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La réforme de l'école selon les jeunes forces démocrates

Je sors de plusieurs jours d'échanges avec Maxime Cluzel, personnalité éminente des Jeunes Forces Démocrates. En deux à trois mots, les Jeunes Forces Démocrates, ce sont les jeunes de l'UDI. Ne les confondez pas avec les Jeunes Démocrates qui sont ceux du MoDem.

A vrai dire, cela a commencé par un commentaire assez vif et peu courtois de ma part à la suite d'un compte-rendu d'une convention des jeunes de l'UDI sur l'Éducation. Mais Maxime Cluzel a réagi avec beaucoup de courtoisie et de calme (ça n'avait pas été mon cas, j'en conviens) et finalement nous avons discuté.

C'est un peu particulier, l'Éducation en France, comme sujet : c'est un des rares thèmes sur lequel à peu près tout le monde peut discuter sans devoir maîtriser des connaissances pointues, comme dans la fiscalité, le droit, l'entreprise ou l'économie, par exemple. On a tous ou presque, un avis, à commencer par ceux qui ont ou ont eu des enfants.

Au sein des partis politiques, c'est un peu une facilité que je reproche, la discussion sur l'Éducation, parce que c'est la plus facile (et c'est bien là le danger car l'apparence est trompeuse...). Pour ma part, je suis bien plus attiré par l'économie, l'industrie et de possibles liens avec la fiscalité, l'environnement et les circuits courts. Mais sur ces sujets, je ne connais pas de dossiers politiques complets bien qu'on puisse consulter des rapports du Sénat ou de l'Assemblée.

Cela dit, les Jeunes Forces Démocrates ont abattu un travail considérable, la preuve en est qu'ils ont mis en ligne un document élaboré de projet de réforme, allant de l'école primaire (mais pas la maternelle, et c'est dommage) jusqu'au supérieur.

Il y a du fond, certes, mais c'est un peu le film d'horreur(s)...En fait, je ne suis d'accord avec presque rien...

Le document se concentre sur le collège, très peu sur l'école primaire et ignore purement et simplement la maternelle. Je me dis d'ailleurs parfois qu'on devrait aussi penser aux crèches, aux halte-garderie, aux assistantes maternelles, aux gardes partagées via des auxiliaires parentales quand on parle d'éducation. A mon avis, la chaîne commence à la naissance. Peut-être même avant avec l'haptonomie. 

Le collège, malheureux collégiens, se voit amputé d'une partie de ses heures en français, en histoire et en mathématiques, la musique et les arts plastiques disparaissent, au profit d'activités interdisciplinaires laissées à la libre inspiration de chaque établissement. En fait, même si mon jeune interlocuteur s'en défend avec véhémence, le projet des jeunes forces démocrates converge fortement avec l'actuelle réforme socialiste du collège.

Au lycée, c'est un jeu de massacre : imaginez un instant, des classes de seconde spécialisées mais dans lesquelles il n'y a que deux heures de français par semaine. Des classes scientifiques avec 2 à 3 heures de physique-chimie. C'est le projet des jeunes forces démocrates.

Dans leur document, ce qui se taille la part du lion, ce sont les langues vivantes. Tout le reste est amputé, et salement. Jusqu'à la gangrène.

Si une telle calamité venait à s'abattre sur l'école, il y a fort à parier qu'il y aurait des émeutes   dans les collèges et les lycées.

Je regrette d'être aussi lapidaire car, objectivement, il y a eu un gros travail d'élaboration dans le document que j'ai lu, mais je m'y retrouve si peu que je ne lui trouve que très peu d'attraits. Oh, bien sûr, il y a quelques principes qui ne me déplaisent pas (une relative autonomie dans les établissements, le rétablissement partiel des humanités, une réflexion très pertinente sur le numérique à l'école) mais le reste...horresco referens...

Je retiens la volonté de créer des filières professionnelles d'excellence. Malheureusement, cette vue de l'esprit se heurte, dans la réalité, aux stratégies des familles, et, disons-le, à un conservatisme évident du corps professoral dans son ensemble. Ce n'est à mon avis par pour demain et si cela devait être le cas, que deviendrait les élèves qui ne pourraient pas intégrer ces filières d'excellence ?

Dernier point, les jeunes forces démocrates proposent d'accroître la part du PIB dans l'éducation : c'est un avis qui les honore, mais en ces temps de disette budgétaire, cela ne me paraît pas une bonne idée. Commençons déjà par récupérer l'argent gaspillé en âneries au sein de l'Éducation Nationale : il pourra être réinvesti avec bonheur dans les choses utiles.

Commentaires

  • Ahah, vous croyez encore pouvoir être influent sur certains thèmes...
    Mais ça c'était autrefois.
    Sinon, il y a rapport à venir sur le numérique et éduc. :pp

  • En effet, ils ont fait du travail, mais j'ai à peu près la même perception (sans avoir absolument tout lu).
    En ce qui concerne le collège, oui, finalement, ils reviennent un peu aux mêmes effets que la réforme actuelle. Concernant la musique et les arts plastiques, ils partent d'un bon sentiment mais risquent d'aboutir à la même situation que le grec et le latin, avec au bout du compte le risque de la disparition. Ils proposent les concernant une matière "langues antiques" : bon, c'est à mi-chemin entre la situation actuelle et la réforme du collège, qui revient à acter que l'on ne reviendrait pas à la situation antérieure (qui proposait, dans l'absolu, plus d'heures, avec la possibilité de suivre de vrais cours dans les deux langues anciennes).

    Les JFD évoquent un renforcement de la spécialisation dès la seconde. Dans l'absolu, je serais plutôt pour l'inverse, pour évoquer le cas du lycée général. En ce qui concerne le lien avec le supérieur, je trouve qu'il s'agit plutôt d'une question de propédeutique générale que d'une question d'enseignement d'une matière plus spécifique.
    Pour cela, il n'est pas forcément utile (ou réaliste) d'envisager des modules d'enseignement supérieur au lycée pas forcément pratiques à mettre en place. Je note au passage que si le doctorant contractuel - j'en suis un - choisit une charge d'enseignement à la fac, c'est pour enseigner à la fac, et dans sa fac ; la proposition des JFD ne tient pas avec le statut actuel et serait accueillie avec scepticisme.
    Si l'on veut faire ou refaire de la terminale et du bac une propédeutique au supérieur (pour la filière générale), il faut relever les exigences du bac, la valeur des mentions et inciter les lycéens de terminale à dépasser précisément ce statut, à commencer à se dépasser un peu pour devenir des étudiants (dans cette optique, il faut évidemment conserver à tout prix l'enseignement de la philosophie !).
    Concernant le travail en groupe, j'ai toujours été sceptique face à l'intention affichée de le valoriser, sans considérer ce qu'il y a derrière. Concernant les TPE, on m'a parlé de peu d'expériences dissimilaires de la mienne : la tête de classe qui fait plus de 50% du travail, un autre élève 30%, un autre ce qui reste (pour caricaturer).

    Concernant le supérieur, leur réflexion semble plus rapide et moins avancée. Le problème du supérieur, c'est qu'il est complexe. On peut évidemment le considérer généralement, mais il y a des problématiques fort différentes selon les filières. Réfléchissant au prochain programme du Modem, ou plutôt d'abord à celui des Jeunes démocrates, je me dis qu'il faudrait prendre en compte cette diversité, ce qui est parfois compliqué pour des raisons de sociologie partisane. Au fond, pour le supérieur, il y a un vrai travail de réflexion à accomplir, en une période où le modèle universitaire est malmené un peu partout, sans oublier la spécificité française des grandes écoles et des prépas. Ce travail, il touche aussi à la formation des enseignants : différentes écoles s'affrontent ici, comme ailleurs, mais la tendance générale ne tourne pas franchement vers la préservation d'une bonne maîtrise disciplinaire, ce qui me semble inquiétant. Si vous consultez les derniers rapports du CAPES de lettres, vous verrez que les jurys admettent qu'ils recrutent (peut-être un peu forcés par des directives du ministère ?) des candidats ric-rac...

    Concernant la filière professionnelle, est-ce le corps professoral qui est le plus conservateur ? Il me semble qu'il y a plutôt un travail général à faire sur la perception de cette filière dans la société et auprès des familles.

  • Bonsoir Ascagne,

    Peu ou prou, on pense donc la même chose du programme des JFD. Pas mieux que celui des Socialistes.

  • Disons que je n'ai pas l'impression que les effets généraux seraient fort différents de ce que les socialistes proposent et mettent en place, même s'il y a de meilleures intentions et moins d'idéologie imposée au départ chez les JFD.
    Bon, on dira que je suis cauteleux, que j'ai une approche diplomatique (explicable par la volonté de ne pas être en mauvais termes avec une formation de jeunes d'un parti voisin, avec qui le rapprochement semble en général plus facile qu'avec les autres générations de l'UDI).

    Pour le programme du Modem, sur lequel il faut commencer à travailler en profondeur, la politique d'éducation en général (sans oublier le supérieur) représente un gros morceau...
    Quelle que soit la situation politique, que l'on finisse par soutenir un candidat plutôt ouvert ou que l'on se retrouve en première ligne, il va falloir beaucoup travailler, être à la fois clair sur la "philosophie de l'éducation" proposée sans être dogmatique, tout en allant loin dans le détail (sinon, on ne touchera pas le monde enseignant).

    Pour le moment, le message de Bayrou contre la réforme du collège et son positionnement sont relativement entendus et plutôt compris. Le gros problème, c'est que le débat sur l'éducation est souvent grevé par des simplifications outrancières et son accaparement, parfois, par des représentants un peu extrémistes dans leur positionnement ou dans leur impression (mais c'est un problème général aujourd'hui, au moins dans le versant le plus public et médiatisé du débat intellectuel).

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