Le Privilégié, qui est un enseignant, s'est montré très surpris de mon soutien au SNES, syndicat enseignant qui appelle à une grève aujourd'hui dans l'Éducation Nationale.
Je persiste et signe. Le Privilégié s'étonne parce qu'il se dit certainement : "voyons, ce gars-là est libéral et plutôt de droite : comment peut-il soutenir un syndicat pas vraiment connu pour ses positions centristes ?".
Eh bien c'est tout simple, Privilégié : parce que sur ce coup-là, le SNES a raison à 100% (ou presque). Mais bon, je ne suis pas le seul à avoir compris les enjeux : ils n'ont pas échappé non plus à l'oeil de lynx de Natacha Polony, observatrice émérite du monde éducatif.
Comme par hasard, les syndicats "réformistes", SGEN (en fait la CFDT), UNSA (héritier de la fameuse FEN des années 80) et même une bonne partie de la FSU (à laquelle appartient le SNES) se sont gardés d'appeler à la grève aujourd'hui. Même le SNALC, expert en moulinets de bras mais qui se dégonfle l'heure venue n'a rien dit. Et pourtant, l'enjeu de cette grève du SNES est à mes yeux prioritaire. Je me réjouis qu'il se soit trouvé un syndicat pour défendre ce qu'il reste du modèle éducatif français. Ce que condamne le SNES c'est d'abord la réforme du lycée et les gesticulations pédagogolâtres qui aboutissent à supprimer peu à peu l'enseignement disciplinaire (le savoir, la culture, au fond) au profit d'une sorte de gloubi-glouba informe pédagogisant (accompagnement éducatif, aide individualisée et cetera). De la merde en barre que nous sert Châtel avec la bénédiction des pédagogols de service.
C'est aussi l'évaluation par compétence, les suppressions de postes (moi, j'en vois les effets avec mes petits, le second d'entre eux évoluant dans des classes de maternelle et de CP puis de CE1 qui frisent des effectifs à 30 !!!), les doubles discours. Ah, les doubles discours... Les Châtel, les Descoings and co qui prêtent une oreille prétendument attentive aux élèves en difficulté sont les premiers à prescrire la suppression de tous les dispositifs d'aide aux enfants en difficulté. Les vrais : RASED en école primaire, conseillers d'orientation dans les collèges, et cetera...
L'école, l'éducation, pour moi, c'est sacré. J'observe avec attention et bienveillance le SNES depuis plusieurs années, et je vois que ce syndicat est le seul à porter le flambeau. J'ai entendu que l'on avait reproché à Bayrou, quand il était ministre de l'Éducation Nationale, d'avoir co-géré cette dernière avec le SNES. Exagération manifeste, à l'évidence, mais je ne m'étonne guère qu'il y ait eu de bonnes relations, tant je constate qu'aujourd'hui, l'un et l'autre ont le même souci de préserver une école de qualité.
Le SNES a eu la très juste idée de séparer les revendications qui concernent notre école et celles qui touchent les retraites. Il a eu raison. C'est plus clair ainsi. J'espère qu'il réussira ainsi à attirer l'attention des médias sur ces réformes déplorables.
Commentaires
Je plussoie. Y'a trop de lacunes dans la jeunesse d'aujourd'hui pour ne pas se rendre compte que les réformes ne font pas de bien. Il est temps de revenir aux valeurs d'antan!
Salut,
Ton billet est très clair.
En fait, ma surprise venait plutôt du fait que les libéraux considèrent en général le SNES comme la pire concentration de marxiste-léniniste encore existante en France. J'ai déjà quelques affrontements à ce propos avec nombre de blogueurs.
Sur la grève elle-même, je doute qu'elle fasse un carton, mais au moins l'appel a-t-il attiré l'attention des journalistes quelques jours...
Evidemment, il fallait ajouter des s à marxiste et à léniniste. Excusez pour la faute.
@Mathieu
Non, ce n'est pas la pire concentration : Sud est encore pire.
C'est sûr qu'il y a des marxistes-léninistes là-bas, mais pas que ça, faut pas non plus exagérer.
Cela dit, marxiste-léninistes ou non, sur ce coup-là, ils ont raison. Faut pas non plus verser dans l'idéologie, surtout pour nous autres centristes.
Bien évidemment, j'ai quelques comptes à régler avec l'éducabilité universelle, non que je conteste l'idée que tout être soit éducable, mais plutôt qu'il le soit de la même manière...
@Homer
Je ne réclame pas forcément un retour en arrière, mais certainement pas la parodie de système éducatif avec son américanisation progressive que droite moderniste et gauche réformiste nous programment...
Ah, L'hérétique, tu sais ce qu'on va faire ?
Inscrire "gesticulations pédagogolâtres " ou "pédagogols de service" à l'encre sympathique sur le front de certains réformateurs... Comme ça, dès que ça chauffe un peu, tous les clignotants s'allument !!!
Certains progressistes mieux que "réformateurs".
Bonne soirée Francoise :)
Oups, :o))
Les classes surchargées sont un véritable scandale. Si on persiste à trouver normal d'entasser 30 enfants par classe au primaire, au collège ou au lycée, il ne faut pas espérer une éducation de qualité.
> moi, j'en vois les effets avec mes petits, le second d'entre eux évoluant dans des classes de maternelle et de CP puis de CE1 qui frisent des effectifs à 30
Ça se faisait il y a 25 ans et ça n'a jamais tué personne.
A chacun ses stigmates semble-t-il.
Bonsoir.
Eh bien moi, professeur, de gauche, je ne souhaite pas faire grève.
Mes raisons sont extrêmement simples.
Je partage bien des analyses du SNES notamment sur la défense d'une école républicaine fondée d'abord sur le savoir. Sur le fond donc pas de hiatus.
En revanche, et c'est ce qui me vaut régulièrement des empoignades en salle des professeurs avec mes collègues syndiqués (dont un haut responsable du-dit SNES !), je trouve la forme catastrophique.
Il ne faut jamais oublier que les mots d'ordre répétés de grève pendant de nombreuses années avant 2007 sont une des causes du discrédit total dont la profession peine aujourd'hui à se débarrasser.
Un collègue du SNES, éminent, en pleine grève/blocage idiot par les élèves de mon établissement (15 jours !!!), n'avait rien trouvé de mieux que cette réflexion: "je ne vois pas d'autre solution que la grève générale".
Il y a comme un blocage mental chez certains syndicalistes qui, avec leurs bonnes intentions d'un autre âge, nous ont préparé l'enfer.
On ne peut pas plaider pour la réduction des déficits et de la dette, et vouloir affranchir l'éducation nationale (un fonctionnaire d'Etat sur deux) de tout effort dans ce domaine.
J'ai passé ma scolarité au lycée (1988-91) dans des classes de près de 4O élèves, ça n'a jamais empêché la transmission de savoir; en dehors des ZEP qui présentent un besoin particulier d'encadrement, un accroissement des effectifs par classe ne me choque donc pas.