarkozy un despote, un ogre, dirais-je (ogre signifie hongre, soit hongrois, soit dit en passant, à l'origine :-) ) mais de relever ce que comporte de despotique son action ou son positionnement politique.

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