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Peintres de droite: Caravage contre les Maniéristes

Unhuman semble convaincu que les peintres sont nécessairement de gauche. Je lui ai promis de lui en trouver quelques uns de droite...Enfin, je vais plutôt donner un exemple.

Je vais commencer par un peintre de gauche de l'époque pour mieux faire ressortir ceux de droite. Il s'agit de Caravage. PourquoiCaravage à gauche ? Parce que c'est le premier (ou en tout cas, l'un des tous premiers) à refuser de donner le beau rôle uniquement aux chefs politiques et religieux dans ses tableaux, particulièrement dans l'histoire sacrée ; en effet, ce sont les gens du peuple qui jouent l'histoire sacrée chez Caravage et non les leaders politico-religieux. Il choisit d'ailleurs ses modèles parmi eux, et ne respectent pas les conventions iconographiques de l'art religieux en vigueur. De fait, il n'hésite pas à peindre la Vierge Marie avec les traits tirés, les jambes enflées, bref, tous les traits caractéristisques des gens du peuple et non de la noblesse. En agissant ainsi, il attaque toute une conception du beau qui participait à l'ordre ancien des hiérarchies sociales en vigueur. Il heurta frontalement toute la tradition maniériste, dont les codes subtils, inter-picturaux (on parlerait d'inter-textualité pour des écrits) s'adressait aux gens de cour, aux individus cultivés et aux lettrés. En tout cas, certainement pas au petit peuple.

Des peintres aussi fameux que Le Gréco, Véronèse ou Le Tintoret appartenait au courant maniériste (même si le vocable vint plus tard) et on retrouve dans leurs peintures les codes qui caractérisent le maniérisme. Le maniérisme préfigure d'ailleurs le classicisme. Les maniéristes ne seraient peut-être pas tous à droite, mais leurs positions esthétiques les rapprochaient certainement plus de la droite de l'époque que d'une peinture sociale. Véronèse, à Venise, était le décorateur favori des nobles et des ecclésiastiques. S'il se heurta à l'Inquisition pour avoir pris quelques libertés avec une représentation de la Cène, il ne prenait pas pour autant la source de son inspiration dans l'imagerie populaire.

Un Titien, de dehors des scènes mythologiques, n'a représenté que des gens de pouvoir (famille de Charles Quint en particulier, Philippe II le roi d'Espagne et cetera...). On pourrait multiplier ces exemples. Bref, il me semble que la peinture de cette époque penche plus vers les valeurs de droite que les valeurs de gauche. Ce n'est que lorsqu'elle va devenir abstraite et conceptuelle vraiment, donc qu'elle va cesser de s'intéresser aux individus pour pouvoir se consacrer aux masses qu'elle prendra un véritable virage idéologique.

Commentaires

  • La théorie du Caravage : je ne l'avais pas vue venir. C'est bien vu et inattendu.

    Ainsi, effectivemment Caravage mena une vie dissolue, riche en scandales provoqués par son caractère violent et bagarreur – allant jusqu'à tuer lors d'une querelle –, sa fréquentation habituelle des bas-fonds et des tavernes, ainsi que par sa sexualité scandaleuse pour l'époque, ce qui lui attira de nombreux ennuis avec la justice, l'Église et le pouvoir.

    Mais faut-il rappeler que la peinture avant la révolution française était une peinture de commande ?

    Les artistes, sans statut d'intermittent, devaient bien vivre en peignant les riches, les nobles et les bourgeois.

    Cela rappelle sous une certaine forme la peinture d'Etat et l'art d'Etat du communisme.

    Donc, c'est dans les Pieds de Nez des portraits, paysages et de leurs oeuvres que l'on peut trouver leur positionnement nécessairement de gauche, du progrès et de l'Education.

  • Je veux bien vous le concéder quand il y a pied de nez, mais cela n'a rien d'un caractère systématique.
    Il se trouve qu'avec Véronèse, j'ai choisi un esprit un peu plus libre que les autres : il avait représenté un soldat ivre et l'autre qui s'était pris un gnon dans sa scène, d'où la colère des autorités religieuses : je ne vous raconte pas ce qu'il aurait pris avec Benoît VI :-)
    Mais globalement, leurs conventions esthétiques traduisaient une certaine conception du monde...pas de gauche !

  • Les notions de droite et de gauche pour cette période me gênent un peu.
    J'aimerais mieux progressiste voire révolutionnaire pour Le Caravage qui était très en avance sur son temps. A commencer par sa manière de peindre, n'a-t-il pas "inventé" le clair-obscur ?

  • à Rosa
    C'est un jeu plutôt qu'autre chose. Bien sûr cette transposition est on ne peut plus approximative. Le clair-obscur est une innovation esthétique mais elle n'a pas de conséquences sociales et politiques.

  • Par esprit d'escalier, cette histoire de bagarre me lance dans une nouvelle tentative :

    les enfants sont-ils de droite ?

    ou la naissance de l'état sauvage

    http://disparitus.blogspot.com/

  • euh...là, je ne vous suis vraiment pas Disparitus : droite, gauche, cela apparaît avec la socialisation, prélude à la politique. Attention, vous versez dans une dérive rousseauiste...

  • Entièrement d'accord avec Rosa.
    Et puis ce clivage G/D nous voulons en sortir, alors ce jeu...
    Nous pourrions remonter plus loin dans le temps, avec la période armanienne qui a correspondu à une 'révolution, la terminologie gauche droite est donc effectivement inadaptée.
    Ok, je sors!

  • @ Martine

    C'est juste un jeu. C'est vrai que ce n'est pas adapté, mais c'est tout de même amusant de pointer les convictions de ces peintres et de se demander ce qu'ils feraient aujourd'hui. Qui sait, Caravage serait peut-être chez Besancenot :-)

  • Ok, je vous laisse donc jouer en paix.
    Besancenot...n'est pas réellement un révolutionnaire, il n'a strictement rien inventé comme nouveau concept idéologique.

  • @ Martine
    Très juste...

  • En tout cas, on joue bien avec les neurones.

    C'est paradoxal en tant que centriste d'essayer de cliver des références. ;-)

    @l'hérétique
    Oui, je deviens de plus en plus Rousseauiste mais je n'en sais pas encore toutes les conséquences !

  • @ Disparitus
    Une bonne dose de Voltaire pour se soigner au plus vite (par exemple, les lettres qu'ils ont échangées...)

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