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  • Les Roms...

    Y'en a, des Roms, en ce moment, dans mon quartier. Ailleurs, comme à Marseille, ça chauffe. D'un côté, je ne suis pas outré des expulsions auxquelles procède Valls. Mais voilà, ça, ce sont les Roms que je ne connais pas. De l'autre, il y a ceux que je croise et là, deux catégories : ceux qui me gonflent et ceux avec lesquels j'ai plus ou moins sympathisé.

    Le problème, c'est d'en croiser à tous les carrefours, devant les boulangeries, aux feux rouges pour imposer de force le nettoyage des vitres (que l'on n'a pas demandé) au pied des distributeurs et cetera...

    Je déteste que l'on me force la main. Et je ne parle pas des enfants qui mendient dans le métro et réclament davantage si l'on a le malheur de leur lâcher la moindre pièce.

    Mais en même temps, il y a la Rom qui me propose un vieux Entraide perclus de froissures pour deux euros chaque samedi. Je le lui achète. Oh, c'est vrai, il est frippé, l'Entraide ; souvent datant de deux mois, s'adressant aux Nancéens, pas aux Parisiens et j'en passe. Mais que de bonnes infos dedans. Pas de l'actualité façon Figaro mais plutôt des trucs et astuces, de la survie ou parfois des entretiens sur des grands sujets de société.

    Et puis ma Rom, je la connais : tous ceux qui tentent d'alpaguer le passant dans le coin sont de sa famille. Je les ai plusieurs fois vus se réunir. Mais voilà, je la connais et elle me connaît. On se salue civilement. Elle sait que je lui achète son journal et que je le lis. Ce n'est pas de la charité. Il m'intéresse, moi, son magazine. Elle me rend un service. Je l'ai déjà vue demander du fric à quelqu'un à titre gratuit. Mais jamais à moi. Je ne dis pas qu'on est amis, mais on se respecte. 

    Un jour, l'une de ses filles s'est avancée vers moi, à la Rom, c'est à dire insistante, presqu'agressive. Elle s'en est approchée et elle lui a dit : laisse, je le connais. Et paf, elle a dégagé sa fille. 

    La dernière fois, elle n'avait rien. On s'est souri, et j'ai passé mon chemin et je lui ai dit "bah, ce sera pour une prochaine fois". Je n'avais pas envie d'entrer dans une relation de mendicité. Et puis cela me gêne quand elle est là, en train d'attendre avec une de ses petites filles. Mais bon, un sandwiche, ça ne fait pas de mal. Alors je suis rentré dans la boulangerie, et je suis revenu avec un bagnat. Dans ce genre de cas, je prends un truc mou (passé un certain âge pas mal de Roms n'ont plus de dents ou presque) et en l'absence d'informations sur la pratique religieuse de mon mendiant, je n'offre jamais quelque chose qui contient du porc. L'Didier va s'étouffer s'il lit ça. «ah, le con ! même quand ce sont des mendiants il a intégré leurs interdits alimentaires !»

    On ne sait pas de quoi demain est fait.

    Il y en a une autre de Rom. C'est celle que je croise très souvent au feu rouge. Toujours souriante, jamais agressive. Mais elle ne me demande jamais mon avis pour nettoyer mon pare-brise. On se connaît maintenant. Elle sait que je vais lui refiler une pièce. Mais elle ne râle pas non plus si je n'ai rien. Maquillée, coiffée, bien habillée, elle pourrait devenir une jolie fille. Peut-être. Là, elle ressemble plutôt à un palefrenier de ferme. D'un côté, ça me gonfle que l'on m'alpague à un feu rouge. J'aime ma tranquillité quand je suis dans mon automobile. De l'autre, je suis aussi un repère pour cette fille. Elle sourit quand elle me voit. 

    Est-ce qu'elles me manqueraient mes Roms si elles étaient expulsées ? Sans doute pas. Mais je n'ai pas non plus le sentiment de souhaiter qu'elles ne soient plus là.

    Il y a en avait une troisième que je connaissais mais que je ne vois plus depuis un an. Là, en revanche, j'ai demandé des nouvelles. Elle se trouvait à la sortie d'un Franprix et vendait l'Itinérant. Caramba : plus d'Itinérant depuis sa disparition. Elle, je l'aimais bien. Elle se tenait droite, là, sans rien dire, toujours aimable, discrète et souriante. C'était ma livreuse. Elle avait fini par m'identifier ainsi que mes enfants. On ne manquait jamais de se saluer, elle demandait des nouvelles des enfants. Comme je ne pouvais pas acheter deux fois l'Itinérant, si on se voyait deux fois dans la semaine, bah, je lui glissais une petite pièce.

    Elle n'a jamais mendié. Je n'ai jamais considéré que c'était de la charité. Un petit coup de main par les temps qui courent, c'est pas du luxe. De mes trois Roms, c'est la seule dont je connaisse le nom. Elle s'appelle Maria. Et franchement, Maria, si tu as été expulsée, je l'ai mauvaise...