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La bureaucratie, ennemie de l'économie de la connaissance

Il y a près de dix ans, les états européens, réunis à Lisbonne, signaient un document qui devait annoncer l'établissement d'une nouvelle économie pour la zone euro : on appelle de memorandum la stratégie de Lisbonne. Elle devait favoriser l'émergence d'un nouveau modèle social et la métamorphose d'une industrie et de services hautement compétitifs. Dix ans après, l'Europe se dégage péniblement d'une très violente crise financière et les objectifs annoncés sont loin d'être atteints.

Pourquoi un tel échec ? C'est la question à laquelle tente de répondre Charles Wyplosz, un économiste suisse, sur le site Telos. J'ai retenu de son billet le rôle éminent de la bureaucratie dans tous les pays. Pour cet économiste, les effets d'annonce et les tracas administratifs de toute sorte sont un frein significatif à l'éclosion de toute forme d'innovation et étouffe des projets moins ambitieux mais plus réalistes.

La Folie des Grandeurs est à vrai dire un mal bien français, tout gouvernement confondu : la communication a pris une telle importance que le souci premier de la classe politique et des gouvernants est désormais de soigner les apparences plus que tout autre chose. Aucune mesure, même la plus insignifiante prise, sans des déclarations tonitruantes. On promet par monts et par vaux, on multiplie les effets d'annonce, et derrière, c'est le néant ou l'insignifiance dans le meilleur des cas.

A cela s'ajoute la manie toute soviétique de multiplier la paperasse et l'arsenal juridique : Nicolas Sarkozy est symptomatique de ce travers, lui qui fait voter lois sur lois pour un oui ou un non, ou simplement parce qu'un fait divers est à la une de l'actualité.

Je me remémore toujours Christian Blanc évoquant la difficulté à mettre en place les pôles de compétitivité en France : pas un dossier qui ne végétât six mois dans les tiroirs de Bercy quand il eût fallu être réactif dans les trois semaines. L'écosystème de la croissance demeure encore à pérenniser.

Malgré tout, nous ne sommes pas non plus stationnaires, et les pôles de compétitivité se développent au fil du temps. Mais ce qui me frappe, c'est de constater l'absence des Régions dans leur genèse. Tout passe par l'État, et je vois davantage le Ministère de l'Industrie et Bercy piloter le développement de ces pôles que les Régions. Je n'ai pas non plus parcouru tous les tableaux de bord des pôles, mais, ce qui me frappe, pour ce que j'en ai vu, pour l'instant, c'est la prépondérance des investissements publics et surtout, la difficulté pour les pôles à attirer du capital-risque. Très peu de mises en relation avec les business Angels et les capitaux risqueurs en règle générale dans les tableaux de bord. Les pôles ont donc du mal à sortir, en matière d'investissements, d'une logique purement hexagonale.

De même quand l'on examine le nombre d'entreprises partenaires membres du pôle et la quantité de celles qui se déplacent à l'étranger, il y a comme un hiatus. Les indicateurs du tableau de bord se contentent de relever le nombre d'entreprises qui réalisent au moins 5% de leur chiffre d'affaires à l'étranger : si la barre est aussi basse, c'est que l'essentiel de leur commerce est hexagonal, alors que les pôles de compétitivité ont vocation à exporter les partenaires qui les constituent.

In fine, du chemin a été fait, et il faudra du temps, je présume, pour mesurer mieux les effets dus à la constitution de ces pôles. Du temps, il en faudra également pour inciter les universités à s'impliquer davantage dans l'activité des pôles et amener les Régions à dépasser les mesurettes qui font bien dans des magazines mais qui ne font pas l'emploi ni notre commerce extérieur...

Commentaires

  • C'est aussi vrai pour la recherche publique, qui est asphyxiée par des monceaux de paperasse pour obtenir trois sous... chaque année ou presque :-(

    On est actuellement à l'exact opposé de ce qui est décrit dans cet article :
    http://www.internetactu.net/2010/01/14/recherche-scientifique-linnovation-nait-de-la-liberte/

    Quand on sait qu'en plus les chiffres annoncés à grand renfort de fanfares sont bidons... (les fameux milliards du grand emprunt ne sont en fait que du capital que les établissements devront placer pour n'en toucher réellement que les intérêts... ie des miettes)

    Pour en revenir au privé, c'est aussi parce qu'il n'y a aucune culture de l'investissement dans ce pays, dernière preuve en date, le crédit impôt-recherche (qui constitue pourtant une vraie manne pour les entreprises, c'est de l'argent public jeté par les fenêtes, aux dires mêmes des rapports de députés UMP et de la Cour des Comptes) est assez peu utilisé et bénéficie notamment à des secteurs non pas technologiques mais bancaires et financiers !!!

    Je vais allez voir votre article sur Telos.

  • Excellent billet L'hérétique. Finalement nous avons à notre disposition tout ce qu'il faut comme outils, comme dispositifs mais nous ne savons pas les utiliser. Paradoxal. Les vrais entrepreneurs, les porteurs de projets innovants sont tout simplement floués. Comme le dit Florent par le secteur bancaire essentiellement.

    J'ai découvert le shéma simplifié de l'écosystème des pôles. Très bien fait pour comprendre la complexité des interactions.
    Ce que j'en retiens c'est
    - que personne ne peut faire un projet seul,
    - que chaque intervenant, quel que soit son rôle ou son niveau, est obligé de collaborer avec tous les autres,
    - que chacun a autant d'importance que les autres et
    - qu'il faudrait absolument qu'un contrat, une charte soit signée entre tous.

    De manière à ce que chacun se sente responsable de tous les autres.
    L'échec d'un projet tient à ce que les responsabilités se diluent et que certains manquent complètement de... modestie !
    J'ai nommé naturellement les financiers... ;-)

  • Regardez ça :

    http://www.lemonde.fr/opinions/article/2010/01/18/les-pme-innovantes-aiment-l-etat-par-philippe-trouve_1293058_3232.html

    Non seulement la R&D n'est plus leur priorité, mais en plus, l'intervention de l'Etat, ils en redemandent !

  • @ florent
    Oui, c'est là où le bât blesse. Nous ne disposons pas de business angels en France. Il n'y a pas de culture du risque.
    Pas facile de mettre en place un éco-système.
    @Françoise
    Je ne sais pas si le problème, ce sont les banques.
    Les investisseurs sont frileux : quand tu con sidères les partenaires de ce genre d'évènements :
    http://www.franceangels.org/EVENEMENTS/Les-grands-evenements-2-9-de-France-Angels
    ils ne sont pas légion...
    Nous avons une culture de l'État, en France, jusque dans notre tissu économique.
    Que veux-tu : la France s'est construite ainsi...

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