L'investiture prochaine de Barack Obama fait couler de l'encre, et du coup, en France, la question de la diversité est relancée. Je voudrais tout d'abord, sur ce sujet, faire une remarque : un noir américain aurait pu être élu président bien avant Obama. Après la première guerre du Golfe, Collin Powel était auréolé de sa victoire et de son statut de commandant en chef des forces alliées. Il était à ce moment-là extrêmement populaire. Il n'a pas voulu se présenter car il souhaitait préserver sa famille, mais il avait tout à fait la carrure pour sortir victorieux d'une campagne présidentielle. Obama est un orateur exceptionnel : du calibre du fameux Périclès à Athènes. Je l'ai écouté parler, et j'avoue que son timbre sonore et profond, sa manière de parler, la force tranquille avec laquelle il imprime les esprits en font un orateur hors pair. Plutarque, dans ses Vies parallèles, dresse un portrait saisissant de Périclès.
(Plutarque évoque l'influence du philosophe Anaxagore sur Périclès)
Périclès puisa dans son commerce non seulement une élévation d’esprit, une éloquence sublime, éloignée de l’affectation et de la bassesse du style populaire, mais encore un extérieur grave et sévère que le rire ne tempérait jamais, une démarche ferme et tranquille, un son de voix toujours égal, une modestie dans son port, dans son geste et dans son habillement, que l’action la plus véhémente, lorsqu’il parlait en public, ne pouvait jamais altérer. Ces qualités, relevées par beaucoup d’autres, frappaient tout le monde d’admiration.
Un Obama serait-il possible en France ? Ce serait difficile. La plupart du temps, les pouvoirs publics essaient de faire bonne figure avec un préfet çà ou mà issu de la diversité, comme on dit, en France. Mais la réalité, c'est que les cités ne produisent au mieux que des chanteurs de rap, des animateurs sociaux ou des sportifs. Pas de chefs d'entreprise, pas de PDG, peu de publicitaires, pas de directeur administratif (dans la fonction publique et cetera). Il faut rendre cette justice à Nicolas Sarkozy qu'il a été absolument le seul à proposer à des personnalités issues de l'immigration des postes autres que fantoches.
Il faut dire que si les mairies de banlieue, en fait d'animation, proposaient auttre chose que du hip-hop, du sport et du théâtre moderne, on pourrait peut-être voir une génération enfin émerger. En effet, en France, pour s'élever socialement, il faut intégrer les codes de la bourgeoisie. Et les codes de la bourgeoisie, tout du moins la bourgeoisie traditionnelle, ce n'est pas le hip-hop et le football.
Il faut ajouter, et c'est là le plus important, que les différentes populations exogènes manquent cruellement d'un leader charismatique. La France n'est pas plus "raciste" que l'Amérique. Mais en Amérique, ces leaders existent, pas en France.
Et quand ils ont le charisme et la détermination nécessaire, comme Yannick Noah, par exemple, ils ne souhaitent pas s'impliquer vigoureusement dans la politique.
Le Figaro a publié le 18 novembre 2008 une analyse très intéressante sur l'émergence de classe moyenne noire. J'en conseille la lecture, tant l'analyse me paraît pertinente et mesurée. Quelques témoignages sont très éloquents et confirment ce que je dis plus haut. Le problème principal, même si quelques préjugés persistent, n'est pas tant d'être noir que de renvoyer l'image qui convient pour intégrer les établissements et services prestigieux. Et cela, les familles noires qui l'ont compris, y veillent au grain.