Cela fait un moment qu'en passant sur la page d'accueil de Marianne2, je suis intrigué par le dessin de Louison, la dessinatrice et humoriste de l'hebdomadaire, réalisé à l'occasion de la mort de Louise Bourgeois. Pourquoi autant de seins ? En fait, cela me rappelait quelque chose mais je ne parvenais pas à retrouver quoi exactement. C'est en tombant tout récemment sur une représentation d'Artémis d'Éphèse que j'ai percuté.
Artémis d'Éphèse est une déesse qui représente la fécondité et la fertilité et allaite les hommes grâce à l'abondance de ses seins gorgés de lait. C'est donc une déesse-mère. Il semble qu'il existait dans le Temple de Diane à Rome, et dans celui d'Artémis à Marseille (à sa création par les Phocéens) des statues de ce type. Artémis, assimilée à Diane chez les Romains, est aussi une déesse vierge et chasseresse. Elle incarne donc deux figures de la féminité, la mère et la vierge. J'ai le souvenir que Louison a un blog, car il me semble être passé là-bas, mais c'est peut-être ma mémoire qui m'égare. En tout cas, je me demande à quoi elle a bien pu penser en choisissant d'illustrer la figure de Louise Bourgeois de cette manière. Dans la seconde partie de sa vie, la sexualité, la féminité, l'adolescence deviennent des thèmes omni-présents dans l'oeuvre de cette artiste. Autant d'attributs qui entrent dans la sphère d'action de Diane/Artémis. C'est une déesse qui protège toutes les transitions de l'existence, qu'il s'agisse de routes et de ponts, d'accouchements, ou de passages d'un âge à un autre.
Je me demande bien à quoi Louison a pu penser en réalisant son dessin. Coïncidence (j'ai du mal à y croire) ? Réminiscence ? Souvenir subconscient ? Choix conscient ? Je me le demande bien. Seul Louison saurait répondre à une telle question.
Commentaires
Je ne vois pas à quel dessin plurimamellaire tu fais référence ?
@Fotini
Louise Bourgeois n'en a en effet jamais réalisé. Mais je m'interrogeais en revanche sur les choix de Louison la dessinatrice.
@L'hérétique
Louise Bourgeois s'est en effet attachée à représenter sulpturalement la procréation de la famille et des êtes humains au travers de la dimension mamélaire des femmes (les mères; avec l'exemple emblématique de "l'araignaie" mère dans sa partie la plus pudique, l'abdomen) ainsi que la dimension phallique des hommes (la sulpture "fillette" est aussi emblématique, mi-phallique, mi-vulve, référence directe au père oedipien) le groupe de structures de la destruction du père dans une caverne est lui tout aussi éloquent.
Je trouve que la pensée métaphorique de Louise Bougeois nous a laissé un héritage historique immense sur le devenir des noyaux humains contemporains, ces petites cellules singulières qui s'aggrègent et se désagrègent dans le mouvement continu de la vie. (A part) : "les femmes sont les sentinelles de la vérité" (Jean-Paul II); c'est alors un hymne de louange qu'il faut dresser aux femmes philosophes, écrivains et sculpteurs, ayant toutes tâtées de près la matière des sciences humaines et artistiques.
Petite remarque, l'Hérétique concernant la statue d'Artémise : certains chercheurs se demandent actuellement si ses seins ne seraient pas des phallus; la déesse tant louée pour ses dons de maternité serait ainsi hermaphrodite ... mais il ne s'agit là bien sûr que d'une thèse de scientifique qui circule.