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Bayrou et DSK

Un blogueur de Mediapart s'imagine que DSK pourrait rendre une candidature de Bayrou caduque à la prochaine élection présidentielle. Marie-Anne qui est habituellement plus perspicace ne semble pas avoir réalisé, dans son commentaire, que l'auteur est très loin d'être un centriste ; son hypothèse n'est qu'une hypothèse d'école qui repose sur des équivalences fallacieuses.

Il faut, je le crois, mettre fin à des spéculations aussi hasardeuses que trompeuses. Bayrou peut bien préférer DSK à Sarkozy, ce qui se conçoit aisément, ils n'en sont pas moins aux antipodes à plein d'égards.

DSK appartient à cette bourgeoisie internationale et pragmatique qui n'a que faire des spécificités françaises, considérées comme autant de lourdeurs désagréables. C'est un de ces europhiles fanatiques prêts à imposer par la voie technocratique l'univers bien-pensant conçu par la gauche moderne, européenne et bien-pensante, convertie à l'économie de marché et aux modes venues d'outre-Atlantique sans le dire à voix haute. Pour ces gens-là, parce que le compromis et l'Europe importent plus que tout, la revendication, particulièrement nationale, parce qu'elle s'oppose à tout lissage de l'opinion est forcément néfaste. Ces gens-là construisent l'Europe contre les nations, au lieu de la construire avec elles. Ils rêvent d'une société mondialisée, sans aspérités, où les business-school européennes rivaliseraient avec les MBA américaines (un condensé de Descoings, en somme...).

Ils méprisent particulièrement la terre, le sol et tout ce qui renvoie à une quelconque forme de différence nationale. Ils brandissent la tolérance comme un étendard mais récusent les différences entre cultures, sauf s'il s'agit de soigner le decorum. On accepte la réserve d'Indiens, en somme, mais pas que l'Indien puisse faire tache d'huile.

Il n'y a rien de plus opposé à cela que la vision terrienne d'un Bayrou, fondamentalement attaché à la culture et à la civilisation française. Ils peuvent bien s'accorder sur les institutions, mais tout les sépare pour le reste : il y a chez Bayrou l'idée qu'il y a des choses qui ne sont pas sacrifiables. Le MoDem pour son programme européen évoquait des biens premiers, mais je pense que la représentation de Bayrou est bien plus enracinée encore dans notre culture. Ce que Bayrou refuse de négocier, et c'est pour cette raison qu'il s'est opposé avec tant de virulence à Nicolas Sarkozy, c'est le modèle français, modèle qui doit être préservé comme un joyau précieux.

Pour DSK et plus généralement les sociaux-libéraux et sociaux-démocrates du PS, ce modèle-là, comme tout le reste, est un vulgaire objet de négociation. Une marchandise que l'on fait peser dans la balance comme tant d'autres marchandises. Tous ceux qui défendent cette idée très particulière de la France, en somme, qui s'attachent à la francophonie et à ce qu'elle véhicule, sont avant tout des empêcheurs de tourner en rond. Le peuple, la nation puent, à leurs narines, et il faut faire leur bien sans les en aviser, parce que mineurs par essence, ils sont bien incapables de comprendre où se trouvent le Bien supérieur.

Au nom d'une certaine idée de la paix et du bien-être, cette gauche-là est prête à gommer toutes nos aspérités, à ne plus communiquer qu'en anglais, à se coucher lorsque notre essence est menacée parce que pour eux, il n'y a pas d'essence : c'est là sans doute l'ultime avatar du matérialisme socialiste, une forme de constructivisme appliqué à la politique. Il n'y a que des émotions, des fantasmes et des peurs à la base des identités nationales, de leur point de vue, et l'idée que l'on puisse hypostasier une substance derrière ces dernières heurtent frontalement leur rationalité petite-bourgeoise, bien-pensante et socialiste. S'ils en acceptent le folklore, c'est de la même manière qu'ils se plaisent à acheter un petit objet d'art chez les Artisans du Monde.

C'est toujours plaisant et satisfaisant moralement de faire son bwana avec les indigènes de toute sorte, y compris sur notre propre sol avec nos agriculteurs, par exemple : une forme d'aumône moderne, dépouillée de toute métaphysique, l'assurance de gagner une seconde vie au paradis socialiste décomplexé.

Et puis ils sont tellement sûrs d'être les détenteurs de la vérité, les garants de la morale, sous couvert de mielleuses invitations au débat et au dialogue.

Cette gauche-là, arrogante et sûre de ses bons sentiments, je la vomis depuis des années. Je ne lui souhaite pas plus de succès qu'au bling-blinguisme sarkozyste.

Je vois en Bayrou, au sein de la classe politique, le dernier défenseur, à n'en pas douter, d'une idée certaine de la France, appuyée toute entière sur sa culture et ses traditions. La gauche ne porte rien de tout cela, et tout ce qu'elle promeut est soluble indifféremment dans une sorte de gloubi-glouba-globish européaniste internationalisé.

La gauche cherche à instaurer une civilisation universelle (ce dont on pourrait la louer) mais nullement à promouvoir l'esprit français comme moteur de cette civilisation, esprit qu'elle renvoie à de l'archaïsme quand elle ne tente pas de disqualifier purement et simplement ses défenseurs en les renvoyant au conservatisme.

Eh bien on se battra, et on ne se laissera pas faire, en portant à bout de bras les couleurs de la France, qu'elles soient bleu blanc rouge ou de lys sur fond azur, car ce sont là celles qui ont fait notre histoire et ce que nous sommes aujourd'hui.

 

 

Commentaires

  • un seul mot: Merci!

  • Superbe.

  • Je ne partage pas tout à fait ta diatribe sur l'Europe des nations, mais pour le reste tu as très bien décrit mon sentiment à l'égard de cet individu et la raison pour laquelle l'idée d'un second tour DSK-Sarkozy me terrifie. À défaut de Bayrou, je préférerais encore la mère Aubry.

  • Je l'imprime cet article. Car il faudra le garder bien au chaud.

  • Le seul au PS qui peut concurrencer Bayrou c'est Manuel Valls, mais il a peu de chance d'être le gagnant des primaires. En tous cas si le 2ème tour est un duel DSK-Sarko ce sera abstension pour moi.

  • @ L'Hérétique

    Belle diatribe, dont certains passages me vont droit au cœur. Mais en somme, qu'est-ce qui vous sépare de Dupont-Aignan ?

  • Cyrano, peut-etre...Un nez à la Pinocchio, leur point commun.

  • Votre article est remarquable. Je pense comme vous que le PS version DSK et l'UMP version Sarkozy ne sont pas si différents sur le fond. Mais Bayrou n'est pas le seul à défendre "une idée certaine de la France", Chevènement à gauche, de Villepin et Marine Le Pen à droite, vont aussi se positionner sur la défense de valeurs françaises. Bien évidemment, on peut ne pas apprécier ces derniers, mais en 2012 Bayrou ne sera pas, contrairement à 2007, le seul "troisième homme".

  • L' heure des paris en ligne?
    Bah Zemmour s'applique à aider deux de vos sus-cités ce soir. :o))

  • Alors là ... ! j'applaudis ! Et puis j'aime bien cette manière de flinguer la petitesse, le misérabilisme !

  • Bonjour,
    Il y aura de la place pour tout le monde et je parie un résultat dans un mouchoir de poche au 1er tour en 2012 tellement les votes vont être diffus. Ce sera pas facile pour Bayrou qui traine plusieurs défaites derrière lui.

  • +1 César je partage.

  • Beau texte même si, par certains aspects, il fait abstraction des différences tout aussi fondamentales qui séparent F. Bayrou du FN, voire de Dupont-Aignan, qui portent également un discours sur la défense de l'identité française.
    Il y a chez F. Bayrou une prétention noble, mais modeste, à l'universalisme des valeurs françaises.

  • @juju
    tant mieux si le billet t'a plu :-)
    @Vlad,Dany, luciole et pourleboss
    idem :-)
    @KPM et Ch.Romain
    Je suis favorable à une Europe unifiée, mais pas déculturée et coupée de son identité. J'ai de très grandes différences avec NDA à commencer par le libéralisme et le souhait d'une Europe plutôt libérale et pragmatique. Libérale, pas ultra-libérale...
    @juntos
    mais chez les autres, c'est souvent sous la forme d'un repli et de manière exclusive. En outre, ce que défend Bayrou, c'est bien plus que le modèle français, c'est le fond culturel européen, qui imprègne la tradition européenne dans son ensemble.
    @willycat
    oui, ce sera difficile pour lui, mais qui sait, peut-être parviendra-t-il à rebondir.

  • Bayrou qui?

  • Je suis également attaché aux identités (y compris nationales, mais pas que, et pas qu'une seule). Une Europe fédérale, c'est justement le respect des identités.

  • Dans ma ville, l'autre soir, en simple auditrice honnête prête à écouter tous les avis, j'étais à un meeting clairement opposé à la réforme des retraites. Je vous mets ici une vidéo du second orateur qui correspond en tous points à ce qu'il a dit dans ma ville.
    http://www.dailymotion.com/video/xcwzc2_reforme-des-retraites-lanalyse-de-g_news

    Bien que sympatisante avec certains participants (EE Landes), je le dis très franchement : j'ai été pratiquement constamment en désaccord complet avec la façon de présenter les choses. Même si certains chiffres sont exacts et que les arguments semblent solides.
    Oui, ce sont des gens sûrs d'eux et il est très difficile d'émettre la moindre objection. Je suis sortie assez sonnée par les petites phrases inutiles qui se voulaient de bons mots patelins.
    Comme -en parlant de notre ministre de l'économie- "Elle dit s'être sentie salie... Elle ne s'est pas lavée depuis !"

    Des affirmations ont également été assénées : "C'est grâce à la retraite à 60 ans qu'il y a un allongement de la vie."
    "Ils veulent faire crever les vieux plus vite."
    Ce "ils" lancé à tout bout de champ est profondément violent, ne visant qu'à maintenir un camp révolté contre un autre. L'un qui serait angélique contre l'autre qu'on diabolise.
    Ici, ce n'est absolument pas de la gauche modérée croyez-moi. Ce sont ces orateurs manipulateurs qui font le plus de mal à la société. Car il existe une gauche raisonnable qui ne pense pas aussi durement.
    Tiens je me demande combien lui a rapporté sa conférence à cet inspecteur-là ?

  • Voui Francoise, j'ai lu aussi un certain Nicolas qui s'agace dans son coin. :D

  • @L' hérétique,
    Echanges salaires actions... ;)

  • Le portrait de DSK est certainement ciselé, mais celui en creux de Bayrou me paraît légèrement irénique : Bayrou est un égomane à la pensée plutôt mole pêchant par indéfinition. Bien sûr, on peut d'autant plus y projeter nos velléités de reviviscence qu'il ne nous contredit pas lui-même par son silence bruyant.
    Je préfère le style Bayrou et les valeurs qu'ils porte, mais qu'est-ce qu'il les porte mal ! Elles lui vont mal ! Il n'a aucune classe et ne sait absolument pas parler. Avez-vous vu son passage télé de samedi soir ? A-FLI-GEANT !! Zemmour n'a pas été mieux d'ailleurs, on aurrait deux mômes s'invectivant à coups de "c'est pas vrai c'est toi qui l'est" flous et incompréhensible. N'avez-vous pas trouvé ??

  • Outre ce fait, je trouve le cas DSK fort intéressant. S'il reste muet quant à ses intentions de se présenter aux élections présidentielles, il ne fait pas de doute qu'il y songe forcement ( Voir fortement. Est-il prêt pour autant à lâcher le FMI?). Pour revenir au cas, tel un jeu de carte ou un partie d'échec contre Aubry, chacun doit avancer ses pions ou abattre ses cartes au bon moment. J'admire cette partie avec attention, un bel exemple de stratégie politique.

  • DSK a compris que l'Europe fédérale est la seule clé politique pour répondre à la compétition engagée contre les mondialistes mercantiles et sans pitié.
    Le G20 s'est fait à 2 ! Bon sang, il ne faut penser qu'à avoir un président européen avant d'être sous la coupe sino-ricaine.
    La clé des grands projets, une seule voix dans le monde, et l'Europe se trouve au premier rang comme la consolidation de son PIB le montre.
    Pas d'autre solution et arrêtez, je vous prie, les (petits) débats franco-français qui ne mènent nul part !
    DSK est classé démocrate donc plus à droite que moi. Mais ce qui compte c'est la moyenne européenne! C'est ça la démocratie. Tenir compte de l'avis de la majorité pour franchir les marches structurelles indispensables à une certaine idée européenne du monde. Je la préfère à celle des sino-ricain. Donc on a pas le choix, ne rêvons pas.

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