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Afghanistan, Philippe Nogrix exprime ses doutes

1592235994.jpgPour mémoire, Philippe Nogrix, sénateur UDF-MoDem, est un membre de la commission des affaires étrangères du Sénat. Il a exprimé le 03 avril dernier dans une tribune ses interrogations sur l'engagement français en Afghanistan.

Comme quoi, Quindi et moi ne sommes pas les seuls à nous interroger au MoDem à ce sujet... Je constate qu'il observe, comme Quindi, que c'est le Soft power qui a le plus de chances de produire quelque chose en Afghanistan, et notamment la recostruction.

 

La France va renforcer sa présence en Afghanistan.

Le Président de la République vient de l'annoncer. On peut regretter que le Parlement ait été placé devant le fait accompli. D'autant plus que cette décision n'est pas anodine.

Depuis 2001, la France participe à l'opération menée en Afghanistan, par l'OTAN sur mandat de l'ONU, contre Al Qaïda et les talibans. Cependant, sa participation est bien moindre que celle de nos voisins anglais ou allemands. Aujourd'hui, 1700 soldats français sont déployés en Afghanistan, sur un total de 60 000 hommes.

Ce seront 700 soldats français supplémentaires qui y seront envoyés. Autrement dit, la France va augmenter sa présence de plus de 40 %.

C'est une inflexion lourde de conséquences. 
      Des conséquences humaines d'abord. En Afghanistan, les troupes sont confrontées à une véritable guerre. La vie des hommes est en jeu. 
      Des enjeux budgétaires ensuite : cet envoi pourrait faire exploser le budget des " opérations extérieures ". 
      Enfin, l'enjeu est géostratégique : une inflexion majeure des positions françaises sur la scène internationale semble se dessiner par-delà la seule question afghane.

Au regard de ces trois enjeux, les tenants et les aboutissants du renforcement de la présence française en Afghanistan n'apparaissent absolument pas clairement. Là est le problème. 
    Pourquoi envoyer 700 hommes supplémentaires ? Cette décision ne correspond pas à une demande de nos alliés. La France agit de manière unilatérale.
     Alors quel est l'objectif ? 
     Pacifier le pays et lutter contre le terrorisme, dit-on. Oui, mais alors, les spectres du Vietnam ou de l'Irak ressurgissent : depuis 7 ans que nous sommes là-bas, les choses se sont-elles améliorées ? Non. Le conflit paraît s'enliser. Le seul moyen pour réussir la transition de la guerre à la paix réside dans le développement et la reconstruction. Mais, la France jouera-t-elle cette carte ? Pas sûr du tout. Si son contingent d'hommes augmente, en revanche, ce ne semble pas être le cas de son aide financière.

Etait-il opportun, dans ces conditions, d'envoyer ces 700 hommes supplémentaires ? Ce ne paraît pas être le cas pour plusieurs raisons. 
     Premièrement, des raisons logistiques. Où trouver les soldats requis ?
     Deuxièmement, cette décision pourrait compromettre les autres engagements que nous avons pris auprès de nos alliés de pouvoir déployer des troupes en cas de crise urgente. 
     Troisièmement, la raison budgétaire : 700 hommes de plus, ce pourrait être 50 millions d'euros supplémentaires sur un poste " opérations extérieures " qui a déjà explosé. Où sera trouvée cette somme ?

Une seule raison paraît vraiment justifier la décision présidentielle : elle entre dans le cadre d'une inflexion majeure de notre positionnement géostratégique. La France se serait engagée dans un profond " glissement atlantiste ". Pour preuve : les 700 soldats français supplémentaires seront déployés dans l'Est de l'Afghanistan où a lieu la guerre contre les positions frontalières d'Al Qaïda, auprès des troupes US.

Ainsi, toutes les interrogations que nous avons évoquées aboutissent à des questions plus fondamentales : jusqu'où ira le glissement atlantiste de la France ? Qu'en penseront nos partenaires européens ? N'était-ce pas le moment de reparler d'engagement concerté ? Autant de questions qui restent sans réponses.

 

 

Commentaires

  • Bien joué d'avoir retrouvé ce commentaire. Nous sommes d'accord sur les besoins financiers pour la reconstruction. Par contre je me range plus du côté de François Bayrou sur la question de l'envoi des 700 hommes (qui sont demandés par nos alliés, notamment canadiens, néerlandais, britanniques, et américains).

  • Pas mal ce nouvel habillage mais ou est passé le orange ?

  • "Pourquoi envoyer 700 hommes supplémentaires ? Cette décision ne correspond pas à une demande de nos alliés. La France agit de manière unilatérale."

    Difficile à croire quand dans le même moment le Canada menace de se désengager dès 2009 si un renfort d'environ 1000 hommes n'était pas envoyé par un des alliés.
    (C'était d'ailleurs l'objet de la toute première note de mon blog)

  • à Yann
    Ben il est à la poubelle pour l'instant.

    à Aurélien et Arnaud

    Moi aussi je me retrouve dans la position de Bayrou. En fait, tout dépend de ce que l'on va faire là-bas exactement. C'est pour cela que je réclamais un débat de longue date sur le sujet. En France, on ne discute jamais assez des finalités.

  • @ L'Hérétique: Pour cela, je pense depuis le début que les Commissions sur les Affaires Etrangères et les affaires de Défense devraient avoir un rôle plus important, avoir accès aux documents confidentiels de l'exécutif, et un droit de regard sur les missions en cours (militaires, diplomatiques, déploiements, nouvelles bases militaires). Quelque chose de similaire au système américain, qui me semble meilleur que le notre (sauf en matière d'investissements où les députés qui siègent dans ces commissions sont à la merci des lobbys et demandes d'investissements dans leurs circonscriptions).

    @Aurélien: sais-tu comment ça marche au Canada le suivi parlementaire des activités de défense?

  • @ Arnaud

    Ben pour l'accessibilité aux documents, ça commence mal...
    http://www.lemonde.fr/culture/article/2008/04/30/le-gouvernement-cree-une-categorie-d-archives-incommunicables_1040153_3246.html

  • @Arnaud

    Je n'ai pas tous les détails en tête mais il me semble que le système de suivi canadien est assez similaire au système américain.

    Je vais essayer d'en savoir plus... C'est le bon moment car une commission spéciale vient tout juste d'être créée à Ottawa pour suivre la mission canadienne en Afghanistan (mieux vaut tard que jamais...), première réunion demain je crois. À suivre...

  • @ L'hérétique, j'ai commencé par rire quand j'ai ouvert le lien, pour après m'apercevoir à quel point la chose est sérieuse: nous serions en train de rendre "incommunicable" des documents laissant une preuve de contamination nucléaire (sur des êtres humains, mais aussi sur des sites militaires ou des sites d'enfouissement militaire). C'est justement ce genre de chose qui devrait faire l'objet de délibérations et suivi parlementaire (je ne pense pas qu'on puisse avoir un débat public sur certains sujets, comme l'enfouissement de déchets nucléaires militaires).

    @ Aurélien: cool

  • euh, addenda: quand je dis suivi parlementaire, je veux dire suivi en commission parlementaire (le secret militaire s'appliquant à la commission)

  • Riche discussion sur le blog du colonel Monnerat (qui a toujours été sceptique sur la réussite des opérations occidentales en Afghanistan, on ne peut pas dire qu'il ait été démenti par la réalité) - je mets en lien. François Duran (blog "Réflexion stratégique"), dans l'un des commentaires, intervient en faveur de l'engagement militaire français dans ce pays, sur le registre du "devoir".

  • Merci pour l'info et le lien. Je vais voir cela de ce pas.

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