EDIT : compte-tenu des premiers commentaires, je fais un EDIT : il ne s'agit en AUCUN CAS dans ce billet de comparer Bayrou à Le pen et a fortiori d'en faire un Le pen ligth. Ce qui m'intéresse, c'est d'analyser la fonction tribunicienne et de voir comment deux personnalités politiques, l'une en dehors du champs républicain (Le pen) l'autre, au contraire, dans la sphère démocratique et républicaine (Bayrou) incarnent cette fonction. J'ajoute qu'il existait en Grèce un nom pour désigner les individus qui flattaient le peuple : cela s'appelait un démagogue. Peut-être aurais-je du intituler ce billet autrement : Tribun versus démagogues, Bayrou vs Le pen.
Je lisais tout récemment un sondage sur la popularité des hommes et femmes politiques et constatais avec étonnement que François Bayrou, parmi les politiques en activité (je ne compte donc ni Chirac ni Giscard) est l'homme le plus populaire auprès de l'électorat du FN.
C'est très étonnant tant le centre est ce qu'il y a de plus opposé aux extrémismes. Mais, bien réfléchi, cela ne l'est pas tant que cela.
Il existait dans la Rome antique une magistrature particulière, qui ne faisait pas partie du cursus honorum : le tribuniciat.
La fonction tribunicienne avait pour objet de défendre les intérêts du peuple; Ils pouvaient paralyser l'action légale d'un magistrat (c'était le bon temps...).
Les tribuns de la plèbe ont progressivement disparu, mais, dans la sphère politique, à différentes époques, on trouve des individus pour incarner cette fonction.
Le malheur de la France, ces trente dernières années, c'est que la fonction a été exercée par un individu clairement placé en dehors du champ républicain, Jean-Marie Le Pen. Or, le tribun de la plèbe n'a de raison d'être que dans le champ républicain.
Or, c'est François Bayrou, en France, qui incarne désormais cette fonction, ce qui est un renversement sans précédent. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si J-F Khan a parlé un jour d'extrême-centre.
Un langage de vérité peut donc porter auprès de l'électorat du FN, qui n'a cure, lui aussi, du clivage droite-gauche. Sur le fond, cet électorat est un électorat qui n'aspire qu'à revenir dans la sphère républicaine, mais qui veut simplement que l'on s'occupe de lui et qu'on le défende contre les injustices.
EDIT : j'ajoute cette ébauche de wikipedia sur la démagogie, qui n'a évidemment rien à voir avec le rôle du tribun de la plèbe :
La démagogie (du grec demos « le peuple » et ago : « conduire ») est une notion politique et rhétorique désignant l'art de mener le peuple en s'attirant ses faveurs, notamment en utilisant un discours simpliste, occultant les nuances, utilisant son charisme et dénaturant la vérité.
Le discours du démagogue sort généralement du champ du rationnel pour s'adresser aux passions, aux frustrations de l'électeur. Il recourt en outre à la satisfaction des souhaits ou des attentes du public ciblé, sans recherche de l'intérêt général mais dans le but unique de s'attirer la sympathie et de gagner le soutien. L'argumentation démagogique est délibérément simple afin de pouvoir être comprise et reprise par le public auquel elle est adressée. Elle fait fréquemment appel à la facilité voire la paresse intellectuelle en proposant des analyses et des solutions qui semblent évidentes et immédiates.
Le terme « démagogie » aujourd'hui est largement perçu avec une connotation péjorative. En effet, l’étymologie du mot grec traduit plutôt le terme « démagogue » comme celui qui éduque, qui conduit le peuple.
La démagogie, même si elle est inhérente à toute démocratie, fausse le jeu d'une conception idéalisée de la démocratie produisant bien souvent des effets contraires à l’intérêt général.
Souvent confondue avec le terme populisme, la démagogie se différencie de celui-ci dans la mesure où elle renvoie à l'idée de "dire au peuple ce qu'il veut entendre" (d'où l'utilisation de termes simplistes), alors que le populisme renvoie à l'idée de "faire ce que le peuple souhaite".
Commentaires
L'expression "extrême-centre" est à attribuer à Alain DUHAMEL et non à J-F Khan, il me semble ...
Sinon pour revenir à la notion de tribun, Bayrou est effectivement un parfait tribun si l'on s'en tient à la définition étymologique du terme (plus que politique) puisqu'il incarne la fonction d'orateur populaire avec brio et éloquence. Mais son mal de tribune ne suffit pas à excuser les tartufferies internes ; Le manque d'équité et l'absence totale de démocratie lors de la consultation interne, notamment.
Du coup, je le trouve plus proche du "Tartuffe ou l’imposteur" de Molière que du Tribun de la plèbe ...
Bien vu, l'Hérétique. D'ailleurs le recul du FN aux dernières présidentielles s'explique peut-être davantage par l'apparition d'un "tribun" républicain que par la surenchère de discours droitier du candidat victorieux.
Ca peut être un message d'espoir. Mais c'est aussi un exercice périlleux de haute voltige. Car le tribun républicain ne doit pas donner dans la démagogie gratuite du "tout/tous pourris". Il faut que ces critiques soient bien étayées et substantiées. Ce que Bayrou parvient à faire la plupart du temps...
@pastel, Dans le registre de la démagogie gratuite Bayrou n'est pas en reste ... ainsi quand vous affirmez que "Bayrou parvient à faire la plupart du temps..." s'agissant de l'absence de démagogie me semble tendancieux .... je serait tenté de vous demander même quand il lance une consultation interne et en écarte ceux qu'il ne souhaite pas voir à ses côtés pour cette même consultation ?
Zemmour parlait d'un "Le Pen des élites". Ce n'est pas faux, en partie. De là à dire que c'est lui qui a capturé les voix FN comme c'est écrit dans un commentaire...
Je ne suis pas surpris. D'ailleurs dans les nouveaux adhérents, j'en ai vu qui avaient déjà voté Le Pen, pas par racisme mais ce sont des poujadistes à deux balles. Bien sûr, ils sont venus à un cocktail puis on ne les a plus vus, tant mieux.
Franchement Article et Commentaires, se basant sur un vague sondage,
me paraissent (une fois n'est pas coutume ?), bien tordus.
Le problème est que c'est le pouvoir qui sort à grande vitesse du champ
républicain depuis mai 2007 et que dans ces cas, là les Hommes et Femmes Politiques qui ne s'en accomodent pas sont peu nombreux.
F. Bayrou est l'un d'eux, voilà tout. D'ailleurs moi non plus je ne m'en
accomode pas. E toi l'hérétique ? et vous les commentateurs ?
Je trouve votre article d'une rare crétinerie, à la limite de la malhonnêteté intellectuelle. Bayrou est au centre et incarne on ne peut plus les valeurs républicaines; ses jugements sont souvent d'une justesse et d'une équité remarquable en politique. L'électorat de Le Pen s'est étiolé car Sarkozy a repris une partie de son électorat et des points de son programme. Les discours extrèmes (voir les tests ADN et cotas d'immigrés...) sont plus à chercher du côté du gouvernement actuel que de Bayrou qui est le contraire d'un démagogue. Les thèmes choisis pendant sa campagne étaient on ne peut plus impopulaires (impôts ou dette de l'État...) et pourtant nécessaires au pays. Mr Sarkozy au contraire n'a eu de cesse de multiplier les clin d'oeil au FN et fait des promesses d'une rare démagogie (pouvoir d'achat, fin des parachutes dorés, etc....) Vous vous dites un disciple de Schumpeter et Montesquieu, je vous conseille de les relire.
@ Mire
Vous n'avez rien compris à l'article, et je vous conseille de le relire.
L'électorat FN ne vote évidemment pas au centre. Mais dans le dernier sondage IFOP sur les personnalités, j'ai vu que 71% de cet électorat trouvait Bayrou sympathique, alors que toutes les autres personnalités étaient à à peine 50%. C'est cela qui m'a interpelé.
Je ne vous taxe pas de crétinerie, mais...il faut lire les articles avant de les juger. Il n'y a pas de discours extrémiste chez Bayrou : c'est en effet, ce que je dis. Lisez, svp, avant de faire des jugements à l'emporte-pièce.
@ Mire
Et tant que j'y suis, renseignez-vous sur ce qu'est un tribun de la plèbe dans la Rome républicaine, faute de quoi, vous ne pourrez comprendre l'esprit de ce billet.
J'ai souvent apprécié vos articles, mais là, je dois dire que je suis très, très dubitative.
Tout d'abord sur le traitement du FN en France. Cette hypocrisie totale qui a exclu ces Français du débat démocratique alors que dans les autres démocraties européénnes, ils auraient eu leur place au Parlement et auraient été obligés de débattre du fond des sujets. C'est ce qui s'est passé en Europe, ailleurs qu'en France qui n'est PAS une vraie démocratie, et ils ont vite quitté les Parlements, car ils n'avaient RIEN de concret à proposer et les villes qu'ils avaient réussi à conquérir ont été de tristes exemples. Pour moi, c'est cela la démocratie.
Je n'ai d'ailleurs jamais apprécié le "cinéma" qui a été fait en 2002 lors de l'élection présidentielle avec tous les profs et les jeunes dans la rue pour "prouver" leur attachement à la démocratie. Quelle tartufferie !
Si on avait voulu être démocrate on aurait dialogué avec ces gens sur tous les sujets, ce qui aurait vite démontré le vide de leurs positions.
Non, on s'est bouché les yeux et les oreilles, il y a tellement d'hypocrisie dans ces comportements.
J'ai personnellement beaucoup discuté avec eux car je n'ai absolument pas peur du débat. Et j'ai constaté un immense DESESPOIR de ces gens devant la cinéma que nous offrent PS et UMP. Beaucoup se sentent absolument délaissés par l'Etat, abandonnés par les partis en place. Et ils ont raison. S'ils ont mis le bulletin FN dans l'urne, c'est comme beaucoup d'Allemands qui n'avaient rien à bouffer dans les années 30, où les partis étaient occupés à se faire la guerre oubliant la misère des concitoyens.
J'ai discuté avec beaucoup d'entre eux et je ne les diabolise pas. Cette attitude qui refuse tout dialogue est une tartufferie. Ce sont des gens qui ne sont pas plus racistes que d'autres Français plus "politiquement corrects" mais qui ne voyaient à l'époque personne d'autre pour les représenter.
Maintenant, qualifier F. Bayou de "Le Pen soft" comme Tapie dont vous reprenez un peu les propos est une arme terrible dans la bien-pensance ambiante.
Néanmoins, les gens de ce pays, qui sont devenus le "Tiers-Etat" dont parle si bien F. Bayrou dans son livre "Au nom du Tiers-Etat", n'ont RIEN à espérer du système noir et blanc en place, auquel se rallient tous les politiques de carrière dans un pays avec 85% de cumul des mandats alors qu'il n'est que de 15% en Grande-Bretagne et 10% en Allemagne...
Nous avons un simulacre de démocratie et F. Bayrou a bien raison de le dénoncer, lui qui a été député européen et a vu comment cela se passe ailleurs.
Tiens, je vous invite à lire tout le dossier Mediapart sur l'affaire Tapie qui donne aussi la parole à Eva Joly:
http://www.mediapart.fr/journal/france/270708/affaire-tapie-sept-questions-autour-d-un-scandale-d-etat-0
http://www.mediapart.fr/journal/france/250708/eva-joly-l-affaire-tapie-met-en-evidence-un-pouvoir-presidentiel-arrogant-et-s
On me reprochera bien sûr que ce journal coûte 9€ par mois. Mais ces articles très bien recherchés et hors de la main-mise sur les médias ne valent-ils pas un soutien plus que les "feuilles de chou" auxquels on nous a habitués ?
Il est en tout cas bien plus informatif que les "gratuits" appartenant - entre autres - à Bolloré qui ne sont que lavage de cerveau pro-gouvernemental.
à Mire
Je me permets de vous dire tout cela, parce que généralement, je suis en accord avec vos commentaires. C'est pour cela que je m'étonne de votre réaction.
@ L'Hérétique:
Je comprends vote étonnement sur certaines réactions, mais votre blog étant lu, je me méfie de la mauvaise utilisation du mot "tribun" par des personnes peu avisées ainsi que du rapprochement avec Le Pen, vu la "renommée" dont il jouit...
C'est pourquoi j'ai souhaité vous répondre.
Amitiés
@ L’Hérétique,
1. C’est bien de rappeler ce qu’était la fonction de tribun de la plèbe dans la Rome Antique.
Deux tribuns de la plèbe sont restés célèbres, il s’agit des frères Gracques (Tiberius et Caius) petits-fils de Scipion l’Africain.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Gracques
Cela me permet d’évoquer le groupe des Gracques qui avaient appelé à un rapprochement du PS avec François Bayrou pendant la campagne présidentielle.
2. Je n’ai pas vu le sondage dont tu fais état. Pourrais-tu en citer ta source d'inspiration, s’il te plaît ? Ca permettrait éventuellement d’éclairer ton billet. En l‘état, je partagerai presque l’avis de Luc : "Franchement Article et Commentaires, se basant sur un vague sondage, me paraissent (une fois n'est pas coutume ?), bien tordus." Il aurait été intéressant de connaître comment est perçu Bayrou dans les autres familles politiques.
@ Danièle,
Il y a beaucoup de vérité dans ce que tu écris sur les électeurs frontistes. On ne doit pas les exclure du débat en les diabolisant. L'espace démocratique comprend tous les citoyens.
=> A force de te voir faire de la pub pour Médiapart, je vais finir par craquer et m’y abonner LOL
@mitiés
@ Danièle
Je viens de faire un EDIT pour être plus clair
Personnellement, j'ai apprécié ce parallèle entre fonction du tribun est rôle de F.Bayrou
Si la démocratie, selon l'adage, est le gouvernement DU peuple, PAR le peuple et POUR le peuple, alors on ne saurait avoir de démocratie sans tribuns.
La question que je me pose est : un tribun, peut-il devenir gouvernant ?
En tous les cas je pense que le sondage IFOP auquel vous vous référez était orienté.
ah voilà la référence du sondage :
http://www.ifop.com/europe/docs/personnalitejuillet2008.pdf
Le tableau de bord politique Paris Match – Ifop :
Les personnalités
Juillet 2008
Merci L'Hérétique ;-)
C'est mieux avec un panorama complet !
Ben oui !!
Et puis Bayrou Le Pen Propre, Besancenot Le Pen de Gauche,
Bientôt Ségolène Le Pen Femme,
est-ce l'homme aux 5 cerveaux qui inspire ces joyeusetés publicitaires ?
Il ferait mieux d'en avoir un seul qui marche bien (du moins qui ait
progressé depuis le Bac où apparemment il n'était pas formidable).
Tout ça c'est dans la ligne des bêtisiers de TF1 la future unique grande
chaine représentative de la culture Francaise.
Pour que cela n'arrive pas il vaudrait mieux que F. Bayrou et ceux qui
pensent comme lui sur l'essentiel arrivent, malgré les courants de propagande artificiels, à être bien plus que des tribuns.
@ L'Hérétique:
Merci de l'ajout en couleur :-)
Je viens d'aller sur le site indiqué pour étudier les résultats du sondage et je trouve encore terrible qu'ils proposent comme duel:
1) Strauss-Kahn - Besancenot
2) Royal - Sarkozy
et ils évitent bien de proposer F. Bayrou dans ces duels...
Comme pendant les présidentielles...
Allez à la page 13 du pdf, Danièle
Cordialement
l'hérétique
C'est bien pouvoir lire dan le détail les réponses à ce sondage, il serait intéressant de voir comment Paris-Match l'a utilisé.
Inquiétant, les résultats du sondage "budget des vacances" (page 29 du pdf)
- 42% des français ont déclaré ne pas partir en vacances cette année ! Ce chiffre n'a jamais été aussi élevé. Vive la France du pouvoir d'achat :-(
Pour ceux qui partiront le budget moyen n'a jamais été si bas à 1149€ en moyenne (les détails par tendance politique sont édifiants - page 31).
C'est incroyable comme certains manient vite l'invective ("article d'une rare crétinerie", "article et commentaires tordus"), sans même essayer de comprendre ce que l'auteur ou les auteurs ont voulu dire. Pour ma part le message principal de l'Hérétique était tout à fait clair et n'a été que confirmé par ceux qui ont émis des doutes voire plus:
"Or, c'est François Bayrou, en France, qui incarne désormais cette fonction, ce qui est un renversement sans précédent. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si J-F Khan a parlé un jour d'extrême-centre.
Un langage de vérité peut donc porter auprès de l'électorat du FN, qui n'a cure, lui aussi, du clivage droite-gauche. Sur le fond, cet électorat est un électorat qui n'aspire qu'à revenir dans la sphère républicaine, mais qui veut simplement que l'on s'occupe de lui et qu'on le défende contre les injustices."
Il ne s'agit donc pas de séduire l'électorat de Le Pen en reprennant et banalisant les thèmes de ce dernier (ça c'est la méthode Sarkozy) mais en leur offrant une autre alternative, démocrate et crédible, face à l'UMPS.
Et j'espère que je n'étais pas en cause dans ceux qui se sont pris aux "premiers commentaires" (y compris l'Hérétique dans son édit).
C'est vraiment à désespérer de la blogosphère.
Celà dit, je ne suis pas d'accord avec Danièle Douet qui trouve que la France n'est pas une démocratie et qui compare la situation de l'électorat de Le Pen à celle de "beaucoup d'Allemands qui n'avaient rien à bouffer dans les années 30". Il ne faut pas charrier quand-même.
Le système politique français et la situation des médias à un grand besoin d'être réformé en profondeur, nous sommes d'accord là dessus. Mais je n'irais pas jusqu'à dire que la France n'est pas une démocratie. Je trouve que là on franchit une ligne rouge qui peut inciter certains à faire usage de moyens... répréhensibles. C'est justement cette ligne que le tribun républicain ne doit pas franchir.
CQFD
Bayrou dérange c'est un fait mais dans le bon sens contrairement à Le Pen.
Je suis 100% d'accord avec L'Hérétique.
Voici ce que j'écrivais, par exemple, en octobre 2006 :
"Désormais, c'est à l'électorat contestataire renvoyant dos-à-dos les deux grands partis de gouvernement que s'adresse François Bayrou. Dans la préface du livre qu'il vient de publier (1), il dénonce ainsi les élites au nom du « peuple des citoyens, le tiers état d'aujourd'hui » : « C'est un peuple qu'ils croient sans importance, écrit-il. Presque un peuple de trop. Un peuple gênant. Ainsi le vivent les pouvoirs, et le considèrent les puissants. Le même mal ronge et court depuis des années, préparant à chaque élection, à chaque consultation, sa surprise, l'irruption du peuple indocile dans le concert bien ordonné de la pensée préfabriquée. Et chaque fois les puissants poussent des ah ! et des oh !, commandent des enquêtes dont ils découvrent les conclusions navrées... et retournent à leurs habitudes méprisantes. » Familier de la science politique, un parlementaire européen UDF qualifie ce discours de « centrisme tribunitien ». Il n'est du reste pas inédit en Europe : on peut citer par exemple le Parti du travail en Lituanie, membre justement du Parti démocrate européen coprésidé par François Bayrou."
http://politique.hautetfort.com/archive/2006/11/13/centre.html
Pour avoir suivi de près les deux campagnes, il y avait du Chevènement-2002 (plus que du Le Pen) dans le discours de Bayrou en 2007. Appel au peuple contre les élites : c'est la définition même du populisme (je n'avais pas osé le mot dans mon article, mais l'idée y était).
Cher Laurent de Boissieu
Je suis très flatté d'avoir le satisfecit d'un journaliste expert et reconnu comme vous. Merci. Votre analyse d'octobre 2006 était prémonitoire. Bravo à vous, quand on considère la suite des évènements.
J'aime beaucoup le concept de centrisme tribunicien.
@ Laurent de Boissieu
Toutefois, je mets un petit bémol : il n'y a pas dans la démarche de Bayrou de volonté de faire "ce que le peuple souhaite". On ne peut donc pas non plus le ranger dans la catégorie populiste.
C'est bien pour cela qu'il trace une voie originale, et que le centrisme tribunicien me paraît bien qualifier sa ligne politique.
Je suis d'accord pour le terme "centrisme tribunicien".
Mais je ne définis pas le populisme comme la volonté de faire ce que le peuple souhaite mais comme la volonté de répondre aux attentes du peuple (plutôt, par exemple, que de les réorienter), d'en appeler au peuple contre les élites.
Faire ce que le peuple souhaite, c'est renverser en politique l'offre et la demande, c'est la démocratie (la dictature ?) des sondages.
Pour faire avancer le Schmilblick, quitte à me contredire un peu : au fait, qu'est-ce que la démocratie si ce n'est "faire ce que le peuple souhaite" en lui demandant de trancher lors des élections démocratiques (et non par les sondages) ?
Ce qui donne :
Démocratie : "faire ce que le peuple veut"
Populisme : "en appeler au peuple contre les élites"
Démagogie : "dire au peuple ce qu'il veut entendre"
@ Laurent de Boissieu
Mais Bayrou n'est pas aussi explicite que vous le dites. Il n'en appelle pas au peuple contre les élites en bloc, mais contre une attitude qui consiste à considérer les aspirations populaires comme infantiles.
Je comprends bien votre raisonnement, je conçois que l'on puisse voir une certaine forme de populisme dans le discours de Bayrou, mais je pense que c'est une erreur. Le discours de Bayrou n'est pas générique. Il cible les cas particuliers à chaque fois, alors que le discours populiste martèle quelques grosses ficelles sans jamais en changer le refrain.
Il me semble que Bayrou évoque des choses précises. En revanche, il est vrai que son discours est essentiellement contestataire, du moins pour l'instant.
Il s'agit pourtant bien d'une stratégie populiste de François Bayrou, décidée à l'été 2006, visant à incarner un "vote protestataire de gouvernement" (expression de Marielle de Sarnez) en s'adressant aux abstentionnistes et à l'électorat protestataire (extrême gauche et extrême droite).