Je lisais il y a quelques jours le titre et l'introduction d'un article du Monde sur le taux de chômage des jeunes hommes dans les zones sensibles : 47% soit un jeune homme sur deux. Je ne suis pas un afficionado des causes sociologiques de la délinquance, mais tout de même, avec un tel "score", cela en fait des individus qui s'ennuient et ne savent pas quoi faire...
Je me suis du coup souvenu du dispositif qui avait été censé dynamiser ces zones : une idée de Juppé, reprise par Raffarin et Borloo en 2004. Les zones franches urbaines.
Les Petites et Moyennes entreprises, au sens où l'entend l'Union européenne (pas plus de 250 salariés, moins de 25% du capital contrôlé par une grosse entreprise, moins de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel) y bénéficient d'exonérations fiscales, sociales et patronales.
Le Conseil Économique et Social a publié un bilan très intéressant sur ce dispositif en février 2009, malheureusement passé inaperçu de la presse. Le dispositif semble porter ses fruits, puisqu'il se traduit dans les zones concernées par de la croissance, de l'emploi, une baisse de l'insécurité (comme quoi !) et une meilleure survie des entreprises créées. Toutefois, de 2003 à 2007, les exonérations, à elles seules, ont coûté 2.7 milliards d'euros quand elles réalisaient en tout et pour tout à peu près 50 000 embauches. Malheureusement, tout en reconnaissant sa nécessité, le rapport n'offre pas la donnée la plus intéressante à mes yeux : le retour sur investissement de l'État. Quels auraient été les coûts si l'État n'avait rien fait ? Il y figure toutefois quelques éléments de réponse :
Selon l’Unedic, le coût d’un chômeur en 2007 indemnisé toute l’année sans interruption représente une dépense d’environ 12 731 euros auxquels il faut ajouter 1 485 euros de versement de l’Unedic aux caisses de retraite complémentaire : soit un coût moyen total de 14 216 euros contre 13 829 euros en 2006.
Voyons, je suis encore bon en calcul mental : 50 000 X 14 000, cela fait 700 millions d'euros. Rien qu'en chômage, en étant large, l'État aurait du payer aux alentours de cette somme pour ceux qui seraient restés sans emploi.
Le rapporteur série les conditions essentielles à l'implantation et à la réussite des entreprises dans les zones franches urbaines :
- disponibilité de locaux à proximité du foyer de l’entrepreneur ;
- accessibilité des locaux par les transports en commun ;
- disposer d’un capital d’amorçage personnel : « love money » ou autres ;
- avoir été accompagné par un interlocuteur compétent privé ou consulaire. À titre d’exemple, la chambre de commerce et d’industrie de la Seine-Saint-Denis accompagne l’entrepreneur en l’aidant à monter son business plan et à trouver des locaux ;
- se sentir en sécurité pour exercer son activité. Les artisans sont exposés au vol et à la destruction de leur matériel. Il faut cependant noter qu’une entreprise sur quatre seulement mentionne des problèmes de sécurité.
Le rapport établit plusieurs axes de propositions, assez classiques, in fine : la sécurité, tant son absence semble un véritable frein à l'expansion économique et la qualité de l'éducation, en développant dans les ZFU des voies d'excellence, la disponibilité foncière, l'accompagnement et l'information, un travail sur l'image des quartiers, l'accès aux biens culturels en sont les principaux,
Le concept de zone franche est ancien : dès l’Antiquité, des États ont voulu favoriser les activités de commerce en instaurant des ports francs. Au II è siècle av. J.-C., l’île de Delos devint ainsi un centre international d’entreposage et de négoce pour toute la Méditerranée ! Jacques Delors le premier a avancé l'idée de mettre en place des zones franches, en France, en...1981 ! Alors même que le socialisme triomphant submergeait la France. Mais Pierre Mauroy en avait alors refusé le principe : pensez-donc ! Des enclaves hyper-capitalistiques et complètement défiscalisées en terre rose ! quel outrage à la doxa socialiste !
Comme les Pôles de compétitivité ou encore le statut d'auto-entrepreneur, les zones franches urbaines m'ont paru faire partie de ces mesures qui allaient dans le bon sens. Si ces dispositifs finissent par échouer, au final, c'est que le gouvernement français n'ose jamais aller jusqu'au bout de sa logique, n'ose pas libérer les initiatives. S'il est clair qu'il faut museler les effets d'aubaine, pourquoi ne pas tenter pour autant de créer de véritable Shangaï, c'est à dire des zones totalement libéralisées économiquement, avec toutefois une et une unique contrainte : 90% des employés des entreprises qui s'installent dans ces zones doivent en venir. Fiscalité et contraintes radicalement abaissées, contre contraintes en termes de localisation de l'emploi radicalement appliquées. Voilà ce que pourrait être un deal gagnant.
Commentaires
Hérétique as tu lu notre " moderne " approche de la filière déchets , nous ne sommes pas un cabinet conseil mais des assos qui ont modélisé cette activité en toute indépendance et sans se laisser impressionner par des sornettes politiques bien désuètes ... et qui sont autant de contre – vérités assenées aux populations dans un contexte de ringardise ou technique et gestion sont complètement absente par rapport aux objectifs concrets du développement durable !!!
je suis désolé d'être chiant mais peux-tu m'envoyer par mail le code du widget de l'échiquier
Le coût par emploi créé est effectivement exorbitant (il y a bien des dispositifs plus efficaces), mais il y a pire : une bonne partie des emplois ne sont tout simplement pas là. Il suffit de se promener dans certaines ZFU pour voir des colonnes de boîtes aux lettres devant des portes fermées… Les salariés sont alors "défiscalisés", mais ne sont généralement pas résidents de la ZFU et n'y travaillent pas non plus.
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