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Une Europe schizophrène

J'essaie de travailler depuis le mois de juillet sur le futur projet européen du MoDem pour 2014 et j'avoue que je patauge dans la mélasse : j'ai lu et compulsé déjà plusieurs centaines de pages, me plongeant dans le code des douanes européens, les décisions de la commission et cetera et j'en passe.

Je me concentre principalement sur les questions économiques (industrie en tête) et dans une moindre mesure sur l'agriculture. 

C'est invraisemblable : on peut bien avoir des idées, impossible de les faire appliquer tant le droit communautaire est d'une rigidité extraordinaire. Les souverainistes disent que Bruxelles nous a dépossédés de toutes nos prérogatives : je vais finir par les croire à force de travailler et faire des recherches sur la question. Je commence aussi à mieux comprendre le sentiment de haine impuissante qui peut parfois animer les agriculteurs...

Mais il y a un autre problème : une incommensurable duplicité des chefs d'État et des États en général. Le Parlement européen propose des choses qui ne sont pas si éloignées des préoccupations populaires et des réalités économiques dans un certain nombre de domaines. La Commission fait elle-même parfois preuve d'initiative. L'inconvénient, quand ces deux institutions sont parvenues à se mettre d'accord, c'est qu'il faut passer la barrière du Conseil européen, et là, c'est mission impossible.

Pas élu, pas représentatif, il fait ch... tout le monde. On en arrive à des situations ubuesques : pendant que Paul et Jacques s'évertuent dans un parlement national à faire passer une mesure, Ubu le chef de leur majorité se garde bien de la défendre en Conseil européen face à ses collègues quand il ne prône pas carrément l'inverse.

Ainsi, même si des parlements nationaux et le Parlement européen convergent, il y aura toujours un empêcheur de tourner en rond quelque part.

Il y a vraiment un problème avec nos institutions en Europe. On pourrait au moins prendre la décision de dégager le Conseil européen de l'existence politique et institutionnelle européenne, mais quel chef d'état est prêt à rogner ses propres pouvoirs ?

Il y a urgence à faire une grande clarté dans la gouvernance économique de l'Europe ; c'est d'ailleurs le sens de la toute dernière lettre de l'euro-député MoDem-ADLE Marielle de Sarnez :

Nous ne pèserons que si nous faisons les pas nécessaires, et ce doivent être des pas de géant, pour que l’Union européenne, et au moins la zone euro, apprennent à décider ensemble, assez vite, et de manière légitime aux yeux des opinions publiques, c’est-à-dire aux yeux des citoyens.

La décision doit se préparer et se prendre au vu et au su des citoyens. Cette décision doit être portée par des visages et des voix, dont les Européens reconnaîtront l’inspiration et la légitimité. D’une manière ou d’une autre, cela signifie clairement que les responsables en charge de la vie de l’Europe, Président de l’Union, Commissaires notamment en charge de l’Economie -, devront leur mandat au vote libre des électeurs européens. Cela signifie aussi que des marges nouvelles devront être offertes aux pays membres pour tout ce qui n’est pas essentiel dans la vie de l’Union. Plus de légitimité, dans une démarche fédérale, cela signifie aussi plus d’autonomie et plus de décentralisation au sein même de l’Europe.

Dans le domaine industriel, il n'y a pas que cela : avec leur concurrence libre et non faussée, les commissaires voient des distorsions de concurrence partout. C'est assez délirant. Et cela devient même un problème car l'information donnée aux consommateurs est considérée dans certains cas comme une distorsion.

Enfin, l'institution européenne ne considère les aspects de sa politique économique qu'à la seule aune de l'Europe, jamais des nations qui la composent. Impossible d'adopter une mesure économique qui aille ou paraisse aller contre l'unité politique de l'Europe.

Les états fédérés de l'Amérique ont plus de marges de manoeuvre que les États européens. Les eurocrates et les européistes sont terrifiés par tout ce qui sent le peuple et la nation. Ils vont pourtant devoir se faire une raison. Si je n'adhère pas à l'idée d'une Europe des nations, je pense en revanche que l'Europe est aussi forte de ses nations que les nations sont fortes de l'Europe.

La construction européenne doit s'ériger autour de ce point d'équilibre, et, à l'heure actuelle, je trouve que le compte n'y est pas.

Je n'aime pas, d'ailleurs, que les eurocrates réduisent le fait culturel des nations à de vagues parlers régionaux et petits artisanats locaux. Les peuples européens ne sont pas des réserves indiennes auxquelles ils conviendrait de donner quelques os à ronger de temps à autre pendant qu'on les dépossède de tous leurs biens. D'ailleurs, même dans le domaine culturel, il y a un certains nombres de pays européens pour cracher sur l'exception alors même que la France s'échine à la défendre, toutes forces politiques confondues.

Conclusion des courses, écrire un programme avec des mesures concrètes à l'échelon européen, je vous garantis que ce n'est pas une sinécure...

Commentaires

  • Je ne peux qu'être d'accord avec toi ;)

  • "C'est invraisemblable : on peut bien avoir des idées, impossible de les faire appliquer tant le droit communautaire est d'une rigidité extraordinaire."

    Voilà, entièrement d'accord avec toi. C'est pourquoi je ne déclarerai "officiellement" mon association que lorsque j'aurai dans mon équipe de conseillers une personne expérimentée dans ce domaine. Amener à son terme un projet industriel sans tenir compte d'abord de l'Europe est une complète folie.
    Pourtant je reste toujours autant persuadée que ce sont les actions locales, issues de la base, qui feront progresser notre société.

    Merci pour ce billet.

  • Commentaire rapide: corrige-moi ce "schizophrène" immédiatement ! :D

  • @Nemo
    Caramba ! La honte. Merci, c'est fait.

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