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La tentation d'un État libéral

Je viens de lire chez Contrepoints le très séduisant compte-rendu d'expérience libérale de Maurice Mc Tigue, ancien premier ministre de Nouvelle-Zélande.

Dans la théorie, la société libérale me paraît la meilleure des sociétés, mais dans la pratique je tends à penser qu'elle ne s'adapte pas heureusement dans les sociétés qui n'ont pas la culture du fair-play. Ce n'est pas un hasard si cette expression est d'ailleurs anglo-saxonne.

Pour qu'une libéralisation fonctionne, il faut que la culture démocratique, la libre concurrence et la transparence soient très fortes là où elle se produit. Si je ne doute pas que les NéoZélandais répondent à ces exigences (il me semble d'ailleurs que ce pays vient d'être jugé comme celui du monde où les libertés sont les plus protégées) j'ai quelques doutes avec la France : ses corporatismes, ses réseaux, la collusion permanente de ses élites avec les grands acteurs économiques, le goût des petits chefs, la mesquinerie généralisée, l'amour de la superficialité et de la poudre aux yeux, rien de tout cela ne me donne confiance. Voyez d'ailleurs comme la France continue d'honorer la mémoire de chefs d'État aussi sinistres et liberticides que Napoléon Bonaparte ou Louis XIV...

L'un des principaux leviers de Mc Tigue a été la suppression massive des subventions de toutes sortes et la fonte drastique des effectifs de la fonction publique, notamment de son administration. Il me semble que l'indispensable corollaire de ces suppressions sont des allègements fiscaux conséquents, au moins sur les activités économiques de production, faute de quoi on tue dans l'oeuf l'esprit d'initiative en étouffant l'entreprise.

Daniel Tourre dans son Pulp Libéralisme fait une observation intéressante : le libéralisme authentique est à l'avantage des PME. C'est l'instabilité fiscale et juridique incessante qui constitue un gros handicap pour cette dernière, ainsi que le poids de l'État, car seules les très grosses entreprises ont la puissance nécessaire pour traiter avec l'État. Or, ce ne devrait pas être sur de tels critères que devraient se faire des négociations entre l'État et les acteurs économiques. Bayrou dans son État d'urgence et par la suite dans son programme présidentiel faisait en 2011 et 2012 à peu près les mêmes observations, s'engageant à cesser de modifier la législation pour une durée certaine s'il était élu.

En France, ce n'est pas je le crois l'absence d'initiative (les Français sont en réalité très individualistes) mais la jalousie et l'envie qui nous conduisent à décréter la puissance de l'État, de manière à ce qu'il puisse s'arroger en notre nom le droit d'exercer les petites mesquineries que chacun individuellement n'aurait pas le pouvoir de réaliser. 

Nous ne sommes pas des Étatistes. Juste des gens envieux, mesquins, jaloux et petits. Nos responsables politique quand ils décrètent une loi de "solidarité" comme ils disent, n'ont de cesse que de penser à s'en affranchir et la laisser aux gogos, et je ne pense pas qu'aux impôts en disant cela. Contraindre à emprunter des transports publics pollués par l'insécurité, la saleté et la vétusté en taxant les moyens de transport individuels, par exemple (Spécialité de la gauche parisienne). Forcer les familles à placer leurs enfants dans des écoles qu'elles jugent pourtant dangereuses et mal famées. Imposer la mixité sociale avec des délinquants. Voilà quelques exemples bien sentis.

Je me sens libéral, mais j'ai un problème de confiance avec mon pays, la France.

C'est cela qu'occultent à mon avis les Libéraux chez nous : ils ne comprennent pas qu'il n'y a pas de libéralisme sans fair-play, sans liberté réelle, sans transparence, sans honnêteté, sans vertu en un mot. Ce n'est pas un hasard si Montesquieu jugeait que les Républiques ne pouvaient fleurir sans vertu dans son Esprit des lois, car c'est pour lui la pierre angulaire de tout régime républicain. 

C'est très exactement mon sentiment. Le libéralisme dans sa forme idéale, c'est cette alliance-là, celle de la liberté, de la vertu et de la démoctatie.

Un libéral qui se respecte ne peut qu'exiger une liberté sans concession. Des libéraux de cette étoffe, il y en a quelques uns en France, et même sur la blogosphère, mais ils ne sont pas nombreux.

Sans verser dans l'anarchie, je pense que le libéralisme s'accomode très mal du culte des petits chefs et des manoeuvres des courtisans de tout poil. Si nous avons eu des esprits forts comme un Voltaire ou un La Bruyère pour les moquer, hélas, ils demeurent omniprésents à tous les étages de notre société.

Quand un chef doit répondre de ses actes, au fond, il est respectable quelles que soient ses lubies, mais quand il est couvert par une hiérarchie ou un Conseil d'Administration,  il vire au chef de soviet à la petite semaine.

Commentaires

  • Notre parti est social démocrate, laissons le néolibéralisme à la droite Sarkozyste, nous nous militons pour tout autre chose que ce monde ou le fric est roi.

  • Mais moi je suis libéral. Pas social-démocrate, et pas néo-libéral non plus.

  • Je me demande dans ce cas, ce que vous faites au MODEM alors, allez donc à l'UMP si le néolibéralisme vous plait tant !

  • @Modemois
    Vous êtes buté ou quoi ? Je viens de vous répondre que je ne suis pas néo-libéral. Ce mot ne veut d'ailleurs pas dire grand chose. Et l'UMP n'est pas libérale non plus.
    En revanche, le MoDem adhère à l'Alliance des Démocrates et des Libéraux européens.

  • "Un libéral qui se respecte ne peut qu'exiger une liberté sans concession."


    Bien sûr. Le renard libre dans un poulailler libre, comme disait l'autre. Désolé, mais on peut être libéral et parfaitement conscient de ce qu'une liberté "sans concession" mène aux pires abus. Pour de plus amples renseignements sur les résultats d'une liberté totale, voyez "La Jungle" d'Upton Sinclair (1908) ou sinon, reportez-vous aux analyses de Karl Popper dans "La Société ouverte et ses ennemis" (1945)...

  • @Christian
    Une liberté sans concessions, c'est une liberté garantie, notamment pour les poules d'aller et venir sans avoir à craindre la prédation du renard.

  • Bonsoir,

    Beau billet qui résume bien la situation. La vraie opposition ne réside plus de nos jours entre une gauche et une droite traditionnelles mais entre un conservatisme (dans son sens premier et le plus strict) d'inspiration socialiste (il ne faut rien changer bien que le modèle tourne à vide) et un libéralisme de fait révolutionnaire (car désireux de rompre avec ce conservatisme sclérosant).
    Je suis comme vous, j'ai mal à ma France et, personnellement, j'envisage avec le plus grand pessimisme l'avenir de ce pays (un bon thermomètre est l'état de ses forces armées).
    Quant au néo-libéralisme qui semble faire si peur, il n'est qu'un mot aussi creux que celui de fasciste quand ce dernier suffisait à qualifier tous les opposants aux grandes heures de l'URSS. Même s'il sonne bien, il a du mal à cacher le vide abyssal de la pensée qui l'a porté sur les fonds baptismaux, pensée qui nous a conduit dans l'impasse actuelle. Normal 1er et Talonette 1ère ne sont que les deux faces d'une même pièce, celle qui représente avant tout la république des copains et des coquins. En France, on a peut être eu des idées mais on a assurément perdu la vertu.

    Bonne soirée

  • Sujet de dissertation en philosophie:
    La liberté est-elle dangereuse?

  • Bonsoir H.
    C'est précisément ce qui ne me rend guère optimiste. Le libéralisme demeure un bel idéal...

  • @ L'Héré

    "Une liberté sans concessions, c'est une liberté garantie, notamment pour les poules d'aller et venir sans avoir à craindre la prédation du renard" m'avez-vous répondu.

    J'aimerais bien que vous développiez. Parce que, là, ce que je comprends, c'est que vous acceptez de limiter la liberté du renard ?

  • Christian, c'est toi qui a parlé de mettre le renard dans le poulailler ! Ce qui signifie que le renard est sur le territoire des poules et que les poules ne sont plus libres.
    Un libéral résoudra le problème en se contentant de mettre un grillage suffisamment haut et solide pour que chacun reste "libre" de chaque côté. Evidemment, si une poule choisit bêtement de passer au-dessus du grillage...

  • @Christian
    Exactement : Françoise a raison. La loi garantit la propriété privée en système libéral. La loi protège donc les poules du renard...

  • Merci ! Pour une fois que je peux prendre Christian en défaut, lui "l'expert" en... (presque) tout ! ;-)

  • Puis bon euh, le poulailler implique une non-liberté (il est, par définition, clos, ou alors les poules se barrent et il n'a plus d'intérêt).
    De plus, le méchant dans l'histoire c'est le fermier qui se croit tout puissant et qui pense (honnêtement ou pas) que les poules ne peuvent pas subvenir à leurs besoins et survivre en milieu hostile", terme magique qui confortera le fermier dans l'édification de sa prison dorée.

    Puis un renard face à des poules unies se fait ramasser la tronche. Grave. Les descendants des dinosaures n'ont rien perdu de leur férocité.

    Non, cette comparaison ne tient pas la route. A mon avis il en existe de meilleures...

    Et on est tous plus ou moins d'accord pour dire que l'anarcho-libéralisme est un peu foufou et que les milices privées sont une perte de temps (et pas que).

  • @ L'Héré et Françoise

    Désolé, les amis : vous vous laissez aveugler par une métaphore. Concrètement, votre histoire de "grillage" signifie qu'il faut 1) des lois pour protéger les faibles des abus des forts et 2) une surveillance et des sanctions pour prévenir les abus et les punir. Par conséquent, on ne saurait parler d'une "liberté sans concession". Ce qui est exactement le propos de mon premier commentaire.

  • @Elphyr,
    Globalement d'accord, j'avoue n'avoir rien compris à cette histoire de poules et goupil, pour tout avouer ai cru de prime abord à une tentative de ré-adaptation de "chicken run", mais avec le renard en plus hors de l'enclos très anxiogène^^^ ;o))
    Quoiqu' assez conforme aux dernières actualités.

  • Je ne connaissais pas encore votre espace...

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