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La Machine infernale

La Machine infernale, c'est le titre d'une pièce de Jean Cocteau. Elle reprend le thème de l'Oedipe-Roi de Sophocle, avec quelques convergences, et quelques différences. Si l'Oedipe de Sophocle paraît le jouet d'un destin injuste, celui de Cocteau a largement usurpé le trône de Thèbes : il n'est pas un véritable héros et doit à la mansuétude et à la lassitude du Sphinx sa place. Dans les deux pièces, Oedipe est sourd aux avertissements répétés de Tirésias et le croit partie prenante d'un complot destiné à l'évincer.

Retour au présent et à une réalité tout aussi insidieuse : de même que Thèbes doit affronter une peste dévastatrice à la suite du meurtre du roi Laïos, de même la France essuie une pluie de dépenses depuis de longues années. De même que le devin Tirésias essaie de mettre en vain en garde contre la cause des maux qui s'abattent sur la cité, de même Bayrou et quelques libéraux s'obstinent à crier en vain dans le désert la menace mortelle que la dette fait peser, comme une épée de Damoclès, sur la France. Hashtable est l'un de ceux-là : dans son dernier billet, il observe que l'agence Fitch vient à son tour de placer la France sous surveillance. Il faut bien comprendre que toute augmentation de nos taux d'emprunt génèrera une pression insupportable sur notre budget et rendra toute fuite en avant supplémentaire insupportable. Si Nicolas Sarkozy doit accomplir de force ce qu'il n'a su faire de bon gré, prendre des mesures crédibles pour réduire nos déficits, il finira comme Oedipe, chassé de Thèbes, aveugle et seul. Si Bayrou est notre Tirésias, alors c'est Tirésias qu'il faut porter au pouvoir, tant il aura averti et averti de ce danger. Ne peut être crédible pour affronter un danger que celui qui en a pris de longue date la mesure.

Mais il ne suffit pas de vouloir lutter contre les déficits : il y a aussi la manière de le faire. Il faudra arbitrer et trancher entre plusieurs priorités et entre plusieurs manières de faire. A mes yeux, la politique commence là. Le problème, c'est que nous n'en sommes pas encore là. Faut-il accroître la fiscalité, réduire drastiquement les services publics, laisser à la charge des individus et du privé une part de la protection sociale et la culture, remettre à plat toutes les niches, abandonner les projets pharaoniques ? Toutes ces questions vont se poser avec acuité. Et il va falloir y répondre. Je choisirai, pour ma part, la force politique et l'homme ou la femme que je soutiendrai, en fonction de ces réponses-là. Mais nous n'y sommes pas encore, hélas. Certaines préconisations font peur : on entend parler de Paul Jorion comme un nouveau messie dans la sphère économique. Vous allez voir à quoi il pense le messie, comme genre de solutions pour que la France puisse dépenser encore plus. Citation...

À qui l’État verse-t-il des intérêts en France ? À des banques, à des compagnies d’assurance, à des particuliers. Si ces particuliers ont de l’argent en trop qu’ils peuvent prêter à l’État, ne serait-il pas plus simple pour l’État de percevoir cet argent sous la forme de l’impôt ? Ce serait aussi beaucoup moins onéreux pour lui, puisqu’il n’aurait pas à verser d’intérêts sur la somme.

Paul Jorion peut toujours dénoncer les méchants spéculateurs, ces derniers ne prospèrent jamais ailleurs que sur un terreau fertile. Bien avant d'attaquer la pratique spéculative, il faudrait commencer par s'occuper du terreau... La Machine infernale est en route, il est plus que temps d'introduire un grain de sable dans son mécanisme.

Commentaires

  • Faut-il accroître la fiscalité : à court terme, certainement, accroître la fiscalité sur les grandes fortunes et les multinationales (qui ont réussi à échapper à presque toute fiscalité depuis 10-15 ans grâce aux paradis fiscaux, aux multi-niches fiscales, aux jeux sur les prix de transfert, etc.)

    Réduire drastiquement les services publics : non. Au contraire, les services publics sont l'un des atouts de la France et de son économie dans la concurrence mondiale.

    Laisser à la charge des individus et du privé une part de la protection sociale et la culture : je ne le pense pas, car cela risquerait de coûter bien plus cher, globalement, que dans le système actuel.

    Remettre à plat toutes les niches : certes. Evaluer leur rapport coûts / bénéfices pour l'action publique.

    Abandonner les projets pharaoniques : en tout cas les réévaluer. Quand l'argent manque, il faut un rapport coûts / bénéfices excellent pour justifier un investissement nouveau. P.ex. je suis a priori pour le canal Seine-Nord mais contre le "grand huit". La force de frappe nucléaire me semble coûter bien trop cher par rapport à ce qu'elle rapporte (et son budget, pour autant que je sache, a été augmenté depuis le début des années 2000 !). Aux USA, Obama a décidé de réduire drastiquement son volume.

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    Tout cela ne suffira pas. Pour rendre le meilleur service public, il va falloir utiliser beaucoup, beaucoup mieux ses ressources et ses moyens. C'est-à-dire faire des gains massifs de "productivité" ; non pour licencier qui que ce soit, mais pour rendre le service public bien plus efficace et générateur de croissance, de bien-être collectif, de durabilité.

    Je pense que le service civique universel s'imposera comme une nécessité.

    Je pense aussi que, si on n'a plus assez de profs "remplaçants titulaires" pour assurer les cours, pourquoi faire appel à des non-professionnels comme le propose le gouvernement ? pourquoi pas plutôt à des enseignants en place et qui feraient actuellement moins de 18 h de cours ?

    Ce n'est qu'un exemple ;-)

  • Côté enseignement, il y a au moins un domaine où on pourrait faire des économies : la formation continue.
    Quand le pays va mal, cela me paraît secondaire de payer des formateurs ou des enseignants à en former d'autres qui travaillent déjà.
    Et puis fermer les centres IUFM qui ne servent à rien et revendre les bâtiments, tiens, ça, ça fera des économies aussi.
    Accroître la fiscalité, je suis contre dans la mesure du possible. C'est la mesure facile sur laquelle comptent toujours les États. Une mesure de gauche typique, anti-koulaks, dans un pays qui fait déjà fuir l'argent et qui taxe lourdement.
    Je préfère qu'on parle d'économies d'abord, et qu'on voit la fiscalité ensuite...
    En ce qui concerne les services publics, désolé, mais on ne pourra pas tout conserver, il faut bien se le dire...

  • @frédéric
    je suis globalement d'accord avec ton propos
    @l'hérétique
    1. As-tu essayé de chiffrer les économies dans les dépenses, que tu appelles toujours de tes voeux ? As-tu mesuré leurs conséquences sociales potentielles ?
    2. Accroître la fiscalité ou, plutôt, restaurer une vraie progressivité de l'impôt n'est pas une mesure facile comme tu le dénonces : c'est un retour sur les cadeaux généreux faits, depuis 30 ans maintenant, à ceux qui, aujourd'hui, continuent à en tirer profit par l'intérêt que leur verse l'Etat.
    Ainsi ces "spéculateurs" gagnent deux fois : d'abord le cadeau fiscal, puis l'intérêt versé sur les sommes (reçues en cadeau fiscal) prêtées à un Etat qui vient de creuser son déficit par le cadeau fiscal.
    Paul Jorion, pour le coup, a raison : autant rétablir l'impôt en supprimant les cadeaux fiscaux qui ne servent qu'à financer la dette aux frais de l'Etat, donc de l'ensemble des contribuables, au profit de quelques uns.
    On tente de nous leurrer en essayant de nous faire croire qu'en desserrant la pression fiscale on incite à l'investissement productif. Dans les faits, on entretient la rente...

  • Jorion est un clown, d'ailleurs ces solutions du toujours plus d'état, de dépenses et d'impôts sont à l'œuvre depuis des décennies dans ce pays et dans d'autres.

    C'est là tout le malheur de ces pseudos intellectuels fortunés et bien pensant, ils ne connaissent pas la vraie vie.

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