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  • Industrie : réensemencer

    Nous devons reconquérir la production. Pendant longtemps, la mode était de considérer que tout cela, les activités primaires, l'agriculture, le secondaire, l'industrie était passé de mode, mais nous ne pouvons pas continuer à nous bercer de ces illusions, car tout le monde dit : il faut parler de l'emploi. 
    La vérité, c'est que, s'il n'y a pas de production, il n'y a pas d'emploi. Il faut donc parler de la production en même temps ou avant de parler de l'emploi. Cela signifie deux choses. Premièrement, concernant les PME qui sont les vrais créateurs d'emplois et qui sont le vrai essaimage sur tous les sujets d'où nous avons été exclus ou que nous avons déserté ou que nous avons perdu, je veux redire devant vous que je ne comprends pas comment un pays qui sait fabriquer des satellites, des fusées, des avions, des hélicoptères, des moteurs d’hélicoptère -dans ma circonscription où nous avons été honorés par les plus grandes autorités de l'État- un sur deux des moteurs vendus dans le monde est fabriqué par nous… Comment ne sommes-nous pas capables de fabriquer une machine à laver ?!… En effet, la technologie de ces instruments ménagers ne me paraît pas beaucoup plus compliquée que celle d'une turbine d'hélicoptère ! 
    Concernant les PME et la reconquête, je crois qu’il existe, ce n'est pas facile, cela ne se décrète pas, une stratégie fondée sur le repérage de gens qui ont la capacité, qui ont la technologie, qui ont le savoir-faire, que nous pourrions d'une manière ou d'une autre intéresser à des développements en France. 
    Après tout, je crois que l'on doit faire… je vous l'expliquerai un autre jour… mais je crois qu’il faut re-ensemencer. C'est ce que j'appelle la stratégie Brémontier. Nous l'aimons beaucoup dans le Sud-Ouest. C'est cet ingénieur agronome qui a eu l'idée de planter dans le désert, c'était un désert ou presque, les marécages. Il a simplement été chercher les graines, il a cultivé les pousses, il les a replantées, il a re-ensemencer comme les paysans - les agronomes savent le faire- le sol aride. 
    Je suis persuadé que l'on peut mettre en place une stratégie qui permette à l'État de soutenir les jeunes pousses et, après, de les laisser vivre leur vie, car je ne crois pas du tout naturellement que la centralisation puisse permettre de résoudre tous les problèmes à la place des gens. Je pense que c'est le contraire. 

    J'aime bien la métaphore filée de Bayrou sur la réindustrialisation. Cela dit, cette stratégie, c'est un peu la martingale du parieur ou encore la pierre philosophale de l'alchimiste. J'ai longtemps cru que ce pouvait être les fameux clusters de Christian Blanc, mais, dans la pratique, si je considère les pôles de compétitivité mis en place par Raffarin, censés être la mise en oeuvre des vues de Christian Blanc, force est de constater qu'ils n'ont attiré que peu les capitaux privés. Sans doute manquons-nous encore de recul, mais j'aimerais bien savoir ce qui coince.

    Tiens, l'image de François me rappelle un souvenir très décalé : dans ma jeunesse, j'ai été un amateur de jeux de rôles invétéré, et notamment du système de jeu Donjons et Dragons. Je jouais un personnage qui avait au fil du temps pas mal évolué (Guerrier niveau 15/ Magicien niveau 12, après avoir été successivement Chevalier, Chevalier-Paladin, Paladin déchu, puis Chevalier révoqué...), et dont l'un des objectifs avait été, avec l'expérience et la maturité, de développer économiquement la baronnie qu'il avait reçu en  héritage de ses parents.

    Des aventures périlleuses mais enrichissantes dans tous les sens du terme avaient permis à ce personnage d'accumuler des fonds considérables. Il avait alors choisi d'opérer une véritable révolution en faisant irriguer tout son territoire, grâce à des canaux de pierre construits par des nains. Les travaux eux-mêmes n'avaient pas été suffisants, bien qu'ils eussent absorbés les deux tiers des fonds.

    Il avait fallu ensuite attendre sept longues années afin de faire tourner les terres : ce temps était nécessaire pour qu'elles s'adaptent en douceur à de nouvelles cultures. Que l'on imagine : jusque là, la baronnie avait eu une production de type méditerranéen, c'est à dire essentiellement de l'olive. Avec l'irrigation, il devenait possible de produire massivement du blé ; l'inconvénient, c'est que les sols n'y étaient pas préparés. Il fallut donc les conseils éclairés d'un ami de la terre, en la circonstance un druide, pour parvenir à les acclimater en douceur. Tenter d'utiliser la magie eût été une erreur grave, en la circonstance, parce que les sols en seraient devenus dépendants. Mais pendant ces sept années, non seulement la terre ne produisait pas de blé, mais elle ne générait plus d'olives non plus.

    Heureusement que mon personnage avait accumulé de sacrés quantités de monnaies et de gemmes ! il fallut alors nourrir une population de presque 3 000 âmes pendant sept longues années, bétail compris !

    La construction d'un institut d'agronomie et l'érection de serres associées à un temple dédié aux divinités de l'agriculture et de la nature asséchèrent définitivement mes fonds, mais l'objectif fut atteint in extremis, et la baronnie décupla son revenu dès la première année de production de blé (de 300 à 3000 pièces d'or par an).

    Bon, j'avais un maître du jeu qui avait le souci du détail, et ...moi aussi. Ce n'est évidemment pas une expérience économique ni même une simulation digne de ce nom. Je ne suis de toutes façons pas entré dans toute une flopée d'autres détails.

    Mais, in fine, je conçois très aisément que l'on ne réoriente pas aussi aisément une industrie qui a pris une certaine direction. Donc, l'ensemencement de François, je le conçois très bien, mais au bout de combien de temps peut-il espérer donner des résultats ?

    J'ajoute que dans l'histoire que je viens de relater, mon personnage avait eu une chance exceptionnelle : son pari avait abouti et son choix avait été couronné de succès, entre autres en raison de sa détermination et des bons conseils de bons conseillers qu'il avait écouté. Rien ne disait, toutefois, que la bonne volonté pouvait suffire, et il aurait très bien pu échouer après avoir dépensé plusieurs centaines de milliers de pièces d'or...