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Finance : les audaces du MoDem à Paris

42c1c10a538a62af079752b2624f4123.jpg«De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace !» Qui ne connaît cette apostrophe désormais célèbre de l'avocat Georges Danton appelant à sauver la patrie. Il n'est pas dans notre intention d'adopter ici un ton emphatique, mais, il faut l'admettre, nous avons été bluffés par celle de Marielle de Sarnez et du MoDem.

Prendre le risque d'intégrer un projet complet sur la finance tout en admettant que la finance n'a pourtant souvent pas bonne presse, je trouve que cela relève d'un grand courage politique et de tout de même d'une certaine audace. Trouver de surcroît le moyen d'associer la finance et le social, c'est encore plus fort. Pour nous qui nous classons parmi les hérétiques, il est évident qu'un tel projet n'est pas pour nous déplaire.

L'article publié sur le blog de Marielle de Sarnez commence ainsi :

« Souffrant d’une mauvaise image au sein de la population, considérée comme un secteur prospère, la finance est absente des programmes économiques, et n’est mentionnée dans le discours politique que pour stigmatiser ses dérives occasionnelles. Et un soutien politique affiché à un secteur décrié paraît électoralement risqué »

Et pourtant, ce risque, le MoDem le prend, arguments à l'appui. Trois axes organisent le projet :

- Déterminant au sein de l’économie parisienne, le secteur financier est stratégique pour Paris mais aussi pour le pays

- L’apparente prise de conscience des enjeux en 2001 ne s’est pas traduite dans les faits

- La nécessité de préserver et renforcer un secteur stratégique pour Paris pourrait aussi conduire à mieux l’intégrer à l’économie de la Ville

Et voici, autour de ces trois axes les grandes lignes de l'argumentaire :

- Le secteur financier est l’un des piliers de l’économie de Paris.

- Paris ne peut pas faire l’impasse sur un secteur stratégique pour la Ville, l’agglomération et le pays.

- Malgré ses atouts, la Place financière de Paris est menacée et présente des signes inquiétants d’affaiblissement.

- Malgré l’intérêt affiché pour la question en 2001, l’action de la Ville s’est résumée à suivre frileusement les initiatives de la profession. 

- Cet engagement à minima dans des initiatives qui restent encore limitées ne confère à la Ville de Paris qu’un rôle de spectateur face à la situation.

-Paris peut donner au secteur financier les moyens de s’y développer et de rester dans la course mondiale.

-L’excellence de la Finance à Paris peut aussi résider dans son caractère citoyen et son intégration à la Ville.

Ce que j'apprécie, dans ce choix, c'est aussi d'aller contre les déclarations à l'emporte-pièce. C'est toujours une facilité de hurler haro sur la finance, car il est clair que les dérives existent. Mais en même temps, jamais le monde n'aurait connu un tel développement économique sans l'introduction du crédit à une échelle massive. Or, c'est précisément le rôle de la finance que de générer un tel crédit. Bien sûr, il existe aussi des produits financiers sur des crédits, voire sur d'autres produits financiers, et je pense en particulier aux marchés dérivés, mais, les marchés dérivés servent aussi les grandes institutions financières privées à se couvrir quand elles consentent des prêts très importants. 

Il me semble qu'ajourd'hui, le principal problème sur les marchés financiers, c'est la manière dont l'information circule et comment elle est perçue. Sur ce sujet, j'aborderai très prochainement la problématique de la Catallaxie, la thèse sur le sujet de l'école autrichienne, et en particulier la manière dont Hayek la traite. 

On connaissait déjà la sociale-économie chère à François Bayrou (mais aussi Michel Rocard, puisque ce dernier évoque l'économie en ces termes-mêmes dans un récent entretien avec le Nouvel Obs), mais  le MoDem parisien de Marielle de Sarnez a créé un concept politico-économique fort intéressant : la social-finance. Le terme n'existe pas encore, mais l'idée, elle, est en oeuvre ; le projet du MoDem sur la finance comporte en effet un volet social non-négligeable ;

Je trouve en particulier l'idée de faire de Paris la capitale de l'Investissement Socialement Responsable à la fois audacieuse et pertinente. 

De manière générale, concevoir une finance solidaire  non par le biais de la fiscalité (à coups de taxation) comme le font généralement les socialistes, mais au contraire avec des initiatives fortes (micro-crédit, investissement socialement responsable, diversification du recrutement pour citer quelques lignes directrices du projet), c'est une manière de penser la sociale-économie qui me convient parfaitement.

 

Commentaires

  • Il n'y a qu'une anomalie dans votre proposition, c'est la mentalité du milieu financier. Une mentalité tournée exclusivement vers l'argent et non pas vers le concept social. Vouloir imposer un autre cadre à la finance, parce qu'il s'agit bien ici de contrainte, risque de froisser certains hauts éléments du milieu. Milieu qui, rappelons le, en plus d'avoir une position extrêmement influente en matière d'économie dispose également d'une place de choix en matière politique grace justement à la puissance que lui apporte le controle sur le monde économique.

    Oui, votre proposition est tournée vers l'intérêt de tous. Oui, elle serait souhaitable, mais comment comptez vous changer près de deux siècles de capitalisme se dirigeant progressivement vers ce capitalisme sauvage évoqué par Marx? Je pense que votre vision, aussi belle soit elle, nécessiterait une implication auprès des hautes sphères qui elle, malheureusement, ne pourrait certainement pas être totalement tournée vers vos idéaux.

  • Bonjour Olivier,

    Je ne suis pas aussi pessimiste que vous, car la logique du profit n'est pas nécessairement perverse : en effet, les entreprises et sociétés qui respectent une charte éthique et environnementale sont souvent plus fiables et plus performantes que les autres, et, en tout cas, sans mauvaises surprises. Or, être rassuré, c'est un élément très important pour la finance. Il y a donc là certainement un secteur d'avenir.

    Je pense qu'il ne faut pas voir le milieu financier comme homogène. Il y a des individus très humains dans la finance, et la preuve, c'est que le projet du MoDem a justement été rédigé par des individus qui se reconnaissent dans =sa démarche alors qu'ils oeuvrent ou travaillent souvent à haut niveau dans la finance.

  • Ce que je redoute c'est un manquement lors de l'application de ces projets. Bien sur que le MoDem a été soutenu par des proches de l'idéologie démocrate, mais ceux là ne forment pas une généralité. Ce que je redoute c'est que le vice prenne à un moment ou un autre le relais.

    En parlant de charte éthique, vous parlez de grands principes. La Constitution est pleine de grands principes mais la plus part sont détournés, je ne crois qu'aux actes. Votre idée est bonne, mais j'attendrais de voir les actes avant de jurer que votre projet fonctionne.

  • pour plus d'explication sur ma position je vous invite à lire mon dernier article : http://olivierqueval.hautetfort.com/archive/2007/12/17/le-rapport-avec-l-argent.html

    Ainsi pourrait on parler un peu plus aisément, si le débat vous intéresse?

  • Très intéressant billet que le vôtre.
    Oui, l'accumulation des crédits est dangereuse. Je pense qu'il y a un problème de régulation actuellement au sein du capitalisme financier.
    Je ne parlais de de charte éthique, mais de fonds éthiques. Les fonds éthiques sont économiquement (je ne me place pas du point de vue de la morale pour dire cela) intéressant, parce qu'ils sont stables et que leur rapport n'est pas négligeable. C'est pour cela que je pense qu'ils représentent un axe d'avenir qui pourrait ouvrir un nouvel âge d'or pour le capitalisme. Bien évidemment à côté de ces fonds éthiques, il est normal qu'il existe des capitaux-risques pour permettre aux jeunes entreprises de se lancer.

    Ce avec quoi je ne m'accorde pas dans votre article, c'est de critiquer en soi le crédit. Ce n'est pas le crédit qui est en soi néfaste, mais ce sur quoi il repose dès lors que les fondamentaux sont viciés.

    Dire ceci :
    "La matière monétaire, l'argent que l'on peut toucher, que l'on possède, garantie la stabilité." c'est proposer une certaine forme de thésaurisation, non ? l'essence du capitalisme, ce n'est pas l'équilibre, c'est le déséquilibre. Et sur ce point, aussi bien la praxéologie de l'école autrichienne que la réflexion hérétique de Schumpeter l'établit.

    Le problème, ce n'est pas pas l'instabilité, mais plutôt quelle instabilité pour le capitalisme. C'est sous cet angle, que pour ma part, j'aborde la question.

  • On gouverne avec l'élite (du moins en principe) mais on est élu par tous. N'est-ce pas encore un discours qui passera bien auprès des cols blancs et restera lettre morte auprès du reste de la population ?

  • Cédric,

    Je trouve qu'au MoDem, nous n'avons pas vocation à faire le lit d'un certain populisme.
    Entre une voie qui fait l'apologie de l'argent, et l'autre qui en fait un motif de honte permanent, je pense qu'il y a la voie de la raison, et c'est la nôtre.

    Je fais partie de ces idéalistes qui pensent que la finance peut jouer un rôle à la fois dynamique et positif.

    Nous sommes les seuls à s'engager dans cette voie, et je trouve que c'est à la fois innovateur et courageux.

  • Non, je n'évoquais pas la thésaurisation. Celle ci est naturellement néfaste à l'économie car l'économie à pour objectif de favoriser une circulation de l'argent, utilisé non pour elle même mais pour permettre à tous de progresser. Mon message sur le thème de l'argent que l'on puisse tenir, toucher, est un message concernant cet argent que l'on construit avec la sueur de notre front, avec nos volontés et notre travail. Cet argent là ce gagne avec le temps, il enseigne la patience et la réflexion (modérant par la même la consommation à outrance). Le crédit est intéressant, mais je pense qu'il est nécessaire de reconsidérer complètement la notion de crédit, puisque le crédit repose sur le concept d'usure (modernisé pour l'occasion) et bien qu'il construit un présent plus ou moins confortable pour le débiteur, le long terme aura la facheuse tendance de le vouer à l'instabilité.

    L'instabilité, c'est la prise de risque. Prend on un risque avec un particulier ou avec une entreprise. La question que je vous pose est la suivante : l'argent prêtée doit être remboursée, mais cela avec un taux de quelques pourcents fixés par la banque. Cet argent doit être prêtée à un créateur de richesse ou à un particulier? Quelles conditions? Quelles publics visés?

    M. Nicolas Sarkozy réforme petit à petit le monde des affaires et du capitalisme à la française, nous verrons concrêtement comment la France en est gratifiée. Mais, chaque citoyen doit agir dans le sens de la Nation, et la Nation se dirigeant vers une société de crédit n'est pas ce qui peut me rassurer. Une entreprise, oui! Un particulier, un peu moins. Parce que la différence entre les deux est que la première permet à tous de gagner un revenu certain et mérité, que le deuxième ne peut garantir complètement son revenu et s'enferme dans l'oisiveté.

  • @ OQB

    Je ne suis toujours pas d'accord avec vous, et notamment avec ceci :
    "le crédit repose sur le concept d'usure"
    Mais pas seulement :
    en réalité les crédits des particuliers ne rapportent presque rien, et ce que vous affirmez à ce sujet dénote une méconnaissance des profits bancaires. Ce qui rapporte aux banques, ce sont les comptes courants et les crédits à la consommation à court-terme, et encore.

    Nous sommes en effet dans une société de crédit : ce qui compte, c'est le ratio, c'est à dire l'endettement moyen de chaque individu. Il est sûr que l'endettement de 30 000 euros par foyer britannique est inquiétant. Nous n'en sommes pas là en France.

    Je vous rejoins en revanche en ce que je pense que les pompes à crédit ne doivent pas être trop largement ouvertes.

  • J'ai croisé Valérie Sachs ce soir: elle était assez sévère sur la manière dont Marielle de Sarnez avait dénaturé son travail "à coup de bisounours"

  • @ gérard,

    Je pense que tout comme moi, elle n'était pas satisfaite jusqu'ici de la partie finance du projet du MoDem. Mais, elle a trouvé de grande qualité le dernier billet que le blog Marielle de Sarnez pour Paris a publié.

  • Pas de méconnaissance, mais une anticipation. Un crédit pour rembourser un crédit risque d'être un schéma classique et répendu dans l'avenir. Je me place du coté du débiteur et non pas du créancier.

    Le circuit risque de se produire et reproduire à cause des intérêts qui pourraient en être tiré. Voyez vous, la création de produit financier repose sur une évolution de la demande. Bon, ce à quoi je vous invitais c'était à imaginer des conséquences réalistes en fonction de vos propositions ou de la situation française si jamais vos propositions ne passent pas. C'est un peu comme aux echecs, on anticipe le coup de l'autre.

    Si je suis encore trop obscur dans mon idée, n'hésitez pas, je la complémenterais volontier.

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