J'étais hier soir au forum "Produire en France, oui, mais comment ?" organisé par l'Alliance Centriste pour le compte de François Bayrou. Il y avait là des pointures avec notamment Robert Rochefort, l'euro-député MoDem, Jean-Pierre Peyrelevade, Pierre Gattaz, PDG de Radial et Aurélien Véron, président du Parti Libéral Démocrate.
Je ne connaissais pas Pierre Gattaz, mais je l'ai découvert : très intéressant ! J'ai retenu de son intervention les choses suivantes
- il n'y a déjà pas beaucoup de petites industries, écrasées par le poids des très grosses entreprises, mais encore moins d'ETI (Entreprises de taille intermédiaire) quasiment inexistantes en France.
- opposer petites et grandes entreprises est stérile : il faut au contraire les assoscier (sur cet aspect, un premier bon point pour Bayrou qui propose un crédit d'impôts pour les entreprises qui prennent une participation dans une petite entreprise).
- Il faut revaloriser l'industrie aux yeux de la jeunesse. Notamment, finance et assurance absorbent tous les ingénieurs, or, pour innover, l'industrie intermédiaire a besoin de personnels formés et diplômés. Une idée très astucieuse : faire venir des enseignants dans les usines et sur les lieux de production pendant une journée. Qu'ils fassent cours dans l'usine, mais en s'arrêtant toutes les deux heures pour que les élèves discutent avec les personnels. Cela peut être fait dès le collège.
- s'appuyer sur les marchés intérieurs pour disposer d'une assurance avant de se lancer dans l'exportation. Les commandes locales permettent de garder des usines sur place et ce repli possible est fort apprécié en temps de crise. De ce point de vue, les collectivités ne jouent pas leur rôle (Robert Rochefort a évoqué la mairie socialiste de Toulouse qui importe du pavé chinois pour refaire une rue alors qu'il y a une carrière de pierres à quelques kilomètres...)
- simplifier les normes et au minimum, commencer par les imposer à tous également, par exemple aux entreprises chinoises qui nous inondent de produits fabriqués en Chine.
- baisser les charges pour permettre l'investissement et l'emploi. Sur ce point, Jean-Pierre Peyrelevade est à 200% sur l'analyse d'Yves Gattaz et rappelle que les entreprises françaises ont les marges les plus basses d'Europe.
Aurélien Véron a de son côté évoqué les Business Angels rappelant que l'environnement fiscal français ne leur était pas favorable. Bayrou dans son programme prévoit de leur permettre de déduire des impôts leurs pertes. Rappelons que les Business Angels sont des fonds de capitaux qui choisissent de prendre des risques en investissant dans des start-up (entreprises qui démarrent). Aurélien Véron a fait observer que la difficulté à obtenir des financements des banques venait de ce qu'elles devaient renforcer leurs fonds propres, et...elles devaient renforcer leurs fonds propres en raison de la quantité d'actifs pourris d'origine étatique qu'elles avaient été contraintes d'acheter en 2009.
C'est près de un million d'emplois qui pourraient être créés en France simplement en réimplantant une industrie manufacturière de biens de consommation. C'est l'un des chevaux de bataille de Robert Rochefort qui constate que pour de nombreux biens, la production n'existe purement et simplement pas ou plus en France.
Il y a des données qui laissent songeur : Matthieu Lambeaux, le PDG de Findus (spécialiste des surgelés) déclarait qu'il suffirait que chaque foyer français achète deux boites par an (oui, vous avez bien lu ! deux par an seulement !!!) pour créer 100 emplois à plein temps en France !
- contre le bas de gamme, Robert Rochefort observe aussi que l'absence de produits résistants et le consumérisme forcené nous amène à nous munir de biens que nous remplaçons. Y gagnons-nous ? Non, pas du tout. Acheter deux à trois produits bas de gamme en trois-quatre ans revient même plus cher que d'en acheter un seul dans le même délai. il y a donc une habitude de consommation à modifier mais aussi de production : l'industrie pourrait réaliser une large partie de son chiffre d'affaire sur le service après-vente et les pièces détachées. C'est le cas des automobiles : les moteurs actuels sont quasiment immortels au regard de leurs prédécesseurs, particulièrement la technologie HDI mise au point par peugeot. Il faut donc miser sur la qualité.
Il y a des gisements de développement énormes en termes d'emploi et de développement dans notre réindustrialisation mais seul François Bayrou semble en avoir pris la mesure avec ses propositions.
Commentaires
"il suffirait que chaque foyer français achète deux boites par an (oui, vous avez bien lu ! deux par an seulement !!!) pour créer 100 emplois à plein temps en France !"
Moui mais la question, c'est pourquoi ces cons de Français ne le font pas ? Sont-ils à ce point méchant ?
@h16
Les Français ne sont plus conscient de ce qu'ils achètent... on est dans une société de consommation et qui a bien appris sa leçon.... on consomme, on consomme, on consomme tout le temps mais comme on consomme tout le temps, on ne regarde plus la qualité des produits mais son prix, plus il est bas, plus on le consomme... mais plus on consomme à bas prix, plus les usines délocalisent... plus les usines délocalisent, moins il y a de boulot.
Il faut inverser la tendance (ok, ca va prendre du temps mais il faut bien commencer un jour) pour qu'on retrouve un cercle vertueux.
Concernant FINDUS, si 100 emplois sont créés en achetant 2 boîtes par an alors le coût par emploi créé est de 3.000.000 €, ce qui est typique d'industrie fort automatisées.
Il serait plus rentable de diminuer le coût du capital afin d'insiter à l'investissement.
Concernant les normes, les chinois, comme tout intervenant sur un marché, respectent les normes techniques locales.
Je me dois de dire aussi que les produits français sont de qualité inférieure à ceux disponibles sur le marché à prix égal.
@h16
parce qu'ils ne sont pas informés.
@h16
problème de distribution, d'information et de modèle de consommation (comme dit dans l'article).
@L' hérétique,
Faudrait suggérer un partenariat Findus Masterchef ;) ou grandes écoles de cuisine par exemple, enfin un machin bidule truc de cet ordre...(Pas obligatoirement les "grands-chefs" ) Afin de développer des gammes disons plus attractives aux papilles et à l'oeil.
Actuellement ce marché est pris d'assaut par Bo-F^^^.
Voici une interview de Pierre Gattaz :
http://www.xerficanal.com/pierre-gattaz-quel-avenir-pour-les-industriels-de-taille-intermediaire-en-france-289.html
@pb
Je l'ai lu. Ce qui me manque,c'est de trouver une version texte du colloque d'hier parce que je n'ai pas dit 5% des idées qui y ont émergé.
Je ne parlais pas tant des fonds propres des banques que des entreprises elles-mêmes. Les prêts exigent un bon bilan. La grande difficulté des PME vient de leur sous-capitalisation. La surtaxation du capital et un environnement réglementaire hostile expliquent pour bonne part cet état de fragilité de nos PME qui ne parviennent pas à grandir.
Cette histoire de boite m'amuse
Simple calcul :
2 boites par français par an ==> 130 millions de boites
100 emplois ==> 1,3 millions de boites produites par personnes
Considérons la boite à 1€ , cela fait 1,3 millions par poste
un poste de production en agroalimentaire qui apporte un CA de 1.3 million , c'est du pain bénit et ça n'existe pas
Je pouse le raisonnement un peu plus en cherchant à résorber 3 millions de chômeurs
2 boites par habitants résorbent 100 chomeurs donc pour 30 000 fois plus il nous faut donc 60 000 boites par habitants et par an soit environ 160 boites par jour (par jour et pas par an !)
A 1 euro par boite vous devez dépensez 160 euros par habitant et par jour pour résorber le chômage
Bayrou prône un renouveau du calcul mental. Il me semble que cela devient urgent !
"S'appuyer sur les marchés intérieurs pour disposer d'une assurance avant de se lancer dans l'exportation. Les commandes locales permettent de garder des usines sur place et ce repli possible est fort apprécié en temps de crise. De ce point de vue, les collectivités ne jouent pas leur rôle. A titre d'exemple, Robert Rochefort a évoqué la mairie socialiste de Toulouse qui importe du pavé chinois pour refaire une rue alors qu'il y a une carrière de pierres à quelques kilomètres...)"
Voilà qui corrobore ce que dit Robert Rochefort :
http://www.ladepeche.fr/article/2012/02/08/1279821-les-microfissures-du-pave-chinois.html#xtor=EPR-1
Dans ses propositions , la ré-industrialisation ne pourra se faire sans la création de produits nouveaux et non pas se faire avec des produits manufacturiers que les pays à bas coûts feront bien mieux que les français. c'est ce que fait intelligemment l'Allemagne . Pour cela , il faut bien sur INNOVER , INVENTER donc avec des inventeurs motivés "financièrement" comme en Allemagne sur les résultats obtenus. La preuve avec des chiffres éloquents : elle dépose 3 fois plus de brevets qu'en France !! (25107 contre 8029) et bien évidemment les balances commerciales s'en ressentent : 152 milliards d’excédent contre 70 milliards de déficit .
Comment se fait-il que vous n'évoquiez pas ce sujet ? il suffirait d'appliquer le même principe d'encouragement financier des inventeurs Allemands ( en place depuis 50 ans) aux inventeurs salariés Français . Votre avis ?
Suite
Allemagne, Japon , Suède, et aussi Chine récompensent leurs Inventeurs salariés et on voit le résultat !! .....
@InvenSala,
Effectivement, dans tous les pays cités cette démarche est interne aux entreprises et un excellent moyen qu'elles ont trouvé pour lutter contre la fuite de leurs cerveaux mais aussi pour se protéger de "l'espionnite".