J'achève, enfin, après plusieurs mois de lecture l'oeuvre majeure d'Alexis de Tocqueville : De la démocratie en Amérique. En une épopque où l'actuel Président réduit les libertés et confisque les pouvoirs les uns après les autres, l'avertissement de Tocqueville dans le dernier chapitre de son ouvrage, sonne magnifiquement. J'ai aimé le souci constant de de Normand d'analyser les ressorts de la démocratie et sa défense infatigable de la liberté contre toutes les tyrannies : contre celle de la majorité, mais aussi contre celle de l'individu dont la démocratie tend à rendre l'émergence possible. Contre la tentation de remettre aussi son sort exclusivement entre les mains d'un État devenu omni-puissant, un mal très moderne qui nous guette toujours plus. A mon sens, une charge sans concession contre l'État socialiste. Tocqueville n'aurait pas été socialiste, c'est évident.
Au-dessus de ceux-là s'élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d'assurer leur jouissance et de veiller sut leur sort. il est absolu, détaillé, régulier, prévoyant et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l'âge viril; mais il ne cherche, au contraire, qu'à les fixer irrévocablement dans l'enfance.
Et puis enfin, contre l'individualisme, ce mal non moins moderne dont nous souffrons et qui fait que nos concitoyens finissent par se désintéresser des affaires publiques. Typiquement le taux d'abstention que nous avons à craindre lors des élections européennes, par exemple :
« L'individualisme est un sentiment réfléchi qui dispose chaque citoyen à s'isoler de la masse de ses semblables de telle sorte que, après s'être créé une petite société à son usage, il abandonne volontiers la grande société à elle-même »
Enfin, le dernier avertissement de Tocqueville contre les hommes forts et l'abandon de la liberté sonne comme une charge, à mes yeux, contre un Nicolas Sarkozy qui se moque à ce point des libertés et confisque tous les pouvoirs.
Chez la plupart des nations modernes, le souverain, quels que soient son origine, sa constitution et son nom, est devenu presque tout-puissant, et les particuliers tombent, de plus en plus, dans le dernier degré de la faiblesse et de la dépendance. [...]
Fixer au pouvoir social des limites étendues, mais visibles et immobiles; donner aux particuliers de certains droits et leur garantir la jouissance incontestée de ces droits; conserver à l'individu le peu d'indépendance, de force et d'originalité qui lui restent; le, relever à côté de la société et le soutenir en face d'elle: tel me parait être le premier objet du législateur dans l'âge où nous entrons. [...]
Je vois chez nos contemporains deux idées contraires mais également funestes.
Les uns n'aperçoivent dans l'égalité que les tendances anarchiques qu'elle fait naître. Ils redoutent leur libre arbitre; ils ont peur d'eux-mêmes.
Les autres, en plus petit nombre, mais mieux éclairés, ont une autre vue. A côté de la route qui, partant de l'égalité, conduit à l'anarchie, ils ont enfin découvert le chemin qui semble mener invinciblement les hommes vers la servitude. Ils plient d'avance leur âme à cette servitude nécessaire; et, désespérant de rester libres, ils adorent déjà au fond de leur cœur le maître qui doit bientôt venir.
Les premiers abandonnent la liberté parce qu'ils l'estiment dangereuse; les seconds parce qu'ils la jugent impossible.
J'en finis donc avec ce magnifique défenseur de la liberté qu'est Tocqueville, même si je n'exclus pas de venir chercher dans ses sages réflexions, dans l'avenir, des éléments pour mieux comprendre un avenir qu'il a su prévoir avec tant de prescience à plus d'un égard. Tout le monde a le droit de se réclamer de Tocqueville, mais, il me semble qu'en France, c'est le MoDem, et en Europe l'ADLE qui, plus que toute autre mouvance politique, se rapprochent le plus de l'idéal de liberté et de justice qui ont pu animer ce grand philosophe. Ce n'est pas un hasard si l'admirateur d'Alexis de Tocqueville que je suis a choisi de me joindre aux hommes et aux femmes dont la liberté est l'étendard.