L'Nicolas s'est fâché tout rouge parce que Martine Aubry a eu la riche idée de prendre une position forte en faveur du breton. Facile : il suffit d'afficher un chiffon bleu rouge avec les mots "école privée" écrits dessus pour que l'Nicolas rue dans les brancards. De fait, Martine Aubry est en faveur d'un enseignement obligatoire du breton là où il se trouve enseigné dans les écoles primaires. Elle estime toutefois que cela devrait relever de la compétence de la Région que de le décréter et mener les recrutements ou, tout du moins, donner les financements ad hoc, ce qui me semble de bon sens.
L'Nicolas est un Breton. Un Breton de Loudéac. Il a vécu 23 ans en Bretagne profonde et s'en targue pour décréter ce qui est bon ou non pour la Bretagne. Pour ma part, je ne suis pas d'origine Bretonne, mais j'y suis né et j'y ai passé les sept premières années de mon enfance.
L'Nicolas, il me fait penser à certains de ces sociaux-démocrates que je connais qui se méfient comme de la peste de toute forme de régionalisme qu'ils assimilent à du nationalisme. Comme, en règle général, seul le secteur associatif, donc nécessairement privé, défie encore la toute-puissance de l'État centralisateur, forcément, quand une collectivité locale favorise la réémergence d'une identité régionale, elle fait le lit d'organismes "privés", comme dit l'Nicolas.
Ce qui est bien, c'est qu'avec l'Nicolas, on retrouve tous les poncifs de cette bonne vieille gauche archaïsante : la méfiance instinctive pour l'expression des identités, le mépris de l'initiative privée, le culte de l'État, et le goût immodéré de l'opinion commune.
Moi, je m'en tamponne de l'école laïque : je ne vois pas pourquoi mes impôts ne devraient servir à financer que l'école laïque au mépris des identités régionales. Ce que l'Nicolas ne comprend pas, c'est qu'un État, au fond, il n'est pas au service d'un clan, d'un parti pris ou même d'une majorité : il est au service de toute la nation dans sa diversité. Il n'a donc pas pour mission de trancher en faveur de la majorité mais au contraire un devoir d'impartialité qui doit l'engager à considérer l'expression de toutes les minorités.
Hélas, je crois qu'il est à peu près inéluctable pour la langue bretonne de devenir à très brève échéance, une langue morte, de surcroît, à l'inverse du latin et du grec, sans descendance.
Une langue se meurt quand les pères et les mères cessent de la transmettre à leurs enfants. Les écoles Diwan sont un effort désespéré pour tenter de sauver l'une des dernière langues celtiques parlées d'Europe, mais je crains qu'il ne soit vain.
Quand une langue disparaît, c'est une part du patrimoine mondial de l'humanité qui s'amenuise, parce qu'avec elle s'effacent un modus operandi, une manière de considérer l'espace, le temps ou encore l'incertitude, pour ne citer que quelques exemples.
Tiens, ça me fait penser aux Indiens d'Amazonie et à la déforestation : pendant longtemps, il a semblé que rien ne devait arrêter l'abattage des arbres du poumon du Monde, et, avec lui, était assuré le dépérissement inéluctable des Indiens, de la faune et de la flore, jusqu'à ce qu'un jour, des experts mandatés par de très gros laboratoires pharmaceutiques fassent une découverte étonnante : on connaissait la diversité du biotope amazonien, cela nul n'en doutait, et on savait donc que l'Amazonie regorgeait de plantes rares et inconnues mais ce que l'on savait beaucoup moins, en revanche, c'est que nombre d'entre elles possédaient des propriétés curatives inconnues. Et ce que l'on ignorait encore plus, c'est que seuls les shamans et sorciers des tribus indiennes, par une transmission ancestrale, en avait recensé les effets et propriétés, les utilisant pour leurs rituels de guérison.
Du jour où l'industrie pharmaceutique réalisa l'existence de ce trésor vivant, l'industrie agro-alimentaire qui voyait tout intérêt à anéantir la canopée américaine trouva à qui parler. De puissants intérêts venaient contre-balancer les leurs. Les Indiens, longtemps en sursis, avaient trouvé de puissants et déterminés protecteurs...
Quand on détruit un biotope culturel, on ne sait pas ce que l'on anéantit vraiment : peut-être des solutions de demain. Je respecte toutes les identités dites régionales, mais la langue bretonne va bien au-delà de la Bretagne : c'est une langue celtique. L'une des dernières. La dernière avec le gaélique qui bat lui-même de l'aile en Écosse et en Irlande. Il faut la sauver. Si elle disparaît, une perte irrémédiable se produira.
Martine Aubry énonce parfois des âneries (par exemple, la dernière, c'est de se réclamer d'Hessel : du coup, je commence à me demander si je vais me déplacer dimanche, tout compte fait...). Mais sur les langues régionales, elle a une pensée forte et juste. Ils ne sont pas nombreux à voir juste dans ce domaine. J'ai toujours trouvé fine et pertinente l'analyse de Bayrou, l'un des très rares responsables politiques d'envergure à pratiquer un parler régional couramment : il a vu le lien évident entre ces cultures et la culture française. Nous aussi, un jour, nous serons peut-être minoritaires autant que l'est la langue bretonne aujourd'hui ; et peut-être alors y aura-t-il un loudéacien du XXXème siècle pour renvoyer ce qu'il restera de la francophonie au nationalisme des temps futurs (peut-être le fait-il déjà, au demeurant).
L'Nicolas a tout faux (mais ce n'est pas la première fois, alors je ne m'en formalise plus, et d'ailleurs, vous allez voir, il va débarquer ici en clamant que je le persécute, que je déforme son propos, que je suis de mauvaise foi, que je l'insulte gravement, et que de toutes façons, sur la langue bretonne, Martine Aubry a une position de droite et donc qu'il est logique qu'on se rejoigne...Vous verrez, je tiens le pari qu'il sera furieux et me vouera aux Gémonies de gauche :-D ). Attendez, comment on dit ça déjà : holl gaou ? Tiens, c'est marrant, holl, ça ressemble pas mal à all en anglais. Non ça doit être holl faoz, plutôt. Voilà, holl faoz, l'Nicolas...
Commentaires
Interrogé sur cette position, ce soir, à Vannes, Bayrou a pris une position radicalement, opposée à la tienne, L'Hérétique.
Tout d'abord, imposer à des familles qui ne le veulent pas de faire apprendre le breton à leurs enfants lui paraît contraire à la liberté de choix des parents. Ensuite, il a relevé que, pour des fonctionnaires qui doivent changer de région tous les deux ans (il en existe), cet apprentissage est un casse-tête ubuesque, car si on adopte cette mesure pour le breton, il faudra le faire pour le basque, pour l'alsacien, pour l'occitan etc. Les enfants devront donc apprendre successivement les langues régionales une par une, ce qui n'est pas de bonne politique. Enfin, ce principe est contradictoire avec celui de l'école unique, la même pour tous.
Je pense qu'Aubry est vraiment aux abois pour en venir à des propositions qu'elle n'imagine certainement pas d'appliquer.
Et surtout, je trouve que le PS devrait balayer devant sa porte avant de lancer des surenchères démagogiques : c'est le PS qui fait obstacle à la réunification de la Bretagne, c'est-à-dire au retour de la Loire-Atlantique dans la région Bretagne. Que le PS, qui dirige le département de la Loire-Atlantique, la région Pays-de-Loire et la région Bretagne, commence donc par réunifier la Bretagne avant de se lancer dans des initiatives hasardeuses. Le paradoxe, c'est que Sarkozy, lui, a promis la réunification, une promesse qui ne lui coûte rien, vu que ses amis ne dirigent aucune des collectivités concernées. Tout cela, du côté du PS comme de celui de l'UMP, c'est du bavardage électoraliste de bas étage, de la poudre aux yeux. Du néant.
@Hervé
Elle a dit que les parents pouvaient faire la demande de ne pas suivre cet enseignement et n'a évoqué que la situation de la Bretagne. Ensuite, elle a renvoyé à la région le soin de gérer la chose.
Tu sais, sans une action forte, on ne relance rien.
Cela dit, j'ai lu la réaction de Bayrou : http://www.ouest-france.fr/ofdernmin_-Francois-Bayrou-a-Vannes-Il-faut-Karcheriser-le-c%C5%93ur-de-l-etat-_6346-1997383-fils-tous_filDMA.Htm
Elle est moins radicale que tu ne le dis : il est en faveur des écoles diwan, ce qui me semble un bon compromis.
Etre en faveur des écoles Diwan ou instaurer l'apprentissage du breton à l'école ce n'est pas pareil.
Qu'un responsable politique souhaite favoriser l'apprentissage de langues régionales pourquoi pas, qu'il instaure un process automatique, non. Les priorités sont ailleurs dans l'éducation nationale.
Et puis de la part d'Aubry, comme je le disais ailleurs, c'est purement électoraliste. Encore ce truc socialo à 2 balles pour défendre des présumés opprimés.
L'Hérétique,
Tu racontes n'importe quoi et tu es insultant.
Hervé et Vlad ont raison.
Et Titine a bien demandé que le Breton soit obligatoire sauf envie pressante des parents qui n'oseront pas dire NON par peur "d'exclusion sociale" des enfants.
En outre, je ne vois pas pourquoi on m'imposerait une culture qui n'est pas la mienne. En outre (bis, mais avec Titine, heu...), faut-il sauver ainsi toutes les langues régionales, le corse, l'occitan, ... et tous les patois locaux ?
@L'hérétique,
Je ne suis pas certaine qu'enfermer l'apprentissage d'une langue dans une région soit le meilleur moyen de la protéger et sauver bien au contraire.
La terminologie langues régionales m'agace beaucoup beaucoup pour moi elles sont territoriales, saisissez-vous la nuance?
Sous prétexte de décentralisation nos régions croulent déjà sous les charges et une grande confusion règne quand aux délégations de compétences cantonales, départementales et régionales.
Cette proposition est à mon sens empreinte ou de fausseté, ou d'ignorance avec un tour de passe-passe comptable.
Donc, désolée pas en harmonie cette fois.
le breton obligatoire qu'elle connerie!!!
j'ai essayé de donner bénévolement des cours de math a des élèves qui ont leurs cours de math en breton mais leurs examens en français. même s'il sont bons en math ils n'arrivent pas parfaitement a comprendre les énoncés en français....donc ils se plantent.....
Etre breton c'est une culture, un état d'esprit, pas forcément une langue, puis quel breton apprendre? Les anciens a 30KM de distance n'arrivent pas à se comprendre...
elle est vraiment aux abois, puis les corses vont demander la même chose, ainsi que les catalans et le basques
Oui, Bayrou a rappelé qu'en son temps, il a sauvé les écoles Diwan. Par ailleurs, il est favorable à la charte des langues régionales. Mais ce fatras d'obligatoire etc n'a aucun rapport avec la promotion de la langue bretonne, que je soutiens depuis longtemps, c'est, je le répète comme l'ont fait plusieurs commentateurs, de la poudre aux yeux électoraliste, car pendant ce temps, le PS est contre la réunification, qui est le préalable à toute initiative d'enseignement généralisé de la langue bretonne.
Ne vois pas le rapport avec la réunification, enfin bon bref le moyen age et moi^^^N'appelle pas de mes voeux ce bond en arrière dans le temps...
Après retour vers le futur, en route vers le passé ?!
Tiendez, par exemple Sieur Torchet:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Jacques_Lasserre
Est-ce ce qu'il s'est réellement passé?
Heing?
Ensuite, les propos de Mi Ser concernant la littérature sur le web, j'avais déposé un quizz...Ne me souviens d'aucune réponse so far, pas étonnant car sans le nom de l'auteur impossible et meme avec^^^.
Alors, on n'aime ou n'aime FBeigb, en ce qui me concerne sa liste pas certaine d'y adhérer, cependant raconte-il que des "c"?
Je ne le crois pas...
Pour rappel:
"Tout cela se tenait debout sur elle et c'était le monde;
se tenait sur elle avec tout le reste..."
Rainer Maria Rilke, l'auteur...!?
Finalement Martine Aubry ne fait que reprendre la position de sa proche amie Marilyse Lebranchu qui a déjà exposé cette position lors d'un colloque à Science Po :
http://conservatismefrancais.over-blog.fr/article-conference-sur-les-langues-regionales-a-sciences-po-compte-rendu-69516660.html